M. Hanssens. Dès que le clergé est satisfait, l'hono
rable membre a ses apaisements Les familles qui ne par
tagent pas son sentiment ne sont rien ses yeux.
M. Colaert. Il y a peut-être vingt pères de famille,
Ypres, qui ne veulent pas de l'enseignement moyen donné
par le clergé.
M. Lambiotte. Les parents peuvent envoyer leurs
enfants où ils veulent, Ypres mais, comme il n'y a qu'un
collège, le collège clérical, le choix est limité.
M. Colaert. Etablissez des collèges comme les ca
tholiques l'ont fait.
M. Hanssens. Allonc donc vous n'avez construit
aucun collège vous-même C'est le clergé qui les construit
avec notre argent.
M. Colaert Faites ce que M. de Stuers et ses amis
ont fait Ypres et vous aurez l'enseignement qui vous
convient.
Mais le collège libéral nouvellement édifié Ypres, dans
l'hôtel de l'honorable M. de Stuers, n'est pas plus peuplé
que l'ancien co lège communal. Malgré toute la propagan
de laite tant dans l'arrondissement qu'au dehors, on n'est
parvenu y caser que 32 élèves, sur lesquels 14 seulement
appartiennent la vi.'le.
Laissez la liberté entière aux pères de famille et l'établis
sent ent ne tiendra pas deux ans.
C'est d'ailleurs ce qui existe dans un grand nombre de
localités. Partout où il y a concurrence, les établissements
libres sont florissants les écoles officielles sont peu peu
plées. L'honorable M. de Stuers ne l'a-t-il pas constaté
lui-même, il y a un instant Que l'archevêque de Maliues
dote la ville de Nivelles, a-t-il dit, d'un collège éptscopal
et bientôt le collège communal sera déserté?
Cela prouve que les établissements du clergé ont la con
fiance des pères de famille bien plus que les vôtres.
L'honorable M. de Stuers a reproché l'honorable mi
nistre et l'administration communale d'Ypres de ne pas
avoir eu, pour les professeurs supprimés, les égards aux
quels ils avaient droit. Il prétend que nous n'avons pas
même traité les anciens professeurs avec courtoisie. C'est
là une imputation contre laquelle ces professeurs proteste
ront eux-mêmes, j'en suis convaincu. Jamais nous n'avons
manqué ni de courtoisie ni de bienveillance envers eux.
Il n'est pas plus exact de dire qu'ils n'ont pas été infor
més de la suppression du collège. Personne n'a ignoré la
décision prise par le conseil communal.
Mais l'honorable membre se fait ici l'organe de ceux qui
ont prétendu que la suppression du collège communal a
été portée subrepticement l'ordre du jour.
J'ai eu l'occasion, au conseil communal même, de dé
fendre mes collègues du collège dont je fais partie contre
cette accusation. Le collège a proposé des mesures finan
cières, des mesures d'économie, parmi lesquelles figurait
la suppression de certaines écoles et du collège communal
Ces mesures ont été annoncées. Le rapport du collège
échevinal a été imprimé, distribué aux membres du conseil
communal et la discussion n'a eu lieu que lorsque tout le
monde a examiné la question et a pu se faire une convic
tion.
L'honorable M. de Stuers a l'entendement extrêmement
dur. (Rires Il prétend toujours que le conseil communal
a supprimé les 6e et 7e latines. On n'a aboli que les cinq
classes supérieures, et celles-là il ne peut s'agir que
d'elles ne comptaient que 32 élèves. Mais l'honorable
membre ne nous comprend pas et il persiste soutenir
que, dans le collège supprimé, il y avait 45 élèves. C'est
uue erreur manifeste. Pour expliquer qu'il a raison, l'ho
norable membre invoque même le rapport de l'honorable
bourgmestre de la ville. Il ne l'a donc pas lu
Voici ce que je lis la page 14 de ce rapport
Tous les calculs ont été établis d'après le nombre d'é
lèves des fiasses supérieures, de la 5e la rétborique.
Nous n'y comprenons pas les élèves de 7e et 6e latines.
