0 FRANCS PAR AN.
50e ANNÉE
30 Mars 1890.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Chemin de fer.
Résumé politique.
l\° 26. Dimanche,
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
YPRES-FURNES.
B-4G
FURNES-YPRES-
7-35 10-20 11-30 3-04 6-20.
Ce qui se passe Berlin apparaît de jour en
jour sous un aspect plus mystérieux. Il y a évi
demment, dans les communications officielles
Sui ont été faites propos de la retraite de M. de
ismarck, un manque absolu de sincérité. Cer
taines phrases, et les plus importantes, dans ce
document, avaient un caractère amphibologique
qui permettait d'y lire le témoignage d'une vive
affection ou le plus cruel des sarcasmes.
Quand l'Empereur disait Je sais qu'il
serait impossible de vous faire revenir sur votre
résolution cela pouvait s'expliquer ainsi
Vous avez eu tort de croire que je n'accepte
rais pas votre démission. Je l'ai, je l'accepte et
je la garde.
D'après ce qu'on écrit aujourd'hui, on pour
rait interpréter le texte d'une façon plus amère
encore pour M. de Bismarck. 11 paraît que la
démission aurait été imposée. Ce n'est pas une
simple retraite, c'est une rupture violente dont
on a vainement cherché dissimuler le caractère
par des paroles flatteuses, la nomination au
titre de duc et la promotion au grade de feld-
maréchal.
La preuve qu'il en doit être ainsi, c'est que le
prince de Bismarck a refusé le titre de duc sous
lequel on voulait dissimuler sa disgrâce. Et son
fils n'a pas voulu rester au service de l'Empe
reur. La brouille est complète.
Et elle était prévoir depuis longtemps. Dès
la mort de Guillaume Ier, Bismarck avait voulu
faire comprendre au jeune Guillaume II que son
frand-père, son lit de mort, lui avait fait jurer
e rester auprès de lui et de l'aider de ses con
seils. Et on attribue aujourd'hui l'influence du
vieux chancelier l'étrange^ conduite tenue par
Guillaume II l'égard de son père et de sa mère
fendant le règne si court et si douloureux de
rédéric III.
Un souvenir important se présente ici. L'em
pereur Frédéric III avait rédigé un journal de
sa vie. Ce journal, oublié San Remo dans la
précipitation du départ la mort de Guillaume
Ier, avait été mis en sûreté par un ami fidèle.
L'Empereur mort, sa veuve avait fui eu Angle
terre avec les papiers de son mari, et on se rap
pelle la brusque et violente rupture qui se
produisit alors entre la famille royale d'Angle
terre et le jeune empereur d'Allemagne.
Un rapprochement s'est fait depuis. Le prince
de Galles, qui partait pour la chasse avec l'ar
chiduc Rodolphe quand Guillaume II a fait sa
première visite officielle la cour de Vienne,
le prince de Galles allait hier Berlin, assis en
uniforme allemand la table de l'Empereur et
portant sa santé des toasts en langue allemande.
L'impératrice veuve, qui avait voulu quitter
l'Allemagne pour u'y jamais revenir, figure au
jourd'hui aux cérémonies de la cour. La récon
ciliation s'est faite, et elle s'est faite aux dépens
du prince de Bismarck.
C'est lui qui est rendu responsable de ce qui
s'est passé d'odieux et de cruel autour de la
tombe de Frédéric III. Le jeune empereur ne
lui pardonne pas le rôle qu'il lui a fait jouer en
ces pénibles circonstances, et même après, dans
l'affaire Geffeken.
Nous sommes la fin de la discussion du
budget de l'agriculture, de l'industrie et des
travaux publics. Tous les représentants rivali
sent de zèle pour parler en faveur de leurs
arrondissements respectifs. Cependant pour
confirmer cette règle générale, nos excellents
mandataires la Chambre font exception, ils
sont restés muets comme des carpes, dans cette
importante question de l'agriculture.
11 est vrai, nous n'avons rien demander.
