Chronique locale.
A nos lecteurs
Gomment
on abuse du ventre d'autrui
Une
Administration modèle.
L\os |4-|5. Dimanche,
53e ANNÉE.
19 Février 1895.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Nous donnons aujourdhui en supplément le
compl'e-rendu de la mémorable séance duCon-
seil communal du 11 Février dernier.
Nous engageons vivement nos lecteurs et les
contribuables de la ville dTpres lire le rap
port de M. le Conseiller Brunfaul, ils pourront
se convaincre, une fois de plus, de quelle façon
nos aigles administrent les finances de leur
chère cité.
ou
comment on obtient une voix.
Le chercheur, qui voudra un jour écrire l'his
toire des Pompiers, fera un livre curieux lire.
Déjà Pline l'Ancien, dans son Histoire de Rome
en parle. Il est vrai qu'à cette époque, le3 Pom
piers n'étaient pas organisés comme de nos jours
et qu'ils ne coûtaient pas 39,000 francs en vingt-
un mois il est vrai, aussi qu'ils ne portaient pas
casque et plumet qu'ils n'avaient ni vareuse,
ni pet-en-1 air, ni tunique passe-poil, que les
Baus de ces temps reculés ne portaient pas de
bottes l'écuyère pour aller au feu, et que
la pompe foulante et aspirante avec boyaux en
caoutchouc était chose inconnue que leurs
seuls engins étaient des seaux, des échelles, des
cordages, des crampons, et que n'ayant pas de
pompes ils ne pouvaient prétendre au titre pom
peux de pompiers extinclorestels ils s'appe
laient tout modestement. Depuis, l'institution
s'est perfectionnée d'âge en âge et l'on a vu, le
pompier de Nanterre, d'inoubliable mémoire, et
le pompier de Bouzy le Têtu, dans Nos Bons
Villageois et d'autres, nous en passons, qui tous
jouèrent un rôle qui marque bien l'importance
qu'a acquise cette intéressante institution dans
notre société moderne, tel point que le sort
d'une politique a été plus d'une fois mise entre
les mains de ces implacables protecteurs des
édifices publics et privés. Témoin encore ce maire
qui perdit son éenarpe de magistrat rien que
fiour avoir fait l'acquisition d'une pompe sans
'approbation de ses administrés. Conçoit-on,
en effet, pareille étourderie de la part du pre
mier serviteur d'une cité
Et, ici, en va-t-il autrement Et entre la
pompe et l'éckarpe il n'y aurait aucune corré
lation
Voyons ce qui s'est passé en la séance du Con
seil communal du 11 Février. Il s'agit, comme
plus haut, de l'achat d'une pompe.
Yeiie PomP0) au prix ridiculement modeste de
4,000 francs.
deux ans 39,000 fr., rien que pour ce service,
alors que sous l'ancienne administration on ne
dépensait pas la moitié et cependant ce service
était très convenablement organisé.
Et M. Brunfaut montre, pièces en main, clair
comme le jour, que les Pompiers out coûté la
ville, en moins de deux ans, puisque l'adminis
tration actuelle n'est entrée en fonctions qu'en
Avril 1891, la bagatelle de fr. 39,000
Et aucun membre du Collège ne s'en doutait
Faut-il que cette administration marche sur des
béquilles
Néanmoins M. Surmont persiste demander
l'acquisition d'une nouvelle pompe.
Après le drôle, le comique. C'est ici que cela
devient comique.
Après quelques objections échangées entre
adversaires et partisans de la pompe 4,000 fr.
Le Secrétaire annote les oui et les non.
Il y a 6 oui et G non.
M. le Bourgmestre compte les têtes 1, 2, 3,
4, 512. Tiens, 12. Il fait le décompte des
12 et n'arrive pas débrouiller ses 6 contre 6.
Tableau.
Le vote a été acquis la pompe, au milieu
d'un rire général.
A servir l'histoire complète des Pompiers, et
l'on y verra comment, sous une administration
cléricale, les voix s'obtiennent et comment on se
décharge sur le ventre du voisin d'un vote em
barrassant.
A la séance du Conseil communal assistaient,
mêlés au public, un grand nombre de sans-tra
vail.
Après la séance un sans-travails'approchant
de la table du Conseil, demande M. le Bourg
mestre la parole.
M. le Bourgmestre la lui refusa, alléguant
que le Conseil allait entrer en Comité secret et
que de plus ce n'était ni le moment ni le lieu
pour le public de s'entretenir avec l'Adminis
tration. Delà, rumeurs parmi les sans-travail,
des mots peu flatteurs ah cela va comme ça,
avec les calotins et nos fabriques, et vos pro
messes, etc.
M. le Bourgmestre, visiblement gêné, donna
l'ordre de chercher la police. Les murmures
continuèrent, la police arriva et la place fut
évacuée.
