N° 57. Dimanche,
48e ANNÉE.
15 Juillet 1888.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Chemin de fer.
Sus aux écoles officielles.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
vires acquirit etnik).
Heures de départ d'Ypres pour
Poperinghe, 6-50 9-09 10-00 12-07 3-00
Ypres, le 14 Juillet 1888.
C'est de toutes les façons que MM. Paul Jan-
son et Féron ont mené la campagne pour obte
nir, directement ou par l'étape du savoir lire et
écrire, le suffrage universel. Leur panacée
tous nos maux, leur desideratum final est de
voir se noyer dans les urnes l'esprit des censi
taires par celui des masses. Les motifs invo
qués ne sont autres que ceux du droit naturel.
Si en cette matière le droit naturel doit avoir
seul empire, on ne saurait produire aucune
raison pour ne pas donner du même coup le
droit de suffrage aux femmes, voire même aux
enfants. La logique nous mène cette consé
quence, bien entendu, s'il ne doit être tenu
aucun compte des nécessités de notre état
social.
L'idéal de la perfection de notre race est cer
tainement souhaiter, mais il est peu probable
que nous l'atteignions de sitôt pour pouvoir
donner déjà libre cours des idées, généreuses
faut en convenir, mais prenant leur source
ans le droit de la nature.
Tout ce qui se passe autour de nous prouve
jusqu'à la dernière évidence, que longtemps
encore nous devrons légiférer et réglementer
en toute matière, que longtemps encore il de
vra être tenu compte de l'ignorance bien grande
dans laquelle croupissent les masses.
La firme Janson et G'8 n'est certainement pas
de cet avis. Elle croit que notre étal social est
déjà si avancé qu'on peut impunément accor
der le suffrage universel tous les belges. Mal
heureusement la guerre qu'elle a faite l'op
portunisme, sous prétexte de reformer l'article
47 de la Constitution, n'a eu d'autre consé
quence que de disloquer cette vaillante armée
libérale qui a su, jusque dans ces dernières
années, refouler les exigences de I ultramon-
tanisrne.
MM. Janson et Cie n'opèrent que dans les
grandes villes ou centres industriels. S'ils con
naissaient la province comme nous la con
naissons, il est supposer qu'ils n'auraient pas
commis cet acte de trahison, qui a livré la
capitale pour la seconde fois aux mains de la
réaction.
Aujourd'hui que de tous les points du pays
surgissent des vœux pour voir reconstituer
cette armée libérale, avec le drapeau de la
quelle nous avons remporté maintes victoires,
nous convions les Bazaines et les traîtres de la
capitale de venir visiter nos villes et communes
aux jours solennels des élections, des proces
sions et des pèlerinages. A moins de ne vouloir
persister dans .leur coupable aveuglement, ils
seraient immédiatement convaincus de la di
rection que doit prendre l'opinion libérale et
que la question cléricale a plus que jamais sa
raison d exister.
Nous le savons, dans les villes la question
cléricale est offerte au public sous forme de
pilules dorées, mais dans les campagnes point
de ménagements. Ainsi il nous est rapporté,
que dans toutes les églises de l'arrondissement,
il a été chanté des cantiques de grâces au sujet
du résultat des élections du 12 et 19 Juin spé
cialement il a été organisé le 9 de ce mois un
gelerinage la Madone miraculeuse de l'église
4 Jean Poperinghe 1° pour la remercier du
résultat de nos élections et 2° pour demander
sa puissante intercession auprès de son divin
fils aux fins d'obtenir la délivrance de notre
très-saint Père le Pape et le voir reprendre ses
Etats, qui lui ont été si violemment arraches.
Qu'on ne croie pas que ces appels politico-
religieux restent sans suite ou sont peu enten
dus. De partout sont accourus Poperinghe
plusieurs milliers de pèlerins, qui sont con
vaincus que lePape reprendra ses Etats l ltalie,
précisément comme les cléricaux ont repris le
pouvoir aux libéraux. Ces masses ignorantes
manifestent aujourd'hui par les prières et les
chants. Si demain le droit de vote leur était
donné, ils manifesteraient de même par les
bulletins.
C'est par toutes ces manifestations que se
fait la force du parti clérical.
