JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Les réactionnaires. Après la mort du chef. Les funérailles de M. Frère-Orban. 56e ANNÉE 9 Janvier 1896. 6 FRANCS PAR AN. PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE. Idem. Pour le restant du pays7-00 On traite forfait. Yprès, le 8 Janvier 1896. Au point de vue législatif, l'année 1895 a été marquée par trois lois reactionnaires importan tes, La majorité cléricale a établi des droits d'entrée sur les denrees de première nécessité. Désormais, cause de ces droits les denrées augmenteront de prix au moindre événement quelque peu contraire. Le prix du beurre a atteint dans la dernière période de sécheresse un prix qu'il n'aurait pas atteint si le beurre étranger avait pu entrer li brement en Belgique. Pour les farines, lorsque les approvisionne ments extraordinaires qui ont été faits en pré vision de l'établissement des droits d'entree seront épuisés, il y aura une hausse de prix. On présume que les droits votés par la majo rité cléricale atteindront la somme de 5.700.000 fr. par an. Maigre cet accroissement de recet tes, il n'y a au budget qu'un excédent de 187,000 francs. Mais le gouvernement avait besoin d'argent fiour doter les écoles cléricales, pour organiser 'inspection diocésaine de renseignement de la religion dans les ecoles officielles. La loi Schollaert a été la seconde loi réac tionnaire qui a caractérisé lœuvre des cléri caux en 1895. Enfin, la troisième a été la loi électorale communale. Bien que cette loi ait augmenté le nombre des électeurs communaux, on doit l'appeler réactionnaire, parce qu'elle était un recul sur la loi électorale pour l'election des membres de la Chambre et la loi électorale provinciale. La loi a été faite de telle façon que l influen- ce du peuple a été noyée dans un ensemble de dispositions disparates et réactionnaires. La majorité n'est plus la majorité des citoyens mais la majorité des voix. Un conseil communal clérical ne pourrait pas dire Nous avons la majorité de la population pour nous. Non, la majorité dans une élection n'est pas la majorité des électeurs. C'est la majorité des voix, et ce n'est pas l'expression de la popula tion lorsqu'une élection communale est favora ble au parti clérical. Car les cléricaux ont ar rangé le corps électoral pour eux. Ils l'ont combiné pour qu'il leur donne la majorité. S'ils avaient confiance dans leur force, s'ils pouvaient réellement dire qu'ils ont la popula tion avec eux, eh bien, ils proclameraient le suffrage universel pur et simple. Ils ne le font Bas parce qu'ils savent qu'il serait contre eux. lais le suffrage universel pur et simple, c'est la nation, c'est la population, et ils savent que la nation, que la copulation les renverserait. Il faudra, cette année, voter le régime élec toral provincial. Oseront-ils poursuivre !a série des lois reactionnaires qu'ils ont votées dans l'année qui vient de s écouler? Des socialistes ont profilé de la mort de M. Frère-Orban pour soutenir une fois de plus que le parti libéral était descendu dans la tombe avec son cbef. Sans doute, la personna lité de M. Frère a été haute; sans doute, il a rayonné sur tous ceux qui l'entouraient et les services éclatants qu'il a rendus au libéralisme ont fortifié le parti, mais celui-ci n'est pas la merci d'aucun homme, quel qu'il soit. Au-dessus des chefs, des orateurs, des mili tants qui défendent le programme, se trouve le principe et rien ne saurait prévaloir contre lui. Ce principe, si M. Frère la réalise avec éclat, servi avec zèle, d'autres lappbqueront leur tour. II vivra longtemps encore travers les siècles comme une foi nouvelle, tant qu'il se trouvera des réactionnaires pour menacer la liberté de conscience, des collectivistes pour abattre la propriété et entraver la liberté indi viduelle. Si grand qu'il soit uirirumme n'a jamais lautoriié et surtout la vitalité d un principe. M, Frère-Orban mort, le principe vit toujours. Celte mort si regrettée d'un chef glorieux invi tera dailleurs tous les libéraux suivre son exemple, se dévouera leur cause et puiser dans les récits de la carrière de l'illustre hom me d'Etat, la force nécessaire au relèvement et l'extension d'un parti indispensable la gran deur du pays. A la mortuaire. A sept heures et demie, le bourgmestre et les échevins de Bruxelles, en grand uniforme, arri vaient la maison mortuaire,de M. Frère-Orban, rue Ducale, pour venir prendre