Chronique locale.
55. Jeudi,
54e ANNÉE'.
26 Avril 1894
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
A nos lecteurs.
Réponse pour réponse.
A propos de bottes.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Nous prions instamment nos lecteurs de bien
vouloir remettre au bureau du Progrèstous les
timbres oblitérés et toutes les feuilles et mor
ceaux d etain qu'ils pourraient recueillir.
Ces objets sont destinés une oeuvre philan
thropique.
Le Progrès mentirait son titre et sa mis
sion s'il rejettait une réforme juste et nécessaire
comme l'est devenue la R. P. par suite de l'in
troduction du suffrage universel et du vote obli
gatoire.
11 y a deux ans, l'Association libérale d'Ypres
l'a inscrite son programme, en même temps
que le suffrage universel. Cela nous a suffi pour
l'admettre.
Le suffrage universel est réalisé. La R. P. se
réalisera comme la revision constitutionnelle,
comme le suffrage universel se sont réalisés,
malgré les opposants, malgré M. Colaert.
Nous sommes partisans de la R. P. non pas
dans un intérêt de mandats ou de parti, mais
parce qu'elle est indispensable pour parfaire
notre régime électoral rénové.
C'est une grande présomption de dire que les
libéraux Ypres 11 ont désormais aucun espoir
de lutter avec succès ni pour le Sénat, ni pour
la Chambre, ni pour la province, ni pour la
commune. Nous avons, au contraire, l'espoir de
culbuter la première occasion, l'administra
tion cléricale qui s'est emparée de l'Hôtel de
Ville par les moyens que tout le monde connaît
et condamne.
Personne d'ailleurs ne peut prévoir ce que
fera la masse profonde des électeurs nouveaux
mais on peut prédire avec certitude qu'elle tour
nera la démocratie libérale.
Les programmes nouveaux auront une force
de pénétration sans précédent et, une fois le
courant établi, il balayera les opposants récal-
itrants, quels qu'ils soient.
Nous sommes partisans du système D'Hondt
ais nous aurions considéré comme un progrès
Je projet Beernaert. Le vote plural n'est pas non
plus notre idéal. C'est aussi un progrès suscep
tible d'amélioration.
M. Colaert rejette-t-il même le projet Beer-
iert
Il
nae
M. Struye maintient-il sa déclaration fière et
patriotique
M. Surmont, que pense-t-il
Et M. Berten
Et vous, Journal d'Ypresqui vous disiez tantôt,
proportionnaliste, vous semblez être devenu
bien circonspect? Voilà autant de questions in
téressantes pour le public Yprois.
Nous avons loyalement dit pourquoi et com
ment nous sommes partisans de la R. P. Nos rai
sons, venant d'un adversaire, n'ont pas grande
chance de convaincre M. Colaert. Nous croyons
utile au débat de mettre sous les yeux un article
d'un des organes catholiques les plus importants
du pays Le Bien public. Nous n'admettons pas,
cela va de soi, tous les points de vue du journal
gantois mais nous sommes d'avis qu'il contient
des arguments que tout homme de progrès réel,
tout bon patriote, tout conservateur dans le bon
sens du mot, doit connaître et méditer
Le Journal est toujours également heureux
dans ses réponses.
Quand il ne tronque pas la vérité, il confond
autour avec alentour et prend ses bas pour ses
souliers.
A propos d'une plaisante aventure récemment
survenue l'occasion d'une noce, et rapportée
par le Progrès en termes badins, le voici qui rap
pelle solennellement que, sous les échevinats ae
MM. Beke, Vanheule et Bossaert, exerçant suc
cessivement les fonctions d'officier de l'état-
civil, il y a eu jusque quatre erreurs de signature
redresser
Bien.
Mais, d'abord, s'agit-il d'erreurs semblables
celle que le Progrès a relevée de cas où il a
fallu courir déranger table toute une réunion
de parents et d'amis
Et puis, point essentiel, est-ce que les éche-
vins susnommés ont, leur arrivée l'état-civil,
LE PROGRÈS
vires acqulklt eunik).
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00.
Idem. Pour le restant du pays7-00.
tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 30.
INSERTIONS Annonces: la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames: la ligne, fr. 0-25
Insertions Judiciaires la ligne, un franc.
Les annonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du Procrês Pour
le restant de la Belgique et de l'Etranger I'Agence Rossel, 44, rue de la Madeleine,
Ct 2, rue de l'Enseignement, Bruxelles.
Nous avons toujours reconnu, nos lecteurs le savent
et peuvent en rendre témoignage, les dangers insépara
bles du suffrage universel.
Mais, d'autre part, lorsque, après plusieurs tentati
ves infructueuses, la revision de notre pacte constitu
tionnel s'est imposée nos assemblées publiques et y a
été votée f unanimité des voix, nous avons dû égale
ment reconnaître le bien fondé de cette délibération.
Comment, en effet, pouvions nous retrouver la
représentation fidèle d'une nation de plus de six millions
d'habitants dans un corps électoral de 135,000 élec
teurs, concentrés pour la plupart dans les villes et dans
lequel l'élément cabaretier entrait pour près d'un cin
quième
Une réforme était nécessaire.
