Journal de l'Alliance libérale d'Ypres et de l'Arrondissement
Dimanche, 5 liai 1901.
61e année.X° 18.
L'Arrogance sacerdotale.
Le Meeting de la Ligue
des Cabaretiers yprois.
LeMeeling desCabaret iers
et la Représentation
proportionnelle.
LÏSIO.N FAIT LA FORCE. ËDat'(liss(ttll MJitiKUtche^IKES ACQCIRIT EISDO.
Un s'abonne au bureau du journal, rue de Dixmude, 53, Ypbes. Les an
nonces, les faits divers et les réclames sont reçus pour l'arrondissement d'Ypres,
les deux Flandres, le restant de la Belgique et de l'Etranger, au bureau du
journal Le Progrès ON TRAITE A FORFAIT.
PRIX DE L'ABONNEMENT:
pour la ville Par an 4 francs.
pr la province Par an 4 fr. âO
Un vienx clicbé. dira la presse cléri
cale.
Et nulle expression n'est plus juste,
cependant, pour qualifier le régime
sous lequel nous vivons.
Nous sommes voués la toute-puis
sance de la sacristie.
Ce n'est que de nom que nous sommes
régis par la monarchie constitutionnel
le. Nous sommes, vrai'dire, en pleine
oligarchie épiscopale.
Le fameux défi de M. Nothomb
Nous sommes vos maîtres, et vous le
ferons bien sentir est pleinement réa
lisé.
Et la presse bien-pensante ne perd
pas une occasion de nous le faire com
prendre.
Le Courrier de Bruxelles publie cha
que jour un article où il reproche
amicalement au ministère de se mon
trer trop condescendant pour t une
poignée d'incrédules C'est ainsi qu'il
désigne le parti libéral.
MM. de Smet-de Naeyer et Detrooz
sont accusés de modérantisme par les
journaux qu'inspire l'épiscopat.
Voilà où nous en sommes.
Le.Courrier de Bruxelles trouve insup
portable que les pères de famille puis-
sent.dispeqser leurs enfants du cçurs de
religion, et proclame que l'école offi
cielle doit être obligatoirement et uni
versellement confessionnelle; que ceux
qui ne veulent pas du catéchisme pour
leurs enfants les instruisent eux-
mêmes
Le Journal de Bruxelles proclame la
nécessité d'une alliance entre le clergé
et l'Etat. A l'en croire, on ne peut pas
gouverner convenablement sans le se
cours de l'Église. Il faut que le Gou
vernement prodigue le respect et sur
tout l'argent l'ambitieuse et plus
cupide encore sacristie. En retour,
notre admirable clergé inspirera aux
masses croyantes des sentiments de
loyalisme et de cons irvation.
Voilà où nous en sommes, dans un
pays où l'Église est censée séparée de
l'État.
Du jour où, au regard de l'autorité
publique et de ceux qui l'exercent, la
pratique d'une foi et l'affirmation d'une
croyance déterminée deviennent un
titre de faveur, une garantie, la raison
d'une protection ou d'une sympathie
spéciale, il n'y a plus ni liberté, ni
égalité, ni tolérance, et l'esprit de la
Constitution b°lge est faussé.
Il y a privilège pour les uns-, offense
et déni de justice pour les autres.
U y a inquisition dans le domaine des
consciences, classification arbitraire
des citoyens, excitation la guerre
religieuse et prime l'hypocrisie.
Et c'est ainsi que nous retournons
laconceptionthéocratique d'une société
où domine l'idée confessionnelle, où
règne et gouverne le clergé.
Oui, c'est là que nous en sommes
aujourd'hui en Belgique, au début du
xxe siècle, sous un régime qui proclame
la liberté de conscience et l'égalité
devant la loi.
Et nous nous trouvons réduits re
prendre et poursuivre le combat pour
les principes mêmes de nos institutions,
pour les règles fondamentales de notre
ordre politique et social.
Ce qu'il y a soixante-dix ans, nos
aïeux croyaient avoir conquis, il nous
re.-te le reconquérir, comme un bien
dont nous n'avons gardé que 1 illusion
ot dont la réalité nous a été ravie.
Le Libéral de Louvain, 28 Avnl
1901.
Le meeting des cabaretiers a amené
dans la salle de la Bourse un nombreux
public.
A 3 heures 1/4, le président, M. Au
guste HARTEEL, a déclaré la séance
ouverte.
11 dit que deux projets de loi, qui
menacent les cabaretiers dans leur
commerce, ont été déposés. Aussi a-t-
on aussitôt, quelques amis, fondé
une ligue pour la défense des intérêts
communs.
Il remercie MM. les représentants
Colaert et Nolf d'avoir répondu l'in-
vitation qui leur a été faite. Il dit que
tous les sénateurs et représentants de
l'arrondissement ont été invités. MM.
Surmont et Van Merris seuls n'ont pas
repondu. MM. Iweins, Cantillon et De
Ridder l'ont prié de bien vouloir les
excuser de ne pas avoir pu venir. MM.
