M0 8. Dimanche,
47e ANNÉE.
30 Janvier 1887.
6 FRANCS PAR AN
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Ypres, le 29 Janvier 4887.
Ce que coûte la destruction de
renseignement.
Le gouvernement libéral avait imposé au
pays, dans l'intérêt majeur du développement
scolaire, des sacrifices sérieux mais féconds.
On lui a durement et injustement reproché
d'avoir dépensé, en vue du progrès intellectuel
de la patrie, des sommes considérables.
Ces dépenses aux yeux de nos adversaires,
n'étaient que d'inutiles gaspillages et de folles
prodigalités.
Il fallait s'empresser de renverser cette œuvre
de dilapidation. Avec la destruction des écoles
devait s'ouvrir une ère d'économies et de pros
périté financière.
Les cléricaux le promirent aux électeurs, et
ceux-ci se laissèrent prendre. L'élection de
Juin 1884 fut le Waterloo des écoles.
Hélas on ne tarda pas s'apercevoir que
les déclamations cléricales sur les prétendus
gaspillages scolaires, étaient inspirées bien
moins par un sincère désir d'économies que par
une haine aveugle et sectaire pour l'enseigne
ment public.
Nous venons d'en recueillir une nouvelle
preuve, bien curieuse enregistrer.
Les libéraux avaient dépensé, mais leurs dé
penses s'étaient traduites en des résultats ap
préciés, et l'or du budget avait fait éclore, sur
toute la surface du pays, de nombreux établis
sements d'instruction.
Ils avaient payé, mais au moins tenaient-ils
la contre-valeur de leurs paiements, et le pa
trimoine national s'en trouvait-il enrichi.
Ils avaient dépensé de l'argent pour créer des
écoles voici que les cléricaux en dépensent
pour ne pas devoir en créer.
Aux dépenses libérales correspondaient des
acquisitions fécondes aux dépenses cléricales
correspond l'appauvrissement pur et simple.
Nous n'exagérons pas.
Ce qui vient de se passer Anvers est vrai
ment inouï c'est peut-être le plus bel épisode
de cette désorganisation scolaire si riche ce
pendant en invraisemblances et en folies.
Pour se rédimer vis-à-vis de la ville d'An
vers de l'obligation de construire une école
normale, le gouvernement des économies con
sent payer la bagatelle de 357,000 francs.
Trois cent cinquante sept mille francs, pour l
n'avoir pas d'école normale I Est-ce réussi
Ceux qui en sont arrivés là, ceux qui, pour
satisfaire leurs passions destructives, appau
vrissent le trésor d'une somme de trois cent
mille francs dont rien ne compense le sacrifice,
ceux-là ne sont ni des prodigues ni des impru
dents ce sont des foux furieux.
Le corps électoral, qui s'est laissé gruger par
les promesses d'économies, sait aujourd hui que
la désorganisation de notre enseignement pu
blic a entraîné pour le trésor les dépenses les
plus insensées.
Prospérité nationale.
Un des principaux organes du parti clérical,
le Bien public, donne, en ces termes, une idée
de la prospérité du pays sous le gouvernement
de Fontanarose-Beernaert et C"
Les symptômes de reprise industrielle qui
se manifestaient dernièrement, loin de s'accen
tuer, disparaissent devant les bruits de guerre
actuels.
Notre pays en souffre naturellement, et la
crise qu'il espérait voir diminuer sévit avec plus
d'intensité que jamais.
Les usines et les ateliers chôment et se fer
ment, et les commandes venant des pays loin
tains sont plus rares que les beaux jours. La
Russie, une de nos vaches lait, au point de
vue industriel, ne nous demande presque
plus rien.
Il y a peu de jours, un grand établissement,
renvoyait son personnel, et ne conservait que
50 ouvriers des 400 qu'il employait depuis plu
sieurs années.
j» Dans la sphère agricole, la situation n'est
pas meilleure le blé est pour rien et le bétail
trouve difficilement des acheteurs.
Quant la propriété, sa valeur diminue de
jour en jour. Il a été vendu récemment, dans
une des plus charmantes régions du pays, un
magnifique domaine comprenant plusieurs cen
taines d'hectares en bois et terres, un château
monumental, une chasse et une pêche prin-
cières, pour 480,000 francs, droits compris. Il
y a quinze ans, son propriétaire aurait refusé
de le céder pour un million de francs.
