Chronique locale.
-net-
10. Jeudi,
56e ANNÉE.
6 Février 1896.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Les élections d'Ypres.
6 FRANCS PAR AN.
Nous continuons reproduire le compte-rendu
de la Chambre relatil l'interpellation de M.
Heuse au sujet de nos élections communales.
Le Journal le prend l'avance sur un ton
triomphant, annonçant le discours de M. Colaert
et aussi (risum teneatis) celui de M. Iweins, ajou
tant, assez naïvement, que l'honorable représen
tant de Liège n'était guère au courant des faits.
Comme il ne nous en coûte jamais de recon
naître une chose vraie, même quand il s'agit
d'allégations faites par nos adversaires, nous ne
ferons aucune difficulté d'avouer que, sur le
point relevé, le Journal a raison.
Non, M. Heuse, qui n'est pas du terroir, n'a
été ni pu être au courant des faits dont s'agit,
et il est hors de doute que M. Colaert les con
naissait mieux que lui, et Henrietje beaucoup
mieux encore que ce dernier.
Le hic, c'est que ni l'un ni l'autre de nos deux
hommes n'ont pu les avouer qu'ils ont dû, au
contraire, les dénier et les démentir.
Entend-on ces Messieurs dire, en pleine Cham
bre encore
Oui, si nous sommes au Conseil communal
d'Ypres, c'est par la fraude et la corruption
pratiquées par nos amis que nous y sommes ar
rivés
Bien plus C'est parce que nous... etc., etc....
Non On ne pouvait s'attendre pareil accès
de franchise
Il se fait donc que, M. Heuse ne pouvant ju
ger de nos griefs la forte distance où il se
trouve, et nos représentants déniant ces griefs,
la Chambre n'a été pas mieux éclairée que si on
avait mis une lanterne sourde sous le fauteuil
du président.
Heureusement, il s'est rencontré au Parlement
même un énergique député qui, ayant vu chez
lui, dans sa propre commune, tout ce qui s'est
passé d'analogue aux fourberies de céans, a pu
témoigner de ce dont les cléricaux sont capa
bles, et protester sur le ton voulu.
C'est pourquoi, après les critiques de M.
Heuse, nous reproduirons le discours de l'ho
norable abbé Daens dont les affirmations préci
ses, les cinglants reproches, les virulentes répro
bations et les apostrophes indignées s'appliquent
tout aussi bien aux élections d'Ypres qu'à cel
les d'Alost. Dans les deux localités, le jeu des
cléricaux a été absolument le même Fraude en
haut corruption en bas tricherie sur toute la
ligne
LE PROGRÈS
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
TIRES ACQUIR1T eundo.
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00
Idem. Pour le restant du pays7-00
tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20.
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Insertions Judiciaires la ligne, un franc.
Les annonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du Progrès Pour
le estant de la Belgique et de l'Etranger, également aux bureaux du journal LE PROCRÈS,
On traite forfait.
M. Schollaertministre de l'intérieur et de l'in
struction publique. Les élections d'Ypres et d'Alost
ont été surtout critiquées il semblerait, entendre
d'honorables membres, que des faits réellement in
croyables auraient été constatés.
Le gouvernement se préoccupe surtout de la ques
tion de droit lors de la vérification des élections.
A Ypres, d'après la plainte, 4 bulletins auraient servi
cette fraude que l'on a appelée le bulletin voya
geur. Or, l'administration communale d'Ypres a
parfaitement expliqué le manquant constaté et les ré
clamants se sont trompés. C est ainsi qu'ils alléguaient
qu'un électeur avait été indûment omis sur les listes
il avait de bonnes raisons pour cela il était mort
[On rit.)
Il eu était ainsi pour un absent et deux autres élec
teurs, également rayés. Ces diverses erreurs rectifiées,
le manquant constaté de 4 bulletins vient tomber.
Deux autres électeurs avaient subi des condamna
tions la prescription était acquise au premier quant
au second, le juge de paix avait omis de le rayer des
listes et, dans ces conditions, on n'aurait pu empêcher
cet électeur de voter que moyennant la production des
pièces établissant sa condamnation.
Quant aux lettres de convocation en blanc dont a
parlé M. Heuse, elles s'expliquent par ce fait que les
dix présidents de bureaux avaient reçu chacun une
lettre de convocation en blanc pour le cas où il y au
rait quelque erreur de la part d'un électeur or, l'une
des dix convocations n'est pas rentrée. Sans doute est-
ce celle possédée par M. Heuse
M. Colaert. Le président comme le secrétaire de
ce bureau sont deux libéraux très impartiaux.
M. Schollaert, ministre de l'intérieur et de l'instruc
tion publique. Pour ce qui est des faits de fraude,
M. Heuse en a cité plusieurs mais ils n'ont pas été
articules devant la députatnM permanente. Plusieurs
n'ont aucune pertinence, si quelques-uns peuvent prê
ter a discussion. En tout cas, des faits semblables doi
vent être signalés la députation permanente et non
en degré d'appel.
Dans ces conditions, je ne pouvais que valider la
décision de la députation permanente.
M. Heuse. Je maintiens qu'une enquête eût été
nécessaire pour l'éiection d'Ypres. En effet, M. le mi
nistre a répondu très vaguement mes critiques sur
ce point il a évité de rencontrer les plus graves. Po
tins de cabaret disent MM. Colaert et Iweins d'Eeck-
houtte ce sont les libéraux qui sont coupables.