Nous l'eussions souhaitée plus conservatrice dans le
sens élevé de ce mot mais les combinaisons élaborées
dans ce but n'ayant pas été ratifiées par la législature,
force a bien été de se rallier aux tempéraments qui at
ténuaient le radicalisme de l'évolution accomplie.
Parmi ces tempéraments s'est indiqué tout d'abord
le vote plural. Il a été le joint qui a permis d'aboutir
une solution Nous n'en sommes pas éperdùment épris
mais il faut bien convenir qu'à défaut de l'habitation,
il offre cependant quelques moyens de résistance
l'aveugle souveraineté du nombre.
Cette innovation eût pu être heureusement complé
tée par l'adoption île la représentation proportionnelle
qui est, comme on l'a djt avec raison, le brise-lames du
suffrage universel, ce qui indépendamment de sa jus
tice intrinsèque, eût dû faire admettre cette réforme
titre de mesure de prévoyance et de préservation.
M. Beernaert était de cet avis qui demeure encore le
nôtre. Malheureusement cette opinion n'a pas été par
tagée par les sections de la Chambre des Représentants
et leur opposition s'est manifestée avec une énergie si
caractérisée et si clairement préméditée qu'il eût été
inutile d'essayer de la vaincre. C'est ce qui a amené la
dernière crise ministérielle et notamment la retraite de
M. Beernaert dont la politique électorale était particu
lièrement visée par les opposants.
Devant, la situation créée par ce grave incident, les
successeurs du cabinet-Beernaert n'avaient qu'une ré
solution prendre, eu égard la gravité même de la
question et aux divergences d'opinions qui se manifes
taient dans le Parlement. Ils ont décidé de maintenir
le statu quo, sauf laisser le pays lui-même exprimer
ses préférences. Il est évident, en effet, que si la re
présentation proportionnelle n'a pu rallier au sein du
Parlement une majorité assez forte, il n'est, plus
forte raison, aucun autre système capable d'y réunir
un nombre suffisant de suffrages pour se faire inscrire
dans nos lois.
Des partisans du dépeçage des arrondissements et
du vote uninominal contestent, mais en vain, la réalité
de ce fait. Personne n'ignore, en effet, que parmi les
adversaires de la représentation proportionnelle, il en
est assez bon nombre qui ne voudraient pas davantage
et, peut-être, encore moins, d'une solution dont l'arbi
traire et l'instabilité sont encore les plus minces dé
fauts.
On nous vante aujourd'hui les vertus conservatri
ces de cette innovation. Nous avouons ne pas les aper
cevoir, surtout depuis l'extension donnée au droit de
suffrage. La géographie électorale peut, dans l'hypo
thèse du vote uninominal, aboutir la création de can
tons qui deviendront de véritables bourgs pourris du
socialisme, notamment dans les centres urbains et dans
les régions industrielles du Hainxut. Il suffit, d'ailleurs,
de s'inspirer de l'expérience faite en France et en Al
lemagne pour se convaincre que le scrutin uninominal
n'est pas un obstacle sérieux opposer la marche
ascendante du socialisme. La raison en est bien sim
ple c'est que ce système réduit l'impuissance les
forces conservatrices, précisément dans les agglomé
rations où leur action pondératrice serait le plus né
cessaire. Nous continuerions, peut-être, sous un tel
régime, remporter provisoirement quelques succès
dans des districts ruraux où la victoire est facile mais
grâce l'inaction forcée de notre réserve urbaine, l'as
cendant du socialisme grandirait partout ailleurs Si
nous voulons sérieusement tenir tête au socialisme, il
faut lui faire front sur toute la ligna et ne pas nous
cantonner dans quelques ouvrages avancés, en se lais
sant s'emparer du cœur de la place. Qu'on s'en félicite
ou qu'on s'en plaigne, nous vivons sous le régime re
présentatif. Or, la perfection de ce régime consiste
assurer autant que possible tous les citoyens l'exer
cice efficace de leurs prérogatives électorales. Si, com
me nous en sommes persuadés, la majorité de la
nation belge est réfractaire au socialisme, la représen
tation proportionnelle nous assurera un triomphe con
servateur que si, contre toutes nos prévisions, il
devait en être autrement, nous conserverions assez
d'éléments de résistance pour empêcher les socialistes
vainqueurs de poursuivre jusqu'au bout leur program
me et pour garder l'espoir fondé d'uue prompte et
victorieuse revanche.
Nous n'ajouterons, en terminant, qu'une observation
basée sur l'expérience. Tous ceux qui connaissent la
Belgique électorale savent quelle influence considéra
ble les arrondissements de Gand et d'Anvers exercent
sur l'orientation générale de notre politique intérieure.
Supposez les électeurs catholiques urbains de ces deux
arrondissements réduits désormais, malgré leur nom
bre, l'état de quantités négligeables et dites ce que
vous pouvoz espérer du résultat final d'une pareille in
novation M. Frère-Oiban, qui sait quoi s'en tenir,
s'en montre l'avance ravi mais on nous accordera
bien que sa satisfaction peut nous être suspecte et que
nous n'avons guère do motifs plausibles de la partager.