Journal de l'Alliance libérale d'Ypres et de l'Arrondissement.
CERCLE D'ÉTUDES
D'EXTENSION UNIVERSITAIRE
Dimanche, 27 Novembre 1904.
64* année. N° 48.
i*arai**ftnt le iHtnaiivhe
ABONNEMENTS NOUVEAUX.
Conférence
de ill. lîédai'd Verkest.
Het Onde Vlaamsche
Volkslied.
HISTOIRE GENERALE DE L'ART,
A l'historien du
Journal d'Ypres.
II.
l'union fait la force.
Vires acquirit eundo.
PBIX DE L'ABONNEMENT:
pocr la ville Par an 4 francs.
p' la province Par an 4 fr. 50
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Noël,
SUJET:
Prix d'eutrée fr. 0-75.
Cônes «le VI. Petruccl,
EN SIX LEÇONS
AVEC PROJECTIONS LUMINEUSES
A PARTIR DU 8 JANVIER 1905.
i.
Le grave et disert historien du
Journal d'Vpres a san3 aucun doute
spéculé sur la bénévolente cédulité de
ses lecteurs, lorsqu'il leur a servi Sa
medi 12 Novembre dernier un inex
tricable fatras de faits qui ne sont his
toriques que de nom. Mettant suite
avec une ardeur dont nous lui sommes
reconnaissants, et ses incohérentes et
audacieuses théories en faveur de l'u
nion de l'Eglise et de l'Etat, il s'est
évertué vouloir éclaircir tendancieu
sement les mobiles qui ont provoqué
au moyen-âge les persécutions dirigées
contre les hérétiques. Il ne répond en
cela que partiellement aux arguments
que nous avons fait valoir dans notre
avant dernier n° et tendant démon
trer que dans les temps les plus reçu
lés déjà les gouvernements théocrati-
ques s'acharnaient la traque de leurs
adversaires en religion. Nous espérons
que le docte scribe du Journal nous
fera l'honneur d'une réfutation de tous
les autres poiuts de notre article.
Si notre confrère aborde avec un
certain front, comme il aime le pro
clamer, l'exposé des raisons supposons
pour l'instant qu'il y en ait) qui ont
pousséjadis les monarques chrétiens
étoufler par le fer et le feu toute vel
léité hétérodoxe, nous lui reconnaissons
aussi l'impudente hardiesse de venir
prétendre l'aide d'interminables dis
cours empruntés je ne sais quel trai
té de casuistique historique, que les
païens étaient des sectaires, que les
infidèles et schismatiques étaient des
provocateurs, et que les pieux monar
que- étaient de doucereux agneaux
qui ne tenaient pas se laisser tondre
la lame sur le dos Les mesures clé
ment^ auxquelles eurent recours,
d'après le Journal d'Ypres le pou
voir séculier et l'Eglise pour enrayer
les progrès incessants de l'incrédulité,
auraient été inefficaces la résistance
armée seule aurait pu mettre fin
1 existence de l'hérésie.
Sans vouloir entamer dans les détails
une polémique de controverses histo
riques qui nTofirirait nos léctenrs
qu'un intérêt douteux, nous défions
notie confrère de citer les rébellions
sanglantes et les persécutions dont se
seraient rendus coupables lus infidèles
avant l'intervention armée des Etats
religieux. Nous le mettons en demeure
d'exposer avec toute la rigueur scieu
tifique qu'exigent de telles accusa
tions, les prétendues insurrections des
Albigeois, les méfaits des Vaudois, les
violences des Juifs, les clauses inscri
tes dans le Talmnd dangereuses pour
la société.
La malignité du Journal est peu
inventive; elle tourne toujours dans
le même cercle d'assertions fausses Un
trait relever l'éloge des hérétiques,
c'est que jamais ils ne furent persécu
teurs quand on ne les inquiétait pas.
