Journal de l'Alliance libérale d'Ypres et de l'Arrondissement. abonnements nouveaux. Un fi n Dimanche, 50 Octobre 1904. 64e année. M* 44 l'union fait la force. i0arai*ttfnil ie Dimanche Vires acquirit li.ndo. Toute personne k'h- boniifviit pour* UN AN recevra, dès présent jusqu'au ,'îl I )écembre prochain, titre gra cieux, le Progrès La montagne a accouché. La paille et la poutre. La loi tle 1X79. Un faiseur de miracles. PRIX DE L'ABONNEMENT: pour la ville Far an 4 francs. la province Far an 4 fr 50 Pour les annonces on traite forfait. On s'abonne au bureau du journal, rue de Uixjiide, 53, Ypres. Les annonces, les faits divers et les réclames sont reçus pour l'arrondissement d'Ypres et les deux Flandres au bureau du Progrès Pour la publicité en dehors des deux Flandres, s'adresser exclusivement au Comptoir de Publicité Van Godtsenhoven et Thibesard, 14, Place de Rrouekère, Bruxelles, téléphone 5230 ANNONCES: Anuouces 15 centimes la ligne. Réclames 25 Annonces judiciaires 1 fr. la ligne. Le Journal d'Ypres revendique pour lui, avec une naïve indignation, les avantages précieux de la liberté de penser,et s'octroye, après d'énergiques protestations contre toute tyrannie dans 1e domaine de la conscience, le monopole exclusif de l'ignorance Nous convenons aisément que celui-ci défie toute concurrence et nous ne songerons jamais contester ses droits. Usant des prérogatives que lui procure une situation qui lui paraît aussi avan tageuse, il nous défend ayee acariâtre- té de discuter les arguments que son omnipotente inconscience nous a four nis, en réponse notre désir de voir exposer par lui la signification du Vrai dont les théories contraires auraient provoqué la Commune de 1871 et la Révolution de 1796. Le Journal n'avait pas obtempéré ce désir, et nous nous étions permis de lui repro cher la désinvolture, peu scrupuleuse, avec laquelle il s'était lancé dans uue foule de considérations étrangères au sujet traiter. Nous saisissons ici sans peine l'utilité des mobiles qui l'ont poussé lancer cet édifiant appel en faveur de la libre manifestation de la pensée. Il n'est que trop vrai que l'amour de la liberté a aussi son hypocrisie et son culte, 3es cafards et ses cagots. Sans vouloir s'attarder discuter la rigueur peu scientifique du moyen auquel le Journal a recours, de dé finir un objet par son contraire, nous aimons cependant de soumettre i'ap- préciation de nos lecteurs les défini tions du contraire du Vrai fournies par notre confrère et leur application aux questions historiques qui nous intéres sent. Le Vrai, en juger d'après sa prose, c'est l'Amour; puis il noiiB dit qu'a vaut de professer le Vrai, il faut cesser de mentir, donc il faut dire la vérité D'où lions concluons que le Vrai, c'est la Vérité. Nous omettrons de considérer des définitions de ce dernier calibre. Le Journal voudrait-il nous ex pliquer en quoi les théories qui ont provoqué la Révolution de 1796 et la Commune de 1871 sont contraires l'Amour ISons lui en serions très re connaissants mais s'il entre dans ses intentions de recourir de nouveau ce moyen très expéditif mais peu coura geux de déblayer ce que nous lui de mandons, nous considérons la polémi que comme terminée, en plaignant notre confrère d'avoir brûlé son tem ple d'Ephèse avant d'avoir su le con struire. Le Journal d'Ypres relève, daus le discours que M. Deschanel a prononcé la Chambre frauçaise, la phrase sui vante Aujourd'hui un fonctionnai- re pour être bien vu est obligé de ne pas remplir ses devoirs religieux et n tre coufrère de s'écrier Cette phrase lapidaire précise le joli régi- me imposé la France par ce mims- tère Combiste et que les Combes bel- ges rêvent d'établir en Belgique. Il est vrai que M. Deschanel a com mencé par déclarer que sous l.t ILstau- ration les fouctionnau8s étaient obligés de remplir leurs devoirs religieux, .dais notre confrère passe ce passage sous silence et pour cause. Le Journal d'Ypres, défendeur attitré de la politique gouvernementale belge, est vraiment bien placé pour laDcer l'a- natbème au gouveruement de M. Com bes Oublie-t-il donc que, depuis 1884, nous vivons en Belgique sous uu régi me analogue celui qui sévissait sous la Restauration Ignore-t-il que notre gouvernement clérical n'a de faveurs que pour ceux, qui sincèrement ou hy pocritement, font leur soumission l'é glise catholique, apostolique et romai ne Ah vraiment, il nous fait