t-s
,M° 81. Dimanche,
55e ANNÉE
8 Octobre 1895
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
La mort politique.
Édifiant.
Plus d'argent.
Le bombardement de Rio
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Ypres, le 7 Octobre 1893.
De son côté, le Précurseur constate qu'il serait
dangereux pour le parti libéral de repousser le
concours du peuple qui lui tend la main et il rap
pelle que le libéralisme a toujours pris fait et
cause pour les ouvriers laborieux et honnêtes.
Pourquoi n'y aurait-il pas alliance entre ces vail
lants travailleurs et la bourgeoisie, union qui
permettrait de débarrasser le pays des cléri
caux Nos lecteurs voudront bien se rappeler
qu'à maintes reprises, en réclamant l'organisa
tion de cercles ouvriers libéraux, nous avons
souhaiter voir se réaliser cette fraternisation des
classes, qui portera le coup suprême aux agita
teurs, ceux qui ne parlent des bourgeois
qu'avec des sentiments de haine et de colère.
A Anvers, c'est le peuple lui-même, qui est
venu demander aux libéraux d'entrer dans leurs
rangs. Nos amis auraient été coupables de re
pousser ces propositions dont rien n'autorise de
suspecter la bonne foi, d'autant plus que par
cette démarche même, c'est le parti libéral qui
absorbe le parti ouvrier et est loin d'être absor
bé, comme voudraient le faire croire les feuilles
cléricales.
Coupables et légers, car il est impossible, en
présence de la tactique cléricale, de répudier le
concours des travailleurs, concours précieux,
bien entendu dans l'hypothèse où ils n'impose
raient jamais au programme commun aucun ar
ticle de nature compromettre tout le parti.
Et, suivant le mot de-1 Etoile belgeils mérite
raient la mort politique, ces libéraux retardatai
res, si la plate-forme électorale étant trouvée, en
relation avec les idées générales, hostile surtout
l'éternel ennemi, aux cléricaux, ils se déta
chaient de la masse et ne marchaient pas dans
le rang l'abri du drapeau tricolore, symbole
de la nation et de la dynastie.
En avant donc pour la délivrance du pays,
tous, ouvriers et bourgeois, la main dans la
main, condamnant les haines stériles, rappro
chant les classes, marchant la vie, en tournant
le dos, dédaigneux, au dépérissement politique.
M. Sluys, dans un discours qu'il a prononcé
lors de l'inauguration du Temple de la science,
Charleroi, a dépeint en ces termes la déplorable
situation de notre enseignement primaire en
Belgique
11 y a l'heure actuelle 250,000 enfants de
six quatorze ans et 267,000 de trois six ans
cjui ne sont dans aucune école. Sur 81,000 en
fants qui quittent l'école primaire, 20,000 seule
ment soit un quart ont reçu une instruc
tion primaire complète. Ces chiffres et les
suivants sont extraits des statistiques officielles
publiées par le gouvernement.
Sur 5,673 écoles primaires que compte notre
pays, il y en a 4,632 (soit 80 p. c.) dans lesquel
les on ne donne aux enfants aucune notion scien
tifique Dans 66 p. c. des écoles, la seconde
langue du pays n'est pas enseignée Dans 95 p.
c. des écoles, on n'enseigne absolument rien en
matière de droit constitutionnel Dans 86 écoles
pour 100, il n'est jamais question ni d'hygiène,
ni d'économie domestique.
Le ministre avoue dans son rapport triennal
600 écoles publiques qui n'ont pas le moindre
matériel pour l'enseignement de la géographie,
plus de 1000 ne possédant pas la série de poids
et mesures
Il résulte des chiffres ci-dessus qu'il manque
10,000 instituteurs dans notre pays, puisque plus
d'un demi million d'enfants courent les rues et
ne reçoivent aucune instruction Et la presse
réactionnaire ne cesse de répéter qu'il y a trop
d'écoles et trop d'instituteurs On donne des
instituteurs sacrifiés des traitements d'attente
la condition qu'ils n'enseignent pas
Que doit être l'éducation donner aux enfants
du peuple 11 importe de veiller tout d'abord
l'éducation physique, aux soins hygiéniques et
de fournir aux enfantB la nourriture et, en hiver
surtout, le vêtement. L'initiative privée, cet
égard, a été admirable, mais absolument insuffi
sante. Il appartient aux pouvoirs publics de faire
tout leur devoir.
Le Journal TAndenne rapporte qu'au concours
général de l'enseignement primaire, l'école de
Sorée a obtenu 16 nominations, soit 21.5 p. c.
sur une population scolaire de 74 élèves.
L'année dernière, la même école obtenait en
core la première place des 66 écoles du canton
scolaire de Ciney, avec 14 nominations sur
une population de 70 élèves soit 20 p. c.
Voilà un résultat qui fait honneur l'institu
teur. Et vous croyez sans doute qu'on en fait
grand cas Sorée.
Détrompez-vous, ce brave homme, dévoué,
consciencieux, qui est la tête d'une famille, ne
parvient pas, nous l'avons déjà raconté,
se faire payer son modeste traitement. En dix-
huit mois, il a touché la somme folle de deux
cents francs
Triste, trois fois triste.
