L'union droite.
La Manifestation Renaix.
Notre régime financier.
dans le but d'une- part, de flatter les agricul
teurs sans rien leur concéder, de l'autre de
calmer les revendications du port d'Anvers qui
réclamait avec insistance la suppression des
droits de fanaux.
La métropole, la première menace d une
réaction économique, a déclaré qu'elle préfé
rait le maintien de ces droits toute taxe sur
l'avoine, l'orge, le beurre, la margarine, etc.,
etc.
On ne peut nier que M. De Burlet, soufflé
par M. Beernaert dans les coulisses, n'ait mené
celte campagne avec un certain esprit machia
vélique.
Le but qu'il s'était proposé ayant été atteint,
il se contentera de déposer la fin de la session
un projet quelconque qui restera dans les car
tons jusquà la législature prochaine se
taillant ainsi une facile réclame électorale.
Le tombeur de M. Beernaert, M. Helleputle,
député de Maeseyck, qui a prononcé le dis
cours sensationnel de la seance d hier, est un
homme d une cinquantaine d'années, de taille
moyenne, très remuant et nerveux.
Sa figure de méridional aux yeux vifs, enca
drée d une barbe noire, est couronnée par une
énorme calvitie, l une des plus franches de la
Chambre, I honorable professeur de I Université
de Louvain ayant horreur de ramener ses der
niers cheveux l'exemple de M. De Lants-
heere.
L'un des bons orateurs de la droite, il parle
d'abondance, sans prétention, se défiant du
langage professoral. Nerveux, agressif, il met
toutefois moins de fiel que M. Woesle dans ses
attaques.
Quand il préside la Ligue démocratique
chrétienne, il se livre des effets oratoires qui
lui donnent un aspect de tribun du Midi, une
sorte de contrefaçon louvaniste de Numa Rou-
mestan. A la Chambre il est plus calme, sauf
quand il attaque le militarisme du général
Criolmulll. Il a mis UCJJCIJlId 11 l une L'UllcllilC
animosité blanchir la droite d'avoir voulu
renverser M. Beernaert, et si le débat continue
sur ce ton, la majorité nous offrira le spectacle
trop rare d'amusantes querelles.
Le budget extraordinaire, suivant des bruits
de couloirs, sera marqué par deux grands
débats, l'un se rapportant aux installations
maritimes, l'autre au chemin de fer du Congo.
Il entre dans les intentions du ministre des
finances de demander un nouveau crédit de dix
millions pour cette vaste entreprise de là un
vif débat dont M. Lambiotte donnera le signal.
Quant aux installations maritimes, les dépu
tés de Bruxelles insisteront sans doute pour que
le crédit soit augmente et porté, sans nouveaux
marchandages, de huit treize millions, afin
d'arriver aux trente-quatre millions nécessaires
pour I accomplissement de ce gigantesque
travail... qui n'est pas encore fait.
Pour qui regarde froidement les choses, le
parti clérical traverse en ce moment une crise
pareille celle qui précéda son échec en 1878.
Assurément, nous ne garantissons point la chute
complète du parti catholique aux élections pro
chaines, car la crise dont il s'agit peut se pro
longer encore pendant longtemps assurément
aussi, nous n'oublions point la discipline de 1er
qui est en honneur chez nos adversaires, et nous
ne manifesterions aucun étonnement si les frères
ennemis se réconciliaient pour nous combattre
mais les symptômes de désagrégation qui se
manifestent au sein du parti clérical sont telle
ment graves qu'une catastrophe finale semble
inévitable.
Avant 1878, la lutte était circonscrite entre
ultramontains et catholiques de gouvernement.
M. Charles Périn était l'homme-drapeau des uns,
et feu M. Thonissen, celui des autres. Cette
lutte, dont ie scandale provoqué par la déposi
tion de Monseigneur Dumout lut un des épisodes
les plus marquants, apparaîtra comme une
insignifiante escarmouche au regard de celle qui
se prépare aujourd'hui, et qui se déroulera, non
plus entre ultramontains et catholiques de gou
vernement, mais entre ceux de nos adversaires
qui veulent faire du socialisme catholique et
ceux qui entendent résister ce courant.
