Aux électeurs
libéraux.
Journal de l'Alliance libérale d Ypres et de l'Arrondissement
Le canal de la Lys
1 Yperlée
le port de Nieuport.
Dimanche, 7 Septembre 1902.
62e année. 56.
fftraismmi le tPinuiiwhe.
l/UJIIO.N PAIT LA FORCE.
Vires acqcirit euhdo.
PRIX DE L'ABONNEMENT:
fOLR la ville Far an 4L francs.
F la province Par an *1 fr. 50
On s'abonne au bureau du journal, rue de Dixmude, 53, Ypres. Les an
nonces, les faits divers et les réclames sont reçus pour l'arrondissement d'Ypres,
les deux Flandres, le restant de la Belgique et de l'Etranger, au bureau du
journal Le Progrès ON TRAITE A FORFAIT
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Annonces 15 centimes la ligne.
Réclames 25
Annonces judiciaires 1 fr. la ligne.
.Nous engageons vivement tous
nus amis politiques consulter
les listes électorales provisoires
pour l'année 1903, qui viennent
rie paraître.
Des exemplaires sont déposés
au local de I'Association Libérale,
rue du Séminaire.
h'ils i»1)' sont pas inscrits ou s'ils
n'y sont inscrits qu'avec un nom-
lire de voix inférieur celui au
quel ils ont droitils sont instam
ment priés de s'adresser sans re
tard an '"milité de 1'Association
LlBF.i ali.
Le bureau est ouvert tous les
jours, de six liuit heures du
soir.
ET
Certes, la science de l'ingénieur a
fait des merveilles de notre temps, et
l'on serait tenté de croire que rien ne
lui est désormais impossible. Mais,
pour vaincre la nature dans toutes ses
résistances, il faut pénétrer tous ses
secrets, découvrir et étudier toutes ses
lois, et, avouons-le, tant de savoir peut
difficilement entrer dans le cerveau
d'un seul homme, quelque bien doué
fût-il De là, lorsqu'il s'agit de grands
travaux, ces mécomptes fréquents, ces
faillites de la science de l'ingénieur.
Celui-ci oublie trop souvent que, dans
bieu des cas, une autre science doit ser
vir de base ses calculs celle du géo
logue.
Cette vérité s'est affirmée une fois de
plus, lors du creusement du canal de
la Lys l'Yperlée. Là, la science de
1 ingénieur s'est heurtée une difficul
té, qu'elle eût pu éviter si elle avait
demandé conseil la géologie.
Le croquis ci-contre nous dispense
d entrer dans de longues explications
sur la position et le rôle du canal de la
Lys l'Yperlée. Ce canal est destiné
mettre en communication le bassin de
1 Eacaut, par la Lys, son affluent, avec
wlui du petit fleuve côtier l'Yzer. Il
'étend de Comines, sur la Lys.
1 ares, sur l'Yperlée canalisée jusqu'à
''izer. Il mesure 14 kilomètres. A peu
près au milieu de sa longueur, il passe
"•oms tunnel par la tranchée d Hollebe
ko.
L'histoire du canal remonte au 31
Janvier 1863, date laquelle parut au
Moniteur l'arrêté royal qm en accor
dait la concession MAI. Bûcher et
an Eecke. I) y a de cela trente-neuf
ans
La société anonyme qui devait ex
ploiter la concession fut constituée le
28 Juillet suivant et les travaux furent
entamés dès 1864. A la suite de déboi
sa financiers et de difficultés d'exécn-
t'on, les entrepreneurs négocièrent la
reprise des travaux par l'Etat. L acte
*'e rétrocession fut signé le 18 Avril
*882 Les travaux et les terrains furent
Repris, moyennant ia somme de
^1^00,000 francs
Il résulte de rt cherches qui ont été
faites la Cour des comptes par M.
Nolf, député d'Y près, que,depuis 1882.
l'Etat a dépensé une somme peu près
égale d9 3 millions 500,000 francs, de
sorte qu'à l'heure actuelle le canal a
coûté au trésor public environ 7 mil
lions de francs.
