54. Jeudi, 57e ANNÉE. 29 Avril 1897 JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Manifestation Nationale. Patriotes, debout La liberté de conscience. Les frères ennemis. 6 FRANCS PAR AN. PARAISSANT LE JEUDI ET LE DEHANCHE. On traite forfait. Yprès, le 28 Avril 1897. Nous venons de recevoir une brochure ren fermant le texte de l'adresse qui sera remise au Roi lors de la manifestation patriotique des an ciens militaires, ainsi que le texte du discours prononce par M. Visart de Bocarmé, représen tant catholique, la réunion des anciens com battants de la légion belge au Mexique. L'adresse, approuvée par les officiers retrai tés de l'armée belge, est éloquente. Les auteurs, après avoir constaté que la question de la ré organisation de l'armée est devenue urgente depuis la propagande active des apôtres delà- narchie, rappelle la défection récente du minis tère, qui avait cependant pris des engagements solennels devant le pays. Une plus longue attente, poursuit l'orateur, ferait croire que le peuple belge cherche se soustraire aux obligations que lui imposent les traités, l'intérêt vital de son indépendance et l'honneur national. Elle se justifierait d autant moins que le gouvernement lui -même reconnaît que le recrutement de I armee est défectueux et que l'effectif de guerre doit être augmenté. D importants journaux politiques et militai res de l'étranger nous mettent en garde contre le danger d'envahissement résultant de l'insuffi sance de nos moyens de défense. Le belligérant qui douterait de l'efficacité de notre neutralité invoquera le cas de force majeure pour empê cher son adversaire d occuper les fortifications de la Meuse, et cette invasion transformerait, une fois de plus, nos riches provinces en un champ clos où pourrait sombrer notre nationa lité. Le Parlement, cependant, persiste dans sa déplorable inaction. Gomme le disait déjà Léo- pold I", sans sécurité nationale, il n'y a pas (l'existence politique or, la Belgique, par sa si tuation, est le pays le plus expose de la terre. Léopold II n'a cessé depuis de faire appel au patriotisme condition sine qua non de notre in dépendance. En particulier, notre Souverain, lors de 1 inauguration Bruges, du monument de Breydel et De Goninck, exhorta les Belges ne reculer devant aucun sacrifice pour main tenir en tout temps les droits de la patrie». Ce discours trouva de l'écho l'étranger, mais aucun acte du gouvernement belge n'y répon dit. Les Belges sommeillent, confiants dans le respect de leur neutralité. Espoir trompeur Les colossales armées de nos voisins seront obligées de prendre un front d'opérations si étendu qu'une de leurs ailes, forlede3à5 corps d armée, aurait le plus grand intérêt traverser la Belgique, moins que celle-ci ne fût en mesure delà repousser ou de 1 arrêter plusieurs jours dans sa marche. Comme les deux belligérants disposent de forces sensible ment égales, celui qui, sur le principal théâtre de guerre, où se portent les coups décisifs, se rait privé du concours d une de ses ailes ou seu lement de 2 corps d'armée, se trouverait dans une position critique et serait en outre, s'il était battu, exposé voir ses communications menacées, coupées peut-être, par ce qui nous resterait encore de troupes et par nos popula tions soulevées contre lui. Il est donc certain que l'un et l'autre belligérants resserreraient leurs lignes de marche et respecteraient no- tre neutralité, si celle-ci était fortement défen due Le gouvernement, au lieu d'abolir le rem placement, cherche créer une armée de volon taires et renforcer la garde civique. Celle-ci n'aurait jamais les qualités nécessaires pour coopérer avec l'armée de campagne et elle-se rait également insuffisante pour la défense des places qui, aujourd hui, depuis la création d'un matériel compliqué, est devenue active. Un de nos généraux les plus distingués, qui fut pendant plusieurs années inspecteur général de la garde civique, disait en 1878, après avoir rappelé que des troupes sans cohésion et sans préparation suffisante font d'énormes pertes sur les champs de bataille et y causent du désordre: Employer la garde civique comme réserve de l'armee, serait commettre une faute, un crime contre l'humanité. Les officiers retraités, auteurs de l'Adresse, constatent que l'on a toujours caché la vérité aux électeurs. En particulier, on ne leur a pas dit que si les Belges venaient perdre leur in dépendance, ils seraient astreints au service militaire jusqu'à l âge de 45 ans, et qu'ils au raient remplir leurs obligations loin du pays, et môme dans des contrées^ dont le climat est mortel pour les Européens. 