X° 43. Jeudi,
47e ANIMÉE
2 Juin 1887.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Revue politique.
La crise ministérielle est enfin close Paris.
M. Rouvier a réussi constituer un cabinet
d'affaires dont les éléments sont pris dans les
groupes de l'union des gauches et de la gauche
radicale. Il se peut que le nouveau ministère ait
quelque durée comme cabinet d'affaires, mais il
semble peu probable qu'il fasse faire un progrès
la politique de concentration dont il a tant été
question dans ces derniers temps. Il est remar
quer que sauf M. Flourens, aucun des membres
de l'ancien cabinet ne figure dans le nouveau.
Le nouveau cabinet se présentera demain de
vant les Chambres.
La politique chôme en ce moment en Angle
terre, la Chambre des communes s'étant ajour
née au 6 Juin, pour les vacances de la Pentecôte.
Cependant, les événements ne se taisent pas
comme le monde parlementaire. En Irlande, on
procède en ce moment de nouvelles expulsions
de fermiers insolvables, dans des conditions qui
sont de nature entretenir l'agitation et l'en
venimer. A Bodyke, par exemple, où il s'agissait
de faire déguerpir une fermière du colonel
O'Callaghan, il a fallu mettre sur pied une véri
table expédition militaire pour exécuter le décret
d'expulsion. Comme d'habitude, toute la popu
lation avait pris parti contre le propriétaire et la
force armée et des rixes se sont produites. Au
moment où les huissiers allaient instrumenter le
sousrsherif qui se trouvait la tête de l'expédition
est tombé en syncope, par suite de l'émotion que
lui causaient les scènes de désordre les paysans
ont poussé des cris de triomphe, saluant cet
accident comme une manifestation du doigt de
Dieu et l'expulsion projetée a dû être aban
donnée.
On pourrait citer bien d'autres exemples pour
prouver que l'agitation irlandaise, loin de dé
croître. s'accentue chaque jour.
Une agitation moins grave, mais qui a néan
moins son importance, est celle qui règne dans le
pays de Galles propos de la dîme payée au
clergé par les paysans pour l'entretien du culte
anglican. Nous en avons déjà parlé plusieurs
reprises et nous avons signale le projet de loi
Îirésenté par lord Salisburv pour y mettre fin en
ibérant le paysan de la dîme pour la mettre
charge des propriétaires du sol. Comme nous
l'avions fait pressentir, le projet de loi en ques
tion n'a nullement donné satisfaction aux paysans
qui savent que les propriétaires se dédommage
ront facilement de la dîme, en augmentant les
loyers d'autant. Le mécontentement des fermiers
du pays de Galles se traduit par une recru
descence d'agitation.
Ypbes, le lr Juin 1887.
Les cléricaux ne sont pas h leur aise, ou ils
feignent une panique qu'ils n'éprouvent pas,
pour justifier des mesures extrêmes de répres
sion, eux qui n'ont pas su en prendre pour
prévenir les troubles.
Sans vouloir rien exagérer, dit le Bien
Publicsans prendre au sérieux surtout les
rumeurs alarmistes trop facilement accueil-
lies et répandues par la presse libérale, on
peut dire, toutefois, que la situation présente,
au fond, n'est ni moins grave, ni moins ten-
due qu'en 1848.
Depuis 1848, dit, de son côté, l'Impartial
de Gandla situation du pays n'a été une
seule fois aussi grave.
Il y a une différence marquée entre les deux
époques
En 1848, M. Delfosse a pu dire en pleine
Chambre La liberté, pour faire le tour du
monde, n'a pas besoin de passer par chez nous.
Le libéralisme était au pouvoir. Il avait ren
versé le cabinet des Six Malou, relevé les Flan
dres de l'état misérable dans lequel elles étaient
tombées sous la domination de ce ministère,
et les cléricaux, affolés, suaient la peur.
Grâce aux réformes que le ministère Rogier-
Frère avait réalisées, la révolution ne passa pas
par chez nous.
Aujourd'hui que nous sommes dans une si
tuation diamétralement opposée, nous épar-
gnera-t-elle.
Commission du Travail.
La Commission a abordé la question des
caisses particulières de secours.
