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N° 37. Dimanche,
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Une enquête nécessaire.
Autour d'un banquet.
56e ANNÉE.
10 Mai 1896
6 FRANCS PAR AI*.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
TIRES ACgOIfilT EDSDO.
On traite forfait.
Voici de chez Weisenbruch, imprimeur du
Roi, une nouvelle brochure jaune signée un
Paysan Flamandce môme paysan qui fit
entendre sa voix dans toutes les circonstances
critiques que traversa notre parti.
Cette fois il s'empare des déclarations de Paul
Janson, de l'union des radicaux avec le parti
ouvrier, pour communiquer sa manière de voir
aux braves électeurs pluraux ou non.
Janson a obéi un coup do tôte, afiirme-t-il.
Dans le parti libéral, il était quelqu'un,
parce que le parti libéral sait honorer le talent.
.Dans le parti socialiste, il ne sera rien, parce
que le talent y compte pour peu de chose. Il
faut, pour plaire ses dirigeants cl sa clien
tèle, une éducation spéciale et une éloquenqe
enragée laquelle M. Janson, trop correctement
et trop littérairement élevé, ne pourra pas con
descendre.
Voilà le sort qui attend M. Janson.
C'est bien fait, s'écrie notre paysan flamand;
qu'allait—il faire dans cette galère?
Quant aux libéraux, ils n'ont qu'à se féliciter
de la rupture. Celle-ci les délivre définitive
ment d'un allié dont l'ambition était pour eux
un embarras et une cause de mésentente.
Le parti libéral aura l'avenir ses coudées
franches, et, quoi qu'on en dise, il ne sortira
pas affaibli de l'aventure.
L'inlolerance religieuse les radicaux c'est
le paysan flamand qui parle avait détourné
du libéralisme toute une catégorie d électeurs
qui entendaient vivre et penser en liberté.
Ceux-là nous reviendront quand nous aurons
adopté des mœurs franchement tolérantes.
Cest là que nous allons.
Notre principe unique est le respect absolu
de toutes les convictions et de toutes les
croyances sincères.
Nos portes s'ouvrent devant les protestants
comme devant les catholiques, devant l'alhce
comme devant le déiste, pourvu qu'ils soient
consciencieux et honnêtes, et admettent avec
nous la nécessité de l'independance du pouvoir
civil, de la liberté du travail et de la liberté de
penser qu'en un mot, ils ne soient ni cléri
caux ni socialistes. (I)
C'est là le vrai libéralisme. En matière poli
tique et religieuse parti de tolérance en
matière sociale parti de démocratie réaliste
et positive ne disant jamais non une réfor
me, mais les accomplissant toutes I heure
opportune et quand elles sont possibles, sans
avoir en vue l'intérêt particulier d'une classe
ou d'une socle, mais n'envisageant que les
intérêts communs de toutes les classes, afin de
les rapprocher, dt: les concilier et de faire, de
ces intérêts bien compris, la raison d'être de
leur loyale entente.
Déjà, l'année dernière, la Chambre n'a pas
pu discuter le budget du ministère des chemins
de fer.
Cette situation n'était pas pour déplaire M.
Vandenpeereboom, qui n'aime pas le contrôle
de la Chambre, qui veut régenter les chemins
de fer en maître absolu. Il n'y a pas de ministre
plus autoritaire que M. Vandenpeereboom. 11
en est arrivé appeler les chemins de fer de
fer de 1 Etat ses chemins de fer.
La Chambre aura-l-elle celte année, plus
que Tannée dernière, le temps de discuter le
budget du ministère des chemins de fer On
prévoit encore que cette discussion devra être
ajournée.
Le travail d'une session a une grande in
fluence sur une autre, et lorsque la Chambre
perd son temps discuter des lois inopportunes,
elle empiète sur le temps des sessions futures,
car les lois nécessaires qu'il aurait fallu discuter
et qu'on aurait pu discuter sont remises
l'année suivante et prennentà leur tour le temps
qu'on aurait pu employer la discussion
d autres mesures législatives indispensables.
Le ministère et la majorité cléricale ont fait
perdre le temps de la Chambre la discussion
de deux lois de parti absolument inopportunes.
C'est la loi sur les droits d'entrée et la nouvelle
loi scolaire qui ont bouleverse tout le travail
parlementaire.
