49. Jeudi, 47e ANNÉE 23 Juin 1887 JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Le Peuple et l'Ignorance. Jésuite. 6 FRANCS PAR AN. PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE. r4~\ v Af Qt cssîiï Les personnes qui prendront un abon nement au PROGRÈS partir du lr Juillet prochain, recevront le journal gratuitement jusqu'à cette époque. L'effervescence du peuple et le mouvement insurrectionnel des ouvriers nous fait présager l'avenir sous de bien lugubres couleurs. La situation actuelle rappelle exactement celle de 1848. Alors comme maintenant, la voix de théoriciens audacieux, une partie de la foule surexcitée discutait couramment l'éven tualité d'un prochain partage de biens. La propriété était par plus d'un esprit aigri, qua lifié de vol et l'on prédisait bref délai le re tour la terreur. Le pays a doublé le cap des tempêtes, parce qu'alors la nation était con duite par des pilotes expérimentés, qui, dans le but de résister l'affreuse tourmente, surent en imposer leurs sentiments pour faire au progrès, les sacrifices les plus urgents. Une politique de réaction comme celle dont nous subissons actuellement l'odieux joug, ne produira pas, tant s'en faut, d'aussi heureux résultats; et ce n'est pas par une armée de moi nes paresseux autant que cupides et ignorants, que nous parviendrons apaiser l'orage qui gronde sourdement l'horizon lointain. II faut le reconnaître, les classes laborieuses mais surtout ouvrières, traversent en ce mo ment une période de crises aiguës et intenses, sans précédent dans les sombres annales du paupérisme. La grande coupable des excès qui se commet tent, c'est la misère qui affole toutes les facul tés de l'intelligence. La conscience s'obscurcit, la notion du devoir, du respect de ses sembla bles et de la propriété d'autrui, disparait quand l'estomac, affaibli par de longues et cruelles privations, réclame en vain sa maigre et dure pitance. Cependant, les souffrances incessantes des classes nécessiteuses ne suffisent pas pour ex pliquer les perturbations qui se produisent elles constituent l'aiguillon des appétits, elles irritent les passions, donnent libre essor aux in stincts pervers, plus ou moins endormis, qu'une volonté éclairée et forte, pourrait seule conte nir et diriger sûrement. A notre avis, l'une des principales causes de la démence populaire, c'est l'ignorance grossière dans laquelle les gouvernements surtout ca tholiques laissent croupir les masses incul tes, parfois imbues de malsains préjugés. Aussi lorsque nous assistons aux mouvements insurrectionnels d'une populace en efferves cence, c'est surtout ceux qui ont la mission et le devoir d'assurer la sécurité et le bien-être du pays, que nous devons accuser. Ce sont eux que l'on devrait traduire en justice, plutôt que louvrier inconscient qui est poussé en avant par la faim et la misère. Dans tous les pays du monde, la majeure portion de I aristocratie se montre au plus haut point hostile la diffusion de l'enseignement primaire, qui cependant rend seul un peuple véritablement grand. Aveuglement stupide, haine insensée et bien dangereuse Mais, somme toute, de quoi nous plaignons- nous Ces gens, en définitive, sont consé quents avec eux-mêmes Us attaquent et ruinent lorsqu'ils le peuvent l'enseignement offi ciel, parce que pour eux, l'idéal est la crétini— sation de l'enfanceetleur devise est: a Abêtissons les masses pour mieux les asservir notre do mination. Plus d'école Plus d'instruction Tous igno rants t Voilà leur rêve Ils parviendront peut-être endormir le peuple, mais pour combien de temps Et que le réveil sera terrible I [Avenir). Si on n'était pas édifié sur la valeur des con victions de la plupart des hommes du parti clérical, la façon dont M. Woeste a essayé de justifier son vote approbatif en faveur des forti fications de la Meuse désillierait les yeux des moins prévenus. M. Woeste a dit crûment qu'il votait l'aggra vation des charges militaires parce que le projet était l'œuvre du ministère clérical et il a laissé entendre, d'une façon presque cynique, qu'il ferait le contraire si un jour, un ministère libéral se voyait forcé de proposer, comme con séquences, du projet en discussion, des aug mentations de charges militaires. C'est n'y pas croire, mais c'est comme cela 1 La preuve nous la trouvons aux Annales parlementaires où l'incident est rapporté comme suit Nouvelles locales. Les Membres de la Magistrature et du Barreau de l'arrondissement d'Ypres ont offert Samedi dernier un Banquet Monsieur J. Iweins, Pré sident du Tribunal, l'occasion de sa promotion au grade d'Officier de l'Ordre de