N° 1,126. Dimanche, 45" a^ée. 18 Octobre 1885.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D* ÏPUKS ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Discours du trône.
Indépendants et réactionnaires.
La garde civique.
LE PROGRÈS
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE. vires acquirit eu.ndo.
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Ypres, 17 Octobre 1885.
Le Journal de Bruges, après avoir consulté
la statistique officielle renseignée dans l'An-
nuaire statistique, reconnaît qu'il est malheu
reusement exact que notre opinion a été loin
de faire tout ce qu'il taillait pour accroître le
nombre de son effet électoral.
Le Journal attribue cet état de choses
l'apathie trop grande de nos amis politiques;
qu'il nous permette de lui dire que cet état de
choses provient surtout de l'impossibilité où
nous nous trouvons de former des capacitaires
dans les campagnes.
Nous défions de prouver le contraire et ce
n'est pas en se mettant le doigt dans l'œil
qu'oïl peut voir clair et apprécier la véritable
situation.
Voici les chiffres donnés par XAnnuaire:
Le Ilainaut et la province de Liège, qui sont les
citadelles du libéralisme, ont eu au premier examen
d'Octobre 1883, l'un 8,384, l'autre 8,265 récipien
daires, et 6,011 et 6,317 admis. Au second examen
ces chiffres descendaient 1,292 et 1,102 récipien
daires, 851 et 734 admis. Pour une population de
1,011,273 et 693,252 habitants, c'est une propor
tion très faible. On remarquera même que le Hainaul
a des nombres presque identiques ceux de la pro
vince de Liège, d'un tiers environ moins populeuse.
Si l'on passe dans les provinces acquises au
cléricalisme, tout autre est la situation.Le Limbourg
ne compte que 214,875 habitants et il avait, en
Octobre 1883 et en Avril 1884 respectivement
3,069 et 487 récipiendaires, dont 1,867 et 207
admis. La Flandre Occidentale a 708,896 habitants,
et le nombre de ses récipiendaires, aux dates préci
tées, était de 10,114 et 1,323: le nombre des admis
de 6,768 et 646.
La statistique dans les cantons est encore plus
significative. A Bruges, 1,053 électeurs nouveaux
ont été inscrits après avoir subi l'examen, Moris
on n'en a inscrit que 181, Liège que 641. Deux
villes, comptant ensemble 165,000 habitants ont
donc moins d'électeurs capacitaires qu'une ville de
45,000 âmes. La première est cléricale, les deux
secondes libérales. On trouvera même que Mons est
dislancé sous ce rapport par des chefs-lieux de can
ton comme Conlich, Eeckeren, Duffel, Thourout,
Menin, Mouscron, Rousbrugghe, Messines, Pas-
schendaele, Loochristy, Hoorebeeke, qui possèdent
279, 248, 188, 267, 225, 185, 205, 219, 225 et
195 électeurs capacitaires, et que Liège compte
moins de ces électeurs que Malines, Louvain et Na-
mur, Bruges distance même Bruxelles, qui n'a que
987 électeurs capacitaires.
Dans un même ressort judiciaire, ce sont les
cantons cléricaux qui l'emportent toujours quant au
nombre de capacitaires inscrits sur' les listes.
Soignies en a 351 et Dour 69; D.dhem en a 328 <t
Seraing 268.
Il n'y aura pas de discours du trône l'ouver
ture de la prochaine session. Cette phrase sèche
est du Journal de Bruxelles. Elle cache nombre de
désillusions et d'amertumes.
Nous savons, de bonne soqrce, dit la Nation, que
le cabinet voulait une lois de plus compromettre la
Couronne et l'associer ses criminels projets.
Le Roi a résisté et signifié aux collègues de M.
Beernaert sa résolution formel lë de ne pas servir de
bouclier la politique ministérielle.
La réponse du souverain a été envoyée, Vendredi
dernier, au chef du cabinet. Elle a motivé le conseil
des ministres tenu Samedi, qui a tant intrigué une
partie de la presse.