Le nombre d'hectares tombés en jachère,
faute de locataires, est énorme, et on pourrait
citer des fermes entières qui attendent vaine
ment un fermier. Pendant ce temps, le pro
priétaire qui ne perçoit pas une obole de reve
nu, doit acquitter l'impôt, et l'on sait si celui-ci
est lourd.
Les amateurs de contrastes pourront relire,
si le cœur leur en dit, les articles que le même
Bien public publiait en 1884 pour énumérer
tous les bienfaits dont le pays serait bref dé
lai redevable au gouvernement clérical.
Voulez-vous avoir un avant-goût des félicités
qui attendraient notre heureuse patrie si le ré
gime clérical qui, paraît-il, n'est encore qu'en
bourgeons chez nous, venait y atteindre le
développement que souhaitaient nos bons clé
ricaux et que le Courrier de Bruxelles traduit
ainsi sous le titre de Desiderata
Développement complet de l'ignorance; lais
ser envahir notre territoire sous prétexte d'a
méliorer le sol et de moraliser les paysans
supprimer tous les divertissements publics. On
ne jouera plus la comédie que dans les écoles
congréganistes. En fait de musique, on aura
les cloches et le Miserere 1
Puis, comme couronnement, frapper d'un
droit équivalant une prohibition, les jour
naux qui dévoileraient les iniquités d'un tel
régime. On appliquerait ainsi au pain intellec
tuel le régime dont on veut frapper le pain
matériel.
Ah I quel beau pays nous aurions alors
Le ministre de la justice vient d'envoyer une
circulaire aux directeurs de prisons, les préve
nant que le tantième perçu au profit des direc
tions sur le produit du travail des prisonniers
est supprime.
La Société Royale des Beaux-Arts d'An
vers se prépare fêter brillamment son 100'
anniversaire en 1888. Dès ce jour on s'occupe
activement de cette manifestation. Les fêtes
seront, du reste, organisées avec le concours
financier du gouvernement, de la province et
de la ville. L'initiative privée fera le reste. On
peut s'attendre des manifestations grandioses.
Les sections se sont réunies Mercredi pour
examiner les projets de loi déposés la semaine
dernière et la proposition de M. Frère-Orban
sur les conseils d'arbitrage et de conciliation.
Il n'y a pas eu de débat.
Les sections ont nommé leurs rapporteurs et
voté les projets.
L'instituteur de Ciergnon.
Il se fait en ce moment de grands efforts dans
toute la presse cléricale pour essayer de réagir
contre l'impression profonde qu'à causée dans
tout le pays la mort de l'instituteur de Ciergnon,
M. Dethise.
La bonne presse fait preuve, dans cette cam
pagne, de plus d'empresssement obéir au mot
d'ordre du clergé que d'adresse, de tact et de
bonne foi.
Dethise, disent certaines feuilles, n'était nul
lement plaindre il jouissait d'un traitement
d'attente de 1,800 fr.
Cest très-vrai, cela près que Dethise ne
jouissait guère de son traitement, attendu que
les mandats restaient impayés. Si c'est là une
jouissance...
LE PROGRES
TIRES ACQUIRIT EUNDO.
ABONNKMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00.
Idem. Pour le restant du pays7-00.
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Marché aux Herbes. i
...19.
1* Supprimer les traitements d'attente aux instituteurs,
pour diminuer, en employant cet argent des travaux,
le nombre des malheureux et des mécontents
2° Supprimer autant d'écoles que possible pour le
même motif
3° Frapper l'alcool d'un impôt tellement fort, qu'on
ôterail l'ouvrier la tentation d'en boire
4" Diminuer le budget de la guerre de dix millions, et
les employer l'agriculture, ce qui retiendrait la
campagne et les paysans qui n'iraient plus se corrompre
dans les villes, et les nobles qui n'iraient plus dans les
capitales dépenser leur argent en plaisirs coupables, ce
qui diminuerait le nombre des grèves et assurerait en
même temps l'ordre et la moralité
5° Occuper davantage les soldats, pour ne pas leur lais
ser le temps de se pervertir, et les faire conduire la
messe
6" Frapper sur l'entrée des théâtres et des cafés-con
certs un droit tellement fort, qne le nombre des specta
teurs se trouvât notablement diminué
7* Enfin, assujettir un impôt de dix centimes, sous
prétexte de timbre, les journaux qui portent dans les villes
et les campagnes le mensonge et la corruption ce
qui leur rendrait l'existence impossible et laisserait la
bonne presse sans concurrence.
r i i g i e»