Le canal était creusé, les écluses et
ponts construits on allait le mettre
en exploitation lorsque, soudain, en
1893, il s'est fermé spontanément, sur
une longueur de 3 kilomètres, dans la
trauchée de Hollebeke Le terrain
avait bougé, les berges s'étaient rap
prochées, tout était refaire en cet en
droit. On crut pouvoir arrêter le mou
vement du sol. en faisant, passer le ca
nal par un tunnel Tout alla bien d'a
bord mais, petit petit, le radier du
tunnel se souleva et, une fois de plus,
le travail était vain
La raison de ce mécompte était très
simple on avait négligé de consulter
les géologues sur la nature du t rrain
que le canal devait traverser on avait
imprudemment
coupé les cou
ches du terrain
quaternaire et
parfois les trois
couches en un
même point
Que devait-il
arriver
Le canal, en
cet endroit, est
rreusé dans un
terrain argi
leux, en pleine
argile yprésiên-
ne bleue. Com
me toutes les
argiles, l'argile
yprésienne se
gonfle sous l'ac
tion de l'eau, et
le terraiD, né
cessairement, ghsse du côté où il ne
trouve pas de résistauco du (côté de la
tranchée), ou du côté où il en trouve
peu, et la force d'expausion de l'argile
est telle, qu'elle exerce une pression
de plus de 3,500 kilogrammes par mè
tre carré.
A cette première cause de glissement
viennent s'ajouter la pression exercée
par les eaux intérieures, les désagréga
tions de l'argile, produites par la sé
cheresse qui la rétrécit et la crevasse
l'humidité remplit les fissures et exer
ce son tour une pression ajoutez-y
l'action désagrégeante de la gelée, et
vous pourrez vous faire une idée des
causes multiples qui contribuèrent
fermer la tranchée.
Cette propriété çxpansive de l'argile
acquiert une grande importance quand
ce terrain sert de fondation des corps
exposés se rompre. Cela a été le cas
pour le radier du tunnel construit dans
la tranchée de Hollebeke le radier
s'est soulevé sur une certaine étendue,
et le travail est recommencer.
Les difficultés sont-elles insurmonta
bles L'argent dépensé l'a-t-il été en
pure perte
Absolument pas Le gouvernement
a consulté ses meilleurs ingénieurs, a
fait faire des voyages d'études, compo
sé des commissions d'hommes compé
tents tant géologues qu'ingénieurs.
Des notices scientifiques ont été écrites
sur le sujet, des rapports ont été dépo
sés, des moyens divers ont été préco
nisés mais, jusqu'ici, le gouverne
ment ne s'est pas encore prononcé.
Et pourtant ce canal a une importan
ce énorme au point de vue des rela
tions commerciales de la West-Flan-
dre et du Hainaut Aujourd'hui, toute
la Flaudre occidentale brûle des char
bons anglais dans nos ports, les ba
teaux vapeur s'en approvisionnent,
parce qu'ils sont meilleur marché
que. les charbons belges. Que I'od achè
ve le canal du Centre, dont un deux
kilomètres restent construire, qu'on
rende le canal de la Lys l'Yperlée
praticab'e. et la Belgique possédera
une magnifique voie navigable deNieu-
portà Charleroi, voire même Namnr
et Dinant. Elle mettrait les grandes
communes de la West-Flandre en com
munication directe avec les grandes
villes du Hainaut, avec Tournai, Mons,
Charleroi, avec les carrières du Tour-
naisis, les bassins houillers du Centre,
du Couchant de Mons et de Charleroi;
elle faciliterait le transport du sable
des dunes aux verreries de Jumet,
Charleroi, etc. des pavés, si néces
saires nos routes des polders mariti
mes, de la chaux du Tournaisis aux
fabriques de ciment et des pierres ar
tificielles. qui commencent s'élever
dans la zone argileuse de Nieuport,
Fumes, etc.
N'est-il pas triste de constater que
la houille et des
tMT° Imatières pre
mières ernploy-
éespar certaines
industries que
le pays wallon
peut fournir en
excellente qua
lité, nous vien
nent d'Angle
terre, parce que
le prix de tran-
spoit des ma
tières belges est
trop élevé Des
pavés mêmes
nous sont four
nis actuel le-
men par la Nor-
Le canal de Comines Ypres.
wege, non par
ce que ceux-ci
sont meilleurs,
mais parce qu'ils coûtent moins cher.
Dans d'autres pays, on cherche, par
des tarifs douaniers exorbitauts, éloi
gner les matières premières et les pro
duits étrangers. Ici, faute d'un bout
de canal, on favorise ces matières au
détriment des produits nationaux.
Sous le rapport des communications,
la Flandre occidentale a d'ailleurs se
plaindre tous les points de vue affli
gée du réseau préhistorique des che
mins de fer de ia compagnie anglaise,
cette province ne peut même pas obte
nir un simple petit tronçon de chemin
de fer de Roulers Ardoye qui, en dé
tournant et en facilitant le trafic, ef-
franchirait uDe grande partie de la
province du tribut forcément payé
cette compagnie.
L'importance d'une grande voie na
vigable, qui mettrait le midi de la Bel
gique en communication directe avec
la mer, se comprend mieux encore, si
l'on considère que la France vient de
décider la construction d'un canal de
Mézières, sur la Meuse, Dunkerque.