Il est aisé de le dire mais de nombreux témoins
déclarent avoir entendu certains propos une enquête
les eût vérifiés. M. Colaert n'a-t-il pas reconnu hier
que le parti catholique avait régalé un millier de ci
toyens, des gardiens a-t-il dit
M. Colaert. Un petit pain j'en ai donné même
vos amis
M. Heuse. Qu'importe II a donc fallu nourrir
et abreuver un millier de gardiens Ypres, où il y a
peine 2,500 électeurs C'est un euphémisme qui dé
guise une véritable ripaille électorale et dont le pays
ne sera pas dupe
Quant M. Iweins, il est en aveu il a reconnu
qu'il était allé l'hospice et avait entretenu les vieil
lards des élections. C'est évidemment un abus d'auto
rité. M. Iweins a dit hier qu'on avait interdit et
non permis, comme le porte par erreur le Compte
rendu analytique la lecture des journaux politiques
aux hospitalises. Pourquoi cette interdiction Pour
quoi ne pas laisser libres les vieillards des hospices
comme les autres citoyens
M. le ministre a reconnu ma modération. Si M.
Daens a signalé ici des faits vrais, qu'importe qu'il soit
d'accord avec nous La vérité est une Or, les faits
que nous avons signalés hier, et qu'il a indiqués de sou
côté, sont exacts, not imment ceux qui sont relatifs
l'aide imposée au vote des 36 vieillards des hospices.
Ici encore, M. le ministre a eu tort de ne pas décréter
l'enquête.
La conclusion de ces débats est celle-ci nous de
vons modifier notre loi électorale. Il est certain qu'un
homme qui dispose de plusieurs voix est plus exposé
des tentatives de corruption que celui qui ne dispose
que d'une voix
Il faut en revenir au vote unique et admettre la re
présentation proportionnelle sans le quorum. Il faut
modifier la procédure électorale des députations per
manentes c'est la moralité qui découle de ce débat.
Il faut moraliser le corps électoral dans l'intérêt du
pays entier (Très bien gauche.)
M Colaert. M. Heuse a prétendu tantôt que M.
Iweins aurait engage les vieillards des hospices d'Ypres
voter pour les catholiques, la veille des élections. En
réalité, il était allé leur parler quinze jours plus tôt et
leur avait dit, au contraire, qu'ils étaient libres de vo
ter selon leur conscience pour qui ils voulaient.
J'aurais, de mon côté, avoué les ripailles d'Ypres
c'est encore une erreur: les catholiques ont simplement
retenu au Volkshuis les membres de la Société.(Bruit.)
La nuit, nous leur avons donné un petit pain et un
verre de bière. (Le bruit continue.) (1)
Je proteste donc contre ce que M. Heuse a dit les
faits sur lesquels il s'est appuyé sont inexacts ou con-
trouvés
Voix nombreuses La clôture la clôture (Pro
testations gauche.)
M. Daens Je ne suis pas fâché que l'interpellation
sur les élections d'Alost se soit produite, car elle me four
ni l'occasion de rectifier ou de rétracter, si l'on veut
certaines de mes paroles.
Excité par une interruption piquante, j'ai dit naguère
de ces élections qu'elles étaient le triomphe de la fraude,
de la violence et de l'orgie. Il y a là uoe erreur. La
parole a quelque peu trahi ma pensée c'est l'incon
vénient que nons éprouvons nous autres Flamands,
lorsque nous nous exprimons en une langue étrangère:
nous ne trouvons pas le mot juste, notre pensée est forcée,
nous employons des mots peu parlementaires qui nous
valent des menaces de rappel l'ordre. Si j'avais parlé
flamand, j'aurais dit De kiezing van Aalst is de triomf
van het bedrog, van het geweld en van de Zatlapperij.
(Rires gauche. Bruit droite.)
M. Demblon. La traduction M. Woeste ne connait
pas le flamand (Nouveaux rires.)
M. Daens. Ce que je traduis par ces mots t Les
élections d'Alost ont été le triomphe de la fraude, de la
violence et de la saoulerie (Hilarité gauche
M. Coremans. Ce n'était pas la peine de vous ré
tracter. (Nouveaux rires.)
M. Daens. 11 y a cependant une nuance (Bruit.) Je
ne puis rien retrancher de cela, car c'est la vérité. Ces
élections ont été une victoire malhonnête et illégale. La loi
a été cyniquement violée dans presque tous ses articles.
Tout le monde sait cela Alost Et ceux qui ont commis
ces actes illégaux s'en font gloire ils disent qu'ils ont
encore d'autres trucs dans leur sac. (Exclamations
gauche.) Il est temps de réprimer ce régime de fraude et
de démoralisation populaire l'interpellation était donc
nécessaire.
Je parlerai avec calme, sans passion, mais en toute sin
cérité. Il ne s'agit plus de mettre en question le résultat
de la dernière élection d'Alost jugée par la députation,
permanente, fatalement partiale, (Réclamations droite.)
M. Woeste. Mais il est inadmissible de dire cela
M. Daens. Je dirai occasionnellement partiale
si vous voulez.
M. de Jonghe d'Ardoye Vous avez été déjà rappelé
l'ordre dans des conditions semblables.
M. Coremans (en flamand!. Dites cela en flamand,
vous le direz mieux (Ou rit.)
M. Daens. L'enquête de la députation permanente a
été un simulacre
(1) Et le bâton