LA LUTTE.
47e ANNÉE.
2 Octobre 1887.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
IVos Élections communales.
i\° 78. Dimanche,
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Ypres, le l1' Octobre 1887.
Donc, nous aurons la lutte. Le parti clérical
va se mettre en rang de bataille et c'est proba
blement sur le terrain de l'enseignement qu'il
entamera le combat. La chose semble avoir été
décidée ces jours derniers; mais il est suffisam
ment notoire qu'elle était décidée bien avant.
Le fait est qu'ici on n'a rien résolu du tout. Des
ordres sont arrivés, il y a des semaines déjà,du
fin fond de l'évéché et nos libres cléricaux n'ont
eu qu'à se soumettre. La lutte partout, même
là où elle doit être illusoire Tel est le mot
d'ordre parti de tous les sièges épiscopaux.
Notre bonne ville n'a pu s'y soustraire, encore
bien que la plupart des cléricaux et non les
moins huppes, fussent d'avis de ne point entrer
en lice. Il n'y avait même de bien disposé
courir l'aventure qu'un certain vieux grincheux
toujours dominé par ses rancunes personnelles
où la religion n'entre absolument pour rien, le
dit vieux, appuyé par quelques jeunes qui
l'abhorrent, mais qui aiment se battre, ce qui
est de leur âge. Eh bien! va pour la lutte! Cela
ne nous déplaît même point, d'autant moins
que c'est sur le terrain de l'enseignement, nous
le croyons du moins, que la bataille va être
livrée.
Nous n'avons, vrai dire, pas besoin de l'a
veu de nos adversaires cet égard. Tout le
monde sait, en effet, que ce que les cléricaux
ont partout pour principal objectif, ce sont les
écoles laïques. Que par impossible ils triom
phent et dès le lendemain de la victoire tout
sera mis en œuvre pour démolir les nombreu
ses écoles que l'autorité civile a si bien organi
sées. Le collège communal, supprimé; l'école
supérieure des filles, supprimée; l'école pri
maire des filles, supprimée; la Loye, supprimée;
l'école inoyennedes garçons, sinon supprimée,
cause de la loi, tout au moins trahie, minée,
discréditée, ruinée au profit de l'enseignement
rival. Voilà ce qu'on promet et sans des feintes
d'ailleurs inutiles. M. Surmont jurait bien
ses grands dieux, il est vrai, en 1884, de ne
rien supprimer du tout: mais on sait ce que
vaut un tel serment.
Et quels griefs fait-on valoir? Les vieux
griefs, toujours les mêmes, cent fois ressassés
et cent fois réfutés, réfutés par les faits mêmes,
ce qui vaut encore mieux que par le raisonne
ment. Nos écoles coûtent cher; elles sont inuti
les elles ne produisent rien de bon elles sont
des foyers d'irréligion, et Dieu sait quelles au
tres idiotes rengaines et sottes blagues.
Nos écoles coûtent cher Pas si cher d'abord
qu'on affecte de le croire. 11 y a, que l'on oublie,
outre les revenus des fondations et le produit
du Denierles subsides du Gouvernement et
ceux de la Province réduits il est vrai depuis
1884, qui diminuent d'autant les charges de la
ville. Mais il y aurait que notre enseignement
serait aussi coûteux qu'on se plaît le dire, que,
eu égard aux résultats dont nous parlerons tan
tôt, il ne coûterait pas trop cher du tout. Dire
d'un service public, dont on ne peut retirer
pour soi aucune utilité, qu'il est trop cher et
inutile, c'est simplement dire une égoïste ab
surdité. Nos bons abbés n'ont pas assez d'invec
tives contre ceux quin'usant pas de leur
ministère, prétendent qu'il faudrait supprimer
le budget des cultes et faire supporter les dé
penses y inscrites par ceux-là qui pratiquent.
Or, leur argument est absolument le même
quoi qu ils en disent. C'est l'éternelle histoire du
doigt fourré dans l'œil jusqu'au coude. Après
cela,sait-on ce que coûtent les écoles du clergé?
On n'a garde de le dire! Mais, de temp#a autre,
la disparition en mains cléricales de quelqu'o-
pulente succession, surprise au passage, ne fait
voir que trop où se trouvent les gouffres et les
leçons trop payées.
Nos écoles sont inutiles? Oui, pour ceux qui
préfèrent l'enseignement frèro-clérical.... Mais
combien préfèrent le nôtre 1 On parle de pres
sion, de contrainte. Et la coaction du clergé,
la plus formidable de toutes, parce quelle
étreint la fois les intérêts et les consciences,
les bourses et les âmes, on a grand soin de n'en
rien dire. Que l'on laisse les parents libres et
l'on verra bien de quel côté iront les préféren
ces. Et où veut-on qu'elles aillent, si ce n'est
du côté où les maîtres savent ce qu'ils doivent
enseigner? Que savent ces sœurs qui se sont
affublées du nom de Lamotjes» Que savent
les petits frères qui se sont plus justement qua
lifiés d'ignorantms? Que savent, en fait de
latin, de grec, d histoire, de littérature, de ma
thématiques et de sciences surtout, ces jeunes
abbés peine entrés au Séminaire et encore
revêtus de leur première soutane, qui s'en vien
nent ici non pour étudier, non pour enseigner,
mais^pour employer les heures qui leur restent
libres entre des leçons improvisées, écrire
dans le Nieuwsblad, au su de leurs élèves, les
sottises et les inepties que chacun connaît?
