N° 92. Dimanche,
47e ANNÉE.
20 Novembre 1887.
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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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Y près, le 19 Novembre 1887.
Nos Finances.
A propos de l'exposé financier fait par le
geai pardon par l'auguste paon gouverne
mental, le Précurseur émet ces réflexions
Dans les impôts on distingue l'impopularité
et le profit M. Beernaert. Ces quatorze mil
lions font honte M. Graux, mais ils font hon
neur M. Beernaert, qui y trouve le plus clair
de ses revenus. Les libéraux ont décrété les
impôts, et ils ne les ont pas perçus c'est,
paraît-il, l'abomination de la désolation les
catholiques les ont condamnés, et ils ont dit
qu'ils étaient inutiles et odieux, mais ils les
perçoivent, et il faut qu'on tresse des couronnes
M. Beernaert.
Cette politique peut avoir l'aveu de quelques
habiles peut-être tous les catholiques rient-
ils sous cape d'un tour qu'ils jugent excellent.
Mais l'approbation des gens d'honneur lui fera
toujours défaut et notre avis, il n'y a rien
qui rabaisse plus M. Beernaert, et qui le fasse
paraître sous un jour plus triste que cette
vaniteuse apologie qu'il fait de lui-même, aux
dépens de l'adversaire courageux et loyal au
quel il doit tant.
Béflexions du correspondant bruxellois du
Journal de Liège, propos, toujours, du grand
ministre
Le grand ministre se vante du relèvement
des recettes des chemins de fer, absolument
comme s'il y était pour quelque chose. Si cela
dépend de lui, pourquoi a-t-il laissé dans les
premiers temps descendre les recettes au-des
sous de ce qu'elles étaient les années précéden
tes? Il dégageait sa responsabilité lorsqu'il
constatait la baisse des produits des chemins
de fer il se disait impuissant exercer une
influence quelconque sur l'état des affaires.
Celles-ci semblent avoir repris un peu.
Est-ce par le fait du grrand ministre
Evidemment non. Alors, pourquoi s'attribue-
t-il l'honneur et le mérite d'avoir amené le
relèvement des recettes des chemins de fer
Rien de tout cela n'est sérieux. Les procédés
du grrrand homme sont ceux de tous les char
latans. Ils ne trompent que les naïfs et les
badauds
La questioo du jour.
La perspective des élections prochaines
donne naissance, dans la presse cléricale, un
double courant de nouvelles vraiment amusant
observer.
Tous les jours, les journaux avec Dieu annon
cent quelque dégrèvement d'impôt pour un
avenir prochain. Dans deux ou trois ans, les
en croire, les Belges ne payeront plus aucune
sorte d'impôt; et on fermera, pour cause d'inu
tilité publique, tous les bureaux des receveurs
de contributions...
D'autre part, les mêmes journaux annoncent
que le gouvernement va augmenter les pen
sions militaires, ainsi que les traitements de
tous les employés des chemins de fer...
Si le gouvernement augmente tous les traite
ments et toutes les pensions et si, d'autre part,
il renonce aux ressources que procure l'impôt,
où diable ira-l-il chercher l'argent nécessaire
pour soutenir cette situation
Est-ce que, par hasard, notre ministère au
rait, par la douceur s'entend, amené l'Eglise
rendre gorge
C'est ça qui serait un fameux coup de finance!
La séance de la Chambre.
M. Demalander peut se vanter d'avoir fait re
cette.
Les tribunes sont combles beaucoup de dames
et une foule de prêtrescurés et vicairesvenus
de Renaix et d Audenarde pour entendre juger
leur protégé.
Des deux côtés de la Chambre, dans l'hémi
cycle, les bancs sont bien garnis.
La séance s'ouvre 2 heures 1/2. M. De
Lantsheere préside.
La Chambre, distraite, s'occupe d'abord de
pétitions qu'elle renvoie, comme d'habitude,
l'un ou l'autre des ministres. M. Lejeune, qui
n'est pas encore fait aux usages, parlementaires,
se lève pour déclarer qu'il étudiera quelques-
unes de ces pétitions avec bienveillance.
