0 FRANCS PAR AN.
Listes Electorales.
Au pays Borain!
N° 60. Jeudi,
52e ANNÉE.
28 Juillcl 1892.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Le ministère de Ponce-Pilate.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
vires acquir1t eundo.
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le restant de la Belgique et de l'Etranger I'Agence Rossel, 44, rue de la Madeleine,
et 2, rue de l'Enseignement, Bruxelles.
iNous engageons tous nos amis récla
mer leur inscription.
Cet avis s'adresse spécialement
1° Aux personnes qui payent des contri
butions dans d'autres localités
2° A celles qui, par suite de décès, con
tinuent les affaires ou habitent des biens
de leurs parents.
3° Aux (ils aînés ou gendres des veuves
payant le cens
4° Aux citoyens qui, soit par leurs fonc
tions, leurs grades ou leurs diplômes,
pourraient être inscrits en qualité d'élec
teur capacitaire (loi du 24 Août 1883).
Aux termes de la loi, l'administration
communale ne peut donner aucune suite
aux demandes d'inscription présentées
après le 30 Août.
iNous prions instamment nos amis poli
tiques de ne*rien négliger, car il est plus
que probable que les cléricaux traîneront
en longueur la revision constitutionnelle,
et que toutes les élections qui auront
lieu en 1893 se feront d'après les listes
électorales dresser cette année.
Ypres, le 27 Juillet 1892.
Le pays, grâce aux derniers débats parle
mentaires, où M. Bara est intervenu avec sa
vigueur et son éloquence habituelles, est suffi
samment édifié sur la nouvelle altitude du
gouvernement en face de la revision ce
qu'il veut, ce n'est plus, cette fois, éluder la
revision, c'est l'escamoter son profit, en faire
une revision exclusivement cléricale.
Ça a toujours été son but. Mais les dernières
élections ont déçu son espoir d'atteindre aux
deux tiers des voix qui lui eussent donné la
majorité pour révisera sa guise. 11 a donc fallu
chercher autre chose et M. Beernaert a trouvé
cette commission chargée d'examiner les
projets révisionnistes divers proposés jusqu'à
ce jour.
Au premier abord, cela paraît rationnel,
équitable. Mais, outre que la procédure est
contraire aux prescriptions parlementaires,
comme il l'a été démontré la Chambre, il ne
faut pas oublier que celle commission, calquée
sur la force des partis, sera nécessairement
composée de plus de cléricaux que de libéraux,
et que la solution prévoir penchera fatale
ment en faveur des premiers.
Du côté des catholiques et du gouvernement,
les élections dernières se sont faites sur l'occu
pation et l'habitationOn pouvait s'attendre
ce que la droite et le ministère produisissent
d'abord ces systèmes et les soumissent la dis
cussion parlementaire. C'eût été loyal et cor
rect. Mais l'échec était certain et la droite et le
cabinet n'ont osé^engager le débat de peur
d'aboutir une crise ministérielle.
De là, cette «commission justement quali
fiée de traquenard par M. Bara et de
commission des funérailles par M. Graux
au lieu du plein jour de la discussion publique,
on préfère le huis-clos plus favorable aux tri
potages, aux manœuvres louches, qui enterre
raient définitivement la revision, c'est
dire une revision loyale et vraiment démocra
tique.
C'est pour empêcher ce résultat, qui serait
désastreux pour le pays, que la gauche a com
battu avec une ardeur qui ne se démentira
pas, nous en sommes sûr, dans les débats qui
suivront.
Avant la dissolution des Chambres, MM.
Beernaert et Cie avaient une formule révision
niste bien nette et connue de tout le monde
c'était l'occupation.
Et ce n'est pas seulement sur le futur article
47 qu'ils s'étaient fait une opinion et choisi un
système. Sur nombre de points nouveaux, non
compris dans la proposition révisionniste pri
mitive et introduits par eux dans la discussion,
ils avaient préconisé de bien précises et bien
radicales solutions la réorganisation du Sénat
par l'élection deux degrés, la représentation
proportionnelle, le référendum.