Iweins et Cantillon se déclarent adver
saires du projet du gouvernement daus
ce qu'il a de vexatoire. M. De Ridder
se déclaré adversaire absolu des deux
projets. Applaudissements
Le Président parle ensuite des nom
breuses vexations dont on n'a cessé
d'accabler les cabaretiers depuis de
longues années. Le commerce qui nous
fait vivre est cependant aussi honora
ble que n'importe quel autre, dit-il. Et
cependant on a rendu les cabaretiers
inéligibles au Conseil des Prud'hom
mes. On leur a fait faire des frais con
sidérables pour le remplacement de
leurs tuyauteries. On a, enfin, voté la
loi de 1889 sur le droit de licence, qui
arrive dans bien des cas empêcher les
enfan.ts succéder leurs parents.
Il démontre, chiffres l'appui,
combien le projet Maenhout pèserait
lourdement sur les débitants.
U finit en adjurant d'une façon élo
quente ses confrères lutter pour la
défense de leur gagne-pain et en priant
les représentants de bien vouloir le»
aider dans cette lutte. Applaudissements
prolongés
M. BONT1NCK a été heureux de
répondre, ainsi que sou ami Janssens,
l'invitation que lui ont faite ses con
frères yprois II les remercie, ainsi que
les représentants présents, au nom de
la ligue nationale des cabarttiers, dont
il est vice-président. Il se plaint de ce
que les autorités aient toujours consi
déré les cabaretiers comme des gens
peu dignes d'intérêt.
Il démontre que la loi de licence de
1889, créée dans le but de combattre
l'alcoolisme, a complètement mauqué
son but. Il en fait ressortir les injusti
ces. Il parle des nombreuses taxes qui
actuellement frappent le cabaretier. Il
montre combien seraient odieuses les
visites domiciliaires.il se déclare,quoi
que cabaretier, adversaire de l'alcoo
lisme. Il annonce qu'il serait disposé
accepter comme transaction le projet
Maenhout,si on l'amen iait.en augmen
tant le nombre de classes, parce que,
entre deux maux, il faut choisir le
moindre. Il dit que île nombreux re
présentants ont déjà déclaré qu'ils ne
voteraieut pas le projet du gouverne
ment. Applaudissements
M. JANSSENS dit que la loi de 1889
a complètement manqué son but, qui
était de contrecarrer l'ouverture de
nouveaux débits d'alcool. Il y a beau
coup plus de cabarets qu'avant et en
beaucoup d'endroits on vend le geniè
vre en fraude. Le contrôle, en effet, est
fort difficile et c'est pour cela que M.
de Smet de Naeyer a été amené pro
poser les odieuses visites domiciliaires,
il montre un des côtés illogiques de la
loi actuelle, qui enlève d'enfant les
privilèges dont jouissait le père, tout
er les laissant la veuve, même si elle
se remarie. Il montre l'odieux de la vi
site domiciliaire et déclare qu'il ferait
passer un mauvais quart d'heure ce
lui qui se permettrait de s'introduire
dans sa chambre coucher.
Les cabaretiers demandent l'abroga
tion de cette loi Ils sont en Belgique
au nombre de 200,000 et s'ils veulent
se montrer résolus, ils sauront imposer
leur volonté au parlement. Applaudis
sements,
M. le représentant NOLF déclare
avoir peu de chose ajouter aux criti
ques formulées par les orateurs précé
dents contre les deux projets en discus
sion. 11 excuse M. De Ridder, retenu
L'ourtrai une autre réunion. 11 décla
re, tant an nom de M. De Ridder qu'en
son nom personnel, qu'il ne votera ni
l'un ni l'autre des deux projets. (Ap
plaudissements)
Que demande-t-on au Parlement
Une loi pour combattre l'alcoolisme.
Toute la question se résume donc sa
voir si les deux projets répondent ce
but. L'orateur critique le projet Maen
hout qui établit une patente générale
sur les débits de boissons alcooliques
ou fermentées. (Je projet aggrave les
charges de la grande majorité des ca
barets. Le texte du projet ne cite que
des minima. Aux patentes qu'il éta
blit viennent encore s'ajouter les divers
centimes additionnels. L'orateur cite
quelques exemples pris dans l'arrondis
sement.
Ce projet aura-t-i! pour effet de com
battre les progrès de l'alcoolisme? L'o
rateur ne le croit pas. D'abord on gé
néralisera la vente de l'alcool Certains
disent en faveur du projet qu'il aura
pour effet de diminuer le nombre des
cabarets. Cela réduira-t-il la con
sommation de l'alcool U croit que
non. Il cite les paroles de l'abbé Kee-
sen et de M. Yaudervelde.
Eu outre, ce projet ne frappe pas les
consommateurs domicile. Si l'alcool
est un poison, il l'est aussi bien au do
micile qu'au cabaret.
Quant au projet du gouvernement, il
repose sur le droit de licence. C'est as
sez dire qu'il en est adversaire pour res
ter fidèle ses déclarations électorales.