Mais il ne s'agit pas de cela. Le cas de M. De
malander vient après ce lever de rideau.
C'est M. Beernaert qui se lève le premier pour
repousser, au nom du gouvernement, la proposi-
de la Constitution, définissant les cas d'incapa
cité élective, n'a pas prévu celui de M. Dema
lander.
Très froidement accueillie droite, cette ex
ception de procédure.
On entre dans le cœur du débat.
M. Demalander se lève. Tous les yeux sont
braqués sur lui.
L'accusé joue d'audace. Il commence sa dé
fense d'une voix haute, bien timbrée, animée
d'une note de défi, et entreprend sa plaidoirie. Il
parle comme un homme sûr de son jury, d'au
tant plus sûr qu'il connaît d'avance le verdict.
Il fait ce qu'il peut pour justifier ses actes, at
taque, avec une vigueur que ses malheurs judi
ciaires excusent, la Cour d'appel de Gand,
rappelle que le corps électoral de Renaix une
juridiction impartiale celle-là, l'a réhabilité
et termine par la fanfare ordinaire Je livre
mes actes l'appréciation de mes juges.
Tout cela n'est pas mal dit. Toutes les phrases
ont été pesées, repesées, et dites avec un accent
de sincérité étonnant.
Au tour de M. Bara,l'auteur de la proposition.
Uu bon discours, celui-là, d'une force et d'une
finesse étonnantes. Sans faire allusion au cas spé
cial qui a provoqué sa proposition, M. Bara a
fustigé de maîtresse main les indignes. Ses coups
ont porté au-delà et, sur les bancs de la droite,
il s'est trouvé des gens, généralement prompts
la réplique, qui les ont subis sans murmurer.
La droite est accablée. M. Beernaert erre seul
dans les couloirs.
Le discours de M. Bara est salué par les
applaudissements de la gauche.
Arrive M. Thonissen, un professeur, qui traite
la question au point de vue juridique. Une con
férence longue, ennuyeuse, laquelle M. Bara
riposte en quelques mots.
Le rapporteur est M. Cornesse. On attendait
M. Cornesse. Serait-il ferblantier ou maladroit
Les deux
Il reproche M. Bara de faire une petite pa
rade électorale. Puis, avec un tact exquis, il
rappelle la lettre par laquelle M. Devolder a re
fuse de figurer Renaix sur la liste cléricale
côté de M. Demalander. C'est exquis de pavé
de l'ours
Pour mettre le comble son habileté, l'aigle
de Maeseyck lit l'arrêt de la Cour de Gand.
L'orateur continue s'asseoir avec complai
sance sur son client qui sue grosses gouttes. La
droite déserte les bancs.
M. Doucet, seul, profite de ce moment propice
pour offrir ses félicitations ou ses condoléances
nous ne savons pas au juste la victime.
Un mot épique termine le discours de M. Cor
nesse qui, s'adressant M. Bara, s'écrie
En présentant votre proposition, vous avez
manqué la courtoisie parlementaire
Après cela, il fallait tirer l'échelle.
M. Bara l'a tirée fort bien en demandant l'in
sertion aux Annales parlementaires de l'arrêt de la
Cour d'appel de Gand, cité par M. Cornesse.
La droite n'y a vu que du feu, a répondu oui
et il se fait que les documents parlementaires
reproduiront demain Parrêt de justice qui a con
damné M. Demalander.
La droite et les indépendants se sont, sans
doute, aperçus de la faute qu'ils venaient de
commettre, car ils ont repoussé par 71 voix con
tre 27 (et une abstention que vous devinez) la
proposition de M. Bara.
Après ce verdict, M. Demalander s'est modes
tement éclipsé.
La Chambre, pour se remettre d'une alarme
si chaude, a continué la discussion des modifica
tions aux lois provinciale et communale.
On a crié A Mardi tout le temps, et cela
a fini par réussir vers 5 heures.
LE PROGRES
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