Aussi, voyez les résultats. Tandis que notre
Collège Communal, par exemple, remporte
chaque année des distinctions aux concours, on
aperçoit des pères de famille, les plus ancrés
dans le clan clérical, retirer leurs enfants,
même ceux de première culotte, du Collège de
S' Vincent de Paul, pour les envoyer Tournai
et ailleurs dans les établissements des Jésuites.
D'autres qui n'ont pas eu la même clairvoyance
et pris les mêmes soins, se voient réduits, les
années d'études révolues, confier leurs enfants
nos professeurs nous pour que ceux-ci
complètent une instruction insuffisante et pré
parent ces mêmes enfants passer certains
examens d'admission. Un enseignement pareil
serait gratuit qu'il coûterait beaucoup trop
cher encore. Mais il s'en faut qu'il le soit, ces
Messieurs du clergé sachant de mille façons se
faire payer avec usure les services qu'ils ren
dent et même ceux qu'ils ne rendent pas. Et
quant cette prétention qu'eux seuls savent
moraliser la jeunesse, c'est là une autre réclame
usée, un autre vieux cliché. 11 fut un temps, et
il a duré long, où toute l'instruction était entre
leurs mains. Le monde valait-il mieux ou moins
cette époque? 11 valait moins, bien moins
qu'aujourd'hui.
Aussi est-ce pure vanterie que cette alléga
tion que les élèves des écoles du clergé ont sur
ceux des écoles laïques, une incontestable supé
riorité morale. La vérité, sous ce rapport, est
que la moralité des enfants dépend, en règle
générale, de la moralité des parents et qu'il y a
des mauvais drôles partout. La religion et la
morale sont d'ailleurs enseignées dans les écoles
laïques. Tout l'enseignement en est même im
prégné. Nos adversaires savent cela et c'est par
pur calcul qu'ils le dissimulent et le nient. Au
surplus, sur ce point comme sur les autres, nous
attendrons avec calme et confiance le verdict
des peres de famille. S'il est vrai que nos éta
blissements laïques d'instruction ne valent rien;
qu'ils coûtent trop cher pour les services qu'ils
rendent; que la jeunesse est mal instruite et
mal élevée par des maîtres et des maîtresses
incapables ou indignes, eh bienl les électeurs
voteront en masse contre la liste libérale. Mais
s'ils estiment au contraire que ce serait un mal
heur pour la ville devoir remplacer les établis
sements communaux par des établissements
confessionnels; l'excellente école dirigée par
M. Verduyn, par une école de petits frères
l'école si bien gouvernée par M™6 d'Hazeleire,
par celle régentée par les sœurs; l'école pros
père tenue par M11* Vanderhaegen par
aucune autre et notre Collége-E'cole Moyenne
par l'Académie des rédacteurs duNieuwsSlad.
et bien alors! ils voteront en masse aussi et
comme ils l'ont fait depuis plus de 50 ans, con
tre la liste cléricale
C'est ce qu'ils feront du reste et pas n'est be
soin d'être prophète pour le prévoir et le pré
dire.
Au 16 courant, Messieurs les cléricaux
Le Journal d'Ypresdans son numéro de
Samedi dernier, dresse une liste passablement
longue et glorieuse des échecs, autrement dit
des vestes remportées par les candidats de la
SociétéDoyen-Spillebout et Cle. Il en conclut
quoi? qu'il ne faut pas s'arrêter en bon chemin
et qu'une nouvelle veste les attend non,
que l'heure des succès négatifs est passée; qu'a
près un certain nombre de plongeons, vous de
venez invulnérable comme le mythologique
Achille; il est vrai que celui-ci avait le talon
encore trop sensible, et que son invulnérabilité
ne lui a pas porté trop grand bonheur. Espé
rons que les baptêmes des candidats divins aux
élections de 1878, 1881 et 1884, ne leur auront
donné ni moins ni plus de chances d'immor
talité I
En tous cas, le Journal parait être revenu
du pays des alouettes toutes rôties. Et il daigne
s'occuper de la question des élections commu
nales, tout comme s'il n'était pas absolument
sûr de la victoire. Il dresse le tableau des bles
sures des combats et blessures et espère
que les lecteurs y trouveront de quoi aug
menter leur confiance et stimuler leur ardeur.
Mais alors, comme nous l'avions dit il y quel-
quesjours, la confiance la plus absolue celle
qu'affecte le brave Journal ne règne pas du
PROGRES
VIRES ACQOIRIT EUNDO
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[dem. Pour le restant du pays7-00.
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