Voilà donc le rapport de l'honorable bourgmestre qui
est suffisamment explicite. Jamais il n'a été question de
supprimer la 6e et la 7e.
L'honorable membre a commis une erreur grossière en
disant que M. le ministre de l'instruction publique avait
cassé la délibération du conseil communal d'Ypres sur ce
point.
L'honorable membre persiste-t-il encore dans son erreur
et dans ses chiffres S'il veut relire son dossier, où se
trouve le rapport de l'honorable bourgmestre, il verra im
médiatement que ce que je dis est exact. Donc toute son
argumentation, en ce qui concerne le nombre des élèves,
tombe. Kien n'en reste debout
M. Lemonnier. Vous soutenez donc la suppression
ici et vous l'avez condamnée Ypres. C'est de la comédie
électorale
M. Colaert. Ah c'est de la comédie électorale
M. Hanssens. Pas autre chose
M. Colaert. Je n'ai pas faire de la comédie élec
torale. Je puis vous laisser faire celte comédie Bruxelles,
où vos amis et vous-même l'avez mise la mode.
M. Lemonnier. Ici, nous exhibons carrément notre
drapeau et nous disons sans détour ce que nous voulons.
M. Colaert. Ou vous ne m'avez pas compris, ou
vous ne m'avez pas écouté. Vous expliquerez, j'espère, en
quoi j'ai fait de la comédie électorale en votant, moi seul,
contre la suppression du collège communal.
M. Lemonnier. Vous avouez donc que, au lieu de
vous occuper des intérêts généraux de votre commune,
des intérêts de vos administrés, vous ne vous occupez que
de vos intérêts électoraux personnels, sans souci des inté
rêts généraux.
M. Colaert. Je répèle que je ne vous comprends
pas. Vous voudrez bien expliquer comment j'ai pu agir
dans un intérêt électoral personnel, en votant comme je
l'ai fait. Mon altitude devait, au contraire, nuire mon
intérêt électoral personnel. J'ai agi, en partie, pour des
motifs personnels que j'ai expliqués ici et Ypres.
M. Lemonnier. Vous placez l'intérêt général au-des
sous de l'intérêt personnel
M. Colaert. Quand la situation financière de la ville
était connue exactement, et il a fallu deux ans pour la
connaître dans tous ses détails l'honorable bourgmes
tre, qui s'en était occupé spécialement, a reconnu qu'il
fallait prendre des mesures pour la rendre bonne et pour
exécuter les travaux qu'il y avait lieu de faire.
M. Lemonnier. Mais vous êtes échevin Vous deviez
connaître la situation financière quand vous avez volé le
maintien du collège, sinon vous êtes incapable
M. Colaert. Vous croyez que ces interruptions me
gênent Je ne prétends pas avoir votre compétence en
toutes matières, et je veux bien passer vos yeux pour un
incapable mais je tiens expliquer ici pourquoi mes
amis ont voté la suppression du collège et pourquoi j'ai
voté contre celte suppression. J'avais donc d'abord des
motifs et non des intérêts personnels.
J'avais un second motif d'agir comme je l'ai fait, un
motif qui vous intéresse. Je ne croyais pas les libéraux
capables de fonder eux-mêmes un collège. Eh bien, j'ai
été trompé et, dès que le collège communal a été suppri
mé. les libéraux d'Ypres, après avoir été pingres pendant
de longues années, comme, du reste, les libéraux en gé
néral,le mot est d'un de vos amis, ont gagné un
accès de générosité et ont fondé un collège. (Interruptions
gauche
M. Coremans. De leurs deniers D'habitude, ils ai
ment mieux se servir de l'argent des autres
M. Colaert. L'honorable ministre a félicité tout
l'heure l'houorable M. de Stuers, qui avait mis son hôtel
la disposition du collège. Je l'en félicite mon tour, et
je le remercie d'aider ainsi ses anciens concitoyens sou
lager le budget.
M. Lemonnier. Malgré toutes vos explications, vous
ne sortirez pas du cercle dans lequel vous êtes enfermé;
vous n'avez agi que dans un intérêt électoral
M. Hanssens. C'est votre vote et votre attitude qu'il
faut expliquer.