C'est qu'il y a plusieurs façons d'interpréter
l'Encyclique Rerum novarum. M. Woeste a la
sienne, qui ne ressemble pas celle de 1 Avenir
social.
En d'autres termes, le parti soi-disant conser
vateur est en passe de se transformer. Or, les
partis qui se transforment sont condamnés se
retremper dans l'opposition.
Ajoutez qu'à la question sociale viennent se
joindre une foule d'autres questions irritantes,
qui divisent le parti catholique en une foule de
petites chapelles ennemies. La question écono
mique et la question des langues, pour ne citer
que ces deux-là, sont pour le cabinet de liquida
tion présidé par M. De Burlet, des pierres
d'achoppement aiguës et coupantes.
Il ne faut donc pas s'étonner des polémiques
personnelles auxquelles nous assistons depuis le
18 Avril. Si nous sommes bien inspirés, nous
pouvons y assister en vainqueurs, et prendre
notre revanche de 1884.
La place de la station est noire de monde. Dé
cidément, ça va bien Réception, congratula
tions, coups de chapeaux, serrements de phalan
ges, etc... Les commissaires, très affairés, se
consultent, s'agitent, se multiplient.
Enfin, tout est prêt. On n'attend plus que les
socialistes. Un mouvement se produit. Ils sont
là En effet, on voit au loin une masse noire
qui se rapproche et de laquelle émergent une
longue banderole et de nombreux cartels. Les
voici Ils sont en nombre et ils y viennent de
tout cœur cela se voit, cela se sent.
Le cortège se met en marche. 11 est véritable
ment) Imputant.. Ou peut cratuci a doux ou tiuis
mille le nombre des manifestants ce qui est
énorme. N'oublions pas que nous sommes dans
une petite ville, où nombre de gens n'ont pas
précisément leur liberté d'allure. Pour la pre
mière fois dans cette localité où les luttes poli-
ques étaient si âpres, des hommes que la vieille
politique tenait irrémédiablement éloignés les
uns des autres, marchent côte côte, dans une
revendication unanime inspirée par le sentiment
de l'équité. Spectacle consolant et réconfortant,
en vérité
Les ouvriers l'abbé Daens a eu raison de le
dire le peuple a l'instinct de ce qui est juste
étaient au poste, en rangs serrés les libéraux de
toutes nuances avaient pris place dans le cortège
et les catholiques y étaient représentés par plu
sieurs personnalités en vue.
Du fond de la place le coup d'oeil est superbe
on voit la longue file des manifestants se dé
ployer sur toute la longueur de la pente, jusqu'à
la Petite Place.
Plusieurs corps de musique entrecoupent le
cortège citons, notamment, la fanfare d'Eenae-
me, village près d'Audenarde.
Fort bien conçues, les inscriptions figurant sur
les cartels nous en copions quelques-unes
Place aux manifestants Vive la Représenta
tion proportionnelle La représentation
proportionnelle, c'est l'égalité et la justice
La représentation proportionnelle sera la sau
vegarde des opinions et leur force par le contrô
le Nous réclamons la représentation pro
portionnelle, et nous manifesterons aussi long
temps que les Chambres ne l'auront votée
On commente l'absence de M. Demalander,
proportionnaliste de la veille, nous assure-t-on,
et qui, paraît-il, avait promis d'assister tout au
moins au meeting, où il a brillé par son absence.
La cortège, toujours grossissant, a parcouru
les principales rues de la ville. Pas un incident,
pas le moindre accroc. Jamais il ne nous a été
donné d'assister une démonstration populaire
plus correcte et plus digne. Et tudieu quel mon
de Une manifestation comme Bruxelles,
disait-on autour de nous. En vérité c'était impo
sant.
