N° 70. Dimanche,
47e ANNÉE.
4 Septembre 1887.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Revue politique.
Il est bien difficile de constituer un ministère
en Bulgarie. Du moins les hommes les plus consi
dérables s'y emploient-ils vainement. M. Stam-
bouloff avait accepté la mission de le former,
mais MM. Stoïlofl' et Natchevitch ont jusqu'ici
refusé d'entrer dans quelque combinaison que
ce fût cependant, M. Stamboulofl insiste pour
obtenir leur concours.
L'effet des dernières discussions relatives
l'Irlande se fait sentir en Angleterre. On en était
arrivé une sorte d'apaisement, mais ces discus
sions et leur résultat ont tout remis en question.
Les choses ont même pris un caractère plus
grave qu'auparavant, car le cabinet pouvait agir
ou s'abstenir il avait l'alternative tandis que,
maintenant qu'il est armé pour une action vigou
reuse, il ne peut plus hésiter sans être taxé de
faiblesse. Ne voit-on pas qu'en Irlande il est
ouvertement bravé et mis au défi de donner la
sanction de la force sa politique
Il est certain qu'il ne se presse pas, bien que
la résistance s'organise et que ce soit le lord-
maire de Dublin, lui-même, qui annonce que
l'heure de la lutte a sonné. On a vu dans les
dernières dépêches jusqu'où les Irlandais pous
sent la résistance aux tentatives d'éviction des
propriétaires contre leurs locataires. On croirait
lire le siège d'une ville au moyen âge les agents
font le siège des maisons chambre par chambre,
et les assiégés se défendent en versant de l'huile
bouillante sur les assaillants et en les repoussant
coups de barres de fer. Parmi les blessés, qui,
dit-on, sont nombreux, on cite un membre du
Parlement.
Enfin, aujourd'hui même, on annonce qu'un
M. Orpen, propriétaire près de Killarney, a été
attaqué par les moonlichters dans sa maison. Des
coups de feu ont été tirés, mais l'on n'a arrêté
personne.
C'est seulement le 31 Août dans l'après-midi
que l'empereur d'Allemagne a pu quitter Babels-
berg. Il est de retour Berlin; un malaise qu'on
dit léger faillit cependant l'empêcher d'assister
aux exercices de la garde au Tempelhof. Le ma
laise a disparu et 1 Empereur a passé la revue,
mais il n'en est pas moins obligé de grands
ménagements.
Qui terre a, guerre a dit le proverbe, mais
il paraît que le mot s'applique aussi aux pêche
ries. Les pêcheurs italiens et les pêcheurs dal-
mates ne s'entendent pas mieux, quant
l'exercice du droit de peche, que les pêcheurs
belges et les pêcheurs anglais. Les deux gouver
nements, celui d'Autriche et celui d'Italie, qui
négocient en ce moment un traité de commerce,
ne semblent pas se laisser arrêter par l'opposi
tion des pêcheurs de Dalmatie ou de Chioggia,
mais il est assez curieux de voir les mêmes ques
tions s'élever en même temps dans la Manche et
dans l'Adriatique.
Ypues, le 3 Septembre 1887.
Le Fiasco de la Session.
Les excellentes réflexions qui suivent sont
empruntées l'Opinion d'Anvers
Maintenant que le rideau est tombé sur la
scène parlementaire, examinons les causes pre
mières du pitoyable fiasco de la session.
La principale réside dans l'hostilité sourde
des ministres révoqués contre leurs successeurs.
MM. Jacobs et Woeste conduisent la droite la
baguette. Sous l'empire des angoisses patrioti
ques qui agitent le Roi, le ministère, qui a de
bonnes raisons pour les partager, annonce avec
ostentation que les membres du cabinet sont
partisans de la réforme militaire. Aussitôt on
entend siffler le venimeux Woeste. Il signifie
la droite de repousser la réforme. M. Beernaert
s'empresse de tirer l'épingle ministérielle du jeu
et le tour est fait. Un pacte se conclut De 1 ar
gent, tant qu'on en demandera, de l'organisation
militaire, jamais l'indépendance du pays fût-
elle compromise.
C'est qu'il s'agit de préparer les élections
législatives. M. Woeste en fait l'aveu dépouillé
d'artifice. Il faut assurer avant tout le triomphe
des cléricaux.
Remplir la caisse, rendre égales les charges
militaires, c'est bon pour les libéraux. Les ca
tholiques, eux, se contentent de drainer les ca
pitaux, de faire le vide dans le trésor au bénéfice
de leurs amis et après eux la fin du monde.
Et chaque fois qu'une loi importante est
soumise aux délibérations de la Chambre, le
même jeu recommence. Le ministère se dérobe.
MM. Woeste et Jacobs sont les maîtres. Le grand
ministre s'incline.
Trop heureux de conserver leurs portefeuil
les ce prix, les membres du cabinet se font les
dociles exécuteurs des hautes oeuvres du clergé.
