Nos 63-64. Dimanche,
14 Août 1887.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
47e ANNÉE.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Le meilleur chocolat catholique.
Le Journal de Bruxelles proteste énergique-
ment, dans l'intérêt du maintien de nos institu
tions constitutionnelles, contre les attaques
dont la personne inviolable du Roi est chaque
jour l'objet dans la presse cléricale et termine
son article en ces termes
C'est au clergé surtout que notre protesta
tion s'adresseau clergé que nos adversaires
représentent souvent comme l'ennemi né de nos
institutions nationales. Nous adjurons, comme
citoyen, les membres du clergé belge, si dévoué
ses devoirs et au bien-être de la patrie belge,
de ne pas se laisser induire en erreur par des
attaques inconsidérées, persévérantes et péril
leuses contre la personne du Roi et le prestige
de la Couronne.
Si le clergé est si dévoué ses devoirs et au
bien-être de la patrie, pourquoi est-ce surtout
lui que le Journal de Bruxelles adresse sa
protestation Il nous semble que le clergé ne
doit pas être très flatté de l'attention et que
c'est plutôt lui qui aurait le droit de protester
en disant: Adressez vos adjurations aux classes
révolutionnaires t
Mais le clergé comprendra demi-mot. C'est
comme si on lui disait: Défiez-vous du chocolat
VVoeste, c'est ici qu'on trouve le vrai chocolat
Beernaert, le seul chocolat catholique qui puisse
entretenir la vie constitutionnelle et développer
les forces nationales. M. Beernaert, il est vrai,
est un peu ce qui s'appelle un converti au point
de vue politique mais M. Woeste l'est tout
fait, lui, au point de vue religieux, et s'il est
aujourdhui f'aide-de-eamp du Soldat du
Pape rien ne prouve qu'il ne passera pas
aussi facilement de l'Ecriture au Coran que de
la Bible l'Ecriture prenez donc le chocolat
Beernaert
Voilà ce que le clergé comprendra, ici, en
Belgique où l'on connaît le dessous des cartes.
Mais que dira-t-on l'étranger en lisant
l'article du Journal de Bruxelles adjurant les
membres du clergé de ne pas se laisser induire
en erreur? Evidemment on en conclura que le
clergé belge est miné lui-même par la propa
gande révolutionnaire et qu'il est prêt passer
du côté des révoltés comme en Irlande
On a vu des rois épouser des bergères, mais
il est rare que l'on voie des institutrices épou
ser des princes. A en croire les tables de l'Elat-
civil, dressées par les journaux cléricaux, ce
dernier cas serait cependant fréquent. Les
maîtresses d'école rouleraient sur l'or, et en
présence de leur opulence on doit leur suppri
mer le traitement d'attente que la pitié gouver
nementale leur a jeté, comme un os ronger,
en les mettant la porte des établissements
d'enseignement pour faire place aux institutri
ces non diplômées.
Les instituteurs, chefs de famille, qui ne
peuvent vivre de l'aumône qu'on leur fait, de
quelques centaines de francs et qui désirant se
payer le luxe d'un équipage avec livrée, ont
sollicité un poste de saute-ruisseau dans une
maison de commerce, seront aussi sevrés de
leur traitement d'attente pour cause de luxe
effrené.
Plusieurs croisades ont déjà été faites contre
cescrésus, et voilà que, de nouveau, on pro
clame la guerre sainte sous la conduite du gé
néral en chef Thonissen, dont l'ordre du jour
annonçant de nouvelles hostilités, est publié
par la Patrie en ces termes
('.e n'est pas sans verser d'abondantes larmes
que le grand maître de l'instruction détruite,
se résignera entamer cette campagne, car
comme le dit Diogène
C'est rafraîchissant mais peu nutritif, et les
victimes du doux professeur ont hâte de chan
ger de régime.
Singulière situation faite notre époque
d'égalité et defraternité. Le czar n'a pas le
moindre frisson de fièvre ou de peur que l'Eu
rope ne tremble, et l'Empereur d'Allemagne
n'éternue pas sans que les nations éprouvent,
l'instant, le besoin de se moucher.
On arme, on se fortifie, dans la perspective
de grandes luttes guerrières, échéances indé
terminées, pouvant dépendre de circonstances
qui ne se produiront peut-être pas. Mais, en
attendant, la prudence exige qu'on soit prêt
tout événement. Ce que cette paix armée coûte
aux Etats est immense.
