Le Congrès socialiste de Courlrai. La réforme de la bienfaisance. d'âge et qu'il ne paiera pas de contri butions et en donner trois et quatre au moine, encore qu'il n'ait ni charge de famille ni obligations fiscales, voilà en quelle criante et monstrueuse antino mie se résume le système. Voilà ce que tout le monde, aujour d'hui, voit et réprouve. Ce que l'on voit moins, c'est l'avan tage considérable dont bénéficient les cléricaux, la faveur des bizarreries de la loi. On l'a dit et Frère-Orban l'avait en trevu dès 1894 Le vote plural, c'est le vote rural et le vote rural, c'est le vo te clérical. Les paysans, dont presque tous ont deux et trois voix, sont embrigadés non seulement dans les confréries reli gieuses, mais dans une série dissocia tion» d'intérêts, sociétés de crédit mu tuel. caisses Raffeisen, groupements et syndicats agricoles, distilleries et lai teries coopératives, dont les curés et les vicaires sont les chevilles ouvrières Ajoutez cela que les administra tions communales sont toutes la cam pagne, entre les mains des prêtres, qui dressent les listes électorales et y in scrivent tour de bras, avec deux et trois voix, leurs ouailles bien pensan tes. Dans 1500 communes belges, c'est-à- dire dans plus de la moitié, aucun con trôle efficace ne peut s'exercer sur la confection des listes. La majorité qui nous gouverne est le produit de la fraude, venant se greffer sur l'injustice. Les fraudes du régime plural sont telles que le parquet s'en est ému. Le procureur général près la cour d'appel de Gand a demandé l'autorisa tion de poursuivre un député clérical qui s'était livré des triturations abso lument scandaleuses. La Chambre des représentants a refusé l'autorisation demandée, couvrant ainsi de «ou ap probation des traudes manifestes et d'odieuses entreprises contre la souve raineté populaire. Les choses en sont là que légale ment, par l'exercice régulier du droit de suffrage tel qu'il est organisé en Belgique, on ne peut plus espérer ren verser le gouvernement des prêtres L'amoncellement formidable des suffrages ruraux vient fatalement écraser, au jour du scrutin le suffrage des villes, tandis que 9000 prêtres et religieux apportent au parti clérical leur formi lable contingent de 2TOOO bulletins de vote. L'opposition des deux gauches roule le rocher de Sisyphe. Dix ans encore de régime clérical et la génération prochaine est totalement empoisonnée. Malgré son essor économique, mal gré ses traditions de liberté, malgré toutes les forces vives qu'elle recèle, la nation B-dge perdrait son raug de na tion civilisée. L'instruction publique est anéantie par ceux-là mêmes qui en ont la direc tion. Le ressort moral est brisé dans l'âme de tous les fonctionnaires, dont on exi ge une soumission complète et servile. Toutes les fonctions de la magistra ture, du haut enseignement, de l'ad ministration supérieure, tous les em plois de notaires, de greffiers, d'huis siers, sont confiés des agents avoués ou secrets <le l'ultramontanisme. La constitution Belge est violée dans tous les priucipes qui en font la gran deur La loi sur les étrangers est rigoureu sement appliquée contre tous les pros crits l'esprit indépendant et vigou reux, voire ceux qui osent critiquer le grand Turc, le bourreau de l'Armé nie, alors que l'hospitalité la plus somptueuse eol accordée toutes les congrégations religieuses vomies par les pays libres. Le budget est mis la disposition du clergé catholique qui. sous toutes les formes et sous tous les prétextes, gra- pille les deniers publics. N'est-ce point assez, tout cela, pour émouvoir un peuple qui. dans le cours des siècles, n'a cessé de se montrer fier, indépendant et digne La Belgique n'a pas le gouvernement qu'elle mérite. Le jour où le verdict du pays pourrait être loyalement ren du, l'Église verrait la fin de sa domi nation néfaste. Les privilèges inouïs dont le clergé est gratifié par une Constitution peut- être trop imprudemment libérale n'ont fait qu augmenter l'arrogance et la morgue de l'armée monacale qui nous inonde. Dn projet de loi, savamment préparé par la sacristie, va renforcer la main morte et mettre toutes les administra tions charitables entre les mains des congrégations religieuses. La prétraille juge que nons ne som mes pas assez asservis, pas assez dé pouillés. Puisse-t-elle éprouver bientôt qu'à trop tendre le ressort, on le brise Les socialistes flamands ont tenu, la Maison du Peuple, Courtrai, un congrès. Les délégués étaient, assez nombreux II en était venu de Bruxel les et d'Anvers. M. Anseele y assistait. Il y avait deux questions l'ordre du jour: la lutte pour le S U. et l'anni versaire de la bataille des Eperons d'Or. Dans la séance du matin, l'assemblée a examiné la situation électorale dans les différents arrondissements de la Flandre. Un délégué s'est efforcé de démon trer que par la coalition de tous les partis d'opposition, il y avait possibili té d'enlever aux cléricaux cinq sièges. Eu supposant que partout ailleurs, les cléricaux conservent leurs positions, les futures Chambres seraient composées de 85 catholiques et de 81 