Ce qui u'empêchera pas quelques politiciens
vieux jeu, qui les événements n'ont rien appris,
de continuer soutenir que les populations sont
indifférentes, qu'il n'y a pas de mouvement, que
l'opinion publique no s'est pas prononcée et que
personne ne demande la représentation propor
tionnelle
Le meeting-
Vers cinq heures, les manifestants s'engouf
frent dans la salle de la Taverne de la Reine, où
doit avoir lieu le meeting annoncé. Quelle cohue
on s'écrase littéralement. Un millier de person
nes s'entassent debout dans la salle, sur l'estrade,
dans les croisées, sur la cour, partout. Les autres
ne parviennent pas se caser. Le succès a dépas
sé toutes les espérances.
M. Liefraans (d'Audenarde,) en français, puis
M. R. Rens, en flamand, développent les argu
ments en faveur de la représentation proportion
nelle et font ressortir les nombreux avantages
ui résulteraient de l'adoption de cette réforme
'équité et de justice, réclamée par tous les par
tis indistinctement. Les énergiques harangues
des deux orateurs sont fréquemment interrom
pues par des applaudissements, et leurs discours
sont acclamés avec enthousiasme
M. Guisset, qui préside, ayant ses côtés MM.
Lucien Noilat, L. Velghe, F. Den Dauw, Max
Van Coppenolle, Sturbaut, Portois, R. Vanden-
doren, etc., représentant les divers partis, lit un
projet d'ordre du jour, que M. Rens traduit en
flamand, et que l'assemblée adopte l'unanimi
té. Cette résolution réclame le vote, dans la ses
sion actuelle, de la représentation proportion
nelle appliquée aux élections tous les degrés,
et conjure les représentants de 1 arrondissement,
qui il sera transmis, d'agir énergiquement dans
ce sens au Parlement.
Le meeting est levé au milieu d'un enthousias
me indescriptible et au cri longuement répété de
u Vive la proportionnelle Les assistants agitent
leurs cannes, leurs chapeaux, leurs mouchoirs.
Le 13 Mai marquera comme une journée
dans l'histoire des partis, Renaix.
M. le Bénateur Finet a publié sous le titre de
Régime financier de la Belgiqne, nécessité
d'un budget du domaine collectif une bro
chure très intéressante, dans laquelle il établit
en corps de doctrine les idées financières qu'il a
émises diverses reprises au Sénat et dans des
articles de la Ré/orme.
Le procédé gouvernemental des emprunts
jet continu, chargeant les générations futures
pour réduire, dans un but électoral, les impôts
actuels la sophistication de budgets, par le
truc, déjà dévoilé, mais de plus en plus employé,
du budget extraordinaire sont mis en lu
mière, par l'honorable sénateur, d'une façon
éclatante. Le grrand ministre des finances, dont
nou3 venons d'avoir la douleur d'être privés, au
moins ostensiblement, est renversé de son falla
cieux piédestal nul gouvernant n'a poussé plus
loin que M. Beernaert le cynisme dans le men
songe budgétaire.
M. Finet montre admirablement que si la Bel
gique, jusque maintenant, n'a pas encore, com
me d'autres pays, dévalé dans le gouffre créé par
les emprunts, c'est grâce des circonstances par
ticulièrement heureuses mais que la plus vul
gaire prudence exige maintenant un change
ment radical dans sa gérance financière.
L'honorable sénateur, dont on connaît les
préoccupations en matière sociale, établit en
même temps la nécessité d'augmenter le domai
ne de la collectivité, ce domaine des revenus
collectifs qui doivent pondérer, équilibrer l'effet
dominateur, sur les masses, des grandes fortu
nes individuelles.
Enfin, comme voies et moyens, pour échap
per aux dangers de l'accumulation des dettes
nationales et de la domination capitaliste, il pré
conise l'impôt sur la richesse. U est incontesta
ble que l'impôt, c'est-à-dire le revenu social, ne
doit point, sous peine d'être charge douloureuse,
être pris sur le travail, sur la source active de
la richesse, mais bien sur la richesse elle-même.
Nous engageons nôs lecteurs étudier atten
tivement cette petite brochure, écrite avec la
netteté d'expression et la logique irréfutable qui
caractérisent les discours et les écrits de M.
Finet. (Étoile).
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L'Etoile belge, en constatant les divergences de
vues qui divisent les cléricaux, en tire pour le
libéralisme des pronostics de bon augure