\°s 65-66. Jeudi,
56e ANNÉE.
20 Août 1896
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
A propos de la loi scolaire
ou la question des gros sous
Misère.
Pas de service personnel.
Les progrès commerciaux
de la Belgique.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
On traite forfait.
On ne connaîtra jamais bien que par la pra
tique les ineffables beautés de la loi scélérate
que les pointus de la droite, le fanatique Schol-
laert en tête, ont arrachés au Parlement. L'é
tude théorique ne saurait en faire toucher du
doigt le but poursuivi et les résultats inévita
bles. 11 y a, sous le mèli-mélo de cette législa
tion des pièges et des chaussetrappes qui auront
pour les finances du pays et celles des commu
nes les plus déplorables conséquences.
Les cléricaux sont enfin parvenus leur but
ils se sont déchargés sur les caisses publiques
des charges de leur enseignement confession
nel.
Ils conservent leurs écoles, mais les font
subsidier par l'Ëiat.
Le tour est joué.
La Constitution veut que la loi règle l'instruc
tion publique donnée aux frais de lEtat.
Les cléricaux ont détruit ce principe.
Désormais il est vrai de dire que l'enseigne
ment privé, donné aux frais de l'Etat, n'est pas
réglé par la loi.
11 existe trois catégories d'écoles primaires
enlretenues par le budget les écoles officielles,
les écoles adoptées et les écoles adoptables.
Dans les premières l'enseignement de la reli
gion est .obligatoire. Les troisièmes peuvent
exclure de leur enseignement non seulement
la religion, mais encore la morale. Toutes ont
droit aux subsides de l'Etat et de la Bienfai
sance publique.
En fait, il n'y aura d'adoptables que des éco
les congréganistes. Peut-être, dans quelques
centres socialistes, les coopératives ouvrières
créeront-elles des écoles franchement révolu
tionnaires. On y formera des républicains, des
collectivistes on y façonnera les futurs arti
sans de la [évolution sociale. Et c'est l'argent de
l'Etat, l'argent des contribuables, les revenus
du patrimoine de la Bienfaisance publique qui
serviront atteindre ce déplorable résultai.
Cela nous autorise dire que la question du
programme, avec la religion obligatoire, n'a
été mise en avant que pour détourner l'atten
tion.
On s'y est attaché presque exclusivement
dans les débats parlementaires, on y a com
plètement négligé la question financière, celle
qui tenait le plus au cœur des cléricaux et
qu'ils ont résolue leur profit exclusif.
Toutes les écoles congréganistes, toutes les
écoles tenues par les petits frères et les petites
sœurs, toutes les écoles auxquelles le clergé
accordera son patronage, qu'elles soient bonnes
ou mauvaises, suffisantes ou nulles, seront
entretenues aux frais du Trésor public.
Jamais nous n'avons été aussi loin dans la
voie de la réaction.
En 1857, lorsque les pavés se sont soulevés
d'eux-mêmes contre le ministère des six Malou,
il ne s'agissait que de donner la personnifica
tion civile certains établissements, pour leur
permettre de recevoir des libéralités.
On ne demandait cette époque que de pui
ser dans la poche dos vieilles bigotes et dans
la bourse des moribonds. Les ressources de
l'Etat restaient consacrées aux services d'utilité
publique, organisés sous son contrôle et sa
direction.
Aujourd'hui on laisse aux couvents, aux
membres du clergé et aux jésuites en robe
courte la facilité de puiser pleines mains dans
le Trésor public et dans la caisse des bureaux
de bienfaisance.
Et le suffrage universel a tellement éloigné
les populations du souci de leurs intérêts les
plus chers que ces monstruosités les laissent
profondément indifférentes.
II est certain que ce n'est pas sous le régime
censitaire ou capacitaire que le parti clérical
eût osé entreprendre de pareilles énormités.
Le gouvernement clérical est, paraît-il, la
recherche de nouveaux impôts. Sa politique de
gaspillage a mis le trésor dans un triste état.
On reprochait naguère aux libéraux de dé
penser 322 millions par an pour le ménage na
tional. On est déjà arrivé 360 millions et l'on
ne sait plus de quel bois faire flèche pour parer
aux dépenses toujours croissantes.
