L'agriculture protégée.
A la Chambre.
Nouvelles locales.
M. Beernaert. Allons, soit. 11 le faut. Eh
bien, j'ai déclaré n'avoir pas été prévenu de la
visite de Pourbaix et de Cousaert. Or, il sera
facile de prouver quq Devolder m'avait prévenu,
puisqu'il arrivait au rendez-vous onze heures
quarante.
M. Beernaert. Tiens, tiens Mais com
ment expliquerez-vous le rapport de Pourbaix
disant qu'il m'a informé de sa qualité d'agent de
la sûreté, alors que moi, la Chambre, j'ai
déclaré que si j'avais connu sa qualité, je ne
l'aurais pas reçu
M. Nothomb. Quelle gravité, mon Dieu,
quelle gravité
Sérieure, n'aurait pas fréquenté des mouchards.
iu du moins, s'il l'a fait, on ne l'a jamais su.
ministres, doivent bénéficier du doute. Et j'en
lèverai un vote de confiance.
A cette époque de l'année le transport des
betteraves présèntè une nécessité de grande
urgence le premier soin d'un gouvernement
soucieux des intérêts de l'agriculture est d'as
surer en temps et lieu le transport de celte
précieuse récolté, la seule qui soit encore ré
munératrice.
Eh bien, voyez toutes les gares partout en
combrement de chariots chargés de betteraves,
attendant des wagons annoncés souvent, mais
n'arrivant jamais que deux ou trois jours trop
tard.
Aussi faut-il entendre les doléances de nos
cultivateurs et leurs justes protestations contre
cette pénurie du matériel. Heureux encore si
pour comble de malheur, ils ne voient pas la
gelée se mettre de la partie.
On assure que beaucoup d'entre eux lésés
réclament l'Etat les dommages intérêts par
faitement justifiés.
Et dire qu'il y a un ministre de l'agriculture
Et comme ce niinistre et son collègue Van
den Peereboom, sont bénis de nos fermiers
Non, on ne s'en fait pas une idée, sauf sur
les quais des gares qui sont censés servir au
chargement des betteraves 1
Hier, second Mardi de Novembre, les Cham
bres se sont réunies de plein droit, sans dis
cours du Trône.
Réouverture tranquille. MM. Raepsaet et
d'Ouitremont se sont aventurés les premiers
dans l'enceinte parlementaire et se sont retirés
après avoir essayé le tapis.
M. Delcourt, auquel son âge conférait, en
l'absence de M. de Haerne, les fonctions provi
soires de président, est entré le premier, en
causant avec M. Simons puis, on a vu M. Pon
tus, tout seul en s'épongeant, il s'éponge tou
jours on dirait qu il vient de tout bouleverser;
M. Cooman3, avec une grande barbe blanche qui
le gâte un peu MM. Jamme, d'Andrimont,
Giroul M. Van Wambeke, toujours élégant;
M. Beernaert, qui a échangé force poignées de
mains, et auquel M. Pontus s'est empressé
d'aller montrer de petits papiers qu'il avait
dans sa poche MM. Itaemdonck,Anspach,Hou-
zeau M. de Lantsheere, qui, en attendant sa
réélection, est allé s'asseoir modestement au
banc de Bruxelles M. Woeste, très souriant et
très entouré M. Eeman, avec une nouvelle
barbe; M. Devolder,se glissant dans les groupes;
M. Vandenpeereboom M. Le Jeune, toujours
marmoréen: M. de Chimay; MM. Bara,Houzeau,
Hardy, Henricot, Steurs, Dupont, de Kerchove,
Fléchet, etc. Tous les assidus de la gauche.
La Chambre a vérifié les pouvoirs de M. Le-
febvre, le nouvel élu de Malmes, qui reprend les
affaires politiques de son père. Elle a tiré au
sort ses sections pour le mois de Novembre, et
élu son bureau. Il y avait quatre-vingt-douze
membres présents pour élire le président.
M. de Lantsheere a été renommé.
MM. Tack et Van Wambeke ont encore été
portés la vice-présidence.
