N° 17. Jeudi,
47e ANNÉE.
3 Mars 1887
6 FRANCS PAR AN
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Revue politique.
Les élections allemandes sont une victoire
pour M. de Bismarck et en même temps une
manifestation imposante en faveur du maintien
de la paix. Le vote du septennat, seul moyen
d'éviter la guerre, s'il faut s'en rapporter la
déclaration du prince-chancelier, est assuré.
Tous les résultats ne sont pas encore connus, et
d'autre part il y a de nombreux ballottages
mais dès présent sont élus 197 septennalistes
et 117 anti-septennalistes. Le Parlement alle
mand se composant de 397 membres, le résultat
définitif n'est pas douteux.
L'ombre au tableau au point de vue alle
mand bien entendu, c'est l'Alsace-Lorraine qui
reste fidèle la cause française et qui a élu dans
toutes les circonscriptions, et presque partout
d'énormes majorités, les candidats du parti de
la protestation. Avant les élections, il y avait
un seul député alsacien ayant accepté les faits
accomplis, M. de Bulach, Erstem-Molsheim.
Il a été éliminé plus de dix mille voix de ma
jorité. Les quinze députés de l'Alsace-Lorraine
appartiennent maintenant au parti français. Le
résultat du scrutin a produit en France une pro
fonde sensation la presse française, restant
fidèle sa prudente ligne de conduite, l'enregis
tre avec une émotion contenue.
Les socialistes, comme il fallait s'y attendre,
ont gagné du terrain dans bon nombre de cir
conscriptions.
Le maréchal de Moltke a été réélu Memel.
M. Krupp, le fameux fondeur de canons a été
battu Lssen.
Le Times apprécie les élections allemandes en
ces termes «Il serait téméraire d'affirmer que
ces élections assurent la paix pour un long ave
nir, mais on ne peut mettre en doute qu'elles
l'assurent pour le présent.
Ypres, le 2 Mars 1887.
Neutralité de la Belgique.
La Post de Berlin a paru avec un article sur
La Situation de l'Europe après le 21 Février,»
où il est assez longuement question de la neu
tralité belge. Le temps nous manque pour tra
duire littéralement cet article, dont l'impor
tance vient des relations connues de la Post
avec M. de Bismarck.
L'article, après avoir affirmé le désir du
gouvernement impérial de maintenir plus que
jamais la paix en Europe, examine les relations
de l'Allemagne avec les différentes puissances.
Il s'en prend ensuite aux correspondants alle
mands des journaux anglais qui ont prêté
l'Allemagne des projets qui porteraient atteinte
la neutralité belge et soulèveraient là une
question qui regarde non seulement l'Angle
terre, mais toutes les autres grandes puissan
ces.
Or, rappelle-t-il, le prince de Bismarck a
déclaré, de toute l'autorité de sa parole, que
l'Allemagne ne commencerait pas la guerre et
n'en prendrait en aucun cas la responsabilité
et coup sûr, elle ne se donnerait pas tort de
débuter en violant un traité européen.
L'article discute ensuite cette opinion que les
fortifications établies par la France sur sa fron
tière de l'Est contraindraient, en cas de guerre,
l'armée allemande se frayer un passage par la
Belgique.
Et revenant aux journaux anglais, il les raille
de leur prétention de connaître les secrets de
l'état-major allemand, qu'en Allemagne même
on ignore....
En tous cas, ajoute-t-il, c'est une grave er
reur que de croire que la politique allemande
est soumise l'exécution des plans de l'état-
major c'est le contraire qui est vrai.
Ni la neutralité de la Belgique, dit-il encore,
ni celle de la Suisse, ne seront violées par l'Al
lemagne. L'état-major allemand attache une
trop haute valeur aux droits que ces deux Etats
se sont créés par la façon dont ils ont observé
les traités qui leur ont été imposés par l'Europe
pour le maintien de la paix. Le bon sens indi
que, en outre, qu'il ne serait pas adroit l'Al
lemagne de contraindre les armées belge et
suisse marcher contre elle avec l'armée fran
çaise.
Nous tenons répéter encore une fois que
nous n'avons pas la prétention de donner ici
une traduction absolument exacte. Mais nous
croyons pouvoir garantir le sens de ces déclara
tions, qui, dans les colonnes de l'organe habi
tuel de M. de Bismarck, ne sont pas sans
intérêt pour nous.