11 n'y a pas ici de préoccupation électorale en jeu. Le Souverain a le droit d interroger directement la nation sur la question de son existence. C'est pourquoi, conclut l'Adresse, les officiers retraités vien nent respectueusement prier Votre Majesté de vouloir bien user des droits que Lui confère la Constitution pour hâter le moment où la nation, loyalement consultée, pourra prouver cjue la paix et la prospérité ne l'ont pas énervee au point qu'elle se refuse faire les sacrifices per sonnels et financiers nécessaires pour défendre l'indépendance et les libertés du pays, i Cet éloquent appel sera entendu malgré les efforts des réactionnaires qui tremblent l'idée d'un appel la Nation. A droite môme, des voix autorisées ont pro testé contre legoïsme de la majorité. M. Visart de Bocarme, dans le discours an nexé l'Adresse, a dit énergiquement Cest avec un profond regret que je vois des membres de la majorité faire fausse roule et négliger les intérêts primordiaux de notre défense nationale, pour donner satisfaction aux électeurs mal informés, ignorants de la ques tion, qui les envoient la Chambre. C'est avec un profond regret aussi que je vois des classes de la société belge qui ont donné des preuves éclatantes de leur patriotisme, spécialement pendant la crise qui créa la Belgique indépen dante et libre, ne pas comprendre que, dans les circonstances actuelles, elles devraient prendre la tête du mouvement sainement démocratique qui se produit pour l'égalité des charges mili taires. Le noble langage de M. Visart de Bocarmé contraste vivement avec celui de nos Nie- mand gedwongen soldaat les sans patrie qui trahissent la naiion. Nous félicitons ce représentant catholique de son attitude courageuse et nous espérons que son mâle appel, lui aussi, sera entendu. La manifestation nationale qui aura lieu pro- chaineraenlà Bruxelles sera une des plus belles, une des plus émouvantes dont la Belgique aura jamais été le théâtre, car aucune n'aura été inspirée par une pensée plus haute. Cent mille citoyens libres viendront apporter au Roi l expression de leur loyalisme et consa crer par une démarche solennelle, les vœux qu'il a si souvent exprimés, préoccupé de la grandeur et du salut de la Belgique. Le Roi, si souvent déçu, a dû éprouver par fois un découragement cruel. Mais les patriotes se lèvent et viennent lui dire Sire, comptez sur nous parlez, la nation vous entend, agis sez, elle sera avec vous I Un arrêté ministériel concernant l'examen d instituteur, paru il y a quelques jours au Moniteur, dit que les récipiendaires qui se irésenteront en 1897 l'examen prévu par article 9 de la loi du 15 Septembre 1895, su- nront une épreuve sur la religion, mais qu'ils pourront en être dispensés sur leur demande écrite s'ils sont majeurs, et, s'ils sont mineurs, sur la demande écrite de leurs parents ou tu teurs. Une demande écrite encore Que de récipiendaires seraient désireux de ne pas subir l'épreuve sur la religion, mais qui n'oseraient en faire la demande écrite I Cette nécessiléd'unedemande écrite est une violation de la liberté de conscience. II est peine besoin de dire que l'aspirant instituteur n'a pas la liberté complète de faire cette demande écrite. M. Schollaert a dit qu'il n'avait rien refuser aux évèques. Sous un tel régime, un instituteur n'a-t-il rien craindre? Heureusement, il y a encore pour lui les ad ministrations communales libérales. Mais il n'en est pas moins vrai que, comme toutes les administrations ne se ressemblent pas, la né cessité dune demande écrite est une mesure d'inquisition, une atteinte la liberté de con science de l'instituteur, dont les droits auraient dû être d'autant mieux sauvegardés, qu'on ou vrait l'école aux ministres des cultes. Edifiante, l'attrapade l'une des derniè res réunions de la Chambre, entre MM. Woeslc et Becrnaert, au moment où celui-ci faisait LE PROGRÈS VIRES iCyCIBIT KUNDO. ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00 Idem. Pour le restant du pays7-00 tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue de Dixmude, 51. INSERTIONS Annonces la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames la ligne, fr. 0-25 Insertions Judiciaires la ligne, un franc. Les annonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du PnocRts Pour le résîunt de la Belgique et de l'Etranger, également aux bureaux du journal LE PROGRES.

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Le Progrès (1841-1914) | 1897 | | pagina 1