l\° 19. Jeudi,
47e ANNÉE.
10 Mars 1887
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Revue politique.
L'école du respect.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Le ministère Italien Depretis reste tout entier
et se représentera devant la Chambre pour pro
voquer un vote.
On croit que le Parlement sera convoqué cette
semaine.
M. Depretis, reconnaissant de la marque de
confiance royale, a donné son acquiescement en
le subordonnant l'appui entier et sans condi
tion de ses amis politiques.
Les troubles de Bulgarie seraient, d'après les
dépêches officielles, en voie d'apaisement nous
croyons que ces dépêches, tout officielles qu'elles
Seuvent être, ont grand besoin de confirmation,
'autant qu'elles sont en contradiction sur plus
d'un point. Le Journal de Saint-Pétersbourg parle
du mouvement avec un beau mépris C'est,
dit-il, la conséquence fatale du mécontentement
Pénéral. Dix-huit mois de cette anarchie, et
ordre sera rétabli sans guerre civile.
L'empereur d'Allemagne a reçu le bureau du
Reichstag. Il a dit qu'il avait été obligé de dis
soudre le Parlement parce que, malgré l'exposé
clair et franc de la supériorité numérique des
armées des pays voisins, l'opposition n'avait pas
voulu voter dans toute son étendue le projet mi
litaire.
Maintenant l'espoir existe que le projet sera
adopté une très-grande majorité.
En ce qui concerne le Pape, l'Empereur a dit
qu'il était convaincu de la sincérité des inten
tions pacifiques de Léon XIII et a exprimé l'es
poir que la question religieuse recevra bientôt
une solution pacifique.
On assure que l'empereur d'Autriche, ayant
eu récemment un entretien avec le comte An-
drassy, aurait dit que la guerre est impossible
actuellement, mais il aurait ajouté qu'il se passe
quelque chose de mystérieux dont on n'aura la
clef que dans trois ou quatre semaines.
Vpres, le 9 Mars 1887.
On connaît les résultats complets et défini
tifs des élections allemandes, c
une incontestable victoire pour JV
Voici le tableau de la force respective des
groupes dans le nouveau Reichstag, comparée
leur situation dans le précédent Parlement
ui constituent
de Bismarck.
On voit que les partis favorables au gouver
nement (nationaux-libéraux, conservateurs,
membres du parti de l'empire) comptent 219
membres, et les partis hostiles (centre, progres
sistes, socialistes, Alsaciens-Lorrains, Polonais,
Danois), 178 soit une majorité de il voix
pour le gouvernement.
Pour obtenir cette majorité, M. de Bismarck
avait compté sans doute sur ses appels au pa
triotisme alarmé de l'Allemagne, sur les bruits
de guerre habilement répandus et son attente
n'a pas été vaine, les chiffres cités le prouvent
évidemment.
C'est grâce ce réveil intense du sentiment
patriotique que les conservateurs et les mem
bres du parti de l'empire ont gagné une di
zaine de sièges, et surtout que les nationaux-
libéraux ont vu le nombre de leurs députés
monter de 50 1021 Cette même raison expli
que les pertes énormes subies par les progres
sistes, qui tombent de 67 35 membres, par
les socialistes qui tombent de 25 11, c'est-à-
dire qui ont perdu plus de la moitié de leurs
représentants, des démocrates enfin,qui étaient
six et n'ont plus un seul représentant.
Pour se convaincre que tel a été le caractère
et la raison de ces élections, qui ont marqué un
revirement si considérable, il suffit de constater
que le mouvement qu'elles indiquent si pro
noncé dans toute l'Allemagne protestante, a été
nul dans les pays annexés, de race non alle
mande. Là où le patriotisme germanique
n existe pas et ne peut exister, M. de Bismarck
na rien gagné. Les Alsaciens-Lorrains, les
Polonais, les Danois conservent le même nombre
de voix. Leur représentation au Reichstag reste
intacte, malgré tous les efforts, toute la pression
du gouvernement.
M. de Bismark avait encore dans son jeu un
autre atout, dont il estimait la valeur très
haut prix et que d'avance il avait consenti
payer fort cher l'intervention du Pape.
Ici le chancelier semble s'être fait de singu
lières illusions. Si en homme pratique et positif
qu'il est, M. de Bismarck mesure l'utilité de
l'intervention papale au résultat qu'elle a pro
duit, il doit se dire aujourd'hui que son atout
ne valait pas grand chose.
