N° 10. Dimanche,
47e ANNÉE
6 Février 1887
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
6 FRANCS PAR AN
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Ypres, le 5 Février 1887.
La Nation a une manière elle de démontrer
la possibilité et la nécessité de la revision: elle
montre que depuis 1848 c'est dire depuis
l'abaissement du cens électoral le parti
libéral n'a cessé de perdre arrondissement
après arrondissement, bien que le progrès des
idées libérales ne soit guère contestable. En
1848, dit-elle, les libéraux avaient, la Cham
bre, de 50 60 voix de majorité. Après 1852,
les arrondissements flamands où nous avions pu
combattre avec quelque chance de succès, n'ont
flus nommé que des cléricaux. La défaite de
863 nous a enlevé Anvers, Bruges que nous
perdîmes définitivement en 1870 et divers
autres arrondissements. Résultat semblable en
1870. Sur 41 arrondissements, il en est 20
acquis aux cléricaux, où nous ne luttons plus
Malines, Turnhoul, Louvain, Courtrai, Dixmu-
de, Fumes, Roulers.Thielt, Ypres, Alost, Aude-
narde. Eecloo, Saint-Nicolas, Termonde,
Hasselt, Maeseyck, Tongres, Bastogne, Marche
et Dinant. A Anvers, Bruges nous luttons
encore, sans grand espoir de succès Namur,
Gand, avec des chances incertaines. Bref la
situation est mauvaise. Et la Nation se deman
de, avec inquiétude, si nous parviendrons
reconquérir jamais tout le terrain perdu en
1884 Conclusion il faut reviser la Constitu
tion au plus tôt, voire tout de suite.
Nous ne déguiserons pas que c'est avec un
certain plaisir que nous voyons enfin un révi
sionniste descendre du septième ciel nuageux
de la théorie sur le terrain des faits, qui est
celui de la politique, et faire trêve aux décla
mations incessantes dont on nous assassine.
Mais voyons ce que signifient les faits allé
gués par la Nation et s'ils comportent la consé
quence qu'elle en tire.
D'abord, en 1884, nous n'avions pas les deux
tiers des voix. La Nation doute fort que nous
retrouvions jamais môme notre majorité de
1884. Comment ferions-nous la revision, qui
exige une majorité des deux tiers des voix
La Nation ne s'est pas aperçue qu'elle dé
montrait l'impossibilité de la revision par le
parti libéral. Il résulte de son raisonnement
même que jamais la revision ne sera possible
qu'avec le concours des catholiques. (Jr il est
clair que ceux-ci ne nous donneront pas gra
cieusement leur concours pour une revision
constitutionnelle, si celle-ci devait rendre leur
situation politique moins bonne et la nôtre
meilleure.
Donc la revision impossible par nous seuls
la revision possible avec les catholiques, la
seule condition qu'elle soit au profit des catho
liques voilà le premier résultat où aboutit la
Nation.
Supposons maintenant la revision faite et le
système capacitaire introduit pour les élections
législatives comme il l'est déjà pour les élections
provinciales et communales. Que produirait ce
système
Nous rendrait-il les vingt arrondissements
où nous ne luttons plus jamais?
La réponse est facile
A Malines, Turnhout, Courtrai, Dixmude,
Furnes, Roulers, Thielt, Alost, Audenarde,
Eecloo, Saint-Nicolas, Termonde, Maeseyck,
Tongres, Bastogne, le système de l'adjonction
des capacités a donné aux élections commu
nales le triomphe au parti catholique non seu
lement dans les villages, mais même au chef-
lieu de l'arrondissement. De plus, ces arrondis
sements ne nomment que des catholiques au
conseil provincial.
A Louvain, Ypres, Hasselt, Marche et Dinant,
le conseil communal est libéral dans le chef-
lieu de l'arrondissement. Dans presques toutes
les communes rurales, il est catholique et,
sauf Marche peut-être, tous ces arrondisse
ments ne nomment que des catholiques au con
seil provincial.
Ne pas oublier que les conseils provinciaux,
élus par Je Corps électoral capacitaire, sont
exclusivement composés de cléricaux dans les
provinces de la Flandre occidentale, d'Anvers,
du Limbourg qu'au conseil de la Flandre
orientale, la minorité libérale est infime, que la
majorité est catholique au conseil de Namur,
que la majorité libérale est infime et précaire
au conseil du Luxembourg et que sur neuf pro
vinces, il n'y en a que trois où subsiste une
majorité libérale solide, le Hainaut, le Brabant
et la province de Liège.
