L'Alcoolisme. une délicate question de principe a été plaidé ce matin devant le tribunal de commerce. L'Union du Crédit confiait l'autre jour la Banque Nationale une traite en recouvrement sur un sieur B... Gilly. La Banque Nationale fit présenter l'efiet par les soins de l'administra tion des postes. Mais voici qu'il y a Gilly trente-deux per sonnes du nom de B... La traite ne portait aucun firénom ni adresse. Tous les B... niant l'un après 'autre devoir quoi que ce soit et même connaî tre le tireur de l'eiiet, la poste crut devoir dres ser 32 protêts. Dont coût 64 Ir. que l'Union du Crédit dut rembourser. D'où le procès actuel. L'Union du Crédit plaide qu'un seul protêt était nécessaire. En cas d'indication fausse du domicile, l'acte de protêt constate que le débi teur n'a pas été trouvé dans la commune, fireuve le paragraphe final de l'article 2 de la oi du 10 Juillet 1877. Pardon, répond la poste, le protêt doit être fait au domicile indiqué sur l'effet ou, défaut d'indication, au domicile de celui par qui l'effet est payable. Même article, même loi. Dans le doute, nous avons dressé protêt partout... Et la traite était d'un import de fr. 166.06 Voilà qui n'arriverait certes pas Ypres. Quand le tiré ne serait indiqué que par la seule initiale Bon saurait de suite qui on a affaire. c-^^7i Dans un précédent article nous avons essayé de caractériser la situation créée notre mal heureux pays par son infernale passion pour les spiritueux. Nul ne peut nous taxer dexagéra- tion car les chiffres que nous avons cités ont été empruntés des documents officiels. Et les re mèdes, dira-t-on Les remèdes Ah com me il serait facile de les découvrir et de les appliquer si tout le monde voulait rivaliser de zèle dans la lulte contre l'alcoolisme Il n'est pas nécessaire de développer longuement cette considération si le peuple était initié aux bienfaits de (épargne et de la prévoyance, l'a bus des spiritueux n'étendrait pas ses incessants ravages. Que l'on multiplie donc les sociétés de secours mutuels, les caisses de retraite, les banques populaires. Que l'on fournisse une dis traction intelligente et honnête la classe la borieuse en créant des bibliothèques publiques et en distribuant le catalogue gratuitement, car cest souvent en le parcourant que naît le désir de consulter certains ouvrages et que s acquiert le goût de la lecture. Que l'on multiplie les cercles d'agrément du genre de la Société Fran klin de Liège, des Sociétés Populaires de Ver- viers, de la Société Callier de Gand. Que l'on jropage l'institution des écoles ménagères trop ongtemps attendues elles sont bien rares dans a classe populaire et même dans la petite xjurgeoisie, les femmes sachant tenir leur inté rieur avec ordre et propreté souvent c'est la saleté du logis et l'insuffisance de la nourriture qui poussent l'ouvrier au cabaret, où il va cher cher dans l'ivresse l'oubli de sa misère. Que les personnes généreuses, s'intéressantau bien-être et l'éducation des travailleurs, répandent profusion des brochures de propagande, telles que Genièvre et C' d Henri Martel et Du rôle de la femme dans la lulte contre ialcoolisme )ar M11' Pascal, que leur prix minime met la jortée de toutes les bourses. Quelles s'affilient a Ligue patriotique contre Ialcoolisme laquelle condamne seulement l a bus des liqueurs fortes et cherche grouper tous ceux qui s'efforcent d'arracher le peuple au vice qui le dégrade et le ruine. Que les patrons prennent I habitude de payer leurs ouvriers le Jeudi. Ce n'est un se cret pour personne que ceux-ci séjournent longtemps au cabaretle Samedi parce que ie len demain est un jour de repos. Que des maisons ouvrières, coquettes et salubres. surgissent dans toutes nos localités un peu importantes, de préférence dans les centres industriels. Trop souvent les travailleurs sont relégués dans des taudis sordides qu'ils prennent en horreur, ce qui les détermine quitter leur intérieur, re noncer la vie de famille, pour se rendre l'estaminet qui les attire, les séduit et les retient par son apparence de confort. Pourquoi ne pas familiariser nos populations avec la consomma tion du vin d Algérie, d'Italie et d Espagne qui est pur, agréable et moins coûteux que l eau- de-vie frelatée dont s'abreuvent nos ouvriers et nos campagnards A l'Etat incombe la mission de décréter des mesures énergiques pour aider les efforts de l'initiative individuelle. Le monopole de la fa brication du genièvre, la réduction du nombre excessif des débits de boissons, une surveillan ce pour la repression des falsifications si nom breuses et si nuisibles, un dégrèvement des droits d'accises sur la préparation de la bière, l'application rigoureuse de la loi sur l'ivresse publique, voilà des mesures dont l'efficacite ne tarderait pas se faire sentir. Comment se fait-il donc que la nation belge demeure indif férente la vue des désastres de l'intemperance? Comment Mais parce que peu de personnes ont étudié cette question qui prime peut-être toutes les autres en importance. C'est ce qu'ont compris certains exploitants d'ardoisières de la province de Luxembourg qui ont fait apposer dans leurs ateliers, pour l'édification de leurs ouvriers, des affiches résumant une partie des résultats de l'intempérance avec une concission pleine deloquence L'alcoolisme. Il se consomme annuellement dans les 155,000 cabarets existant en Belgique 7O MILLIONS de litres de genièvre qui coû tent la nation belge 135 MILLIONS de francs. Sur 1,500,000 hommes valides que renferme la population de notre pays, il y en a 300,000 dont le cerveau est altéré par l'a bus des spiritueux. On estime 25,000 par an le nombre des individus succombant préma turément chez nous par excès de boissons for tes. Tandis