M0 13. Jeudi,
47e ANNÉE
17 Février 1887
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
L'Éducation
morale et religieuse.
Commission du travail.
6 FRANCS PAR AN
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
vires acquirit euruo.
Ypres, le 16 Février 1887.
RÉGLONS LES COMPTES.
A la suite des événements qui ont attristé et
inquiété notre pays, l'année dernière, les cléri
caux et leurs organes ont insinué que l'ensei
gnement primaire laïc doit être tenu pour
responsable de l'état moral de la partie la plus
turbulente de nos classes ouvrières. Certain de
ces organes a même paru assez disposé mettre
sur le dos des instituteurs laïcs les crimes com
mis dans le bassin de Charleroi.
Je n'ai pas, pour le moment, examiner l'état
intellectuel et moral de nos classes ouvrières
mais il me paraît utile de rechercher qui in
combe la responsabilité de l'éducation quelle
qu'elle soit que ces populations ont reçue.
A chacun ce qui lui revient,
Ce n'est que par l'éducation morale et reli
gieuse proclament les porte-voix des cléri
caux que l'on pourra ramener les classes
ouvrières la résignation chrétienne, seule ca
pable de leur faire supporter avec patience,
tous leurs maux.
Je ne dis pas non.
La résignation chrétienne doit être une ex
cellente chose, facile pratiquer par ceux qui,
devant une table servie bouche que veux-tu,
ont bien dîné.
La résignation chrétienne pouvant fournir du
pain ceux oui ont faim, vêtir ceux qui sont
nus, abriter les ménages sans logement, faute
de ressources, je suis a avis que l'on a eu tort et
grandement tort£de ne pas la donner tous
nos ouvriers et quantité de nos commerçants.
C'était un moyen sûr de permettre chacun
de rire au nez de la trop longue et trop cruelle
crise qui accable le monde.
Dans notre pays, le clergé a eu, pendant plus
de 50 ans, la direction absolue de l'éducation
morale et religieuse dans toutes les écoles pri
maires, sans exception. 11 a donc pu donner ou
faire donner aux jeunes gens de l'un et l'autre
sexe la résignation chrétienne si propre parer
aux crises les plus longues et les plus intenses.
Pourquoi ne l'a-t-il pas fait
Il protestera. Je m'y attends car avouer que
la marchandise qu'ils vendent n'a pas les quali
tés qu'ils lui prêtent, que le spécifique qu'ils
prônent n'est que remède de charlatans, c'est
ce que nos prêtres et nos religieux se gardent
bien de faire. Disciples des jésuites ou jésuites
eux-mêmes, ils possèdent trop bien l'éducation
morale de leurs maîtres pour se laisser aller
un honnête aveu.
Se laver de leurs imprévoyances et de leurs
fautes et en salir les autres, est un de ces exer
cices qui leur est famdier. Le procédé est
quelque peu canaille, mais fort adroit. Plus
d'un honnête homme se laisse prendre ces
finesses de Bazile.
Les fruits de l'éducation étroite, malsaine,
égoïste, dissolvante des liens sociaux que le
clergé a imposée et dirigée pendant plus de
cinquante ans, sous prétexte d'éducation morale
et religieuse se dressent accusateurs devant lui,
étalant son impuissance enseigner la morale,
tous ses efforts et toute son attention étant la
politique, au dénigrement de tout ce qui ne lui
est pas soumis. Voilà pourquoi les cléricaux es
saient de rendre les instituteurs laïcs responsa
bles de ce qu'eux-mêmes ont produit. Mais
chacun ce qui lui revient.
Indépendamment de la période actuelle mau
dite, dont les cléricaux porteront la terrible
responsabilité devant la conscience publique
outragée, nous avons trois périodes dans notre
enseignement primaire.
De 1830 1842 De 1842 1879 De
1879 1884.
Les ouvriers élevés dans la 1" période ont de
53 65 ans. Ceux de la 2* ont de 16 53
ans. Ceux de la 3* de 11 16 ans.
De 1830 1842, le clergé a dirigé l'éducation
des enfants du peuple cemme il l'a voulu.
De 1842 1879, il a été, de par la loi, le
maître souverain de l'éducation publique dans
toutes les écoles primaires du pays. De plus, il
a formé dans ses écoles normales et dans les
écoles normales de l'Etat, l'éducation morale et
religieuse des instituteurs et des institutrices
chargés de desservir ces écoles sous l'autorité
du clergé.