Espérer reconquérir ces arrondissements per
dus par l'adjonction des capacités, c'est donc
se repaître de chimères, ou se payer de mots.
Les faits sont là, trop clairs, hélas I
Passons aux arrondissements où le parti li
béral lutte encore dans des conditions d'infé
riorité.
Est-ce Bruges que nous rendra l'adjonction
des capacités Le conseil communal de
Bruges est exclusivement catholique, comme le
conseil provincial delà Flandre occidentale.
Est-ce Anvers? Anvers a conservé un
conseil communal libéral, mais toutes les com
munes de l'arrondissement sont aux mains des
catholiques le canton même d'Anvers nomme
des catholiques au conseil provincial, qui est
clérical et homogène.
L'adjonction des capacités ne nous rendrait
donc évidemment ni les arrondissements que,
sous le système censitaire, nous considérons
comme absolument perdus, ni ceux qui sont
peu près perdus.
Elle ne pourrait avoir d'influence sérieuse
que sur les arrondissements où la force des
Gartis se balance aujourd'hui, comme Gand,
fivelles, Verviers Namur, Soignies nous
mettons de côté Bruxelles, où la victoire catho
lique de 1884 n'est qu'un accident dû la poli
tique des amis de la Nation.
Que produirait l'adjonction des capacités
Nivelles Nous n'en savons trop rien mais
l'arrondissement est libéral, il reviendra cer
tainement aux libéraux sans la revision, peut-
être même avec la revision.
Que produirait-elle Namur? Hélas,
voyez les résultats de l'élection provinciale.
Catholiques Namur même, catholiques
Eghezée, catholiques Fosses, catholiques
Gembloux
Que produirait-elle Soignies, Verviers,
où les députés prgvinciaux de Herve, Dolhain-
Limbourg, AuDe^ont catholiques? Nos amis
de ces arrondissements pourraient répondre en
connaissance de cause la question.
Mais pour Gand, nous pouvons dire la
Nation que les libéraux qui, croiraient les
chances accrues par l'adjonction des capacités
sont aussi peu nombreux que peu sérieux que
l'immense majorité de nos amis sont persuadés
(pie bientôt le capacitarisme entraînerait
Gand la chûte définitive du dernier arrondisse
ment libéral des Flandres, de tout le pays
flamand 1
Tel serait, sur le terrain des faits, les modifi
cations que la revision el l'adjonction des ca
pacités pourraient produire dans la composition
du Parlement.
Nous risquerions gros, la vie même pour
un bénéfice très-problématique et qui serait
des plus minces.
Simples mesures de précautions, répond-on
fiartout, quand on s'étonne des préparatifs mi-
itaires que font tous les Etats, excepté la Bel-
§ique, pour résister un choc que ces apprêts
oivent faire considérer comme prochain.
Puissent les précautions être utiles. En atten
dant notre pays nous semble dans la situation
de cet ouvrier du chemin de fer qui doit ratta
cher deux wagons d'un train. S'il ne prend pas
garde il sera écrasé entre les deux.
Par lequel
Qu'importe, si c'est par celui du Nord ou du
Sud Ce qu'il doit faire, c'est de bien se tenir
et de se défendre contre les deux. Quand le
convoi de la guerre, qui transporte avec lui la
mort, la ruine, la servitude, sera en marche,
il ne sera plus temps.
Voici la situation où nous nous trouvons avec
un ministère qui. lorsqu'on lui parle de la dé
fense du pays, répond exemptions ecclésiasti
ques, et un Parlement dont l'impuissance est
manifeste, puisqu'il obéit passivement au cabi
net, qui a pour maîtres les évêques.
Quand le pays, inquiet, demande être
éclairé, M. Beernaert lui fait répondre, par un
de ses porte-voix: qu'il s'expliquera claire
ment, quand le moment sera venu.
Il paraît que sans être autoritaire, comme
Louis XIV, le Roi ne voulait pas attendre le
bon vouloir de notre Premier.
Le Nieuwe Rotterdamsche Courant annonce
queLéopold II adressera prochainement un mes
sage aux Chambres pour signaler la nécessité
de voter le service personnel et les travaux de
défense nécessaires.
Nous ne savons jusqu'à quel point on peut
croire ce bruit mais nous savons que le chef
de l'Etat, s'il plait ses ministres de ne pas ar
mer, n'est pas désarmé, lui, contre leur impré
voyance ou leur mauvais vouloir. Il peut chan-
LE PROGRES
TIRES ACQPIRIT El'NIK).
ABONNEMENT PAR AN Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00
Idem. Pour le restant du pays7-00.
Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20.
A. - c mur'
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