Le dessous des cartes.
Beaucoup de braves gens sont en peine et se
demandent comment le cabinet Beernaert ré
clame de la Chambre une somme de soixante
millions pour dépenses militaires, après tant
de déclamations anti-militaristes et tant de
promesses de persévérantes économies.
En effet, le cas est bizarre.
On peut l'expliquer en partie par l'interven
tion de la presse anglaise mais cette inter
vention est-elle venue spontanément Non I
Nous en possédons la preuve indirecte. Avant
les articles du Standard, du Morning Post et
du Timesle gouvernement belge avait inter
rogé le ministère Salisbury sur ses intentions
en cas de violation de notre nationalité.
Le septennat, discuté déjà avec passion au
Parlement allemand amenait les premiers
bruits de guerre et donnait l'éveil toutes les
puissances.
Prompte fut la réponse du cabinet anglais
fort amicale dans la forme, elle dégageait au
fond sa parole et faisait clairement entendre
que les forces anglaises n'étant pas assez nom
breuses, il ne fallait pas compter sur leur con
cours dans l'hypothèse d'une invasion.
Depuis 1870, l'égoïsme de la Grande-Breta
gne a fait du chemin!
Après la lecture de cette note confidentielle,
le gouvernement se décida prendre les mesu
res nécessaires pour réorganiser l'armée, défen
dre la Meuse, en un mot, sauver sa responsabi
lité en cas de désastre.
Comment justifier cette conversion si subite?
Pouvait-on livrer la publicité la déclaration
si grave du ministère Salisbury et détruire
d'un coup tout l'effet du traité de 1839 C'eut
été commettre une grossière faute diplomati
que....
Et la droite trompée, bernée, qu'allait—elle
dire? M. Beernaert eut alors une idée de gé
nie il pria le ministère anglais d'inspirer la
presse de Londres, de lui faire connaître les
sentiments secrets de ses gouvernants, afin
d'éclairer les belges sur leurs devoirs et d'ame
ner le vote des crédits extraordinaires.
Le service lui fut ainsi rendu on connaît le
reste. Que l'on ne s'insurge pas contre ce récit
il vient de Londres, du bureau de la rédaction
d'un grand journal, souvent inspiré par le chef
des conservateurs anglais.
La note, la fameuse note, a été montrée
MM. Jacobs et Woeste aussi M. Jacobs jouait-
il la comédie quand il appuyait la demande
d'éclaircissements faite par M. Frère une
séance récente. 11 a connu le projet des crédits
avant son dépôt...
M. Beernaert est donc l'auteur indirect des
articles de la presse anglaise. C'est d'une jolie
force 1
Pour le mendiant du Vatican,
s. v. p.
L'Eglise catholique vient encore de découvrir
une excellente occasion de pratiquer une abon
dante saignée aux fidèles.
L'occasion, c'est le jubilé de cinquante ans
de prêtrise du pape Léon XIII. La Belgique clé
ricale prendra naturellement une part considé
rable la fête, en vue de laquelle un comité
organisateur s'est déjà constitué.
Ce comité a décidé que les paroisses des di
vers diocèses seraient invitées offrir chacune
un don spécial.
De cette façon, on est déjà assuré de la quan
tité, et comme il importe aussi de veiller ce
que la qualité, c'est-à-dire la valeur, ne laisse
rien desirer, on annonce que les dons seront
exposés au Vatican.
Le Moniteur a publié l'acte de constitution
de la Compagnie du Congo pour le commerce
et l'industrie.
2,000 actions sont souscrites représentant
une somme de 100,000 fr. versée.
La feuille officielle publie aussi la loi conte-
tenant le budget du ministère des affaires
étrangères pour l'exercice 1887. Il est fixé la
somme de 2,377,020 fr.
Mme Popp.
La presse a pris l'habitude de fêter le cin
quantenaire de ses membres qui s'étaient les
plus distingués et avaient le plus honoré notre
profession, une des plus difficiles, des plus déli
cates et des plus ingrates qui existent.
C'est ainsi que successivement on a célébré le
cinquantenaire de M. Eugène Landoy, puis
celui de M. Delmée, directeur de l'Economie.
Est-ce que nos confrères ne pensent pas qu'il
LE PROGRES
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