On devait s'attendre ce que, devant les
nouvelles Chambres chargées de la besogne
révisionniste, le ministère vint proposer de
traduire en articles législatifs ses théories aussi
énergiquement qu'anticipativement défendues
devant les Chambres défuntes.
Mais point du tout.
Devant des Chambres incompétentes, M.
Beernaert énonçait des réformes et même par
tait en guerre contre sa majorité pour en faire
admettre le principe devant le pouvoir légis
latif souverain et l'heure voulue, M. Beernaert
seclipse il n'a plus rien proposer ni défen
dre.
Le ministère annonce au pays qu'il se désin
téresse de la revision, qu il n'entend prendre
aucune initiative ni assumer aucune responsa
bilité et qu'il laissera faire.
C'est le renversement des principes les plus
évidents, les plus traditionnellement invétérés
du gouvernement parlementaire.
Le devoir du ministère, devant la Consti
tuante comme devant le parlement ordinaire,
est de formuler les propositions de loi qu'il
croit réclamées par l'opinion publique.
On a toujours admis que, pour les questions
importantes, c'est au gouvernement qu'il ap
partient de prendre l'initiative, parce qu'il est
le mieux même de guider les débats et de
présenter des solutions.
Voilà ce qui s'est pratiqué de tout temps.
Cette tradition, M. Beernaert la déserte
ce rôle normal du gouvernement, il l'abdique.
11 se déclare impuissant formuler des pro
positions.
Sa besogne, il veut s'en décharger sur une
commission parlementaire.
Pourquoi Parce qu'il a peur d'être mis en
minorité sur l'une ou l aulre des propositions
qu'il soumettrait au parlement, et de voir le
pouvoir lui échapper la suite de pareil échec.
L'amour du portefeuille, voilà le principe de
haute politique et de patriotique sagesse qui
dirige nos gouvernants.
Que le gouvernement s'éclipse, pourvu que
les ministres demeurent
Pour les naïfs qui ont encore le courage de
lire les journaux cléricaux, il est entendu que
nos curés et nos vicaires ne s'occupent jamais
de politique, et que leur unique mission, mission
de paix et de concorde, se borne aux exercices
du culte, la propagation de la foi et la con
version des indifférents, des hérétiques et des
libres-penseurs.
Or donc écoutez cette histoire
Une de nos plus populeuses communes du
Borinage, située un peu plus de deux lieues de
Mons, avait le bonheur d'avoir pour curé un
homme qui avait pris ses chimères pour la
réalité, qui ne voulait pas jouer au maître et
seigneur en dehors de son église et dont l'unique
préoccupation était de vivre en bonne intelli
gence avec toutes ses ouailles.
Notez bien que se fût-il jeté dans la politique,
les résultats eussent été bien piètres la com
mune dont nous parlons, étant une de celles où
l'on trouve, en fait de parti clérical, un état-
major [et de 4e classe seulement] et assez
de soldats pour faire un demi-peloton.
Aux élections communales et provinciales nos
adversaires n'y engagent jamais de lutte
faute d'électeurs.
Toutefois la conduite de notre curé, un curé
genre 1830 [il y en a encore une demi-douzaine
en Belgique] ne pouvait convenir aux vingt ou
trente cléricaux de l'endroit, la tête desquels
se trouvait la supérieure du couvent.
A côté de ce général en jupons s'agitaient un
candidat manqué des élections de Mons, rentier
de profession, un industriel quelconque, aussi
léger que les produits qu'il fabrique et un apo
thicaire qui la trituration de pilules laissait
de nombreux loisirs.
On commença par donner de bons conseils
notre curé, qui déclara vouloir se passer de
conseils et de conseillers.
La guerre fut allumée du coup et bientôt tou
tes relations cessèrent entre curé et cléricaux, et
ce qui fut plus grave, notre prêtre cessa même
ses visites aux tendres épouses de nos calotins.
Il devint le curé des libéraux.
On résolut de se venger, et un beau jour ap
parut une liste, une pétition plutôt, pour de
mander l'évêque de Tournai le déplacement de
ce vilain, ce galeux, ce libre-penseur enfin.
Socialistes et libéraux, qui, quoique ne fré
quentant guère l'église, se trouvaient bien avec
LE
PROGRES