L'application du droit de licence a
été inefficace combattre l'alcoolisme.
L'orateur, chiffres l'appui, montre
que depuis son application, la consom
mation de l'alcool n'a pas diminué. 11
prête en outre la fraude.
L'orateur critique le projet dans ses
détails. Il permet la violation du do
micile, il frappe les contrevenants d'a
mendes exagérées.
Les projets de loi qui nous sont pré
sentés sont en réalité des mesures finan
cières. Ce sont de nouveaux impôts
dont on veut frapper les cabaretiers,
sous prétexte de la lutte contre l'alcoo
lisme.
La vraie solution consiste régle
menter la fabrication de l'alcool, mê
me en allant jusqu'au monopole.
U déclare qu'il peut en conséquence
adhérer aux vœux émis par les cabare
tiers yprois. (Applaudissements).
M. le représentant COLAERT dit
qu'il est venu plutôt pour écouter que
pour parler, parce qu'en sa qualité de
législateur, il doit veiller conserver
sa liberté d'action. Sans vouloir enga
ger son attitude, il dit. qu'il n'est pas
favorable an projet de Smet de Naeyer.
Il est d'avis qu'actuellement en Belgi
que il se consomme trop d'alcool. Quant
la bière, qui est une boisson inoffensi
ve, il n'est que juste qu'un ouvrier ait
le droit d'en boire une pinte après son
dur labeur. La loi de M. Beernaert de
ANNONCES
Annonces 15 centimes la ligne.
Réclames 25
Annonces judiciaires 1 fr. la ligne.
1889 a manqué son but. L'intention de
son auteur était de lutter contre l'al
coolisme. qui constamment, en faisant
de nouveaux progrès, faisait augmen
ter la mortalité et peuplait les asiles
d'aliénés. L'orateur craint que le pro
jet de loi de Smet de Naeyer, basé éga
lement sur le droit de licence, ne ré
ponde pas ce qu'en attend son au
teur.
I! y a quatre ans, le gouvernement a
fait augmenter les droits çur l alcool et
la consommation a néanmoins continué
augmenter. Le problème de la lutte
contre l'alcoolisme est donc fort diffici
le résoudre. On s'arrêtera peut-être
au monopole de l'alcool, si l'on prouve
que l'affaire est bonne. Cela demande
une étude approfondie, car on a vu
une ce système a fait faillite en Suis
se. (1)
L'orateur dit qu'un des mauvais cô
tés du projet de Smet de Naeyer est
l'autorisation des visites domiciliaires,
dont il a toujours été adversaire. Il
trouve que cela ne se justifie pas plus
daus la question de vente de boissons
que dans les questions de chasse.
Pour montrer quels abus peut don
ner lieu l'interdiction absolue de la
vente d'alcools, il cite un cas qui s'est
passé dans les environs de la ville un
cabaretier a été poursuivi parce
que chez lui. une tierce personne avait
servi un-médicament un malade. Il
est heureux d'annoncer que l'affaire
s'est terminée par un acquittement.
L'orateur est d'avis qu'il y a trop de
cabarets, mais il ne pourrait admettre
qu'on enlève des gens des droits ac
quis. Il s'élève contre les atteintes que
porterait l'adoption du projet de Smet
aux propriétés de tiers.
Bien souvent des cabaretiers lui ont
dit qu'ils trouvaient injuste que tous
les débitants n'étaient pas soumis au
même traitemeut. Il est du même avis
et trouve en cela le projet Maenhout
plus juste que le projet de Smet. Il se
rait plus juste aussi de frapper la fa
brication et non la vente de l'alcool.
(Applaudissements).
M. BONTINCK, au nom de la ligue
belge des cabaretiers, remercie les re
présentants pour leurs déclarations et
admet qu'il serait en effet plus juste
de frapper la fabucation. Il trouve
qu'il serait souhaiter qu'on vende des
boissons de bonne qualité, car, ce qui
peuple surtout les maisons d'aliénés et
ce qui abrège l'existence, ce sont les al
cools frelatés.
Le Secrétaire, M. Arth. SALOMÉ,
donne lecture d'une lettre, qu'on en
verra au Ministre, et le PRÉSIDENT
déclare la séance levée.
Le meeting des cabaretiers, ainsi
que la réunion des brasseurs d'il y a
quinze jours, ont fait ressortir un des
avantages de la représentation propor
tionnelle.
Avant l'application de ce système,
aucun de nos honorables ne se déran
geait, pour venir entendre ses électeurs
de toute opinion lui demander quelle
serait son attitude dans telle ou
telle question d'intérêt corporatif. Cela
provenait de ce que, dans notre arron
dissement, les représentants et séna
teurs. étant tous de la même opinion
politique et ayant leur réélection assu
rée, n étaient stimulés par aucune ému
lation. Maintenant, au contraire, deux
1 N. U. L. K C'est une erreur profon
de. Le monopole en Suisse a réduit de 25 °L la
consommation de l'alcool.