Chronique locale.
Fermons les yeux pour ne pas voir les dangers
(^ui s'accumulent l'intérieur et (extérieur,
fct remettons-nous, comme s'en remet l'inquie-
tude pourtant bien éveillée de plus d un catho
lique, aux desseins de la Providence. Quand le
péril sera là, Dieu viendra notre aide les
évéques s'en portent garants.
BLAGUES ET BLAGUEURS.
Voici donc la Tuindag passée Mais ce qui ne
l'est pas, c'est l'impression laissée dans le public
par l'attitude et le langage des meneurs du parti
clérical,sénateur Surmont, représentant Collart,
conseiller Henritje et autres dignitaires.
Après avoir fait le possible pour empêcher les
fêtes ou les faire avorter, voici que, dans leur
Moniteurils essayent de les amoindrir, de les
débiner, comme aussi de railler et de vilipender
tous ceux qui y ont pris part et ont contribué
leur succès.
Succès colossal s'il en fut
Jamais, de mémoire d'Yprois, les festivités delà
Tuindag n'ont été aussi brillantes, aussi animées,
et jamais, non plus, elles n'ont attiré en ville un
tel concours d'étrangers, laissant, derrière eux,
une telle somme de prolits nos détaillants de
toute catégorie.
Et cependant, il n'a pas dépendu des chefs du
clan clérical qu'il n'en fût autrement.
On sait le motif, disons mieux, le prétexte de
leur abstention et de leur hostilité. Ils n'ont
pas été invités faire partie de la commission
organisatrice. Belle excuse Comme s'il y avait
bénéfice être chargé de tous les soins, de tous les
labeurs et de toutes les responsabilités que l'or
ganisation de fêtes publiques entraîne Mais en
admettant que ce pût être là une cause de froisse
ment d'amour-propre, était-ce une raison pour
contrarier les efforts des commissaires et tenter
de faire rater les festivités Et l'organisation,
préméditée depuis des mois, de ce fameux festi
val de Poperinghe fixé au deuxième Dimanche
de la Tuindag, qu'a-ce donc été sinon un coup
monté contre le festival fixé au même jour
Ypres Et ces tentatives de détournement et
d'embauchage Voit-on ces soi-disant protec
teurs du petit commerce yprois, ces prétendus
amis de nos détaillants auxquels ils promettent
monts et merveilles pourplus tard, les voit-
on, eux si difficiles sur la qualité des sociétés in
vitées et se gaussant des modestes musiques de
village, les voit-on courir intriguer Westoutre,
Wvtschaete et ailleurs, achetant le concours
ou 1 abstention des fanfares de ces localités? Les
voit-on encore quitter la ville, aller bouder
Voormezeele comme Surmont; se pavanér
Heyst comme Henritje, ou se promener autour
d'un kiosque vide sur le marché désert de Po
peringhe comme Collart Les voit-on, toujours,
blâmer l'avance ceux qui pavoiseront et illu
mineront Les entend-on depuis, riant jaune et
vert, se moquer et des fêtes terminées, et de
ceux qui y ont présidé, et de ceux, même parmi
leurs amis, qui y ont participé, dénigrant le tout
et poussant leurs idiotes plaisanteries jusqu'aux
plus indignes personnalités
Allez toujours on vous connaît beaux mas
ques Ah les fêtés n'ont été que mesquines
Bien, bien Vous ne pouviez, trahissant vos ja
loux soucis, mieux faire entendre que ces fêtes,si
bien réussies, ont la lois contrarié vos desseins,
déjoué vos plans et déconcerté vos espérances.
Vous auriez voulu qu'elles se fussent réduit
rien; que le double anniversaire se fût passé
sans la moindre manifestationpatriotique; qu'au
cun étranger ne fût venu visiter notre ville
qu'aucune dépense n'eût été faite. C'est ça qui
aurait fait votre affaire C'est alors qu'on vous
eut vus, réellement triomphants, entonner d'au
tres antennes sur la pingrerie libérale et le dé
dain de l'administration pour les intérêts des
contribuables C'est alors qu'on aurait pu gober
vos promesses, et croire que, si vous triomphiez
aux élections, vous apporteriez l'âge d'or avec
un festival chaque 1 uindag, le tout avec votre
inépuisable caisse dont un jour un des vôtres, es
pèce de quart de noble, dans un accès de franche
mauvaise humeur au sujet d'une élection qui
avait envoyé la Chambre un autre que lui, di
sait Ah ça est-ce qu'elle va aider au pot-au-feu
de ce roturier sans fortune Caisse où afflue
tout cet argent dont tant de familles se plaignent
d'être dépouillées, deshéritées, les unes, par une
vieille tante; les autres, par une vieille cousine;
celles-ci par un oncle tombé en enfance celles-
là par un cousin devenu cagot.