Satisfaits d'opérer des conversions et
de prêcher au peuple, ils vivaient en
parfaite amitié avec leuiR voisins or
thodoxes. Mais l'Eglise et l'Etat unis
ont toujours considéré qu'un pouvoir
civil, en tolérant les autres croyances,
persécutait les leurs
Le Journal d'Ypres ou I' (partial)
auteur X qui lui porte conseil, essaie
de justifier les persécutions religieuses
organisées par les deux pouvoirs soli
daires en invoquant le caractère des
lieux et des temps où elles sévirent et
des sujets auxquels elles s'appliquè
rent Pour le dernier point, nous le
renvoyons nos observations précé
dentes Quant dire que les répressions
sanglantes dues au fanatisme aveugle
des gouvernants d'alors sont compati
bles avec le caractère des lieux et des
temps qu'elles déshonorèrent, c'est
avouer de fait les erreurs odieuses que
la politique d'un gouvernement reli
gieux est forcément amenée commet
tre Dans les temps reculés, elle avait
recours la violence aujourd'hui,
l'homicide légal n'entrant plus dans
nos mœurs, il lui serait malaisé de s'en
servir mais la croisade ouverte du
moyen-âge a soccédé le despotisme
sournois et cynique des temps moder
nes. Au lieu de massacrer un homme
comme jadis, on a trouvé le moyen
plus révoltant et plus lâche de l'accu
ler ainsi que sa famille la misère en le
chassant des administrations de l'Etat
et en le privant de toute assistance pé
cuniaire. Nous no doutons pas que
cette cruauté raffinée ait été librement
consentie par tout gouvernement reli
gieux, comme le nôtre, et reconnue
compatible avec le caractère des temps
et des mœurs contemporains.
An chapitre X du Syllabus, Pie IX
condamne comme hérétiques ceux qui
pensent qu'à notre époque il n'eBt plus
utile que la religion catholique soit
considérée comme l'unique religion d'E
tat l'exclusion de tous les autres cul
tes,et qui estiment que c'est avec raison
que, dans quelques pays catholiques,
la loi a pourvu ce que les étrangers
qui s'y rendent y jouissent de l'exer
cice public de leurs cultes particuliers.
L'Encyclique de 1888 déclare juste,
que l'autorité publique réprime les
opinions mensongère?, pour ne pas les
laisser s'étendre la ;ue de l'Etat.
Elle condamne eutiu ia doctrine qui
affirme qu'il n'appartient pas l'Eglise
de faire des lois, déjuger, de punir, et
qu'elle doit se borner exhorter, per
suader, diriger ceijx qui 89 soumettent
elle volontairement.
Nous prions le Journal d'Ypres de
nous montrer la possibilité de concilier
la prescription de toutes ces !ib»rté*
modernes avec une large tolérance
dont tenterait de se réclamer tout gou
vernement religieux. Qu'il apprenne
que l'esprit de l'Evangile se manifeste
partout où souffle un vent de liberté,
de concorde et d'amour. La seule prié
re qui nous vienne de Jésus est une
prière sublime de renoncement, une
formule d'adoration universelle c'est
la répudiation <lu cléricalisme.
L'ardeur qui anime l'encyclopédie
vivante du Journal deverser sur
le papier d'interminables digressions
historiques en réponse nos articles
défendant la suprématie du pouvoir
civil, n'est certes pas un feu de paille.
Une fécondité aussi désordonnée pro
duisant des hors-d'œuvre dont nous
sommes blasés et dans lesquels nous
cherchons en vain des arguments pro
bants et des réfutations précises, n'of
fre que des fruits verts dépourvus de
saveur. La filandreuse exposition his
torique que nous sert le prodigue éru-
dit du Journal se refuse nous four
nir des idées telles qu'il se plaisait
nous réclamer autrefois
Pour résumer en peu de mots le ré
sultat de son ahurissante activité céré
brale, nous dirons nos lecteurs que
notre confrère s'est évertué motiver
l'œuvre odieuse de l'Inquisition et de
la Réforme en prétextant, d'une part
la sollicitude maternelle des chefs
des pouvons temporel et spirituel réu
nis de maintenir l'intégrité de la foi,
d'autre part les violences dont s'étaient
rendus coupables les hérétiques du
XVIe siècle.
Nous convenons de la vérité de cette
assertion, et nous ajouterons, détail
dont l'importance n'est pas si dédai
gner au point de voir le Journal le
passer sous silence, que le mobile qui
poussait les monarques chrétiens
persécuter les hérétiques était non
seulement cette sollicitude mater
nelle de vouloir maintenir l'unité de
la foi, mais encore celle de conserver
l'intégrité de leur territoire ou de l'a
grandir sous prétexte de religion me
nacée. Nous admettons avec notre con
frère, que ces monstres étaient des
exemples de brebis galeuses ou de
poires mauvaises ces despotes
sanguinaires n'étaient pas, comme le
judicieux organe clérical désirerait
nous le faire prétendre, des véritables
disciples du Christ car nous sommes
trop pénétrés de cetté vérité, que les
véritables disciples du Christ servent
l'Eglise an lieu de s'en servir, qu'ils la
protègent en la tenant en dehors des
rivalités politiques pour posséder la
terre, il faut qu'elle commence d'abord
par y renoncer.