Léopold. Une table artistement dressée, des mets déli cieux des vins exquisdes conversations agréa bles entre amis heureux de se revoir, formaient lesélémentsdecette réunion intime etcharmante, dont tous les convives conserveront le plus doux souvenir. Le Banquet était présidé par Monsieur Dusil- lion, Juge le plus ancien, ayant sa droite Monsieur J. Iweins, et sa gauche Monsieur Bossaert, le doyen des avocats ae notre Barreau. Les toasts furent courts et peu nombreux ils n'en étaient que meilleurs. Monsieur Dusillion, en buvant la santé de Monsieur le Président Iweins, a rendu hommage, dans les termes les plus heureux, aux qualités du héros de la fête qui se voyait comme un père de famille entouré de ses enfants. Ses paroles chaleureuses furent accueillies par un tonnerre d'applaudissements et tous, le verre en main, allèrent auprès de Monsieur le Président Iweins, saluer en lui l'hom me affable et sympathique dont on venait de faire un si juste éloge. Monsieur Iweins que cette manifestation spontanée avait profondément ému, retraça dans sa réponse les phases diverses de sa carrière ju diciaire déjà longue, et en exprimant la légitime ressortir que d'autres, trop longtemps oubliés, devaient aussi recevoir leur recompense; s'a- dressant spécialement Maître Bossaert, il fit un brillant éloge du doyen de l'Ordre des Avo cats, et il y associa le Barreau tout entier. Le discours de Monsieur le Président Iweins appela quelques paroles de remercîment de MM. Bossaert et Colaert. Enfin Monsieur Iweins prit une dernière fois la parole pour rendre hommage un ancien et digne Magistrat Monsieur le Président honoraire Sartel, retenu chez lui par l'âge et les infirmités, et dont les éminentes qualités venaient aussi de recevoir une nouvelle et juste récompense par sa promotion au grade d'Officier de l'Ordre de Léopold. Pendant toute la durée du Banquet, l'excel lente musique des Pompiers, sous la savante LE PROGRES vires acqdirit eundo. ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00. Idem. Pour le restant du pays7-00. tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20. INSERTIONS Annonces: la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames: la ligne, fr. 0-25. Insertions Judiciaires la ligne un franc. Pour les annonces de France et de Belgique s'adresser l'Agence Havas, Bruxelles, 89, Marché aux Herbes. Ypbes, le 22 Juin 1887. bans ces circonstances, a dit M. Woeste, la Chambre comprendra que le vote alliimatif que je compte émettre sur le projet, une condition que j'indiquerai tout l'heure, que ce vote aflirmatif, dis-je, sera plutôt un vote de confiance dans le cabinet qu'un acte de foi clans le mé rite de son projet. (Interruptions gauche). M. Bara. Vous posez la question de cabinet pour le ministère M. Woeste. Mon vote aura, du reste, une portée très limitée. Comme je viens de le dire, pour moi les fortifica tions de la Meuse ne sont pas autre chose que l'équivalent des fortifications de 1859, celles-ci étant devenues ineffica ces par les progrès de l'artillerie. Ces fortifications d'après les déclarations même du gouvernement, ne doivent en traîner aucune aggravation je les vote dans ces conditions et sous cette réserve, et si, plus tard, on vient nous dire Vous avez voté les fortifications de la Meuse et, comme conséquence de ces fortifications, vous êtes tenus de voter les aggravations qui vous sont proposées elles ne le seront pas par le ministère actuel, mais elles pourraient l'être par un autre ministère, je serais en droit de ré pondre non.... M. Bara. C'est cela M. Woeste. mon vote a été nettement précisé, la portée en a été clairement indiquée... M. Bara. Quelle morale M. Woeste. je n'ai pas entendu aller au-delà de ce que j'ai déclaré. M. Bara. Quelle morale! C'est une morale de jésuite! Vous refuserez de voter les hommes et les dépenses après avoir voté les fortifications qui, d'après vous même, les nécessiteront M. Woeste. M. Bara dit que c'est une morale de jé suite. (Bruit). M. Bara. Oui. M. Woeste. Je discute sérieusement.... M. Bara. Et je qualifie sérieusement votre attitude M. Woeste.Je discute sérieusement dans une Cham bre composée d'hommes sérieux; j'ai le droit d'expliquer loyalement mou vote, et je ne répondrai pas, je ne m'a baisserai pas répondre l'interruption de l'honorable membre. (Interruption gauche). M. Bara. Mais le mot reste M. Woeste. Oui, il reste votre passif, pas au mien. (Bruit et interruptions). M. le Président. Veuillez faire silence, Messieurs. M. Bara a trouvé le mot juste: On n'est pas plus jésuite

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