rire Comme on la rencontre souvent cette histoire de la paille et la poutre Quoi qu'il en soit, si le régime fran çais est tel que le dépeint M Descha nel, il ne saurait, pas plus que celui que nous subissons actuellement en Belgique, être celui que nous souhai tons, c'est-à-dire le régime d un gou vernement libéral. L'Avenir du Tournaisis affirme qu'au cune loi ne fut plus soucieuse (le sauve garder la liberté de conscience et la foi religieuse que la loi de 1879 Mais voilà Le clergé catholique refusa de venir donner le cours de religion l'école pu blique, parce qu'il ne pouvait plus y entrer en maître et soumettre l'enseignement tout entier ses règles et ses caprices. On demandait un jour un prélat, fameux par ses ardeurs politiques et qui pariait tou jours de liberté, ce qu'il entendait par là. La liberté, répondit-il, c'est quand nous sommes les maîtres, Quand on veut appliquer ces gaillards-là le droit commun, quand 011 les in vite observer, comme tous les autres citoyens, la Constitution et les lois, ils crient comme des oies qu'on égorge et se trouvent, parait-il, dans line heure d'angoisse et d'indignation Pour noue clergé, une loi qui lui donne toute facilité pour exercer son ministère, mais qui lui enlève en môme temps toute suprématie in justifiée, est une loi de malheur Le recul du temps met peu peu les choses leur place. Les cléricaux sont bien mal inspi rés en venant aujourd'hui essayer de glorifier leur abominable guerre scolaire de 1819. Car, aux yeux des générations actuelles, de tels sou venirs De serviront qu a mettre en relief la soif inextinguible de domination qui caractérise l'Eglise romaine et sa prétention outrecuidante de se mettre au-dessus des constitutions et des lots. Dimanche, l'Association cléricale de Bruxelles a donné une fête ses Jeunes Gardes. Entr'autres discours, M. le sénateur Braun y a dit des choses étonnantes, stupéfiantes, renversantes. Nous citons le compte-rendu publié par uue feuille ultramontaine bruxel loise M. Braun, sénateur, fait le tableau des persécutions dont nous serions victimes si nos adversaires revenaient au pouvoir non seulement nos croyances et notre ensei gnement seraient en péril, mais aussi toutes les libertés inscrites au pied de la colonne du Congrès. Feut on en croire ses yeux C'est nous, libéraux, qui on refuse, sous différents prétextes, le bénéfice de la liberté de conscience et de l'égalité des citoyens devaut la Constitution et devant la loi. c'est nous qui sommes les persécuteurs, les oppresseurs C'est nous qui exigeons des catholi ques de* formalités administrative- 't des petits papiers pour leur accorder ia liberté de conscience dan3 les écoles C'est nous qui refusons des statues aux grands hommes du cléricalisme (■'est notiB qui faisons déserter et qui fermons les écoles cléricales C'est noii.s qui accaparons les places et qui excluons les catholiques des emplois publics C'est nous, enfin, car il faut limiter l'énumération, qui faisons enseigner dans les écoles privées et même dans les établissements officiels, que les libertés constitutionnelles sont des er reurs, des licences, des sources de dés ordre et de vices L'abbé Bataille et Mgr Rutten lui- même ne sont que des francs-maçons déguisés M Braun est un grand thaumaturge; il renouvelle en politique le miracle de la transubstantiation. Les persécutés deviennent des per sécuteurs, les spoliés des accapareurs, les libéraux des cléricaux et les cléri caux des libéraux M Braun sera canonisé... si le ridi cule ne tue pas dans son parti. Après deux années de questions vai nes et de mises eu demeure inutiles, nous sommes enfin parvenus obtenir du Bien Publicpropos du repos do minical, une manière de réponse. Four avoir été rumiuée pendant deux ans, la riposte du Bien Public n'est pas forte, et, pour la trouver, ce n'était pas vraiment la peine de thésauriser mot par mot quelques bouts de sophismes, ni de les serrer en avare pendant vingt- quatre mois dans le vieux bas de laine où notre confrère garde ses économies de dialecticien Nous avons, dès le jour où les cléri caux lancèrent la fameuse distinction entre travailler et faire travailler, po sé la question en ces termes Du moment que la loi défend aux patrons d'employer leurs ouvriers le Dimanche, la loi empêche ca* ouvriers de travailler le Di manche pour leur patron. Donc ede les obli ge chômer le jour du Seigneur. Donc cette loi