Tout gouvernement théocrate, ca
tholique ou protestant, a toujours été
et sera toujours un gouvernement op
pressif et inquisiteur l'histoire, (notre
lumineux confrère s'est oftert le dé
montrer), nous en donne de précieux
exemples et prouve tout simplement
que sous l'influence de la civilisation
les moyens de persécution ont changé
de nature. Un gouvernement neutre
ne se livrera jamais une enquête sur
les opinions philosophiques de ses su
jets il n'agira jamais l'exemple de
notre gouvernement actuel qui, comme
les papiers recueillis lors de l'incendie
du ministère de l'intérieur l'ont prou
vé, enregistre minutieusement la na
ture des croyances des instituteurs offi
ciels, le caractère des lieux qu'ils fré
quentent, les livres qu'ils lisent, le
nombre de fois qu'ils assistent ou non
1' ffice de la messe.
Ces p-océdés répugnent notre as-
i t. de tolérance qui respecte les hom
mes ut les idées. L'abbé de Haarne ne
u-'Ciarnit-il nu jalis qu'il ne faudrait
y avoir aucune alliance autre entre
l'Eglise et l'Etat, que celle de la tolé
rance réciproque et de la liberté
Le Journal d'Ypres désavouera-t-
il la savoureuse sentence proclamée
il y a quelques jours au- Parlement par
M Borboux, député clérical de Ver-
viera La loi religieuse ignore la loi
civile n
Notre zélé confrère invoquera indu
bitablement contre notre thèBe, les
procédés délateurs dans l'armée aux
quels a eu recours le gonvernement
français qui prend les allures de la
neutralité. Ce serait là un argument
nul, car s'il est de bonne foi, le Jour
nal devrait reconnaître au gouverne
ment français, soucieux du maintien de
ia forme gouvernementale en vigueur,
le droit et l'impérieux devoir de s'in
former des tendances antirépublicai
nes de certains officiers réactionnai
res (1)
Qu'on ne nous accuse pas de Corn -
bisme, car les vrais Combistes soDt
ceux qui prescrivent comme étaut des
libertés dangereuses, les libertés d'en
seignement, des cultes et même d'as
sociation, qui les gardent, aussi long
temps qu'ils n'ont pas ie droit de par
la Constitution revisée de nous les en
lever. Le but des cléricaux et la ligne
de conduite qu'ils ont tenir lurent
un jour nettement exprimés dans un
traité Catholique et politiquepublié en
1878, et qui reçut alors l'approbation
de ia presque totalité de la presse clé
ricale belge.
On y disait
Nous ferons de la modification
complète de la Constitution dans un sens
catholiquele but de nos eliorts. Pour
être enfant de l'Eglise, il faut accep
ter de tout cœur les condamnations
portées récemment par Elle dans le
Syllabus de 1864 et les Encycliques de
1832 et 1864 c'est dur pnur quelques-
uns, mai - ce n'est pas moins une obli
gation stricte et indiscutable.
Les cléricaux jugent aujourd'hui
peut-être plus politique d'employer ia
ruse que la violence pour assurer la
réalisation de cette méconnaissance
médiévale des droits de l'homme. Mais
avertis par le pas«é, souvenons-nous
que leur attitude actuelle ne pourrait
être qu'un déguisement ou une feinte.
III.
La majestueuse banalité dont s'est
revêtue ia prose du Journal dans
son dernier article, rivalise quelque
peu avec cette jobardante présomption
dont croient se rajeunir les plus bour
geoises sagesses ce n'est que le mono
cle par quoi Joseph Prudhomme essaie
de remplacer ses lunettes, on avouera
Est-ce l'Etat qui a fait l'Eglise, ou
bien est-ce l'Eglise qui a fait l'Etat?
Voilà le problème palpitant d'intérêt
dont la solution, d'après le Journal
légitime l'union de l'Eglise etde l'Etat.
L'Eglise a fait l'Etat, affirme-t-il, donc
Elle doit l'absorber en maîtresse.
Si c'est le sentiment religieux seul
qui a fondé la Société et non l'Etat,
comme les raisons subséquentes du
Journaltendent le faire voir,
mais qui sont inadmissibles pour des
considérations scientifiques et histori
ques qu'il serait oiseux de produire ici,
cela ne prouve pas que ce soit la reli
gion catholique qui se soit chargée de
cette mission. L'Etat a existé avant
l'Eglise, n'en déplaise notre confrère,
et 1 Etat neutre a pu se maintenir jadis
et se maintient encore aujourd'hui tout
aussi bien et même mieux que maints
états catholiques notre confrère se
méfie des enseignements exacts de
l'histoire en cette matière et a l'air de
(N. J. I. R i Si le ministère Combes est allé
au delà, il est sorti des règles de la neutralité.
La faute des uns ne saurait excuser celle des
autres.