55. Dimanche, 57® ANNÉE. 2 Mai 1897 JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. La guerre en Orient. La patrie marâtre. 6 FRANCS PAR AN. PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE. On traite forfait. Kanopoulos, 27 Avril. Les troupes sont échelonnées depuis ici jus qu'à Pente Pighadia où ont lieu tous les jours des escarmouches. A la sortie de Philippiades on rencontre une grande caserne turque et une poudrière aban données où les Turcs ont laissé une grande quantité de munitions notamment 10,000 obus et fusées. Koumoutzades, 27 Avril. Le commandant Benoukos avec 1,000 hom mes se trouve ici. Un bataillon d'infanterie et les evzones sont aux avant-postes avec le major Paspadimos. Us occupent l'issue des gorges profondes existant entre les montagnes élevées qui conduisent de Kanopoulos Koumoutzades. Au point de contact avec l'ennemi les senti nelles sont plus vigilantes. Des ouvrages mobiles de défense ont été dressés. Les chefs et les troupes sont pleins d'entrain, malgré les nouvelles reçues de Tbessalie. Une victoire grecque. Athènes, 28 Avril. Un combat est engagé depuis ce matin Vel- stino. Vers le soir la lutte a été favorable aux Grecs. Les turcs ont été repoussés. Arta, 28 Avril. Les troupes qui ont opérées Philippiades rejoindront le colonel Botzari, pour marcher contre Janina. Les evzones combattent actuellement devant Pentepigadia. Kn avant. L'armée turque avance en Epire et en Thes- fialie. A l'ouest, les Grecs ont été refoulés pres que sous les murs d'Arta. A l'Est, Edhem-Pacha prépare son invasion. De même qu'il avait divisé son armée en trois corps pour franchir les défi lés de la Thessalie, il organise trois colonnes d'invasion, ayant pour objectifs Volo, l'ouest Trikala, l'est Athènes, au sud, par Pharsale et Lamia. L'Occupation tic Volo. Les journaux publient une dépêche de Con- stantinople disant que Volo et Tricala ont été occupés par la cavalerie turque. Alliés des Turcs. Sur Pharsale. Les Valaquea macédoniens, conduits par le chef apostolique Margariti, ont pris les armes et se sont joints aux Turcs contre les Hellènes. Les puissances ont protesté contre l'attaque des ports ouverts par la flotte grecque. L'armée turque a reçu du palais l'ordre de marcher sur Pharsale et Lamia. Ypres, le lr Mai 1897. 11 est curieux, et de nature susciter d'amè- res réflexions, le cas du citoyen belge qui est venu nous exposer ses doléances. Ce brave, mettons qu'il s'appelle Durand est profondément attaché son pays natal, et il est Ger d'être belge. On pourrait trouver que sous le gouvernement dont nous sommes affligés, il ny a peut-être pas de quoi. Mais Durand n'y regarde pas de si près, et if est de ceux qui tressaillent la vue des trois couleurs ou laudition d une Brabançonne. 11 se rappelle avec émotion le temps où il ser vait son Roi Anvers, dans un régiment d'ar- tillerie, et il regrette l'epoque bénie où il portait l'uniforme de l'armée nationale. Des cir constances indépendantes de sa volonté l'ont empêché de rester au service après l'expiration de son terme, et il a été licencie avec un livret militaire absolument vierge de punitions. El voyez la cruelle ironie du destin Malgré ses efforts pour arriver se caser en Belgique après son séjour sous les drapeaux, Durand ne trouva rien, et il fut obligé de chercher en France pour ne pas mourir de faim, il accep ta d'entrer la Cs'du tramway électrique d Roubaix. Grâce son zèle et sa conduite ire réprochable, il devint bientôt conducteur- receveur, fonctions qu'il remplit l'entière sa tisfaction de ses supérieurs. Mais, comme Mignon regrettant sa patrie, Durand souffre sur la terre étrangère toutes les tortures de l'exil. Et chez nos aimables voisins de France, ces tortures sont autant matérielles que morales sous la maternelle et protection niste administration de M. Méline, les Belges résidant en France sont frappés d'une taxe qui doit rapporter gros 5 l'Etat dans le départe ment du Nord. Et non seulement l'Etat perçoit la taxe, mais les sociétés, les compagnies, les industriels font sourdement la guerre aux sa lariés étrangers, et