que depuis 15 ans la population ne s'est accrue que de 14 la consommation du genièvre a augmenté de 37 et avec elle ont augmenté Les cas de fol ie de 45 La criminalité de 74% Les cas de suicide de 80% La mendicité et le vagabondage de 150 dette situation est due principalement au développement de Ialcoolisme qui est un fléau plus redoutable que la peste, la famine, le cole- ra ou la guerre. Quels chiffres sinistres Ah si celte épouvan table statistique était connue de la nation, quel émoi elle soulèverait dans notre pays Qu'on répande donc ce tableau profusion qu il ait sa place dans tous nos lieux publics. La Ligue patriotique contre l'alcoolisme nepour - rail pas rendre de service plus important la Belgique qu'en l'éclairant sur le danger auquel l'expose son funeste penchant pour les boissons enivrantes. Le triple vote des instituteurs. Le ministre de l'intérieur a consulté les députations permanentes des neuf provinces au sujet de la composition de la future liste des capacitaires ayant droit deux votes supplé mentaires. Voici un extrait du rapport présenté la députation du Brabant par M. Defré, au sujet des instituteurs communaux Si l'on a voulu donner une véritable prime la capacité, il serait illogique de refuser le double vote aux instituteurs sortis des écoles communales, alors qu'on l'accorde ceux qui ont suivi les cours des collèges ou athénées. Les études des premiers sont égales, sinon su périeures celles des secondes. C'est ce qu'il est indispensable de démontrer. On n'entre l'école normale qu'à l'âge de seize ans accomplis et après avoir subi un exa men sur le programme du quatrième degré des écoles primaires, c'est-à-dire de l'enseignement moyen du degré intérieur dans ses éléments es sentiels, les langues étrangères exceptées, ou encore de la quatrième professionnelle des athé nées. J'ajouterai même que dans certains éta blissements de province les collèges épisco- paux surtout le programme de quatrième est inférieur celui qu'on exige d'un aspirant nor- maliste. Beaucoup de récipiendaires d'ailleurs ont fait leur troisième professionnelle ou suivi des cours équivalents. Ce point de départ admis, il n'est plus contes table que l'ensemble des études d'un instituteur ne corresponde des études moyennes profes sionnelles, puisque les trois années d'école nor male équivalent pour le moins, comme labeur et comme science acquise, aux années de troi sième, deuxième et première des collèges et athénées. On en trouve une première preuve dans ce fait que le normaliste ne peut conquérir son diplô me avant l'âge de dix-neuf ans, tandis que l'on constate que la grande majorité des jeunes gens entrent l'Université avant cet âge en géné ral dix-huit ans. Comparons ensuite les programmes et nous constaterons que cette comparaison est tout l'avantage des instituteurs non seulement on leur enseigne théoriquement et pratiquement la littérature de la langue maternelle, les lan gues modernes, l'arithmétique supérieure avec toutes ses applications au commerce et aux industries, l'algèbre, la géométrie, les sciences naturelles, le commerce et tout cela d'une manière très étendue mais on leur impose en outre un vaste programme pratique dont le col légien ou l'athénéen n'a pas la plus vague no tion. Ce programme comprend la morale, la psycologie, la pédagogie, l'économie (politique, domestique et rurale), l'hygiène, le droit consti tutionnel, l'agriculture dans ses branches di verses. Et que l'on n'objecte pas que tant de branches ne peuvent pas être approfondies. L'instituteur, par cela même qu'il est appelé enseigner, doit connaître. Il est donc obligé de fournir une somme de travail extraordinaire pour s'appro prier en peu de temps les notions les plus vastes. D'ailleurs sa vie n'est qu'un perpétuel labeur intellectuel. Et tandis que celui qui est sorti de première scientifique, ou de rhétorique latine, a depuis longtemps allégé sa mémoire de tout ce qui ne lui est pas rigoureusement nécessaire pour faire sou chemin dans le monde, l'institu teur, lui, n'a rien oublié chargé d'instruire les autres, non seulement il doit conserver intactes toutes ses connaissances acquises l'école nor male, mais il doit encore chaque jour en élargir le cercle, en se tenant au courant de tous les progrès, de toutes les transformations de la science ou de la méthode. J'estime donc que ce serait commettre un vé ritable déni de justice que de refuser deux voix supplémentaires aux instituteurs de l'enseigne ment primaire, et que ce serait mal interprêter la pensée des Constituants qui ont rédigé ou voté le nouvel article 47 de la Constitution. Il n'était pas facile de maintenir l'ordre dans les salles de spectacle du siècle dernier. A l'O péra de Paris quarante gardes françaises, com mandées par trois sergents et trois caporaux, étaient chargés de cet honneur, parfois périlleux, moyennant la rétribution modique de 36 livres par soirée et d'une gratification globale de 500 livres, comptée au bout de l'an leur sergent- major. La turbulence extrême du public, l'insolence des seigneurs, des officiers et des abbés, qui prenaient la scène d'assaut, poursuivaient les actrices, chantaient des refrains satiriques et tiraient l'épée sous le plus mince prétexte, mo tivaient chaque instant l'intervention de la force armée. Et c'étaient des bagarres conti nuelles. Impossible même de répéter huis clos, car l'on forçait très bien les portes. Trônant sur le devant de la scène, aux balcons, comme l'on disait alors, petits-maîtres et mousquetaires troublaient la représentation, narguant le public qui ne se faisait point faute de les invectiver.

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Le Progrès (1841-1914) | 1893 | | pagina 2