Le toupet du Journal
Le cas de M. Meerseman.
Bal populaire.
Gomme Ypres.
échevin ou, mieux encore, bourgmestre -, qu'il
est, en un mot, le maître de la ville et de tous
ses habitants.
Et son rêve évanoui, heureux encore, il se dit
que ce n'est que partie remise et que, dans quel
ques jours, le songe deviendra réalité... Et sans
le moindre trouble, le moindre repentir, le moin
dre scrupule sans un brin de honte ou de pu
deur, il s'en va trouver ses compagnons de lutte
qui, le méprisant au fond, lui serrent néanmoins
la main par considération du but qu'il poursuit,
et deviennent ainsi ses complices.
Serrer une main pareille, corruptrice, crimi
nelle, infâme
Est-ce possible des gens qui passent et veu
lent passer pour honnêtes Oui, et cela se voit
au grand jour Oh misère de notre nature eh
lâcheté de certains caractères
Mais ces gens ne comprennent-ils donc pas, ou
ne veulent-ils comprendre, que rien que la réus
site d'une élection dans des conditions sembla
bles suffirait pour démoraliser toute une ville
Le Journal ose dire que les catholiques n'ont
amené l'urne aucun malade ou impotent, tan
dis que le parti libéral a fait arriver même les
moribonds.
Toujours la même audace, la même effronte
rie dans le mensonge.
L'usage de forcer les malades se laisser por
ter l'urne a été inventé par les cléricaux eux-
mêmes. Si, cette fois-ci, ils ne l'ont pas mis en
pratique, chose vérifier, c'est qu'ils n'avaient
plus de malades entraîner, ayant tué tous ceux
qu'ils entraînaient d'habitude.
Ne les a-t-on pas vus, passé trois ans, trans
porter au scrutin, en dépit qu'il en eut, le vieux
président M. Sartel, fesant pendant au vieux
médecin Bossaert et d'autres encore
Nous avons hurlé alors, dit le Journal... Et ici
encore il ment.
Non, nous n'avons pas hurlé nous avons tex
tuellement dit ceci
Au réappel de midi, on apporte les malades.
M. Sartel, Président honoraire du Tribunal,
est transporté également. Cela fait peine
voir On se prend déplorer l'ardeur de nos
luttes politiques, quand on voit les mourants
mis en réquisition pour appuyer tel ou tel
parti qui se dispute le pouvoir.
(Numéro du 20 Octobre 1887).
Singulier hurlement, n'est-ce pas
La réquisition des malades est chose regretta
ble, sans doute.
Mais, encore une fois, ce sont les cléricaux qui
ont introduit cela. On sait même, qu'à Namur,
ils ont un jour déposé un cadavre devant l'urne
l'électeur était mort en route.
Les coupables sont ceux qui, par leurs agisse
ments déloyaux et frauduleux, provoquent leurs
adversaires ces extrémités.
Nos malades, indignés des fraudes et des cor
ruptions pratiquées par nos cléricaux, ont tenu
devoir de se faire transporter sur le champ de
bataille.
Grand merci ces vaillants Ils ont con
tribué sauver l'honneur de la ville. Leur dé
vouement console et de la lâcheté ou de l'indiffé
rence des rares qui se sont abstenus, et de la
turpitude de ceux qui se sont laissés gagner, et
de l'ignominie des corrupteurs
Si un vieux dicton laisse aux condamnés vingt-
quatre heures pour maudire leurs juges, il faut
bien passer pareille faveur aux vaincus dans les
luttes politiques. Mais encore ne faut-il 'que les
malédictions soient excessives et, que sous cou
leur d'user du privilège, on en abuse outrance.
C'est ce que font nos cléricaux, ajoutant de nou
veaux mensonges ceux, en nombre incalcula
ble, qu'ils ont nasardés avant le scrutin.
Ainsi ils allèguent que M. N. Meerseman a été
insulté et rudoyé. Si le fait était exact, nous ne
ferions aucune difficulté pour joindre notre blâ
me celui du Journal si sévère qu'il soit.
