la Ligue de l'enseignement. (Circulaire du I" octobre 1905) Lorsque l'école est fréquentée par des enfants dont tous les parents, sans exception, professent le même culte, et lorsque l'école ne compte, par conséquent, aucun élève dispensé du cours de re ligion, l'instituteur répondra au vœu des familles, sans méconnaître les prescriptions de la loi, en rappelant dans ses leçons scientifiques, lorsque l'occasion s'en présentera, les grandes vérités, les dogmes de la religion; en fortifiant les deux ensei gnements l'un par l'autre, et en donnant ainsi son école le caractère confessionnel qui assure aux enfants le bienfait inappréciable de l'éducation religieuse et morale, sans retarder en aucune façon leur instruction scientifique. Voilà l'enseignement que vous essayez d'intro duire dans les écoles publiques et c'est précisé ment celui qui se donne dans vos écoles libres. Qu'il s'y donne, c'est votre droit, mais nous cons tatons et c'est là ce qui nous révolte, que par des moyens subreptices et détournés vous voulez qu'il règne en maître dans les écoles de l'Etat. En effet, le nombre d'instituteurs qui sont aujourd'hui dans les écoles publique- et qui restent affranchis de la domination du clergé est infime et vous cherchez surtout introduire partout des instituteurs imbus de ces doctrines, formés dans vos écoles normales privées. Messieurs, cette circulaire n'a-l-elle pas réelle ment quelque chose d'exorbitant Ainsi, voilà l'instituteur chargé d'enseigner la science et il faut qu'après cela il accomplisse cette mission impossible et irréalisable de mettre le dogme d'accord avec la science Il devra probablement enseigner les hérésies scientifiques que l'Eglise repiésenlait comme la vérité même avant que Copernic n'eût fait con naître son système et il avait tellement peur d'en courir l'anathème de l'Eglise qu'il n'a publié son œuvre qu'à la fin de sa vie et avec les plus ex presses réserves, en disant que ses doctrines étaient de pures hypothèses, alors qu'il était convaincu qu'elles avaient le caractère de certitude. L'instituteur devra, par exemple, enseigner que la création s'est faite en six jours. Comment don- nera-t-il alors son enseignement scientifique, puisque les sciences, l'astronomie, la géologie, la paléontologie, la zoologie démontrent que cette création en six jours est une pure légende, telles enseignes que nous voyons aujourd'hui des prêtres avisés, et non des moindres, trouver dans la légende une interprétation laquelle personne n'avait jamais songé jusqu'ici et prétendre que le mot jour n'a pas son sens ordinaire, mais qu'il indique seulement une des longues périodes oui a amené la terre dans son état actuel. Moïse a ainsi été le précurseur de Darwin Combien d'hommes ne sortiraient pas de leur misérable condition s'ils ne recevaient que votre enseignement primaire où le temps se passe sur tout réciter des prières et des patenôtres Vous ne pouvez faire, d'ailleurs, aucune objection de principe l'instruction obligatoire vous vous bornez simplement réclamer le droit au subside que vous prétendez, on ne sait par quelle aberra- ration, être implicitement inscrit dans la Consti tution. En ce qui concerne le droit de suffrage, c'est le parti catholique qui est cause de la nouvelle cam pagne révisionniste en aggravant les conditions électorale® pour la province et la commune nul ne peut défendre le système hybride qui permet quelqu'un d'être conseiller communal en ne pou vant pas être électeur pour la province. Vous projetiez pis encore c'est ce qui a fait effondrer M. Vandenpeereboom. Vous n'appliquez la représentation proportion nelle qu'en cas de ballottage de façon ce qu'elle ne puisse être appliquée que dans les grandes villes. Je convie le corps électoral appliquer partout ce grand principe de l'égalité qui représente le suffrage universel avec les garanties connexes. Vous n'avez rien trouvé droite si ce n'est de faire le procès de M. Hymans qui aurait manqué de caractère. Comme