Ces trois honorai des membres, auxquels la
droite s'obstine confier ces hautes fonctions,
sont trois des bafouilleurs les plus distingués de
l'assemblée. Il est impossible ae comprendre un
texte quelconque lu par eux ce qui fait qu'on
va continuer discuter dans le brouillard.
MM. de Mérode,De Sadeleer,Snoy et Auspach
reviennent comme secrétaires. M. Léon Visart
remplace, comme questeur, feu M. Lefebvre.
M. De Lantsheere a prononcé, en montant au
fauteuil, son petit speech de reconnaissance
habituel il y avait une aimable invitation au
calme et la tenue qui sera écoutée, nous
l'espérons, par les Eeman, Doucet et autres
membres de la droite sujets des accès d'épilep-
sie peu parlementaires.
Le speech présidentiel a pris, la fin, une
petite allure de discours du Trône il a annoncé,
en effet, que le gouvernement aurait cœur de
soumettre la Chambre de nouvelles lois socia
les qui seront l'objet de la sollicitude de la
Chambre. Cela a fini par une invocation la
protection du Dieu tout-puissant. Amen.
Toute cette séance s'est passée, naturellement,
en appels nominaux. Combien M. Pirmez avait
raison de recommander son système de vote par
l'électricité, qui unirait la célérité la publicité
conforme l'esprit de la loi
La Chambre a encore nommé les commissions
des Finances, de l'Industrie et des Naturalisa
tions.
Elle s'est ajournée Mardi, après ce grand
effort. On commencera par la discussion du
projet de loi sur la collation de3 grades acadé
miques. Il y a des amendements du gouverne
ment, mais qui n'entament pas, a dit M. Devol
der, le fond du débat.
Sous la rubrique Nouvelles locales, le
Journal d'Ypres, dans son dernier numéro, an
nonçait une réunion des électeurs capacitaires
et des membres des sociétés catholiques de la
ville. Ordre du jour la revision électorale.
Le pieux confrère a cru devoir accompagner
et appuyer cette annonce de considérante assez
réussis. Pour engager ses amis assister cette
réunion, il leur apprend que les libéraux, qui
recherchent toutes les occasions de combattre le
ministère, de le calomnier de travestir ses in
tentions et ses œuvres ont profité du projet
de loi Devolder pour mener contre le gouverne
ment catholique une campagne dont la déloyauté
n'a d'égale que son cynisme
Oh la la mon petit Monsieur, comme vous y
allez Au moment où tout le pays est convain
cu que certains chefs du parti catholique se sont
fravement compromis dans les tripotages Pour-
aix et Cie, au moment où l'on se demande si
MM. Devolder et Beernaert auront l'audace de
se représenter, au nom du Roi, devant la Cham
bre qu'ils ont trompée, devant la majorité qu'ils
ont entraînée, leur suite, dans le discrédit où
ils se débattent, c'est ce moment que vous
lancez la tête des libéraux les épithètes de
déloyaux et de cyniques A notre humble avis,
vous avez perdu une fort belle occasion de vous
taire
Que le Journal d'Ypres sache très bien mentir
et qu'il tombe en admiration devant ceux de
son parti qui savent encore mieux mentir que
lui, très bien Mais il met trop de charité chré
tienne affubler les autres de ses qualités trans
cendantes. Il trouve, entr'autres, que toute la
polémique libérale se résume en ces mots
ôle-toi de là que je m'y mette Ah Et sa
polémique lui Ses calomnies, ses injures, ses
méchancetés l'adresse de nos conseillers com
munaux Est-ce que tout cela ne revient pas
dire ôtez-vous de là que mes patrons s'y mettent n
Puis, pour les besoins de sa cause, il apprend
ses lecteurs que la maxime la fin justifie les
moyens est une maxime essentiellement libé
rale 11 finira peut-être bien encore par leur
persuader que jésuitisme est synonyme de libé
ralisme, et que Escobar et Loyola étaient des
libéraux. Ceci serait de l'ingratitude La Patrie
trouverait qu'il a mal profité de ses leçons
Voyons, Maître Crac, quand vous engagez vos
ami3 se défier des mensonges d'un libéralisme
aux abois, vous devez être étonné vous-même de
la hauteur de votre toupet Hein
M. Woeste part). Nous nous contentons
de les penser.
