N° 28. Dimanche,
JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
47e ANNÉE.
10 Avril 1887.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
vires acquirit echdo.
Ypbes, le 9 Avril 1887.
LES PEINTURES DELBEKE.
Le Conseil Communal, dans sa séance du 2
Avril dernier, a décidé de confier la continuation
des fresques dans l'aîle sud-ouest des Halles
M. Delbeke.
Voilà donc la fin de cette campagne tourmen
tée, péripéties diverses, inattendues et dont les
fastes de l'art ne présentent pas de second exem
ple.
Nous croyons utile, pour l'édification du pu
blic de donner in-extenso les pièces principales de
ce long procès. Rappelons d'abord que les deux
panneaux Delbeke avaient été approuvés par la
Commission des Monuments. D'ordinaire, disons
invariablement, cette sanction suffit. A Ypres,
il n'en fut pas de même; une grande partie du
public se refusa catégoriquement se rallier
l'avis de ce Collège. Mais cette négation ne fut
pas une solution et cependant il en fallut une.
On en appela donc un groupe d'artistes dont
l'autorité, dans la pensée de l'auteur, devait in
failliblement rassurer ceux qui, sans parti pris,
ne demandaient qu'à s'éclairer, en même temps
qu'elle eût ramené dans la modération ceux qui
dans cette question controversée apportaient une
passion aveuglante. Ce groupe, composé de
MM. Markelbach, Van Camp, Jos. Stallaert,
Hermans, Serrure, Jean Verhas, de Schamphe-
leer et P. De Vigne, arriva en notre ville dans
les premiers jours de Novembre 1886. Nous don
nons son rapport
Bruxelles, le 2 Décembre 1886.
A Messieurs Van Meule, Bourgmestre, et Th. Cornette,
Messieurs,
Faisant partie du groupe d'artistes de Bruxel
les qui a pris cœur d éveiller l'attention du
Gouvernement et de l'Autorité Communale
d'Ypres sur la valeur d'un artiste méconnu jus
qu'à ce jour, je suis heureux de pouvoir me
joindre mes collègues pour saluer l'œuvre que
nous avons été appelés examiner récemment
dans votre ville.
Les deux panneaux de peinture murale dont
l'exécution fut confiée titre d'épreuve au pein
tre Louis Delbeke, constituent, mon avis, la
tentative la plus heureuse de peinture monu
mentale qui ait été faite dans notre pays.
Par le caractère, l'harmonie et les moyens
sobres d'exécution,ces productions se rattachent
aux grandes époques d'art où une entente par
faite régnait entre l'architecture et la peinture
et dont les traditions sont perdues depuis la Re
naissance.
Delbeke a scrupuleusement observé les lois
fondamentales de cet art difficile, qui exige des
aptitudes spéciales, la peinture architectonique.
Il est pénétré de ce principe, aujourd'hui ac
cepté, qu'une décoration picturale destinée un
édifice doit être conçue d'après d'autres règles
qu'un tableau mobile. Mais malgré l'éclatante
vérité de ce principe, personne de nos jours n'a
eu le talent ou la hardiesse d'en faire 1 applica
tion.
Il serait donc hautement désirable Mes
sieurs, dans l'intérêt de l'art national, que cet
artiste qui vient de donner une preuve si évi
dente de maîtrise puisse être appelé poursui
vre une œuvre dont les données sont en rapport
intime avec l'édifice grandiose qu'elle est desti
née compléter.
m II serait souhaiter que l'Administration
Communale d'Ypres, au sein de laquelle Delbeke
a rencontré de si nobles protecteurs, puisse con
tinuer prêter son appui intelligent cet artiste,
sans se laisser émouvoir par la critique incon
sciente qui s'acharnera longtemps encore sur une
œuvre conçue absolument en dehors de la rou
tine.
n Que la liberté la plus complète soit laissée
Delbeke dans l'exécution de son programme
qu'aucune pression administrative n'agisse sur
lui et un jour la ville d'Ypres possédera une
œuvre d'art monumental que le pays entier lui
enviera.
«Veuillez agréer, Messieurs, l'assurance de ma
haute considération. Paul DE VIGNE.
u P. S. Une lettre collective signée par tous
les artistes du groupe suivra la présente missive.
D. V.
Bruxelles, lr Décembre 1886.
Messieurs,
Le groupe d'artistes qui s'intéressent l'œu
vre de Monsieur Delbeke en voie d'exécution,
après une visite faite aux Halles d'Ypres dans le
but d'y examiner consciencieusement ses deux
panneaux, a l'honneur de vous adresser le résu
mé des impressions que cet examen lui a laissées.
n S'il est donné l'artiste de poursuivre son
œuvre dans les conditions de calme et de sécu
rité indispensables au développement d'une
grande idee, il y a lieu de croire qu'il laissera
sa ville natale un beau spécimen de peinture mo
numentale voir les deux premiers panneaux
si sobres d'aspect, et d'allure si originale, qu'il
vient d'exécuter, il semble que l'architecte du
monument et l'artiste qui le décore se soient
concertés pour réaliser un tout harmonieux et
complet. Le monument conserve son caractère
propre, rehaussé de richesses de colorations qui
font corps aveo luisans altérer l'aspect de ses
assises m la logique de sa puissante charpente.