V avait-il quelque opportunité discuter la
loi sur les droits dèntree Quels services cette
loi a-1-elle rendus et devait-elle rendre
l'agriculture? Alors même qu'on en admettrait
le principe, on doit reconnaître qu'elle n'a eu
aucune influence bienfaisante pour l'agricul
ture
La nouvelle loi scolaire avait-elle une op
portunité qui en justifiât le dépôt et la discus
sion immédiate Pour le parti clérical, pour
le clergé, oui mais pour le pays, alors même
qu'elle n eût pas été une loi funeste, elle était
inopportune. Rien ne justifiait cette hâte, si ce
n'est, pour le parti clérical, la perpétration d'un
coup de parti qui devait donner aux adminis
trations bien pensantes le moyen d adopter des
ecoles avant les élections. C'était une assurance
contre les mésaventures électorales.
Ce sont ces deux lois, la loi scolaire, qui ont
retarde le travail parlementaire.
C'est pour accomplir cette mauvaise besogne
que le gouvernement et la majorité cléricale
ont empêche la Chambre de discuter le budget
du ministère des chemins de fer, de s'occuper
de projets utiles.
C'est pour obtenir ces deux lois de parti, que
l'on a remis un travail qui, son tour, empiète
cette annee sur le temps réservé autre chose.
On prévoit encore que le budget du ministère
des chemins de fer ne pourra pas être discute
cette année. En même temps, des députés de
la gauche demandent une enquête sur tout ce
qui concerne ce département. Celle enquête
devient d'autant plus nécessaire, que ce serait
un moyen de remedier en partie au fan que le
temps utile pour la discussion du budget fera
défaut.
C'est le 28 Mai que la droite de la Chambre
offre un banquet d'entraînement électoral au
président du bureau et aux membres du cabi
net.
S'il faut en croire un jourual anversois, tous
les députés de la droite ont souscrit, l'excep
tion d'un seul.
Cet unique dissident n'est point, comme on
pourrait le croire, M. l'abbé Daens.
M. Daens aurait donc souscrit, et se dispose
rait festoyer avec ses ennemis.
Le bruit court dans les cercles parlementaires
que l'initiative de M. Daens a complètement dé
sorienté les organisateurs de la Cène faire.
Les questeurs, qui sont les commissaires du
banquet, ont songé un instant, en prévision des
incidents qui pourraient éclater entre M. YVoes-
te et ses prétoriens d une part, et M. Daens de
l'autre, supprimer les couteaux mais cette
mesure préventive, assurément fort sage, n'a
pas été jugee suffisante, attendu que les four
chettes, les cuillers, les assiettes et les verres
peuvent, sous la main d'un convive un peu
brusque, se transformer en instruments de
propagande par le fait.
On agile, paraît-il, la question de savoir s'il
ne conviendrait pas de faire dîner M. Daens
tout seul, une petite table.
Cette petite table, qui n'a rien de commun
avec celle que Massenet a chantee dans Manon
présenterait l'avantage d'être symbolique.
Malheureusement, M Daens, de plus en plus
égaré par son mauvais esprit, refuse de dîner
part.
Les choses en sont là. Nous tiendrons nos
lecteurs au courant des moindres phases de ce
conflit de fourchettes.
Reste savoir, puisque M. Daens a souscrit,
quel est le député qui s'est abstenu.
Le journal dont nous parlions tantôt assure
que ce seigneur mystérieux ne serait autre que
M. De Lantsheere.
Ce dissident-là n'est pas le premier venu, et
son abstention sera considérée comme un évé
nement.
Il est vrai que l'ex-président de la Chambre
s'est complu depuis quelques mois, avec la mor
dante bonhomie qu'on lui connaît, 5 blâmer
publiquement le desordre qui règne au palais
de la Nation.
Voilà six mois que nous siégons, a-t-il dit
récemment, et sur 47 projets déposés pendant
ces deux dernières sessions, 4 seulement qui
ne revêtaient d'ailleurs aucun caractère d'ur
gence sont devenus des lois. La Chambre n'a
plus que six semaines de session devant elle,
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00
Idem. Pour le restant du pays7-00
tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20.
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insertions Judiciaires la ligne, un franc.
Les annonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du Procrês Pour
le restant de la Belgique et de l'Etranger, également aux bureaux du journal LE PROGRÉS,
Ypbes, le 9 Mai 1896.
(1) Nous entendons par cléricaux les catholiques intran
sigeants, sectaires radicaux d'une autre couleur, mais
nou moins exclusifs que les radicaux soi-disant libéraux.
(N. de la R.)