11 a eu son corps d'inspecteurs payés par
l'Etat, chargés concuremment avec les curés et
les vicaires de diriger l'enseignement moral et
religieux donné par les instituteurs. 11 a intro
duit dans toutes les écoles les livres sa marque
l'exclusion de tous autres.
Les instituteurs étaient libres de faire et de
dire ce qui convenait au clergé. Malheur
celui qui eût regimbé
Voilà des faits indéniables.
Et un jour, il est arrivé que ces fonctionnai
res, élevés sous votre direction dans les écoles
primaires, Messieurs du clergé, rassasiés par
vous dans vos écoles normales, de votre morale
religieuse, dirigés par vous dans leurs écoles,
n'ont plus rien valu du tout
Hier encore, c'était des hommes capables,
de fervents catholiques, prêchant d'exemple,
dans les pratiques du culte et le lendemain,
ces mêmes hommes, si bien élevés par vos
soins, ne méritaient plus que la défiance de
tout le monde, tel point que vous aviez ajouté
vos litanies Des maîtres sans foi, délivrez-
nous, Seigneur
Mais ces maîtres sans foi c'est vous qui
les aviez formés. Ces hommes devenus subite
ment des êtres immoraux que vous outragiez
et faisiez outrager par votre sainte presse,
n'avaient reçu, depuis leur enfance, que votre
éducation morale et religieuse.
Que vaut donc l'éducation que vous donnez
pour, de votre aveu, s'effacer ainsi subitement
d'un jour l'autre Personne mieux que vous
n'a établi qu'elle est faux-teint. Vous avez tel
lement peu de confiance dans l'éducation morale
et religieuse que vous donnez que vous n'osez
exposer vos séminaristes au contact des caser
nes pour quelques mois. Vous avez la préten
tion de former l'éducation des générations qui
s élèvent et vous donnez la preuve que vous-
mêmes êtes convaincus que votre éducation
est sans résistance!
C'est que votre éducation morale et reli
gieuse est la négation de toute morale. Vous
habituez ramper sous vos volontés, mais vous
n'élevez pas. Vous méconnaissez les sentiments
et vous ne savez pas former les caractères.
L'éducation morale et religieuse telle que
vous la donnez laisse l'esprit et le cœur vides.
Jacques Sincère.
Dans sa séance plénière de Samedi, 12 Fé
vrier, 10 h. 1/2 du matin, la commission du
travail s'est occupée de la proposition de M. le
sénateur Montefiore-Levi institution d'une
commission permanente de surveillance de
l'industrie.
Cette motion a été combattue par M. Th.
Janssens, députe de Saint-Nicolas, qui la con
sidère comme inspirée par un zèle exagéré.
M. De Bruyn, député de Termonde, y voit un
organe dangereux. Il préfère le rétablissement
du conseil supérieurdu commerce et de l'indus
trie, tombé avec les chambres de commerce. 11
rend hommage cependant aux excellentes in
tentions de M. Montefiore et formule une pro
position transactionnelle ainsi conçue
M. Dauby formule une série de critiques et
adresse de nombreuses questions l'auteur de
la proposition.
M. Montefiore défend son projet et après dis
cussion entre MM. Lagasse, Debruyn et Dauby,
M. Pirmez, qui préside, résume le débat et met
aux voix les deux principes commission de
surveillance, système Montefiore inspection,
système De Bruyn.
Le principe du système Montefiore est écarté
par parité de suffrages.
Le principe du système De Bruyn est admis
ensuite par 7 voix contre 2 et renvoyé l'exa
men de la section.
Dans sa séance de l'après-midi, la commis-
LE PROGR
ABONNEMENT PAR AN; Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00.
Idem. Pour le restant du pays7-00.
Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20.
INSERTIONS Annonces; la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames: la ligne, fr 0-25.
Insertions Judiciaires la ligne un franc.
Pour les annonces de France et de Belgique s'adresser l'Agence Havas, Bruxelles 89
Marché aux Herbes.
Il est institué une inspection permanente de l'industrie,
chargée de surveiller l'exécution des lois et règlements sur
la matière.
Les fonctionnaires chargés de ce service adresseront au
gouvernement des rapports trimestriels sur les inspections
qu'ils auront faites
Un rapport résumant les travaux de l'année pourra être
soumis au conseil supérieur du commerce et de l'industrie
ou toute autre délégation dont le gouvernement jugerait
utile de proposer l'institution.