Il n'y eut pas d'autre désordre.
Morale. 1° Quand on fait des promesses, il
faut les tenir.
2° Quand aux séances du Conseil on intronise
la claque, il arrive un jour qu'on obtient la
contre-claque.
3° Qui sème le vent recueille la tempête.
Il est de notoriété que quand le Bourgmestre
demandait l'autorisation d'acheter une pompe,
cette pompe était déjà achetée depuis longtemps
et que c'est le commandant Baus qui l'avait
ordonnée.
Il y a mieux. Ce même commandant prétend
maintenant qu'il faut changer les BOITES DES
BOUCHES A EAU, dont coût 5,000 francs.
Ah ça, quand cela finira-t-il
Ce troisième échevin va-t-il nous ruiner tout-
à-fait
Nous savons que ce Monsieur a la prétention
de tout diriger et qu'il y a trois mois qu'il se
flattait publiquement d'avoir étudié le budget,
mais cela ne fait pas notre affaire. Si les ânes
doivent tirer notre char, que les chevaux les
haridelles s'en aillent, et vite Alors nous
verrons qui nous tire.
La dernière séance du Conseil communal a
été remarquable en ce sens que nos maîtres, ces
éminents financiers, ont donné la preuve irré
cusable de leurs talents administratifs. Dire que
jamais un Collège échevinal n'a été aplati com
me l'a été le nôtre, le 11 Février, paraîtra une
exagération manifeste, et cependant rien n'est
plus vrai, et quoiqu'on dise,jamais on ne rendra,
avec assez de précision, la scène comme elle s'est
passée, avec sa foudroyante déroute et sa pi
toyable défaite. Toujours on sera en dessous de
la vérité. Qu'on se figure deux ou trois trois,
quand on y comprend M. Berghman manne
quins bourrés de son que, d'une bonne secousse,
on vide tout d'un coup et qu'on voit, en quelques
secondes, tomber en un paquet informe, c'est le
spectacle que nous offraient nos maîtres quand
M. Brunfaut dépeçait le fameux budget de
1893, Bi bruyamment annoncé et si impatiem
ment attendu.
LE PROGRÈS
vires acquir1t edndo.
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00.
Idem. Pour le restant du pays7-00.
'out ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20.
INSERTIONS Annonces: la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames: la ligne, fr. 0-25
Insertions Judiciaires la ligne, un franc.
\#- aqqonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du Phocrês Pour
le rtuaiit de la Belgique et de l'Etranger 1'Agence Rossel, 44, rue de la Madeleine,
et 2, rue de l'Enseignement, Bruxelles.
Mle Président propose l'achat d'une nou-
M. BrunfautConseiller et ancien Comman
dant des Pompiers fait remarquer que cette
acquisition est inopportune inopportune, vu la
suffisance du matériel existant inopportune,
vu 1 état précaire de nos finances, au point où
nos nouveaux administrateurs les ont réduites.
Déjà, dit-il, vous avez dépensé en moins de
M. ColaertEchevin 39,000 fr., où cher
chez-vous cela
M. Brunfaut. Dans mes notes.
M. le Président. Vous rêvez. Il n'est pas
question de 39,000 fr.
M. Brunfaut. Je rêve Non, c'est vous qui
rê7ez. Je vais vous le démontrer.
M. SurmontPrésident met la question aux
voix. On vote par oui ou non.
M. Surmont. 6 oui et Gnon, comment cela
est-il possible Cela ne se peut pas.
Un membre. Mais si. Nous sommes 12, et il
y a 6 oui et 6 non, cela lait 12. Donc pas de
pompe.
M. Surmont. Comment 12 Comment som
mes-nous 12
M. le Bourgmestre. M. Breyne-Devos, vous
avez dit nou
M. Breyne-DevosConseiller. Oui.
M. le Bourgmestre. Comment
Plusieurs membres. Il a dit non.
M. le Bourgmestre. Comment vous avez dit
non
M. Van Eeckhout, Conseiller. Certainement
il a dit non.
M. le Bourgmestre. C'est bien certain, M.
de Vos
M. Breyne-Devos. Ce n'est pas moi été, M.
le Bourgmestre. Et M. Breyne, éloignant quel
que peu sa chaise de M. Van Eeckhout, son voi
sin de gauche, après l'avoir toisé, d'un air
inquiet, au-dessous de sou gilet, et désignant M.
Van Eeckhout c'est lui qui a dit non
M. Van Eeckhout. Moi
M. Breyne-DevosOui, oui, vous êtes ven
triloque. Il est ventriloque, M.le Bourgmestre.il
fraie avec le diable Et M. Breyne s'éloigne de
plus en plus de M. Van Eeckhout, regardant,
avec eflroi, son ventre.