M Colaert. Vous n'aimez pas entendre mes expli
cations, je le crois. Je les donne cependant comme je les
ai donnée* au conseil communal d'Ypres. Je n'y ajoute
pas un mot, et mes déclarations ont été approuvées par
le parti libéral d'Ypres et par toute la presse libérale du
pays
M. Hanssens. Mais vous dites ici le contraire Les
libéraux d'Ypres ne vous reconnaîtraient plus s'ils vous en
tendaient.
M. Colaert. Je le répète encore une fois, j'ai été
trompé dans mes prévisions et, si j'avais pu croire que les
libéraux auraient la générosité de fonder eux-mêmes un
collège, je me serais tout au moins abstenu.
M. Lemonnier Quelle mauvaise plaisanterie
M. Colaert. L'honorable M de Stuers c'est un
point de son discours auquel j'ai oublié de répondre
nous a dit que les anciens élèves du collège supprimé ont
offert de venir en aide la commune par des souscriptions
volontaires. En effet, la fin de la discussion, M. Brun-
faut, un conseiller de la minorité, au nom des anciens
élèves, a offert, pour une période de deux ans, de verser
dans la caisse communale la part incombant la ville
dans les dépenses du collège.
Quelle a été mon attitude
Le collège échevina! s'est retiré, et c'est moi qui ai
conseillé mes honorables collègues de ne pas accepter
cette proposition, qui, celle-là, était insidieuse, comme l'a
démontré si bien mon honorable collègue et ami, M.
Struye. Le subside offert n'avait aucun caractère de per
manence et, l'expiration des deux années, nous aurions
dû faire ce qu'on ne voulait pas établir des impôts.
L'honorable bourgmestre avait proposé précédemment
de recourir ce moyen de créer des ressources. Mais le
parti libéral tout entier s'est levé il n'a pas voulu éta
blir de nouveaux impôts, et le parti catholique ne l'a pas
voulu davantage. Pour ma part, je me suis opposé énergi-
quement, au sein du collège échevinal, toute aggravation
des charges communales.
On a donc dû recourir d'autres ressources, et il fal
lait nécessairement les prendre là où il était possible de
les trouver, c'est-à-dire dans le budget de l'enseignement.
On ne les trouvera pas encore dit l'honorable M. de
Stuers. Sans doute, Messieurs, l'économie qu'on réalisera
ne sera pas immédiatement considérable elle ne s'élèvera
qu'à quelques milliers de francs mais lorsque l'honorable
ministre sera intervenu, lorsqu'il aura placé les profes
seurs qui jouissent d'un traitement d'attente, l'économie
sera suffisante pour pouvoir exécuter les travaux réclamés
par la ville d'Ypres et qui consistent dans l'établissement
d'une distribution d'eau convenable et dans l'exécution
de différentes mesures que l'hygiène commande.
On prétend que j'ai agi dans un but électoral.
Je n'ai aucune crainte au sujet d'une élection commu
nale future. Mon sort est entre les mains de mes amis et
de mes électeurs, et personnellement je m'en inquiète fort
peu. Avec moi ou sans moi, les prochaines élections se
ront favorables au parti catholique.
A ce propos, je dois, après l'honorable ministre de l'in
térieur, relever une accusation qui a été lancée contre
nous Oui, les élections de 1890 ont été irrégulières, et
elles l'ont été ce point que le ministre de l'époque, l'ho
norable M. Melot, n'a pu que ratifier la décision de la dé-
putation permanente, qui en avait prononcé l'annulation.
D'autres élections ont eu lieu en 1891 et celles-là, par
faitement régulières, ont été maintenues par l'honorable
M. de Burlet, devenu ministre de l'intérieur. Il est vrai
que, pendant la nuit qui les a précédées, nous avons fait
la veillée et nous avons enlevé de nombreux électeurs
les moyens de fraude qui avaient été placés entre leurs
mains par un libéral notable, un des chefs de l'Association
libérale
Je possède encore des enveloppes portant une écriture
parfaitement connue si j'avais pu croire que l'honorable
M. de Stuers aurait rappelé l'élection du lr Février 1891
ou celle d'Octobre 1890, je me serais muni des preuves de
la fraude la plus manifeste. La Chambre a été saisie de
demandes d'interpellation par MM. Neujean, Janson et
Graux mais ces interpellations, solennellement annon
cées, ont été plusieurs fois remises, pour être enfin défi
nitivement retirées.