Tout est parfait. Notre arrondissement, nos
Flandres représentent l'idéal de la domination
du prêtre. Dès lors qu'avons-nous besoin de
plus? Nous jouissons du bonheur ici bas, le
séjour céleste nous attend après notre mort, si,
bien entendu, nous continuons accorder notre
suffrage notre sénateur et nos représentants
actuels ou d'autres qui seront désignés par
MM. les curés et les vicaires. Quelle félicité
Le ministère de l'agriculture, ainsi qu'il a été
dit et conformément" son institution, devait
produire des miracles dans tout le pays agri
cole. La manne céleste allait tomber dru sur
nos champs de culture, en attendant les grives
et les poulets rôtis.
Rogier, qui a sauvé les Flandres de la plus
formidable des crises, le fondateur de l'ensei
gnement des associations agricoles, lui et tous
ses successeurs qui ont largement secondé, au
moyen de subsides, tous les efforts privés pour
améliorer l'agriculture, ne sont que des pyg-
mées en présence des De Bruyn, qui marchent
d'après la baguette magique de leurs évéques.
Aux derniersde pompon, aux premiers la honte
de n'avoir absolument rien fait.
Aux temps d'élections, nous dirions peut-être
mieux, de carnaval politique, puisque les mas
ques ont seuls de la vogue dans, cette contrée,
on nous sert forte dose le mensonge et la
duperie. Il nous semble que cela devrait suffire
et les déceptions devraient s'arrêter là. Cela
devrait surtout être vrai quand il s'agit de nos
cultivateurs.
Est-ce parce que les électeurs-cultivateurs
forment la grande force du parti clérical, ou
y a-t-il autre raison?Toujours est-il que nous
n'avons jamais vu se moquer plus agréable
ment de cette catégorie de citoyens que pré
sentement.
Pour le prouver, nous citerons les droits
d'entrée sur les céréales, qui ont été promis
tous les exploitants de terre. Sans approuver
ces droits, nous (nous plaçons ici au point de
vue des cléricaux qui ont trompé les campa
gnards au moyen de ces promesses), ils sont
encore établir, et d'après le ministre ils ne
le seront pas, mais nous verrons les promesses
se renouveler au mois de Juin prochain, avec
moins de conviction sans doute, mais toujours
dans le but de tromper l'électeur.
Il est vrai, on a accordé un impôt de peu
d'importance sur le bétail, mais c'est l'Etat qui
bénéficie le plus de ces droits en laissant au
producteur toutes les courses et tous les désa
gréments du service de la douane.
Ce que nous avons obtenu encore par l'insti
tution du ministère de l'agriculture, c'est une
nouvelle armée de fonctionnaires de toute sorte
et de tout calibre, mais nos cultivateurs sont
d'avis que cela ne leur profite guère.
Sous les ministères libéraux, sans parade,
sans tambour ni trompette, on savait venir en
aide l'industrie agricole. Les associations et
les comices agricoles, fondés sous leurs auspi
ces, recevaient des subsides en rapport avec
leurs besoins ou leurs travaux. Tout en dé
centralisant, on donnait aux progrès en agri
culture une impulsion immense. Il suffisait
nos cléricaux d'imiter ce qu'avaient fait leurs
devanciers.
Nos grands hommes de 1884 en ont pensé
autrement. On n'institue pas un ministère
de l'agriculture pour ne continuer que l'œuvre
de ses devanciers. Puis avant tout, il faut que
ce ministère porte la couleur cléricale, celle de
la maison Beernaert et Ci8.
C'est pourquoi le grand protecteur de l'agri
culture, M. De Bruyn, par un arrêté du 28
Janvier dernier, a complètement changé les
circonscriptions des associations et comices
agricoles du pays, sans avis ou contrairement
l'avis des institutions intéressées ou des per
sonnes compétentes. Au lieu d'avoir un comice
par arrondissement administratif, nous en au
rons désormais treize dans la province, sans
compter ceux qui viendront peut-être encore.
Par son arrêté, d'où la politique semble
n avoir pas été bannie, M. De Bruyn a signé la
mort ou l'impuissance de toutes les associations
agricoles.
En démolissant tout ce qui est au service du
progrès, le cléricalisme reste dans son rôle,
mais que les journaux cléricaux continuent
chanter les louanges et les bienfaits, rendus
au pays par le ministère de l'agriculture, cela
dépasse-'toutes les bornes. Nous nous deman
dons jusqu'à quand cette comédie va-t-elle
durer
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Courlrai-Bruxelles, 5-30 9-5811-162-41
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- 5-20
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Ypres, le 29 Mars 1890.