On écrit de Milan un journal parisien
En ce moment, Milan, les pièces de 1 fr.
et de 50centimes fontprime dans des proportions
que les Parisiens ne soupçonnent pas. C'est ef
frayant. Je viens de demander la monnaie d'un
billet de 10 fr. un changeur de la rue Charles-
Albert il a retenu 60 centimes
La monnaie de billon elle même fait défaut.
Dans le premier café de Milan, j'ai remis un bil
let de 5 fr. pour payer mon petit déjeuner du
matin, le garçon m'a répondu que ma dépense
n'était pas assez considérable pour qu'on me ren
dît de la monnaie de billon qui était vraiment
trop rare et trop chère.
Certains commerçants plus fortunés ont
imaginé des petites boîtes qui contiennent vingt
pièces de 5 centimes. En échange d'un billet, ils
vous remettent un tas de ces petites boites.
Mais c'est l'exception, et on est trop heu
reux de les trouver.
Ces renseignements sont très exacts ils nous
ont été confirmés par un correspondant bru
xellois.
Dans un récent voyage en Italie, il a pu con
stater cette pénurie d'argent et d'or. Elle profite
largement aux étrangers qui obtiennent un
change fantastique quand ils échangent des louis
contre des billets. Si vous allez dans ce beau
pays, ayez soin de vous munir d'or.
Depuis trois semaines que le câble nous ap
porte chaque jour, invariablement, la nouvelle
que la flotte de l'amiral Custodio José de Mello
continue bombarder la capitale des Etats-Unis
du Brésil, on pourrait croire que Rio-Janeiro est
en ruines et sa population exterminée.
Heureusement, uneinterviewque vient d'avoir
un rédacteur de Y Eclair avec Mme Sarah Bern
hardt, retour d'une nouvelle tournéedans l'Amé
rique du Sud, bord du Portugalest tout fait
rassurante cet égard.
Voici le récit aussi amusant que peu dramati
que, que fait l'éminente artiste de ce qu'elle a
vu de ses propres yeux
l.V
LE PROGRÈS
VIRES ACyL'lRlT EPNDO.
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00.
Idem. Pour le restant du pays7-00.
tout ce <ji»i cQpcwnft le journal doit être adressé I éditeur, rue au Benne, 20.
INSERTIONS Annonces: la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames: la ligne, fr. 0-25
Insertions Judiciaires la ligne, un franc.
Les annonce-, sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du Progrès Pour
le restant de la Belgique et de l'Etranger BAgence Rossel, 44, rue de la Madeleine,
«Pi ït'-j de l'Enseignement, tiruxelles.
h'Etoile belge justifiant l'alliance qui vient
d'être conclue entre le parti libéral et le parti
ouvrier Anvers, écrit Il s'agit d'aller aux
nouvelles couches électorales. C'est le droit des
vieux partis et nous ajoutons que c'est leur de
voir. S'ils abandonnaient eux mêmes la masse
des citoyens auxquels ils viennent de conférer
l'électorat, ils manqueraient leur mission so
ciale et mériteraient la mort politique. Le rai
sonnement est parfaitement juste, exact et logi
que.
raconté par Mme Sarah Bernhardt.
Le premier jour très intéressée, je pensais avec un pe
tit frisson, dont l'espérance, l'avouerai-je n'avait rien de
désagréable Je vais voir bombarder. Il faut tout con
naître, et l'occasion de voir un bombardement d'un peu
près et cependant portée des obus, ne se rencontre pas
tous les jours. J'ouvre les yeux, et, ce qui n'était pas moins
utile, les oreilles. Le premier coup de canon que j'entends
part cinq heures je regarde avec ma longue vue je ne
vois rien. Un deuxième, un troisième, un quatrième rien.
Des boulets de la Ligue de la paix n'auraient pas été plus
pacifiques. Je compte, de cinq heures du soir minuit,
deux cent onze coups de caoon pas un seul qui démo
lisse quoi que ce soit. Le fort de Santa-Cruz avait plutôt
l'air de saluer le vaisseau amiral qui portait l'amiral Mel
lo nue de s'écrouler. Détail curieux: un torpilleur quia
passé et repassé plusieurs heures dans le rayon de tir, n'a
jamais été atteint Ou s'épargnait, c'était visible.
Le Portugal, bord duquel je me trouvais, avait reçu
l'ordre de ne laisser débarquer aucun de ses passagers.
Cependant je manifestai l'envie de connaître les impres
sions que j'éprouverais en pleine rade, sous les obus, et
enfin la sensation d'effroi, de terreur, de stupeur d'une
ville que l'on bombarde. L'amiral français s'y prêta avec
une galanterie exquise. Une cbaloupe vapeur fut mise
ma disposition vers le milieu de la deuxième journée et,
sans grande émotion, je débarquai Rio-Janéiro, où je
séjournai deux jours sous l'escorte de mes vaillants ca
valiers-marins.
Ma déception a été profonde C'était là une ville assié
gée Tout y était parfaitement tranquille, on n'avait des