Oui, M. Meerseman est un de ces hommes, ra
res au camp clérical, dont la parfaite honorabi
lité devrait être un sûr abri contre tout outrage.
Mais informations prises, il se fait que le Jour
nal a singulièrement tronqué les choses, selon
son habitude invétérée du reste. Il y a tout sim
plement que lorsque M. Meerseman, après le
résultat connu du scrutin, est descendu, au mi
lieu d'une foule acclamant les candidats élus et
le coudoyant un peu, l'escalier de l'Hôtel-de-
Ville, quelques mauvais plaisants lui ont mis des
bluets sur le chapeau. Etaient-ce des électeurs
qui se sont permis cette farce déplacée Person
ne n'en sait rien Mais ce que chacun sait, c'est
qu'à chaque élection, il se glisse, dans la multi
tude des électeurs, quantité de gens qui ne de
mandent qu'à s'amuser et boire au compte des
vainqueurs quels qu'ils soient. Et les mêmes indi
vidus qui, si on les laissait faire, taperaient dru
sur les cléricaux vaincus, cogneraient non moins
ferme sur les libéraux culbutés. Cela se voit tou
jours et partout, et la chose n'a en elle-même
aucune importaiite réelle
Mais en admettant même que quelques élec
teurs libéraux mal élevés aient hué et bousculé
l'honorable concitoyen de la rue de Lille, ne
s'est-il pas rencontré, dans cette même rue, un
autre concitoyen qui a encouru une condamna
tion pour avoir un jour, qui n'était pas un jour
d'élection, hué un Ministre et un Gouverneur
passant en voiture devant le cercle clérical Et
fe Journal a-t-il songé alors dire que cha-
7i cun sait apprécier la différence entre la con-
duite des libéraux et celle des catholiques
A-t-il, ce propos, parlé de voyou et de ros-
sard A-t-il formulé le moindre-blâme et expri
mé seulement le moindre regret
Ah bah Il n'y a pour lui de voyoux et de ca
nailles que les libéraux qui se permettent de
manquer de respect un des siens. Mais que les
Blaurce Koussen et autres calottins se permet
tent, vis-à-vis d'un libéral, toutes les gredineries
et polissonneries possibles, ce sont de braves et
honnêtes gens dont il est défendu de dire le
moindre mal.
Ainsi l'entend et le veut la morale calottine,
celle aux deux poids et aux deux mesures.
Nous recevons, avec prière d'insertion, la
lettre suivante
Maintenant que les cléricaux battus exercent
partout de lâches vengeances, est-ce qu'on ne va
pas provoquer des poursuites contre ceux d'en-
tr'eux qui ont fait œuvre de corruption Le
lendemain soir de l'élection, un électeur, venu
de loin, a exhibé une lettre, écrite et signée par
un matador calottin bien connu et portant peu
près textuellement ce qui suit
Ci-joint 20 francs pour frais de voyage. Pour
le reste, je vous remettrai encore quelque chose
Ypres.
Signature.
Ypres, le 14 Octobre 1890.
Cette lettre se trouve, m'assure-t-on, avec
d'autres, aux mains d'un de nos chefs libéraux.
On m'assure aussi que des dons et des promesses
comme ceux qu'elle renferme constituent des
faits de corruption gravement punissables.
Eh bien Est-ce qu'on ne va pas porter
plainte On le devrait d'autant plus, ce ipe
semble, que les faits sont notoirement nom
breux....
La paix aux vaincus l'indulgence pour les
battus tout cela est beau, mais ce ne sont que
des mots... Est-ce que les cléricaux défaits ont
pitié, eux, des nôtres auxquels ils peuvent en
core nuire Est-ce qu'ils ne les sacrifient pas
sans retenue, ni commisération Aux représail
les donc Œil pour œil, dent pour dent Nous
tenons un maître corrupteur par sa sale patte et
ses longues oreilles. Eh bien il faut qu'on le
traîne en justice pour l'exemple des autres
C'est mon humble avis du moins, et j'imagine
aussi que c'est le bon... Puisse-t-on le suivre
Veuillez agréer, etc.
Les constatations des rédacteurs
du Journal.