il eut été acclamé par vous, s'il avait manifesté une autre opinion que son parti! Nous avons recherché loyalement une for mule qui assure l'unité de notre programme, et M. Hymans a fait preuve d'esprit et de sagesse politiques. Ma carrière ne sera peut-être plus longue... (Protestations.) M. Huysmans. Pourquoi donc vous êtes plus jeune que jamais M. Janson. J'ai connu des heures de périls, d'orages et d'obstacles, mais je n'ai jamais connu une heure de désespérance. Et ce fut pour moi une heure belle et grande que celle où nous avons signé le programme des gauches. Aujourd'hui, le parti libéral est uni comme les cinq doigts de la main Souvenez-vous que vous n'avez le pouvoir que parce que nous étions divisés et parce que le parti socialiste n'était qu'à l'aurore de la vie politique, ne comprenant pas que certaines concessions peut vent s'imposer. Mais aujourd'hui pour vous le péril est extrême, car nos voix d'opposition son- aussi nombreuses que les vôtres et si nos voix ne s'étaient pas perdues de droite et de gauche, nous aurions déjà conquis le pouvoir Vous vous imaginez que notre programme puisse succomber Illusion Il doit réussir parce qu'il représente l'égalité dans tous les domaines ce serait presque désespérer du pays s'il nous refusait le mandat de confiance que nous deman dons de lui. Si le ministère de demain est cons titué, vous chercherez en v-ain des griefs pour le renverser. Un jour heureux sera celui où nos rues ne seront plus encombrée® de mendiants et les prisons de malheureux qui n'ont pas eu le bonheur de pou voir aller l'école et s'y instruire. Nous voulons la femme la maison familiale, Te mari au travail, l'enfant l'école, le vieillard garanti contre la misère. Voilà ce que veulent les libéraux en faisant justice au peuple qui est l'auteur de toutes ces richesses nationales dont le ministre des finances se prévaut? M. Woeste nous a récité une fable qu'on ap prend sur les bancs de l'école et il nous dit Tout est pour le lion, et le lion c'est le parti socialiste! C'est très flatteur pour celui-ci mais M. Woeste a oublié que le lion symbolise le peuple belge. Pour le peuple belge, le service personnel Pour le peuple belge, l'instruction obligatoire! Pour le peuple belge, l'égalité politique et les réformes sociales Et puisque M. Woeste aime La Fontaine, je lui rappellerai celle de la lime et du serpent. De même que la lime, notre programme est dur comme l'airain, l'acier et le diamant, et vous ne parviendrez pas l'ébrécher! Votre programme, vous, c'est d'abord de con server, comme jadis Rome; c'est ensuite d'amé liorer, mais, en fait d'amélioration, M. Woeste a gardé de Conrart le silence prudent; enfin, c'est empêcher. Est-ce que conserver et empêcher ce n'est pas la même chose Vous avez accompli votre œuvre et vous n'avez plus qu'un désir conserver le pouvoir pour favo riser vos amis! Vous n'avez plus accomplir une réforme politique, sociale et financière vraiment digne de ce nom. Sans vouloir être prophète, je crois fermement dans le succès du parti libéral, si glorieux dans le passé et dont le programme est si vrai et si simple que certains de nos adversaires en réclament cer tains points comme le service personnel et l'instruc tion obligatoire. Il sortira victorieux aux élections de demain et le 27 mai le pays rendra un verdict de soulage ment... j'allais dire un verdict de honte et d'inca pacité, mais j'hésitais et j'hésiterais encore si l'on ne nous avait fait connaître, ces jours-ci, un docu ment archiépiscopal qui nous a révélé l'espionnage organisé par le clergé dans tout le pays pour divi ser les citoyens en croyants et incroyants. Mais le pays, qui sent que notre programme c'est l'égalité en tout et pour tout, vous renversera dans les élections de demain (Chaleureuses appro bations et vifs applaudissements gauche. L'ora teur reçoit les félicitations de ses amis.)

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Le Progrès (1841-1914) | 1906 | | pagina 14