Lorsqu'on considère la composition de la
majorité cléricale, on est confondu de ce que l'on
y trouve. Des échappés de cour d'assises et des
tribunaux correctionnels. S'agit-il de relever le
prestige de ces honorables, qui ne sont honora
bles qu'à la chambre, vlan, l'un d'eux est bom
bardé ministre d'Etat. Et de plus fort en plus
fort, il ne suffit plus aux condamnés d'un mandat
parlementaire pour redorer leurs blasons ternis,
il leur faut l'apothéose. N'est-ce pas l'un de ces
honorables qui disait fièrement que les ques
tions d'honieur devaient se vider sur l'heure.
Ce qui distingue la droite et ses cornacs c'est
l'absence complète de morale et même de sens
moral.
Tous ces polichinelles sont dans la main du
clergé et ils obéissent aveuglément au mot
d'ordre. On comprend dès lors l'avilissement du
mandat législatif et l'impossibilité d'obtenir le
vote des projets dont l'épiscopat ne veut pas
Une mobilisation.
L'ordre de mobilisation du 17" corps français
(Toulouse), qui a été lancé de Paris le 30, 8
heures du matin, pour recevoir son exécution
ftartir du lendemain 31, porte qu'on mobilisera
es troupes actives de ce corps d'armée avec
tout leur matériel d'artillerie, de train, d'ambu
lance, ainsi que leur cavalerie au complet. Cet
essai de mise sur pied de guerre ne comporte
donc pas le rappel de la territoriale ni de la
reserve de la territoriale; il s'applique par
conséquent la réserve de l'armée active, c'est-
à-dire aux hommes de 20 29 ans ceux de
30 45 ans ne prennent point part l'essai.
Il sera curieux de savoir si toutes les opéra
tions se termineront endéans le temps voulu
(12 jours). Si l'on avait mobilisé la territoriale,
ce temps eut été porté 18 jours. On pourra se
faire une idée des forces de la France quand on
aura constaté quel a été l'effectif mobilisé du
17e corps. Il se rapprochera vraisemblablement
de 40 mille hommes. En multipliant ce chiffre
par 19 (nombre des corps d'armée) et en
doublant le produit pour y ajouter l'effectif de
l'armée territoriale, on obtiendra le chiffre total
approximatif que la France peut mobiliser pour
sa défense. Approximativement, ce chiffre se
monte un million cinq cent mille hommes,
sans compter les effectifs puissants de la ma
rine, de l'infanterie et de l'artillerie de marine.
Ces chiffres sont équivalents, sinon supérieurs
ceux de l'Allemagne.
Proportion gardée, si nous possédions des
institutions militaires modernisées comme les
autres pays, nous devrions pouvoir mobiliser,
eu égard la population, 200,000 hommes
moyennant notre budget actuel qui parvient
peine entretenir une armée mobilisable de
130,000 hommes.
Et tandis que chez nous il n'y a que les pau
vres gens qui soient obligés de marcher, en
France l'appel sous les drapeaux rallie tout le
monde, riches et pauvres, entraînés par un
admirable élan patriotique.
Vienne le moment, hélas où notre nationalité
soit menacée. Nous saurions ce qu'il en coûte
rait au pays d'avoir eu les cléricaux au pouvoir
l'heure fatale où de véritables hommes d'Etat
eussent dû courageusement s'imposer le devoir
patriotique de faire les sacrifices nécessaires
la sûreté de la défense nationale
La peine de mort.
La condamnation de Pranzini a ramené celte
question que beaucoup d'Etats ont tranchée, si
non par humanité, au moins parce qu'ils ont
compris que ces exemples sanglants qu'on
croyait de nature frapper de terreur ceux que
leurs mauvais instincts portent au crime,
étaient parfaitement inefficaces, et que l'écha-
faud, s'il est inutile, est une monstruosité, la
société étant assez forte pour se défendre contre
un seul individu qu'elle peut facilement isoler
pour l'empêcher de nuire.
La Belgique l'a compris une des premières,
et nous nous honorons d'avoir aidé gagner
cette campagne pour l'inviolabilité de la vie
humaine et Te droit que Dieu seul possède de
l'enlever, puisque c'est lui qui la donne.
La France n'a pas suivi notre exemple et les
crimes v sont plus fréquents que chez nous
l'on a fait cette remarque que le nombre en
augmente après chaque exécution, la tourbe
qui se roule autour de la guillotine y prenant,
comme les animaux féroces qui sentent la chair,
le goût du sang.
LE PROGRES
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Marché aux Herbes.
La Gazette de Moscou s'occupe de la question
bulgare elle conseille de ne se fier que tout
juste M. de Bismarck qui, dit-elle, a été le
courtier du traité de Berlin, dont le but était
d'arriver exclure l'influence russe des
Balkans Il y avait autre chose encore dans le
traité qui avait été précédé, ne le perdons pas
de vue, du traité de San Stephano. Or, ce traité
tendait, on se le rappelle, simplifier beaucoup
la question d'Orient.