En restant dans l'esprit du parvis de la cathé
drale de Sienne qui, au début, avait été proposé
comme modèle, l'artiste a su donner ses pan
neaux le chatoiement nécessaire leur destina
tion, grâce au coloris particulier aux peintres de
race flamande. L'imprévu des relations de tons
ne nuit nullement l'unité nécessaire, il laisse
les objets discrètement leur plan et ne cherche
Êas dissimuler la surface plane qu'ils couvrent,
ien ne rappelle ici la peinture de chevalet, ses
reliefs et ses profondeurs.
Vous le savez, Messieurs, d'après le conseil
Judicieux qu'en ont donné Messieurs Beyaert et
îalat, membres delaCommissiondes Monuments,
les panneaux seront reliés entre eux par une
suite non interrompue de motifs décoratifs qui
ajouteront l'intérêt des scènes historiques.
Cette modification au projet primitif a ouvert un
champ nouveau la fertile imagination de M.
Delbeke.
Pour qu'il poursuive son œuvre avec un suc
cès égal celui que nous constatons aujourd'hui,
pour qu'il en surmonte les difficultés, sans sortir
de son programme, il importe qu'il conserve
une complète liberté d'action et qu'il n'ait pas
craindre quand il reprendra ses pinceaux d'a
voir encore les abandonner. Nous sommes per
suadés, Messieurs, que votre bienveillance éclai
rée assurera ce résultat et qu'encouragé par
vous, l'artiste réalisera toutes vos espérances et
se montrera la hauteur de la belle entreprise
que vous avez confiée son talent.
Recevez, Messieurs, l'expression de nos sen
timents de haute considération.
Jos STALLAERT; C. YAN CAMP HER
MANS; Ch. MARKELBACH; Paul DE VIGNE;
Jean VERHAS SERRURE Auguste, m
M. de Schampheleer, absent au moment où
cette pièce fut rédigée Bruxelles, écrivit quel
ques jours plus tard M. le Bourgmestre pour
exprimer tout son regret de n'avoir pas eu l'oc
casion de signer le rapport ci-dessus, et qu'il
se faisait un devoir de déclarer qu'il s'y ralliait
sans aucune réserve.
Cependant ce rapport, tout explicite qu'il fût,
ne convainquit pas plus que l'approbation de la
Commission des Monuments. Comment sortir de
là Un second groupe d'artistes, encore de pre
mier ordre, se constitua et vint son tour ap
porter l'examen de ces fresques le poids de son
autorité. Ceci eut lieu le 6 Janvier dernier.
Voici son rapport adressé l'Administration
Communale, suivi d'une lettre de M. Denduits
de Gand
Courrières (Pas-de-Calais), 6 Janvier 1887.
Le 4 Janvier 1887, les artistes dont les noms
suivent Mlle E. Beernaert, MM. Slingeneyer,
A. De Vriendt, E. Smits, J. Millery, C. Meunier,
Jules Breton, (français), De Haas, (hollandais),
Samyn, (archit.), se sont réunis en commis
sion dans les galeries des Halles, Ypres, afin
d'y donner leur avis sur les deux peintures mu
rales exécutées par M. Delbeke.
77 Après avoir hautement manifesté leur admi
ration pour le vaste et incomparable monument,
ils se sont immédiatement occupés de l'objet de
leur réunion.
77 Disons, tout d'abord, que s'il y avait eu pour
eux quelque dérangement venir d'assez loin,
ces artistes trouvèrent un vrai dédommagement
dans les charmantes impressions qui leur furent
réservées, par la contemplation du superbe édi
fice, et, enfin, par la chaude et unanime appro
bation qu'ils exprimèrent, sans hésiter, devant
l'œuvre qu'ils avaient juger.
77 En effet, ces artistes, de tendances diverses,
Sroclamèrent d'une seule voix la parfaite réussite
e cette fresque, tant il est vrai qu'une œuvre
portant le cachet du véritable art, s'impose
tous ceux qui l'aiment ou le cultivent, n im
porte sous quelle forme car si les manifesta
tions de cet art sont variées l'infini, rien n'é
clate plus clairement que sa présence aux yeux
des initiés.
77 La grandeur, la naïve simplicité, l'admirable
harmonie des couleurs, la justesse des attitudes
LE PROGRES
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Marché aux Herbes.
Échevin des Beaux-Arts de la mile d'Ypres.
A Messieurs les Bourgmestre, Échevins et Membres
du Conseil Communal d'Ypres.
Rapport sur les Peintures exécutées par Monsieur
Delbeke aux Halles d'Ypres.