Maintenant, que voulait-oif mettre dans la haran
gue royale De quel danger sommes-nous encore
menacés? S'agit-il d'une nouvelle réforme électorale,
d'une loi sur les inhumations ou d'une loi sur les
bourses? Nous l'ignorons... Mais, en présence de
cet incident, la concentration des forces libérales
devient de plus en plus nécessaire pour résister aux
témérités de la politique cléricale.
Les réactionnaires en France ont joué le rôle hy
pocrite des indépendants en Belgique.
Dans leurs rangs vous trouvez des bonapartistes,
des orléanistes, des légitimistes Oubliant leurs an
ciennes divisions ces tartuffes de la politique ont mis
leur drapeau en poche et se sont coalisés pour abat
tre la République Telle est l'alliance que les cléri
caux et les soi-disants indépendants ont faite en
Belgique pour renverser le ministère libéral.
En France, comme en Belgique, s'ils avaient ex- j
posé franchement leur programme, s'ils avaient fait
une profession de foi, ils auraient été battus. Mais
il est bien plus facile de tromper le corps électoral
en se couvrant d'un masque ou d'un déguisement
quelconque, que de se présenter lui loyalement, le
visage découvert.
A Bruxelles, les indépendants se défendaient d'être
alliés aux cléricaux, c'était une injure que cette sup
position! Non; ils voulaient aller siéger la Chambre
pour le bien du pays en général et de la ville de
Bruxelles en particulier.
Ils ne se laisseraient inspirer que par des senti
ments de justice et d'équité, sans faire aucune dis
tinction entre les partis. Ils se posaient en média
teurs et en redresseurs d'abus.
La discorde était dans les rangs des libéraux, la
crise industrielle sévissait les contribuables affolés
ont cru que l'avènement des indépendants au pouvoir
ait peut-être le commencement d'une ère de pros
périté et d'abondance et, sans réfléchir plus long
temps, sans peser toutes les conséquences de l'acte
qu'ils allaient poser, ils ont mis la tête du pays le
plus exécrable des gouvernements
Ah! si lés Français avaient daigné jeter un regard
attentif sur ce qui se passait chez les bons belges
actuellement, ils se seraient bien gardés d'accorder
leurs suffrages aux réactionnaires, menteurs et hy
pocrites comme les indépendants belges
Quoi! C'est un gouvernement analogue que par
nos votes irréfléchis, nous donnerions la France,
un gouvernement bassement haineux, ennemi de
l'instruction et soumis au clergé comme l'esclave
son maître, se seraient-ils écriés, et, l'indignation
dans le cœur, ils auraient, du poids le leurs votes,
écrasé pour toujours la réaction.
Espérons que ces échecs successifs serviront de
leçon aux libéraux des deux pays.
La garde civique de Termonde vient d'être dis
soute par arrêté royal, pour être réorganisée.
Ce fait, auquel on n'avait pas donné d'abord
grande attention, l'arrêté ayant paru au Moniteur
sans considérants; prend, par les explications
qui sont fournies maintenant, une importance
toute particulière.
Celte dissolution est une manœuvre politique. Le
but est cyniquement avoué par les journaux du
ministère.
Le corps des officiers du bataillon de Termonde se
composait aux trois quarts de libéraux. Cela déplai
sait aux sacristains de l'endroit. Ils ont signalé le
fait la cléricale Députation permanente d'Anvers,
qui a immédiatement découvert que, pour faire élire
des libéraux, on ne composait pas suffisamment les
compagnies de gardes du même quartier.
Proposition de dissolution. Dissolution.
En deux temps et trois mouvements, le tour a été
exécuté.
Nous serions curieux de connaître l'enquête qui a
motivé la proposition de la Députation permanente
et la prompte décision du gouvernement. Peut être
un membre de la gauche aura-t-il l'idée de la deman
der, dès la rentrée des Chambres, au gouvernement.
Mais il ne faut pas trop compter sur les libéraux de
la Chambre, qui ont pour principe de se taire et de
laisser faire.
En attendant, on va réorganiser la garde civique
de Termonde de telle façon que tous les grades
appartiendront aux cléricaux et, cette fois, les
libéraux auront beau crier, la Députation se bouche
ra les oreilles.