Eh bien avant qu'il vous soit donné de prou
ver la majorité des électeurs yprois que vous
ne leur avez fait que des promesses en 1 air; que
vous les avez leurrés, trompés et dupés, il
s'écoulera encore bien de l'eau dans l'Yperlée.
Vous vous vantez de conquérir l'Hôtel de
Ville au mois d'Octobre prochain et de défenes-
trer votre façon la majorité libérale qui siège
au Conseil... Oh la bonne blague la plaisante
forfanterie Il y a trente ans et plus que les
Henritje, de père en fils, menacent et vaticinent
sur ce ton... Attends,je viens comme se plaisait
exclamer votre ex-rédacteur... Et, en atten
dant, entendez ceci la ville d'Ypres n'est pas
encore mûre pour M. Surmont et Cie... M. le
baron aura de nouveau le cou plus percé que
Goliath dont il a tant ri, et lui et toute sa suite
recevront, aux comices prochains, la plus verte
raclée de bois vert que jamais ils aient eue.
Octobre Octobre Vous répéterez cela, mes
bons amis... mais sur un tout autre ton, soyez-
en sûrs, bien sûrs
INQUIÉTANT.
On demande de tous les coins des numéros du
Journal d'Ypres.
C'est le Journal lui-même qui l'annonce, ajou
tant qu'il ne sait quoi attribuer ce succès.
Hélas! hélas! c'était prévoir et\àcraindre.
Inévitable effet de l'abus des fruits verts en
cette perfide saison
Quelle foire mes amis
Quelle foire dans tous les coins
Ohé le Journal s. v. p.
A LA BOUTIQUE.
A en croire M. Crac de la rue au Beurre, on se
firesse de tous côtés, dans ses bureaux, pour avoir
e Journal d'Ypres de Mercredi dernier. C'est sur
tout du Nord de la France qu'on vient se bous
culer pour avoir ce numéro.
Ail right, en avant, M. Crac, pour peu que
cela continue il faudra établir une seconde
presse sur les bords de la Garonne, car vous êtes
unique de votre espèce et votre polémique ne
saurait trop se répandre sur tous les points de
l'univers.
Nous aussi, et vous ne nous citez pas, ingrat,
aurions désiré obtenir un wagonet de vos saintes
et véridiques feuilles; nous en avons eu quelques-
unes, mais pas assez, que nous avons envoyées
nos amis. Nous tenons beaucoup vous faire
connaître et, puisque vous nous servez si bien,
nous vous promettons que nous saisirons toutes
les occasions de vous fournir le plus de lecteurs
possible. Mais il faut continuer sur le même ton
que vous avez si délicatement adopté. Pas de dé
faillance; toujours mentir et insulter raide;
rager dans la gueule cracher votre bave, sans
égard pour personne et, si on en rit, redoublez
de zèle, de colère, de violence et, plus vous serez
bouffon, plus on vous achètera. C'est un conseil
d'ami, suivez-le.
Reuske est mort, mort d'apoplexie et le Jour
nal Y Ypres. au cœur sensible, a, non la douleur,
mais le plaisir d'en faire part ses lecteurs.
C'est le plus grand bonheur que le protecteur de
nos festivités pût éprouver, après avoir mordu
Bon frein pendant les huit jours de la kermesse,
la vue de cet enthousiasme général qui donnait
un croc-en-jambe sanglant tous ses efforts pour
faire échouer la Tuindag. Cela le console, mais
mal, de toutes les contrariétés qu'il a dû endurer
et si une demi-douzaine de conseillers pouvaient
avoir le sort de Reuske, mais pour de bon, juste
ciel, quelle joie dans le camp clérical, quel ri
godon on y danserait Mais nous n'en sommes
pas là, malheureusement pour les jésuites robe
courte. Nous n'en sommes pas même entière
ment là, comme le voudrait le Journal d'Ypres,
en ce qui concerne Goliath. Il est vrai que Go
liath n échappe pas toujours, plus que tout au
tre, aux chiquenaudes du vent, mais il n'en
gieurt pas aussi facilement que le souhaite notre
joyeux confrère.