La science et l'industrie se font les complices
de cet armement général sur mer et sur terre
la première invente des projectiles explosifs,
chaque jour plus violents; la seconde cuirasse
les navires et les rend invulnérables, car on se
prépare, sur mer comme sur terre, un branle-
bas général.
La question est de savoir quelle nation sera
maîtresse de la mer, au moyen des projectiles
les plus capables d'entamer les navires les
moins vulnérables.
Eh bien! une découverte nouvelle, faite par
un homme de génie, qu'une nation tiendrait
secrète, pourrait renverser toute l'économie
meurtrière et triompher des adversaires, sans
que la valeur des forces et du courage y soit
pour rien. Ce sont là des jeux de.la guerre et
du hasard.
Et dire que toutes ces précautions n'arrêtent
pas la marche du temps et n'empêchent ni
Guillaume-le-Victorieux, de s'affaiblir, ni le
Roi Guillaume de Hollande de laisser tomber
de ses mains défaillantes la royauté en que
nouille.
Au milieu de ces agitations, de ces appré
hensions, de ces doutes et des bruits de guerre
entre l'Allemagne et la Russie, un projet surgit
qui se rattache celui de M. de Laveleye, sur
1 arbitrage international. M.deMolinari l'expose
dans le Times sous ce titre la Ligue des Neutres.
D'après ce projet, toute puissance qui cher
cherait dans une guerre inique la sanction de
son ambition trouverait sur son chemin la
Ligue des Neutres, dont la mission serait de
faire prévaloir le droit sur la force.
Au moment où l'Allemagne cherche de nou
veau déchaîner la guerre, ce qui oblige l'Eu
rope tenir sous les armes un effectif de paix
de près de quatre millions d'hommes qui, en
temps de guerre, peuvent être portés près de
treize millions, la Ligue des Neutres serait la
sanction du tribunal arbitral.
La force morale, dit M. de Molinari, ne
)eut avoir raison de la force matérielle qu'en
ui opposant une force matérielle supérieure.
ïtant donné que la guerre est devenue une
nuisance générale les neutres n'ont-ils pas
le droit d'empêcher cette nuisance de se pro
duire
La raison dit: oui. Mais combien d'obstacles
vaincre avant d'arriver amener un résultat
aussi désirable?
M. Beernaert a prononcé Lundi, avant la
clôture de la session, une imprudente parole
ropos d'un amendement proposé par M. de
tuers pour l'achat de deux nouvelles malles,
le ministre a dit
Je n'accepte pas l'amendement de M. de
Stuers; il me permettra de le considérer comme
un amendement purement électoral.
On aura souvent, avant les élections d'Octo
bre et de 1888, lui rappeler ce propos qui se
trompe d'adresse et qui va droit ses amis.
Sous la rubrique Moorseele nous lisons dans
le Courrier de Courtrai de Dimanche dernier
les lignes suivantes
Les Dames Religieuses de l'enfant Jésus,
viennent d acquérir le château de Moorseele,
ancienne propriété de Mme Debacker.
Bon ça! Dans le bon vieux temps,ce ne furent
que couvents et maisons que la gent monacale
acheta; aujourd'hui ce sont des châteaux, et
pas des châteaux... en Espagne, s'il vous plaît.
Le Patriote, un enfant terrible, divulgue un
intéressant détail du ménage parlementaire
Pas mal pour des gens qui pérorent contre
l'alcoolisme et votent des lois contre l'ivresse.
LE PROGRES
VIRES ACQCIRIT E0N1K).
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Marclié aux Herbes.
Ypres, le 13 Août 1887.
11 résulte d'une enquête qui a élé faite très soigneuse
ment et très impartialement, que bon nombre d'institu
teurs gueux, pourvus de traitements d'attente, sont en
même temps titulaires de places très bien rétribuées. Nous
sommes fondé croire que ces cumulards d'un nouveau
genre n'en ont plus pour longtemps émarger officielle
ment et qu'une razzia énergique sera faite parmi eux. Il en
est temps.
Thonissen a la fibre tendre
Le bon professeur de Louvain
Fait aceroire qui veut l'entendre.
Qu'il mêle des pleurs son vin,
Quand le pays est en alarmes,
Villes, villages et hameaux,
Thonissen nous offre ses larmes
Comme remède tous maux.
p oo^gfroo-o-
Le coup de l'étrier. Les représentants ont joyeuse
ment fêté aujourd'hui leur dernière séance de la session.
Il restait avant la séance 7 litres de cognac.
Ils y ont passé tous
Quant au nombre total de grogs bus par nos honorables
pendant les dix mois de session, il s'élève au cubage total
de 750 litres de fine Champagne