DU 9 OCTOBRE 1890.
Conseil communal d'Ypres.
Séance du i Octobre 1890.
La dépêche de M. le Gouverneur se termine
ainsi A l'effet de prévenir toute nouvelle
cause de retard, je tiens vous prévenir, Mes-
n sieurs, que M. le Ministre de l'Intérieur et de
l'Instruction publique exige que dans sa déli-
n bération le Conseil communal fixe d'une ma-
n nière précise le montant de l'indemnité
allouer, par tête d'enfant indigent, aux mem-
n bres du personnel enseignant, alors même que
ceux-ci jouiraient d'un traitement fixe.
M. le Président rappelle également qu'il a,
dans la même séance, donné lecture d'une déli
bération du Bureau de Bienfaisance d'où il con-
ste que cette administration charitable ne peut,
vu l'insuffisance de ses ressources, intervenir
dans les frais de l'instruction donner aux in
digents secourus par elle.
Le Collège vous a proposé alors, MM., de vous
conformer au vœu de la loi, c"est-à-dire de
dresser les listps d'après le mode indiqué par
l'autorité supérieure et de déterminer le taux de
la rétribution fixer par tête d'enfant. Le mi-
nerval proposé était de fr. 0-25 c. par mois ou
3 fr. par an.
On obj ecte peut-être que nous avons mis du
temps nous conformer la loi. Nous pourrons
répondre que ce n'est que dans ces derniers
temps que le gouvernement nous a invités mo
difier notre attitude. Nombre de villes d'ail
leurs ont fait comme -Yprès, et pas plus qu'Ypres,
elles n'ont jusqu'à ce jour été le moins du mon
de inquiétées.
Quoiqu'il eu soit, la mesure conseillée alors
ar le Collège n'a pas été prise, certains mem-
res ayant demandé le temps de réfléchir et
prié le Collège de faire un nouvel examen de
la question.
Nouvelle étude faite, le Collège est d'avis,
MM., qu'il y a lieu de maintenir, dans nos éco
les, le principe de la gratuité, tout en détermi
nant, conformément aux prescriptions légales,
le taux du minerval payer pour les enfants des
parents secourus par le Bureau de Bienfaisance.
Nous avons le droit, en vertu de la loi même
du 20 Septembre 1884, de décréter le principe
de la gratuité cela est incontestable. Seule
ment, le gouvernement peut y répondre par une
réduction de ses subsides mais il faut espérer
que cette réduction ne sera jamais bien grande,
Yprès fesant beaucoup pour l'instruction pu
blique, et que nos finances ne s'en ressentiront
guères.
Il y a encore ceci c'est que la ville touche
annuellement les revenus des fondations faites
il y a 100 et 200 ans en faveur de l'instruction
gratuite, et que ce serait aller manifestement
l'encontre de la volonté des testateurs que
d'exiger aujourd'hui une rétribution pour 1 in
struction laquelle les indigents ont droit. Or,
nous tenons respecter la volonté des fonda
teurs et nous conformer leurs intentions.
C'est dans cet ordre d'idées que le Collège a
l'honneur, MM., de vous proposer la délibéra
tion que voici
Le Conseil,
Vu la dépêche de Monsieur le Gouverneur, en
date du 8 Juillet dernier
Vu la loi du 20 Septembre 1884 organique de
l'instruction primaire (art. 3) et la circulaire
Ministérielle du 21 même mois, relative l'an*
plication de cette loi
Vu la lettre du Bureau de Bienfaisance en
date du lr Juillet 1889, n° 4395, par laquelle le
dit Bureau déclare que ses ressources ne lui per
mettent pas d'intervenir darts les frais résulter
de l'instruction des enfants indigents
Revu la délibération en daifo- du 6 Juillet 1889;
Arrête au chiffre de 974 le nombre des enfants
indigents ayant droit l'instruction gratuite
pour l'année 1889-90 fixe 50 centimes par
mois, ou '6 francs pour l'année, le taux de
la rétribution par tête d'enfant pauvre
exprime l'avis qu'il y a lieu d'exonérer le Bu
reau de Bienfaisance de toute charge d'interven
tion dans les frais dont s'agit dit que le mi
nerval toucher éventuellement sera compris,
dans le traitement fixe dont jouissent MM. les
instituteurs, sans majoration de celui-ci dé-
Expédition de la présente délibération sera
soumise en double la Députation Permanente,
en même temps que la délibération du Bureau
de Bienfaisance et les listes des enfants inscrits.
(Très bien. Très bien.1)
De cette façon, dit M. le Président, nous
maintenons intact le principe de la gratuité et
nous nous inclinons, contraints et forcés, devant
la loi de 1884 et devant les injonctions du Gou
vernement.
L'honorable membre ne peut cependant ad
mettre entièrement la délibération dont il vient
d'être donné lecture. 11 ne peut se rallier au
principe de la gratuité qui, d'après lui, doit être
aboli.
La loi, dit M. Colaert, ne défend assurément
pas aux Administrations Communales le droit de
décréter la gratuité de l'enseignement; mais il
est logique, du moment où le Bureau de Bien
faisance est obligé de payer pour les enfants des
parents secourus par lui, il est logique d'exiger
une rétribution pour les enfants dos parents non
indigents. C'est une conséquence logique de
l'application de la loi.