est contraire l'article 15 de la C insti tution. Au lieu de répondre cet argument, le Bien public éprouve le besoin de le traduire en syllogisme. Et voici comment le traducteur sa cré, qui est un sacré traducteur, tra vestit notre raisonnement Le projet de loi interdit au patron de con traindre son personnel travailler, aux jours consacrés par l'usage pour le repos hebdomadaire. Or, l'article 15 de la Constitution dit que nul ne peut être tenu d'observer les jours da repos d'un culte. Donc, le projet de loi est contraire l'ar ticle 15. Le Bien public a oublié de traduire notre première phrase II ne veut pas avouer que la loi proposée, en interdi sant aux patrons d'employer ses ou vriers le Dimanche, interdit par le fait même aux ouvriers de travailler le Di manche pour leur patron. Ou comprend que le Bien public ait laissé tomber, dans sa traduction, le membre de phrase qui le gène Or, cet te phrase touche précisément au nœud du débat Elle prouve que la jésuitique distinction entre travailler et faire tra vailler ne répond pas la réalité des choses. Interdire aux patrons de faire travailler, c'est empêcher les ouvriers de travailler. Cette simple remarque ruine et réduit rieu toute 1 argu mentation du Bien public. Mais puisque notre confrère est pris soudainement d'un si ardent amour pour le syllogisme, nous donnerons nous mêmes notre argument la forme scholastique dont il a besoin d'être re vêtu pour attirer l'attantiou des comtes romains. Nous raisonnerons donc de la maniè re suivante Le projet de loi de M. Helleputte, en interdisant au patron d'employer ses ouvriers le Dimanche, interdit aux ou vriers de travailler le Dimanche pour leur patron. Or, l'article 15, en disant que nul ne peut être contraint de concourir d'une manière quelconque aux cérémonies d'un culte, ni d'en observer les jours de repos, reconnaît chacun le droit de se livrer le Dimanche aux travaux de sa profession. Donc le projet de M. Helleputte est iuconstitutionnel. Si le Bien public veut s'exercer sur ce syllogisme, nous contemplerons ses exercices avec intérêt. Mais qu'il ne détourne plus la mi neure, ce qui est indigne de son écla tante vertu En attendant, nous voulons bien dis cuter l'étrange raisonnement que le Bienqmblic accroche notre syllogisme tel qu'il l'a traduit. La feuille gantoise écrit L'article 15 n'a nullement pour objet de garantir la liberté absolue du travail, mais la liberté absolue des cultes ou, plus juste ment, la liberté de ne professer aucun culte. Son but est d'empêcher que personne puisse être tenu de concourir un culte, soit en prenant part aux cérémonies, soit en s'abste- uant des œuvres serviles que ce culte inter dit. Voilà l'esprit de l'article 15. Nous sommes d'accord. Le projet de M Helleputte, en inter disant au patron d'employer ses ou vriers le Dimanche, leur interdit de travailler le Dimanche pour leur pa- trou. Donc, de l'aveu même du Bien publicce projet est contraire l'esprit de l'article 15, dont le but est d'em pêcher que personne puisse être tenu de concourir un culte soit en prenant parc aux cérémonies, soit en s'abstenant des œuvres serviles que ce culte interdit. Le Bien public dit encore qu'aucune société ouvrière ne demande la liberté du travail dominical. Il nous serait facile de rappeler pour la vingtième fois le témoignage de MM. Grenier et Doat, que le Bien public a toujours passé sous silence. Nous pour rions répondre aussi que les sociétés ouvrières ne sont pas toute la classe ouvrière. Mais nom n'entendons pas que le débat dévie. La question n'est pas de savoir ce que veulent les ou vriers, mais de savoir ce que veut et ne veut pas l'article 15 de la Constitu tion. S'il vous paraît avoir fait son temps, revisez-le. Mais aussi longtemps qu'il n'est pas revisé, respectez-le. C'était l'avis de Victor Jacobs. En terminant, ie Bien public nous de mande, d'un air triomphant, pourquoi nous n'accussons pas l'Etat de violer I article 15, puisque les fontionnaires chôment généralement le Dimanche. Nous avons répondu cent fois cette s colle d'examinateur universitaire L'Etat, soit lorsqu'il décide da ne pas rendre la justice le Dimanche, soit lorsqu'il décide de transporter le Di manche des voyageurs et des colis, agit dans les deux cas en qualité de patron, et en vertu même de l'article 15.

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Le Progrès (1841-1914) | 1904 | | pagina 1