membres de l'opposition. Un délégué, M. Leruste, de Mous- cron, a alors protesté. On ne doit pas contracter des alliances avec les partis bourgeois. Le moment n'est pas venu de s'occuper des élections de Mai, car il semblerait que le parti socialiste at tend le triomphe du S. U. des élections alors «qu'il sortira des pavés». Le S U. doit être conquis avant le mois de Mai et il faut que les élections pro chaines soient celles de laConstituante. Ce discours a été applaudi. M Anseele y a répondu. Quelle que soit l'issue du mouvement en faveur du S U il faudra des élections en Mai. Par conséquent, il importe de détermi ner dès présent la conduite tenir. M. Anseele dépose l'ordre du jour suivant Considérant que le peuple flamand est prêt faire tous les sacrifices la cause du S. U. Considérant que les élections de Mai prochain seront celles de la Con stituante Considérant que les partis victimes du vote plural, tous les partisans du S. U. doivent uuir leurs efforts pour le triomphe de l'égalité politique Le congrès émet le vœu suivant. Dans le« arrondissements où le par ti ouvrier n'est pas assez fort pour faire triompher so i candidat, il soutiendra énergiquement les candidats partisans du S. U. Dans les arrondissements où aucun candidat du S. U. ne se présente, le parti socialiste enl rera eu lutte avec ses seules forces. Les fédérations tégiouales flaman des pourront contracter des coalitions avec d'autres partis, qui poursuivent la réalisation immédiate du S. U. M. Anseele a ajouté que le grand danger qui menace le S. U., ce sont moins les cléricaux que la méfiance ré ciproque qui existe entre la classe ou vrière et la bourgeoisie libérale. Il faut fair- toutes les concessions pour faire disp 'Iaitre cette méfiance L'orateur a parlé avec éloge du discours de M. Hy- mans. Une proposition hostile aux coali tions électorales est repoussée. L'ordre du jour de M. Anseele est voté une grande majorité. La séance est levée une heure. Elle est reprise deux heures et de mie. Le congrès s'occupe des moyens employer pour contrecarrer les mani festations cléricales relatives la com mémoration de la bataille des Eperons d'Or. M. Anseele fait, ce sujet, une lon gue conférence, dans laquelle il s'effor ce de démontrer que la bataille de Courtrai fut une lutte do classes et non une lutte de races ou de religions. On décide, la suite de ce discours, d'organiser Courtrai une grande ma nifestation laquelle seraient invités tous les démocrates du pays et même ceux du Nord de la France. On vote l'ordre du jour suivant, dé posé par M. Anseele Le congrès Considérant que la bataille menée par les héros de la bataille des Eperons d'Or était uue lutte de clauses et nou une lutte de races ou de religions Que le saug versé pour délivrer la Flandre le fut par les classes qui soute naient la cause du roi de France Rend un solennel hommage la mémoire des vainqueurs Décide, par la publicatiou de bro chures, défaire connaître le véritable caractère de cette lutte héroïque Fait appel tous les partis démo cratiques pour l'organisation d'une grande manifestation sur le champ de bataille de Grœnmghe Engage la classe ouvrière conti nuer la lutte pour la complète déli vrance du prolétariat et de réaliser les idées pour lesquelles les héros de 1302 ont combattu sous les murs de Cour trai. Cet ordre du jour est voté. Une nouvelle loi «le* c ou vents La Commission royale de Bienfai sance instituée le o Avril 1895 avec mission de mettre l'étude la réorga nisation de la charité publique en Bel gique, vient de publier ses résolutions et son rapport général. Ces résolutions et ce rapport sont ce que nous avons prévu qu'ils seraient une odieuse tentative de réaction. Le but poursuivi par la Commission a été bien moins de réorganiser la cha nté publique que d'organiser la chari té privée, en accordant la personnifi cation civile aux couvents et en éten dant d'une manière illimitée la main morte. Il faut conjurer ce péril Ce n'est pas d'hier que l'on parle d'autoriser des associations privées, de simples sociétés sans caractère officiel, accepter des fondation» perpétuelles, l'effet d'organiser le drainage des ca pitaux, d'augmenter les ressources mo nacales et d'assurer définitivement l'omnipotence ecclésiastique. Nos lecteurs connaissent la tentative de 11556 et comment elle fut siftiée par le pays. Et bien, les cléricaux d'aujourd'hui veulent aller beaucoup plus loin que les cléricaux de 1856, dont l'apparente modération n'a cependant pas empêché l'émeute de gronder dans la rue. Le projet de la Commission est un monument d'impudence et d'audace il ne vise rien de moins qu'à en ca- puciner jamais la Belgique. La Commission précouise la liberté absolue des fondations, en supprimant tout contrôle sur leur gestion. Tonte association charitable qui jus tifiera de certaines conditions accessoi res sera dotée de la personnification ci vile. c'est-à-dire du privilège de droit public dont jouissent, pour des motifs d'intérêt supérieur, les établissements officiels. Sera considérée comme association de bienfaisance celle qui. d'après ses