les menacent de les remer cier,... moins qu'ils ne se fassent naturali ser. Car c'est là le seul moyen que les Français aient trouvé jusqu'ici pour arrêter la diminu tion croissante du chiffre de la population dans leur pays. Ailleurs, chez, nous, en Belgique, par exemple, on s'y prendrait peut-être autrement pour fabriquer des citoyens chez nos voisins, on procède par... arrêtés ministé riels. Pour en revenir notre ami Durand, il a été ces jours-ci mis en demeure par sa compagnie de donner sa démission, ou d'adopter officielle ment la nationalité française. Vous comprenez que cette proposition la fait bondir. Lui si belge, renier sa patrie, se vendre l'étranger Jamais I Aussi sa résolu- lion fut vite prise il écrivit sans tarder au mi nistre de la guerre de Belgique, lui rappelant ses excellents services dans I armée, lui expo sant sa situation Roubaix, lui disant son iné branlable attachement son pays, et terminant en lui demandant si ce pays ne pourrait utili ser ses bras et son intelligence, moyennant un juste salaire. Notre ministre de !a guerre est actuellement M. Vandenpeereboom, lequel, comme on sait, dirige aussi le département des chemins de fer. Un ancien soldat, employé aux tramways élec triques, cela rentrait doublement dans sa com pétence celle particularité, peut-être 1 inté ressa, et il Gt.répondre au solliciteur qu'il avait se présenter dans les bureaux de la gare de notre ville. Durand était aux anges. Il obtint un congé de son administration, et il accourut notre antique cité. Mais une amère désillusion l'at tendait. Croyez-vous qu'on l interrogea sur ses capa cités et sur ses antécédents, qu'on lui demanda d'exhiber des certiGcats Pas le moins du monde Pouvez-voas, lui dit-on, vous réclamer d'un gros bonnet clérical Etes-vous recom mande par un ami du gouvernement au pou voir Donnez-vous toutes garanties au parti catholique Et Durand, qui n'a malheureusement aucune relation parmi les porte-soutanes et leurs humbles serviteurs, dut avouer que le genre de protection requis lui faisait absolument défaut. Alors, lui fut-il déclaré, il vous faudra attendre une huitaine d'années avant d'obtenir une place. Nous avons satislaire une foule de quémandeurs plus sérieusement appuyés que vous. Cette dérisoire réponse jeta notre homme dans une furieuse indignation. Voilà donc, se dit-il, comment me traite ma patrie Je lui ai sacriGé naguère mes belles années aujourd' hui, pour ne pas la renier, je suis prêt aban donner une situation, pourvu toutefois qu'elle daigne me venir en aide et elle me laisse en présence de celle alternative mourir de faim en attendant un emploi problématique, ou bien abdiquer mon nom et mes droits de citoyen belge, abjurer ma foi patriotique pour adopter une nationalité étrangère 1 Ingrate Belgique, voilà comment tu te comportes vis-à-vis de tes plus Gdèles enfants Et quand il vint nous exposer sa situation, nous fûmes forcé de reconnaître que son cour roux était justiGé. Comme il nous demandait conseil sur la conduite qu'il avait tenir, nous n'avons pu lui dissimuler qu'entre M Méline, taxant les étrangers, et M. Vandenpeereboom, imposant ses employés d'humiliantes cafar- dises, nous préférions le premier. Durand, dont le patriotisme était déjà fortement entame, parut décidé dès lors se faire enrôler parmi les administrés de M. Félix Faure. Et voilà comme quoi, sans s'en douter, le Pere Boom contribue, dans la mesure de ses moyens, la repopulation de la France. Shoking LE PROGRÈS TIRES ACOIMRIT EONDO ABONNEMENT PAB AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00 Idem. Pour le restant du pays7-00 tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue de Dixmude, 51. INSERTIONS Annonces la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames la ligne, fr. 0-25 Inse/tioDs Judiciaires la ligne, un franc. Les annonces sont reçues Pour l'arrondissement d'Ypres aux bureaux du Pnocnés Pour le restant de la Belgique et de l'Etranger, également aux bureaux du journal LE PROGRES.

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Le Progrès (1841-1914) | 1897 | | pagina 1