M. le Président vient de nous dire que l'État
pourrait répondre cette proclamation du prin
cipe de la gratuité par une réduction de subsi
des. Je le crains également et je crois que la
Province aussi pourrait diminuer son subside.
n Mais, poursuit M. Colaert, votre soumission
la loi entraîne une autre conséquence
laquelle vous n'avez peut-être pas songé. C'est
n que le Bureau de Bienfaisance îlevra subsidier
les écoles libres,
Je demande donc formellement que le Bureau
de Bienfaisance paie le minerval des enfants in
digents fréquentant les écoles catholiques tout
comme il paiera dorénavant le minerval des
élèves fréquentant les écoles communales.
Une troisième conséquence de votre soumis
sion la loi la modification du traitement des
instituteurs. La loi porte en effet que le miner
val scolaire est attribué aux instituteurs. Il y
aura donc lieu de fixer nouveau leurs traite
ments.
Telles sont, MM.,les considérations quej'avais
faire valoir et les conséquences que doit avoir
la résolution que vous allez prendre.
J'ai dit.
L'arrêté ministériel du 21 Septembre 1884 dé
termine les diverses catégories d'enfants ayant
droit l'instruction gratuite. Ce sont les suivan
tes
Pour ceux-là, aucune difficulté ne peut exister.
Leur droit résulte de leur inscription sur les
registres des secourus.
h) Les enfants des ouvriers qui n'ont pour
revenu que le produit de leur salaire journalier.
Eh bien, lorsqu'on consulte les listes dressées
par le Collège, lorsqu'on les examine de très
près, on acquiert cette conviction que tous les
enfants y énumérés se trouvent dans l'une ou
l'autre des catégories que je viens d'énoncer.
On a dit que le fils de M. Rotschild, s'il se
présentait l'école communale, y serait admis.
Il ne faut pas exagérer. D'ailleurs le fils de M.
Rotschild ne se présentera pas. On ne trouvera
pas de noms semblables sur les listes. Les en
fants des riches ne vont pas la Loye. On peut
affirmer qu'il n'y a guère là que des enfantsd'ou-
vriers et d'artisans, ayant du mal nouer les
deux bouts de l'année après avoir travaillé et
peiné sans relâche. Cela n'est pas douteux.
Et supposons qu'il y ait par ci par là une per
sonne dont on ignore les ressources, laquelle
on soupçonne quelque avoir, quelle enquête,
quelle inquisition ne faudrait-il pas se livrer
pour déterminer si elle peut ou non envoyer
gratuitement ses enfants l'école? Il faudra voir
ce qu'elle gagne, ce qu'elle dépense, ce qu'elle
mange, ce qu'elle boit, et tout cela pour faire
entrer six malheureux francs dans la caisse com
munale
Les procédés inquisitoriaux répugnent tout
le monde et pour notre part nous ne les emploie
rons pas.
En déterminant le taux de la rétribution dûe
par tête d'enfant indigent, nous nous confor-
(suite et pin).
M. le Président rappelle que dans une précé
dente séance il a donné lecture d'une dépêche
de M. le Gouverneur de la province par laquelle
ce haut fonctionnaire invite le Conseil statuer
sans retard sur les listes des enfants indigents
admis au bénéfice de l'instruction gratuite.
M. Colaert rappelle qu'à deux reprises déjà il a
insisté pour que le Conseil se décidât enfin
exécuter la loi de 1884. A deux reprises, dit-il,
il a invité le Conseil entrer- dan3 la voie dans
laquelle le Collège entre aujourd'hui. Il est
heureux de constater ces bonnes dispositions.
M. Bossaert Ne parlons pas de la Province
elle n'intervient que pour fr. 881-00.
M. Colaert: Si peu que ce soit, elle pourrait ré
duire encore. M.le Président espère que la réduc
tion des subsides de l'État ne serait jamais bien
forte. Je ne partage pas cette opinion optimiste
j'ai au contraire des craintes trè3 vives.
M. Bossaert Je ne comprends pas Entendez-
vous que le Bureau de Bienfaisance devra payer
aux écoles libres le minerval des enfants pauvres
secourus par lui et fréquentant ces écoles
M. Colaert Précisément Ce sera la consé
quence de votre résolution
M. Bossaert Eh bien, la loi ne le permet pas.
Il est défendu aux Bureaux de Bienfaisance, com
me aux fabriques d'église, de subsidier,d'une fa
çon directe ou indirecte, les écoles libres. Le3 Bu
reaux de Bienfaisance ne peuvent accorder de
subsides qu'aux écoles officielles ou adoptées
M. Colaert Pas du tout. Lisez la loi. Les Bu
reaux de Bienfaisance possèdent incontestable
ment le droit que vous leur déniez. Au surplus,
depuis la dernière loi qui commine des peines
contre les membres des administrations charita
bles qui abuseraient de leurs fonctions pour fa
voriser les écoles officielles au détriment des
écoles libres, il doit être permis aux Bureaux
de Bienfaisance d'intervenir, de subsidier les
écoles libres aussi bien que les écoles officielles.
M. le Président Quand nous n'aurions invo
quer, pour conserver le principe de la gratuité
de l'instruction primaire, d'autre argument
qu'une longue tradition, cela suffirait déjà pour
nous déterminer. Mais nous avons une autre rai
son, et celle-là réside dans la difficulté qu'il y
aurait décider quelles sont les personnes dont
le3 enfants auraient ou n'auraient pas droit
l'instruction gratuite
a) Les enfants de personnes secourues par les
Bureaux de Bienfaisance.
c) Tous les autres enfants habitant la commu
ne, l'égard desquels il sera reconnu, conformé
ment aux dispositions ci-après, que les personnes
qui en sont chargées ne se trouvent pas dans
une position aisée.