Goliath a la vie dure et il en jouera encore de
belles ses amis les cléricaux. Après tout, qu'y
a-t-il d'étonnant ce qu'un géant ait un moment
de faiblesse, surtout après une semaine de liesse
et de fatigue Et qui est-ce qui peut résister aux
fureurs d'Eole Les saints et les saintes mêmes
doivent céder devant les coups redoublés d'un
vent en furie. Ne vit-on pas, le matin même du
15, une Vierge de S4 Jacques, perchée sur son
trône, perdre sa couronne, au beau cours de la
procession Voilà cependant une Vierge, la
quelle tant de fidèles demandent des miracles,
qui se voit décoiffer comme le plus vulgaire des
géants. Le Journal ne dit rien de cet accroc
l'une des plus puissantes patronnes du Ciel, mais
il se gausse de Reuske, qui puise toute sa force
en lui-même et qui n'a d'autre secours atten
dre que celui que peuvent lui accorder ses amis,
ces affreux libéraux. Or, si les saints .du Paradis,
qui se reposent toute l'année, ne peuvent résister
un coup de vent, pour une fois par an qu'ils
mettent le nez dehors, comment exiger d'un sim
ple Goliath des prodiges surnaturels Et c'est
même une bonne affaire pour MM. les catho
liques, car si, par aventure, les géants se mon
traient plus forts que les saints qu'on promène
en procession, ce ne sont plus ceux-ci qu'on
adorerait, mais les autres. Et voyez où cela
nous mènerait Quelle révolution dans la bou
tique N'est-ce pas déjà assez que deux pro
cessions, l'une de S4 Martin l'autre de S4
Jacques, sans compter le fiasco retentissant
des Blaurce Koussen aient dû la première
renoncer sa sortie, l'autre courir au galop
travers la pluie, tandis que Reuske se pa
vanait fièrement la faveur d'un soleil ra
dieux En somme, le doigt de Dieu n'est-il pas
assez expressif
Ne poussons pas plus loin la comparaison, car,
en vérité, on ne voit que trop où elle nous con
duirait et nous n'avons nulle envie d'abuser de
nos avantages. Dans le bonheur même, il faut
savoir se modérer.
a; cg3i«-t
Mort, Goliath
Qui dit cela
Le Journal d'Ypres,
Ah le Jourml d'Ypres On ne l'écoute
lus, le Journal d'Ypres. Dit-il autre chose que
es sottises, depuis quelques mois Mort Go
liath si peu mort, le brave Goliath, qu'il se
mettra en route dans quelques jours pour le
beau pays de France.
Bah ainsi, pas vraie, donc, l'histoire de
sa mort
Ah rien, vousdis-je. Goliath a reçu une
invitation pour assister une fête de bienfaisan
ce organisée Lille, au bénéfice de Port-de-
France et de S4 Etienne. Il a accepté et s'y
rendra. Il s'agit d'une bonne œuvre et il tient
y jouer sa partie. Les Français l'ont vu ici
Ypres ils en ont été ravis, pendant que les clé
ricaux lui faisaient la grimace, et ils ont insisté
pour qu'il assistât leur fête du 24. Reuske, bon
enfant, a promis d'en être. On lui donnera la
S lace d'honneur au cortège et les habitants du
ord l'entoureront de tous les honneurs dûs sa
considération, et par une attention qu'on ne
saurait assez savourer, ils l'ont prié de leur ap
porter un millier de numéros du Journal J Ypres,
comme ils en ont déjà eu. On se souvient en effet
que le Journal d?Ypres en a expédié dans le Nord
un nombre considérable et cela a beaucoup amu
sé ces Français, peu habitués une littérature
aussi divertissante ils en voudraient encore.
C'est peu de chose pour Reuske de se charger
d'un ballot de journaux, et pour le Journal
d"1 Ypres, c'est une bonne affaire.
Donc Goliath partira pour Lille, tous frais
charge de la grande ville du Nord
Bon voyage et au revoir.
Le Journal d'Ypres évalue 20,000 fr. le coût
de nos fêtes il n'en sait pas le premier mot,
mais il éprouve le besoin de jeter un gros chiffre
la face du public. S'il pouvait prouver que ce
sont là des dépenses folles et qu'une administra-
argentcomme vous affectez de le dire Votre
argent, ah le bon mot On sait ce que cela signi
fie, mes bons apôtres... C'est bien cet argent-là
qui est celui des autres, puisé qu'il est dans cette