Première déception: le Centre, recevant com
munication des dépêches de Mgr Jacobini, con
naissant les instructions du Pape, son désir de
satisfaire M. de Bismarck et de voir voter le
septennat, le centre vote résolument contre le
gouvernement, fait rejeter le septennat et rend
ainsi la dissolution du Parlement inévitable.
Seconde déception devant leurs électeurs,
M. Windhorst et ses amis déclarent que le Pape
n'a nullement le droit de les forcer voter le
septennat, que c'est là une question politique
et non une question religieuse. Ils refusent
donc de s'incliner devant les instances de Mgr
Jacobini et de Léon XIII lui-même.
Troisième déception l'immense majorité
des électeurs catholiques soutiennent le Centre
et ses chefs dans cette résistance et réélisent
presque partout leurs anciens députés. Ils
étaient 110 l'ancien Reichstag. Ils reviennent
102 au Reichstag nouveau l
Léon XIII, de ce Pape qui se pose si volontiers
en arbitre, pour ne pas dire en maître de
l'Europe.
C'est la montagne ayant accouché d'une
souris
Comment expliquer l'étonnante exigùité de
ce résultat Les uns l'attribuent certaine
indépendance d'esprit des populations catholi
ques de l'Allemagne, très fidèles, mais moins
serviles que d'autres. Beaucoup y verront sans
doute la preuve d'un défaut de bonne foi de la
Curie romaine. Ce n'est pas en Belgique, où
personne n'a oublié ïassolutamente segreto, que
le double jeu de la Cour papale pourrait sur
prendre. Nous savons, par une piteuse expé
rience, quoi l'on s'expose en traitant avec
notre Saint-Père le Pape, et qu'il n'est maqui
gnon si retors qui, en fait de ruse, les
Monsignori romains n'en remontreraient. On
connait les instructions ostensibles de Mgr
Jacobini aux chefs du Centre, celles qui étaient
faites pour être connues de M. de Bismarck.
N'y en a-t-il pas eu d'autres? N'a-t-on pas laissé
soupçonner du moins, deviner M. Yvindhorst
et ses lieutenants qu'on verrait, Rome, une
apparente désobéissance, sans trop de déplai
sir Chi lo sa Et qui le saura jamais
Mais quoi qu'il en soit, que le centre et les
électeurs catholiques aient vraiment résisté aux
ordres du Pape, ou que, lisant entre les lignes,
ils y aient vu une secrète invitation n'en point
tenir compte, les électeurs catholiques ont voté
comme un seul homme pour les adversaires du
septennat et de M. de Bismarck, et le Centre
se retrouve au Reichstag, ayant dans toute
l'Allemagne allemande, seul résisté, ou peu
près au prodigieux effort de l'administration
impériale.
Aussi M. de Bismarck peut-il aujourd'hui
tourner et retourner ce dilemme
Ou bien le Pape n'a point usé de son influen
ce sur les catholiques en faveur de l'Empire.
Ou bien cette influence, dont, au Vatican, on
faisait si grand état, se réduit peu de chose en
vérité.
En tout cas, le Pape qui ne cesse d'offrir aux
gouvernements son appui pour combattre leurs
adversaires, socialistes, anarchistes, révolu
tionnaires, vient de donner une preuve tan
gible de ce que les gouvernements peuvent at
tendre de la Curie.
Elle n'a eu assez d'influence ni sur les catho
liques, ni même sur le clergé allemand pour
empêcher l'élection d'adversaires résolus et
implacables de l'Empire. Quelle influence pour
rait-elle prétendre sur ceux qui sont rebelles
l'influence de l'Eglise
Les cléricaux protestent volontiers de leur
respect pour les droits des pères de famille,
n'est-ce pas
Eh bien, l'ineffable M. Woeste vient de dé
poser un projet de loi supprimant, pour les en
fants qui veulent se mariersans le consentement
LE PROGRES
TIRES ACQUIRIT EUNDO.
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00.
Idem. Pour le restant du pays7-00.
Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20.
INSERTIONS Annonces: la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames: la ligne, fr. 0-25.
Insertions: judiciaires la ligne un franc.
Pour les annonces de France et de Belgique s'adresser l'Agence Havas, Bruxelles, 89,
Marché aux Herbes.
Reichstag
Nouveau
Ancien
Centre
102
110
Nationaux-libéraux
102
50
Conservateurs
82
76
Parti de l'empire
35
31
Progressistes
34
67
Alsaciens-Lorrains
15
15
Polonais
15
16
Socialistes
11
25
Démocrates.
0
6
Danois
1
1
397
397
Huit députés du centre qui sont restés sur le
carreau, voilà donc, pratiquement, tout l'effet
qu'a produit jusqu'à présent l'intervention de
8