Cette question a donné lieu un assez long
débat auquel ont pris part mm. dejace, dénis,
La commission adopte le système d'après le
quel tout patron, occupant au moins cinq
ouvriers assurés conformément au projet de loi
sur les assurances ouvrières contre les accidents
du travail, sera tenu d'organiser les moyens de
pourvoir sans retard tous les soins médicaux
résultant de ces accidents.
Les patrons soumis cette obligation pour
ront ou recourir aux caisses particulières de
secours institution créer, ou s'affilier des
compagnies d'assurances de secours tempo
raires.
Sur les observations de MM. Dejace, Dauby,
Jacobs et Brandts, il est admis que, pour éviter
tout risque du côté des patrons comme du côté
des ouvriers, les fonds de la caisse de secours
devront être déposés.
En résumé, le patron sera chargé de tous les
frais médicaux quelconques penaant les trois
mois qui suivront l'accident. Passé ce délai, si
I accident a d'autres conséquences, ce sera l'af
faire de la caisse d'assurance.
L'administration de ces caisses de secours
sera dévolue des ouvriers délégués selon un
mode d'élection et des conditions d'éligibilité
fixer. Le patron aura le droit de se faire repré
senter au conseil d'administration et d'en récla
mer la présidence.
Dans tout nouvel établissement le conseil
d'administration pourra être choisi parle patron
pour les trois premiers exercices. (Adopté.)
La discussion s'est ouverte ensuite sur les
caisses communes de prévoyance en faveur des
ouvriers mineurs.
Il faut que le système admis le soit pour le
pays tout entier. On a repoussé la participation
de l'ouvrier. Il faut s'en tenir ce principe et en
accepter toutes les conséquences.
La commission, une très petite majorité,
décide que les ouvriers participeront l'alimen
tation de la caisse de secours.
Cette proposition de M. Sabatier, appuyée
par M. Jacobs, a été adoptée.
Documents parlementaires.
Le projet de loi qui enlève aux huissiers du
juge ae paix le monopole des exploits devant
les justices de paix est un joli exemple des re-
LE PROGRES
vires acquir1t ecnro.
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harzé et mor1sseaux.
m. dauby propose qu'aux compagnies d'assu
rances on substitue les sociétés de secours
mutuels.
m. harzé demande que les dispositions de l'ar
ticle 3 de la proposition étenaent les frais du
service chirurgical tous les frais médicaux et
pharmaceutiques.
m. jacobs propose d'appliquer l'article cette
expression générale; traitement des blessés la
charge du patron.
m. harzé s'y rallie. (Adopté.) L'article 4 et les
suivants, d'après lesquels les différentes caisses
particulières de secours pourront être syndi
quées par commune ou par groupes d'industries
similaires, sont adoptés.
m. harzé déplore l'imprudence des ouvriers
des mines. Il demande pour les caisses de pré
voyance la personnalité civile.
m. dénis proteste contre les retenues sur les
salaires.
m. sabatier insiste sur la nécessité de mettre
les patrons et les ouvriers en contact dans l'ad
ministration de ces caisses. C'est une faute de la
part des patrons de se séparer des ouvriers.
m. dauby revient sur la nécessité de se servir,
même en les réformant, des institutions de pré
voyance existantes.
m. morisseaux dit qu'il n'y a là qu'une ques
tion de forme. Il rappelle la discussion récente
entre M. Montefiore-Levi et Sainctelette sur la
question des assurances.
m. jacobs fait observer ce sujet que le vote
de la commission sur la forme de l'assurance
ouvrière engage l'avenir même en ce qui con
cerne l'industrie houillère.
m. morisseaux considère la question au point
de vue de la quotité que chaque charbonnage
aura verser. Cette industrie est déjà tellement
écrasée que faire tomber sur le patron tout seul
la charge de la caisse de secours et celle encore
de la prime d'assurance, c'est vouloir l'impos
sible. L'honorable membre, sur une observa
tion de M. Jacobs, rappelle avoir déjà soutenu
cette thèse dans la discussion des assurances
ouvrières. D'ailleurs, comment éviter, dans ces
conditions, la répercussion sur les salaires
m. pirmez, président, expose la question de
proportionnalité entre les versements des diffé
rents charbonnages.
m. sabatier ne veut pas que les charbonnages
mal dirigés puissent rendre les autres responsa
bles de leurs imprudences. Ce serait un encou
ragement la négligence. Une contribution
supplémentaire de 50 p. c. sera dévolue aux
charbonnages dont les versements n'auront pas
atteint le montant des secours versés.