Ce canai, qui, dans toute sa longueur,
longera nos frontières du sud, coûtera
au delà de 200 millions et présentera
des difficultés d'exécution plus nom
breuses et au moins aussi graves que
la tranchée de Hollebeke.
u Ce canal, comme M. Nolf l'a fait
remarquer la Chambre des représen
tants (1) (séance du 30 Avril 1902),aura
franchir la crête de partage entre
l'Escaut et la Sambre, puis la ligne
défaite entre la Sambre et la Meuse
il sera nécessairement parsemé d'eclu-
ses, autant d'obstacles la navigation.
Son alimentation sera difficile, et l'on
prévoit qu'il ne pourra être mis en ex-
Discours de M. Nolf,
laires, 1905, p 1320.
4 finales parlemen-
ploitatiou avant douze ou quinze ans.
Dans ces conditions, il dépend
pour ainsi dire de nous, d'enlever au
projet français une grande partie de sa
raison d'être, puisque, bien avant le
commencement des travaux français,
nous pourrions avoir complètement
terminé la ligne de navigation Dunker-
que-Mézières, que nous avons sur notre
territoire, et qui serait sinon meilleu
re, tout au moins capable de soutenir
la concurrence avec la voie française,
qui est projetée.
Nous avons dit que le canal d'Ypres
Comines, après achèvement du canal
du Centre, mettrait le bassin de Char
leroi et même Namur et Dinant, par
des voies navigables, directement en
communication avec la mer Nieu
port. Cette communication directe
n'est pas seulement nécessaire pour
ameuer les produits du Hainaut dans
la West-Flandre, mais aussi pour four
nir aux usines du Hainaut les matières
premières indispensables, qui finissent
de plus en plus par manquer en Bel
gique.
Déjà nos verreries emploient le sable
des dunes pour la fabrication du verre
commun. Nos usines et nos hauts-four
neaux travaillent le minerai exotique,
que nous envoient la Suède, l'Espague
et même l'Amérique. Le transport de
ces matières pondéreuses doit se faire
avec le moins de frais possible le
transport par eau, pour être plus lent,
n'en est pas moius bien plus économi
que, et Nieuport est un endroit tout
indiqué pour le débarquement de ces
matières.
L'importance de Nieuport, le seul
port naturel de notre littoral, n'est pas
suffisamment apprécié Cependant ce
port est appelé au plus brillant avenir,
si le gouvernement veut se décider,
et il devra le faire lôt ou tard, au
sacrifice d'une couple de millions né
cessaires cette fin.
Sans vouloir, en quoi que ce soit,
nuire aux intérêts d'Ostende, nous
pouvons dire que, si l'on avait fait
pour Nieuport la cinquième partie des
sacrifices que, depuis 1830, on a fait
pour Ostende, Nieuport serait aujour
d'hui un port superbe, répondant
toutes les exigeuces du présent et de
l'avenir, et personne n'aurait jamais
songé àcoustruire le port artificiel de
Heyst (1)
(I) Qu'on ne se figure pas qu'en demandant
des installations maritimes pour Nieuport,
nous voulions faire le moindre tort au trafic
d'Anvers, d'CLtendc, de Gand, de Bruges ou
de Blankenberghe
Est-ce que les nombreux ports qui se sont
créés su>- tous les points de la côte d'Angleter
re, d'Ecosse et d'Irlande, nuisent ou ont nui
aux progrès incessants de Liverpool et de Lon
dres? Est-ce que Glascow, qui se trouvait, il
y a quelques années encore, dans une situation
analogue celle de Nieuport au débouché de
l'océan Atlantique dans la mer d'Irlande, a
fait dommage Liverpool, placé comme An
vers sur un fleuve enfoncé dans les terres
Non, et cependant Glascow est déjà un des
ports les plus importants, siège de nombreux
chantiers où se construisent chaque année des
(lottes d'immenses steamers trans atlantiques
et des engins maritimes de toutes sortes.
Nous pourrions citer vingt ports nouveaux,
construits depuis quelques années sur la côte
anglaise, la plupart par des compagnies de
chemins de fer, depuis celui de Douvres jus
qu'à Holyliead et même en Irlande, et qui tous
servent développer l'industrie, l'agriculture
et le commerce de l'Angleterre, sans nuire le
moins du monde aux anciens ports -le ce pays,
dont le trafic, au contraire, ne cesse de s'éten
dre.
Pourquoi en serait-il autrement chez nous
Y a-t-il un pays où le commerce maritime se
soit plus rapidement et plus largement déve
loppé depuis 1860 qu'en Belgique N'y a l-il