possession du corps de l'illustre ministre d'Etat et le conduire l'hôtel-de-ville. Après un court échange de compliments de condoléances et de remerciements, le petit cor tège funèbre s'est mis en marche. Un char, chargé de couronnes, précédait le corbillard. Il y en avait beaucoup, envoyées par quelques associations libérales, quelques famil les amies, les Bischoflsheim, les Jamar, les Pelt- zer, mais pas autant qu'on devait en espérer, étant donné le grand nombre de corporations et d'individus qui ont été en rapport avec M. Frère pendant sa longue carrière. Suivait le corbillard, sur lequel avait été placé le cercueil, un cercueil en chêne garni d'argent, recouvert de l'uniforme de l'ancien ministre. La famille et le collège échevinal venaient ensuite, dans des voitures fermées. Les pompiers formaient autour du corbillard une garde dffion- neur. A l'IIôtel-de-Villo. C'est dans la salle Gothique que la famille de M. Frère-Orban reçoit les personnes venues pour assister aux funérailles. Les fenêtres ont été ten dues de noir et les sun-burners électriques bril lent de toute leur intensité. Le cercueil a été déposé sous un dais formé par des draperies noires, au fronton duquel ont été inscrites les initiales F. O. Le drapeau trico lore recouvre la bière, qu'éclaire d'une lumière blafarde une lampe incadescence dissimulée sous les tentures. Au pied du cercueil, une cou ronne de chrysanthèmes artificiels offerte par l'administration communale. Vers 8 h. 1/2 commencent arriver les nom breuses personnalités appartenant tous les mondes le comte de Flandre et le prince Al bert, tous deux en grande tenue les maisons royales, qui sont largement représentées par le comte John d'Oultremont, grand maréchal de la cour le baron A. Goffinet, secrétaire des com mandements du Roi le baron Constant Goffinet, intendant de la liste civile le colonel Bricoux, commandant du département du grand-écuyer les généraux Nicaise et Strauch, aides-du-camp du Roi le commandant comte du Chastel-An- delot de la Howarderie, officier d'ordonnance le lieutenant Gumont, attaché la maison mili taire; le comte Werner de Mérode, grand-maître de la maison de la Reine le comte O. d'Oultre mont de Duras, grand-maître de la maison du comte et de la comtesse de Flandre le général Du Roy do Blicquy, aide-de-camp du comte de Flandre le major Burnell et le commandant comte Hemricourt de Grunne, officier d'ordon nance. Les ministres Begerem, Vandenpeereboom, De Smet de Naeyer, De Bruyn, Schollaert et le général Brassine. Les ministres d'Etat Beernaert, Jules Bara, Guillery, de Lantsheere, baron Lambermont, t'Kint de Roodenbeke et Lejeune. Le gouverneur de la province, MVergote. M. Buis, bourgmestre, les échevins De Mot, De Potter, Steens, Bruylant et Lepage, les con seillers communaux, sauf les socialistes, qui se sont abstenus, et presque tous les bourgmestres de l'agglomération. Les discours. Une oraison funèbre et cinq discours ont été prononcés au milieu du recueillement général, par le pasteur Lebeau, par M. Begerem, au nom du gouvernement, par M. Vanderkindere, au nom de la classe des lettres de l'Académie royale, par M. Bara, qui a été le principal col laborateur de l'œuvre de Frère-Orban, par M. Goblet, au nom de la Ligue libérale et par M Buis, au nom de la capitale. Le départ. Il est neuf heures trois quarts lorsque le corps, porté bras, apparaît boub le porche de l'Hôtel de Ville. Une compagnie de grenadiers rend les hon neurs au défunt par une salve. Dans le char fu nèbre, le lourd sarcophage est glissé et lentement le cortège se forme. Ce sont d'abord des gendarmes cheval ou vrant la marche dans l'étroite rue au Beurre pour gagner le boulevard Anspach. Puis les vieux oraves de 1830 en costume national, et leur vieux drapeau les généraux et l'état- major de la garnison les délégations, avec dra- \o 2. Jeudi, LE PROGR TIRES acyuirit ECfl>0. ABONNEMENT PAR AN: Pour rarrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00 tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20. INSERTIONS Annonces la ligue ordinaire fr. 0-10 Réclames la ligne, fr. 0-25. Insertions Judiciaires la ligne, un franc. Les annonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du Progrès Pour le resiaflt de la 'Belgique et de l'Etranger, également aux bureaux du journal LE PROGRÈS, -*

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Le Progrès (1841-1914) | 1896 | | pagina 1