La communication, que j'ai faite de quelques-unes de
mes pièces conviction a sans doute fait tomber l'inter
pellation l'eau.
M. de Stuers. J'ai fait une interpellation M. le mi
nistre de l'intérieur, et c'est, tout le temps, un député
d'Ypres qui me répond. (Rires).
M. Colaert. Un député d'Osiende attaque des actes
de l'administration communale d'Ypres les députés
d'Ypres ont bien le droit, me semble-t-il, de répondre. Je
crois d'ailleurs que nous avons répondu d'une façon pé-
remptoire.
Je ne veux plus insister sur mon droit de cité Ypres
mais je constate que M. de Stuers avait prévu dans sa ré
ponse écrite tout ce que j'allais dire. (Riies droite).
M. de Stuers. J'étais averti, car vous m'aviez préve
nu hier que vous alliez me dire que mon père était né
Ruremonde
M. Colaert. Je vous ai demandé si vous me faisiez
un grief de ce que j'étais né Poperinghe. Je vous ai dit
Est-ce que j'ai jamais songé vous faire un grief de ce
que votre père était né Ruremonde (Rires droite.)
M. Lemonnier. Vous aurez beau dire vous avez joué
une comédie électorale
M. Colaert. Je ne répondrai plus cette interrup
tion.
Je n'admets pas que l'honorable M. de Stuers vienne
dire dans son discours écrit, que je renie ma patrie, c'est-
à-dire la ville de Poperinghe. Je n'ai rien dit de pareil,
mais j'ai déclaré que j'étais fier d'être sorti du collège de
Poperinghe. Ce collège patronné a des succès que le collège
communal d'Ypres n'a jamais connus. Vous ne le nierez
pas depuis nombre d'années, dans tous les concours du
gouvernement, il tient tête aux meilleurs établissements
officiels du pays. (Très bien droite).
M. de Burlet, ministre de l'intérieur et de l'instruction
publique. Messieurs, ce débat est épuisé, mais je ne
puis cependant m'abstenir de donner l'honorable M. de
Stuers la satisfaction qu'il réclame.
Lorsque l'honorable membre interpelle le gouverne
ment, voudrait-il interdire aux autres membres de la
Chambre de prendre part aux débats?
Le gouvernement seul doit lui répondre. Or, j'ai parlé
pendant une heure au début de la séance, et c'est beau
coup pour une affaire de ce genre.
De quoi peut se plaindre encore l'honorable membre
Rien n'est changé Ypres depuis la suppression du
collège communal un collège libre et libéral a remplacé
l'officiel, le nom seul a changé et le local, l'étiquette offi
cielle seule manque.
Tout est sauf au point de vue de l'enseignement et
une économie de 25,000 francs pour les finances de l'Etat
et de la commune se trouve réalisée.
M. Hanssens. Mais l'enseignement public a disparu
c'est l'essentiel, au point de vue du but que vous poursui
vez.
M. Vanderkindere. Ce n'est pas votre devoir de sup
primer l'enseignement public vous êtes là pour le main
tenir.
M. de Burlet, ministre de l'intérieur et de l'instruction
publique. Il ne s'agit pas d'une suppression décidée
par le gouvernement et vous ne pouvez soutenir sérieuse
ment que le gouvernement ait le devoir, quelles que
soient les circonstances, de maintenir quand même et
d'imposer une commune une charge qui n'aurait plus sa
raison d'être.
M. Bara. Je demande la parole.
M. de Burlet, ministre de l'intérieur et de l'instruction
publique. La situation actuelle ne laisse-t-elle point
chacun, Ypres, la faculté de faire donner ses enfants
l'enseignement moyen conforme ses préférences D'un
côté, un établissement épiscopal de l'autre, un établis-