statut-*, a pour obj-*t principal de pré venir ou de soulager les misères de la classe indigente. On n exige pas de ces associations qu'elles observent une complète neu tralité politique ou confessionnelle dans la distribution de leur secours. On ne réclame pas de ces associa tions la gratuité absolue des services qu'elles rendront aux classes pauvres. Bien au contraire, on leur promet des subsides sur les caisses publiques. Ou n'exige pas davantage que l'asso ciation libre soit exclusivement une as sociation de bienfaisance. Elle pourra, accessoirementdouner l'enseignement vendre des prières, pratiquer la vie contemplative. La question se réduira une appréciation de fait dans chaque cas particulier, et c'est le gouverne ment. conseillé et inspiré par les évê- ques, qui statuera souverainement Pour obtenir la personnification ci vile, le couvent devra uniquement sa tisfaire aux conditions suivantes 1) Comprendre un minimum de membres belges ou étrangers autorisés établir leur domicile en Belgique. 2 Avoir des statuts et publier an nuellement un état sommaire de re cettes et de dépenses. 3 Ne confier la direction de l'asso ciation qu'à des Belges ou des étr> gers autorisés établir leur domiej] dans le pays. 4) Admettre l'inspection de l'£t. dans ses établissements. L'inspection, la reddition des com tes, voilà les correctifs spécieux imJ nés pour faire accepter ce que l'inn vation proposée a de vraiment subve sif et inouï. L'Inspecteur, quel sera-t-il $a doute, un partisan zélé de la loi et o- créature de l'épiscopat. Il n'en sau^ dire autrement. Et quant aux comptes, nous savo par l'exemple des fabriques d'églig comment on les dresse dans le mom pieux, et de quelle façon ces gens g vent s'y prendre pour éluder tout co trôle et rendre impénétrable 1g comptabilité. On justifiera que les aumônes ont décaissées, mais au profit et de qui Fournira-t-on la liste des secourus 1 les distributions se feront-elles av. équité et discernement Qu'en saur; t-on et comment le vérifier La société et l'autorité seront dot complètement désarmées. On priei les bons belges de participer la coi struction d'une chapelle, de racheti des petits chinois, de doter des cab; rets biens pensants affublés du titrée patronages, tout cela sous le couve de la charité. Et, par la voie d'une double évoli tion, fatale en son parallélisme, on ve ra, d'une part, les couvents s'enrichi et d'autre part s'accroître la misère. Car s'il est un fait que démenti l'histoire, c'est la radicale impuissani des couvents soulager la misère. 1 n'ont jamais réussi, au contraire, qu l'aggraver. An xiv' siècle. dit Michelet, e cet âge d'or de la puissance monac le, archevêques, évêqnes, chanoine moines anciens, moines nouveau: tous vivaient dans l'opulence. Toi ce monde tonsuré croissait des béo dictions du Ciel et de la graisse de i terre c'était un petit peuple hei reux. obèse et reluisant, au milieu d grand peuple affamé. L'administration d'un tuteur estai sujettie certaines règles fixes, inflex bles, rigoureuses, dans l'intérêt d'u seul individu. Et ces règles ne_.se/vj.ier as appliquées l'administrateur d( îens des pauvres (tes biens serait! abandonnés l'omnipotente et discn tionnaire gestion de gens inconnus t irresponsables Voilà où nous allons. Des nuées d'administrateurs partiel liers de toute espèce vont s'emparf des fondations charitables la favec de la liberté absolue des fondations,le moines vont redoubler d'efforts pou accaparer le patrimoine des famille- Us n'auront plus besoin de cacher 1er jeu et de recourir aux combinaison souvent dangereuses qu'ils emploies aujourd'hui pour frauder la loi ils n reculeront devant aucun moyen pou satisfaire leur insatiable soif de rieu ses, et pour asseoir l'omnipotence ec clésiastique sur l'opulence des mona* tères. Déjà l'exploitation des couvents 1er a procuré d'immenses, d'incalculable ressources. Les 2221 couvents que poe sède aujourd'hui la Belgique sont àli tête d'un capital de un milliard très' six millions, sans compter les valser mobilières et les propriétés qui fiè rent au cadastre sous uu nom d'eœ prunt. Et il se trouve des gens qui, dans tu rapport officiel, osent dire qu'il h- encourager la multiplication de main-mortes, leur donner des drd'- nouveaux, en taire des institutionslf gales et reconnues, et favoriser, par-' suppression de toutes eutraves fpca1--' leur développement financier. Les fanatiques n ont donc rien app: ni rien oublié, Nous souhaitons de tout cœur qui gouvernement, désireux de favoris l'extension des ordres religieux, dép' se la Chambre le projet élaboré f* sa commission spéciale. On ne tarder» pas s'apercevoir que cette œuvre une véritable provocation qui dooDeà le vertige au pays. Plus que le projet, mort-né de elle est un anachronisme et un défi On demeure confondu devant l'aiid* ce du parti clérical, qui, non conte de peupler la magistrature, l'ense;^' ruent, les ministères et toutes le® ministrations publiques de créa",r? inféodées au clergé, veut encore p"

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Le Progrès (1841-1914) | 1902 | | pagina 2