Le R. P. président. Du courage, monsieur le
ministre. L'Esprit-Saint est avec vous.
Le R. Distinquo. Pardon, minuit et
cinq.
M. Beernaert. Pour moi, c'est la même chose.
Le R P. Malou. Papa ne se serait jamais
mis dans un cas pareil. Il était trop fort, papa.
Le R. P. Lhoir. Si on invoquait la raison
d'Etat
M. Nothomb. C'est d'une extrême gravité
M. Jacobs. Et ça ne prendrait pas du tout.
M. Beernaert (avec désespoir). Pas du tout
Le R. P. Distinguo. Vous êtes des poltrons.
Vous ne nierez pas que M. Devolder soit venu.
Vous déclarerez qu'il arrivait minuit et cinq
avec le télégramme, qu'il venait de retrouver
dans ses papiers. Comme cela, vous n'avez pas
été prévenu, puisque M. Devolder est arrivé
après le départ de Pourbaix et de Cousaert.
Le R. P. Malou. Jamais papa n'aurait tenu
ce langage.
Le R. P. Vulpes. Moi, foi de casuiste, j'y
perds mon latin
Le R. P. Fouinard. Ta, ta, ta! L'explication
est facile. Vous raconterez qu'ils n'ont déclaré
leur qualité de policiers qu'à la fin de votre
conversation, et qu'alors vous les avez priés de
sortir.
M. Beernaert. Mon révérend père, vous nous
sauvez la vie, mes collègues et moi.
Le général Pontus (ému). Et si une petite
place d'aumônier en chef peut vous taire plaisir?
Le R. P. Fouinard. Merci. Je n'aime pas
les grandeurs... Mais je vous recommanderai
quelqu'un.
M. Beernaert redevenu inquiet). Mais je me
rappelle avoir dit ignorer que l'ultimatum dût
être signé par un ouvrier. Et il existe un manus
crit de moi établissant que j'ai renvoyé l'ulti
matum Rompf frères, La Louvière, par
express, pour le faire signer par Onklette
M. Nothomb. Jamais nous ne sortirons de
là. C'est beaucoup trop grave.
Le R. P. Malou. Papa, une intelligence su-
Le R. P. Escobardo. Allons, mes révérends
pères, l'œuvre. Il y aura un évêché pour celui
qui sauvera notre sainte cause.
Le R. P. Vulpes. Je ne dirai qu'une chose
Avinain, sur l'échafaud, s'est écrié N'avouez
jamais
Le R. P. Fouinard. Moi, je donne ma langue
aux chiens.
Le R. P. Debrouillati. Je n'y vois que du feu.
Le R. P. Lhoir. Les paroles volent et les
écrits restent. Vous avez eu tort d'écrire.
Le R. P. Distinguo. Pardon. Distinguons,
distinguons. Vous avez écrit cela
M. Beernaert (piteux). Hélas, oui
Le R. P. Distinguo. Vous pourriez nier votre
écriture mais ça ne serait pas distingué.
Le R. P. Malou part). Papa n'écrivait pas,
lui
Le R. P. Distinguo. Voilà ce que vous allez
faire Vous avez bien écrit Ils vont la faire écrire
par Onklette, de Saint- Vaast Soutenez mordicus
qu'Onklette n'a jamais existé. Si la gauche pro
teste, la droite demandera la clôture.
Le chœur des ministres. Bravo
M. Jacobs. Et moi, je vienlrai dire au bon
moment qu'en présence de deux versions con
tradictoires, les accusés, pardon, je veux dire les
M. Woeste voix basse)C'est ce que nous
verrons.
Le R. P. Escobardo. Et maintenant, en route
pour le train de minuit
M. Beernaert. G Pourbaix 0 Cousaert Je
ne me sens sauvé qu'à moitié.
Le R. P. Escobardo. Mes enfants, je vous
bénis, au nom du Père, du Fils et du Saint-
Esprit. (Exil).
L'assistance. Amen (Elle se sépare).
Pour copie qu'on forme
noël.