11 faudra renoncer bientôt relever les âneries
et les méchancetés de ces Messieurs du Journal.
On lit dans le dernier numéro de cette béate
feuille
Nous avons observé que les affiches libérales
n ne portaient pas de timbre. Ce n'est pas la pre-
mière fois que nous constatons ce fait.
n Ils auront donc toujours des faveurs les
agents du fisc ne voient plus clair.
Ceux qui no voient plus clair sont les gens du
Journal.
Ils ne savent donc pas, ces législateurs et ces
avocats, que les affiches électorales, avant le
scrutin, ont, de tout temps, été affranchies du
timbre
Décidément, ils doivent être vingt au moins
pour écrire tant de sottises...
Mais c'est la rage de la calomnie et de la dé
nonciation qui les perd. Jupiter continue les
maintenir en pleine démence.
Pauvres menteurs et pauvres fous
Demain Dimanche, 8 heures du soir, Grand
Bal populaire, dans les salles du Rez-de-Chaus-
sée des Halles.
Par suite du mauvais temps le Reusje ne sortira
pas.
On écrit de Renaix, XÉtoile Belge
Les fraudes électorales de Renaix.
Renaix, 21 Octobre.
L'élection des cléricaux Renaix est la fois
une déception pour nos amis et un scandale sans
précédent. L'honorable De Malander et ses acoly
tes sont élus par la pratique sur une vaste
échelle de la plus odieuse corruption, et c'est
par centaines que l'on compte Renaix les élec
teurs qui ont été soumis aux manœuvres igno
bles d un parti appelé dans le pays entier les
malandrins de Renaix. La victoire des libéraux
était certaine l'élection provinciale dernière
donnait cent vingt voix de majorité aux candi
dats du libéralisme renaisien, Mil. De Keyser et
Snoeck les efforts du parti clérical devaient
donc être proportionnés cette majorité. Les vi
sites faites par les candidats cléricaux aux élec
teurs de Renaix leur avaient donné la juste
somme de leur impopularité, ils ne pouvaient
espérer un succès qu'en s'attachant corrompre
par l'argent, soixante soixante-dix électeurs
libéraux. -
Après avoir tâté le corps électoral renaisien,
les malandrins prirent individuellement les élec
teurs qu'ils voulaient corrompre. Ils leurs en
voyèrent, un, deux ou plusieurs mandataires qui
n'avaient d'autre mission que d'affaiblir les ré
pugnances de l'électeur ce but une fois atteint,
le comité électoral malandrin dépêchait près de
l'électeur un personnage de qualité chargé de
l'enguirlander et finissait par acheter sa victime
tout prix.
Malheureusement pour les malandrins, leurs
armes se retournent contre eux. Acheter des vo
tes n'est pas déjà besogne facile, mais s'assurer
les votes, c'est tout autre chose. Afin de détour
ner cette grosse difficulté, les malandrins ont eu
recours la chimie ils ont fait marquer leurs
votes achetés au moyen d'une aniline appliquée
sur la case réservée aux catholiques et dont l'é
lecteur rapportait la marque son acheteur
après avoir voté.
Mais cette marque a fait tâche d'huile sur un
très grand nombre de bulletins catholiques et le
témoin libéral attaché au 2e bureau en a signalé
et paraphé plus de trente. Ces bulletins ont été
validés quand même par le bureau, dont la ma
jorité était cléricale, malgré les protestations de
M. De Keyser, qui présidait. La fraude par l'a
niline s'est produite également dans les deux
autres bureaux, mais par une disposition de l'é
clairage, le bureau principal qui dépouillait ces
deux bureaux ne s'est pas rendu compte immé
diatement de la fraude commise il a validé un
grand nombre de bulletins portant des taches
qu'il attribuait l'impression ou d'autres cau
ses sans importance. Maintenant que la lumière
éclate aux yeux de tous et que l'attitude piteuse
des cléricaux la confirme, il suffira d'en appeler
l'autorité supérieure pour invalider un Bcrutin
Monsieur l'éditeur du Progrès,
Jules,
(Correspondance particulière).