Chaque fois que l'on a voté une mesure poli
tique, on a creusé un trou profond dans le
budget. Pour couvrir les dépenses de la loi
scolaire, qui auraient dû pouvoir être imputées
sur le budget ordinaire, on a établi pour treize
millions de droits d'entrée.
On a prétendu que le chiffre était plus faible.
En réalité il est supérieur, car le rendement des
nouveaux droits de douane, en y ajoutant
l'accise sur la margarine indigène, a produit
pendant les six premiers mois de l'année 1896
7,250,000, ce qui fera 14 1/4 millions pour
l'année entière. Ce sont les chiffres du Moniteur
nous les avons cités.
Quand on a augmente la rémunération des
miliciens, ce qui représente une charge nou
velle de 12 millions par an, on s'est trouvé
également dans l'impossibilité de porter cette
charge l'ordinaire ou plutôt de la faire sup
porter par le budget ordinaire, et l'on a établi
pour 20 millions de nouveaux droits sur l'al
cool.
Nous n'en avons pas encore fini. Chaque fois
que nos adversaires voleront une nouvelle loi
de parti, ils lèveront un nouvel impôt.
On se demande comment ils peuvent se van
ter d'accorder des avantages au peuple belge,
puisqu'ils passent leur temps puiser dans sa
j)oche le montant de leurs prétendues largesses.
Et il est bon de noter que le peuple paye tou
jours plus que la somme qu'on lui réclame, car
s'il s'agit de droits de douane par exemple, il
doit acquitter en outre la note toujours salée du
fonctionnarisme.
Voici en quels termes le Courrier de Bruxel
les dément la nouvelle du dépôt d'un projet de
réforme militaire
11 n'est pas besoin de dire que nos confrè
res ont tiré ces informations sensationnelles de
leur propre fond.
Certes, nos adversaires verraient de fort bon
œil le gouvernement se mettre, au cou, la corde
du service personnel mais cette joie ne leur
sera pas donnée. Le ministère ne songe pas
rouvrir le débat sur la question militaire.
Nos confrères libéraux peuvent donc conter
leurs petits potins ni aujourd'hui ni l'an pro
chain, ils ne verront leurs désirs réalisés.
Nous croyons qu'il serait de la dignité du
général Brassine d'annoncer une fois pour tou
tes, dans l'organe officieux du gouvernement,
quelles sont ses intentions vraies.
Sinon, il deviendra tout jamais un objet de
dérision et de pitié parmi les officiers qui atten
dent que le ministre de la guerre tienne sa
parole.
Le Soir consacre son article une étude sur
les progrès économiques accomplis par la Bel
gique depuis sa séparation davec la Hollande.
Nous en extrayons les passages suivants
En 1834, les importations de la Belgique,
commerce général, montaient seulement
192,909,426 francs. C'était peu, mais comparé
au chiffre de 1831, soit 98,013.079 francs,
celait beaucoup, car il y avait déjà un progrès
d'environ cent millions. Ce début était plein de
promesses et faisait favorablement augurer de
1 avenir, car la plus grande partie de ces impor
tations était composée de matières premières
destinées au travail de nos manufactures.
Dix ans après, en 1844, malgré les difficultés
de tous genres contre lesquelles la jeune nation
avait lutter, nous trouvons encore une aug
mentation d'une centaine de millions, soit
307,701,331 francs.
Chaque étape de dix ans ne fait qu'accentuer
cette marche en avant et nous arrivons, en
1894, au chiffre respectable de 2,703,080,783
francs, c'est-à-dire, en soixante ans, une
augmentation de plus de deux milliards six cent
millions.
Examinons maintenant les progrès accusés
par une autre branche de notre domaine com-
LE PROGRÈS
TIRES ACQU1R1T EONDO.
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00
Idem. Pour le restant du pays7-00
tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 20.
INSERTIONS Annonces la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames la ligne, fr. 0-2S.
Insertions Judiciaires la ligne, un franc.
Les annonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du Progrès Pour
k restant de la Belgique et de l'Etranger, également aux bureaux du journal LE PROGRÈS,
Ypres, le 19 Août 1896.