Si les radicaux sont sincères dans leurs con
victions, qu'ils viennent étudier le mal sur
place, ils pourront ainsi méditer la situation
précaire dans laquelle se trouve le libéralisme
en province. Nous avons la conviction que com
me remède ils proposeront autre chose que le
suffrage universel.
Par l'immixtion de la religion en toute ma
tière, par l'activité du prêtre politique, on re
crute une armée composée de toutes les classes
de la société et si formidablement organisée
par le fanatisme et l'ignorance, que dans nos
Flandres on est parvenu éliminer du Parle
ment tous les représentants de l'opinion libé
rale.
Où cela nous conduira-l-il L'avenir seul le
dira. La situation actuelle doit nous servir de
point de mire et nous faire ouvrir les yeux.
C'est sur le vif que nous devons étudier les re
mèdes. Conformer notre conduite sur ce qui se
pratique là où il n'y a point de retenue, non
sur ce qui se fait par modération dans les villes.
N'oublions jamais que MM. Beernaert, Le-
jeune, anciens libéraux, peut-être demain le
radical M. Picard, ne représentent le pouvoir
que pour la forme. Le véritable ministre,
l'alter ego des évèques et des curés, c'est
M. Woeste; lui est le véritable représentant
du cléricalisme. C'est lui qu'est réservé le
triomphe final. Cest M. Woeste qui nous
fera jouir des bienfaits de l'encyclique du Pape
Léon XIII, Libertas. X.
Ça commence. Le premier pétard est parti.
M. Colaert entre dans son rôle. Il faut faire la
guerre aux écoles, le contrôleur s'en charge,
mais doucettement, doucereusement, en tapi
nois. Plumer la poule sans la faire crier est un
art, mais quelque précaution qu'on prenne, ne
la touchât-on que du bout des doigts,qu'encore
elle crie. C'est que la poule a l epiderme sensi
ble et les écoles primaires aussi.
Dans la séance du 7 Juillet du Conseil com
munal, M. le Bourgmestre fait connaître que
le nombre des enfants indigents admis l'in
struction gratuite est de 674.
M. Colaert trouve que ce chiffre est fort
élevé.
Ah! s'il pouvait le réduire, s'il pouvait même
le supprimer tout-à-fait, il ne le dira pas, mais
cela ferait son bonheur. Malheureusement il ne
le pourra pas, et c'est là son malheur.Toutefois,
il fera son possible et là où il est impuissant il
appellera son aide la Députation permanente.
Celle-ci fera le reste.
Avant d'aller plus loin, M. Colaert demande
si ces 674 enfants sont tous, pauvres A très-
peu d'exceptions près, répond M. le Bourg
mestre. D'ailleurs, ajoute celui-ci, la gra-
tuité de l'instruction a été décrétée, par le
Conseil communal pour l'école primaire et
elle existe déjà en fait depuis un demi-siècle.
On admet l'école gratuite tous ceux qui se
présentent.
M. le Bourgmestre aurait pu ajouter que c'est
ainsi que M. H. Iweins d'Eeckhoutle a reçu sa
première instruction l'école communale
d'Ypres.
M. Colaert. C'est que la loi de 1884 n'ad-
met la gratuité que pour les enfants pauvres.»
Voyez-vous, la loi de 1884 doit être rigou
reusement observée. II faut toujours respecter
la loi, c'est le propre des hommes d'ordre. Et la
loi de 1879 sur l'instruction primaire, fallait-il
aussi l'observer Qu'en faisaient-ils, ces hom
mes d'ordre? Ils la houspillaient, la contre
carraient et la violaient sans vergogne. Ils
déclaraient du haut de la tribune nationale que
loin de la subir, ils ne s'y conformeraient ja
mais et ils prêchaient ouvertement la rébellion
Les hommes d'ordre sont ainsi faits.
M. Colaert n'est pas partisan de la gratuité
de l'instruction primaire; il ne savait pas que le
Conseil avait voté la gratuité. Il s'en assurera.
C'est une question, dit-il, que je me réserve
d'examiner. Nous pouvons d'ailleurs revenir
sur cette décision.
M. Colaert examinera donc la question. A
votre aise, M. Colaert. Mais n'est-ce pas plus
que de la naïveté d'espérer que le Conseil re
vienne sur cette décision?Quoi! le mouvement
est l'instruction gratuite et obligatoire; par
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