Journal de l'Alliance libérale d'Ypres et de l'Arrondissement.
f
Dimanche, 20 Juin 1909.
09e année. 2o.
Vires acquirit eunoo.
PRIX DE L'ABONNEMENT:
pocr la ville Par an -4 francs,
p' la province Par an -4 fr 50
p' l étranger Par an 6 fr. 60
ANNONCES:
Annonces 15 centimes la ligne.
Réclames 25
Annonces judiciaires 1 t'r. la ligne.
ATTENTION
Un joli portrait.
Les démocrates-chrétiens sont nos
adversaires s'ils ont consenti parfois
conclure un cartel avec les libéraux et
les socialistes ils ne l'ont fait qae sous
la pression de leurs éléments les plus
impatients de faire aboutir les réfor
mes démocratiques et la plupart du
temps, malgré l'opposition de leurs
chefs les plus autorisés.
Nous devons cependant reconnaître,
que ces adversaires sont plus francs et
plus sincères que les cléricaux et qu'ils
ont plus le souci de la vérité
Tandis que les journaux réactionnai
res cherchent diminuer la significa
tion des élections de Mali nés et de
Loochristy et se donncnL un mal énor
me pour attribuer ces résultats des
causes passagères et locales, les démo
crates avouent sans ambages, que dans
ces deux cantons, les libéraux oui fait
des progrès considérables.
Un de leurs organes les plus répandus
Het Vrije Woord, constate ce propos
que le parti clérical se désagrège et
s'effrite et en trace 4e joli portrait que
voici
Les cléricaux dansent et sautent,
se disputent et se battept entre
eux, comme si leur puissance ne
pouvait disparaître, tout comme un
lils prodigue qui fait la noce, jusqu'à
ce qu'il est expulsé de son logis par
huissier et qu'il peut se mettre
garder les cochons.
Les partis d'opposition ont 50,000
voix de plus que les cléricaux cha-
que élection prouve que ceux-ci per-
dent les éléments indépendants et
énergiques de la population et De
Landwacht, 't Volkskeri et 'tNieuws
van den Dag font de leur nez, comme
un citadin qui vient parader une
kermesse de village, avec une canne
de 25 centimes, des manchettes, un
col et un devant de chemise en pa-
pier et s'imagine que les paysans le
considèrent comme un millionnaire.
A la tombée du jour, on lui demande
combien il lui faut de temps pour
courir jusqu'à la ville et sa préten-
tion tombe au fond de sa culotte.
L'année prochaine il en sera ainsi
des blagueurs réactionnaires. Mes-
sieurs,souvenez-vous de laFrance!
Et dire que ce ne sont pas des libé
raux, des gueux, des mécréants, des
francs-maçons, des lils de Satan, qui
parlent du parti clérical en termes aus
si irrévérencieux et lui allongent des
coups de pied aussi bien appliqués,
mais que ce sont des croyants, des
hommes de foi, d'excellents chrétiens,
épris du rêve généreux de réconcilier
l'Eglise du Christ et la démocratie, en
prenant pour guide l'Evangile et la fa
meuse encyclique de Léon XII, De
rerum novarutn.
Que les temps sont loin, où nos
épiscopes gardîlient sous leurs houlet
tes un immense troupeau de brebis
fidèles, dociles et soumises.
Aujourd'hui des milliers de brebis
sont devenues enragées.
Le désarroi règne dans le troupeau,
au point que M. Woeste, qui fût de
puis un demi siècle de toutes nos lut
tes électorales et qui a une expérience
consommée des fluctuations de l'opi
nion publique, se montre inquiet, an
xieux.
Le réseau, aux mailles si serrées,
des influences du sacerdoce, de la no
blesse, de la haute finance, des unions
professionnelles et agricoles, des
geitenbonden et varkensbonden ne
préservera pas le parti clérical de la
débâcle.
Il est plus profondément divisé et
abusé que ne le fut le parti libéral aux
plus mauvais jours en 1885 el 1884 et
dès lors il sera fatalement battu.
La Chronique errante.
V
La Chambre.
Après que M. le Président eut annoncé
la nouvelle de la mort de M. le cheva
lier de Gorwarem, ancien membre de
la Chambre des Représentants, M. Hen-
derickx a annoncé qu'il interpellerait
le ministre de l'intérieur 1° au sujet des
violences exercées par un major de la
garde-civique d'Anvers sur la personne
d'un bourgeois qui protestait contre la
non-observation, par cet officier, de la
loi prescrivant les commandements en
flamand 2° des infractions continuel
les cette loi, commises par certains
officiers de la garde.
Par 69 voix contre 55 et 1 abstention,
la Chambre a adopté la question préa
lable mettant tin l'interpellation de la
veille, puis elle a repris la discussion
des articles de la proposition de loi sur
la eéruse.
Un amendement de M. Delbastée
interdisant l'emploi de la céruse a été
repoussé par 59 voix contre 58 et i
abstention, M. Warocqué.
Un amendement subsidiaire a subi le
même sort 65 voix contre 62 et 2 abs
tentions.
Par contre un amendement de M.
Delbastée permettant au gouvernement
d'interdire l'emploi de certaines matiè
res nocives dans les travaux de pein
ture a été adopté par 69 voix contre 63
et 2 abstentions.
Après avoir repoussé un amendement
de .1/. Denis, invitant les médecins
informer les inspecteurs du travail
l'union pait la force.
/*artitXMani le I>intanc/te.
On s'abonne au bureau du journal, rce de Dixmlde, 53, Ypres. Les annonces, les faits
divers et les réclames sont reçus pour l'arrondissement d'Ypres et les deux Flaudres au bureau
du Progrès. Pour la publicité en dehors des deux Flaudres, s'adresser exclusivement au
Comptoir de Publicité JACQOSS THIBESARD, 14, Place de Brouckère, Bruxelles,
téléphone 5230. Pour les annonces on traite forfait.
Les citoyens qui ont atteint leur 24'
année le premier Mai dernier sont de
droit électeurs la Chambre.
Les citoyens qui ont atteint leur 29e
année le premier Mai dernier sont de
droit électeurs au Sénatla province et
la commune, moyennant certaines con
ditions de famille et de cens.
Les citoyens qui ont atteint 34 ans le
premier Mai dernier ont droit un vote
supplémentaire.
Veillez donc avec soin votre inscrip
tion et adressez-vous, pour tous rensei
gnements, au bureau électoral de l'Asso
ciation libérale.
YPIIES.
Les Halles d'Ypres sont en voie de res
tauration. On m'a prié d'aller voir ça
Je suis allé voir ça et d'autres choses
encore qui m'ont paru offrir un certain in
térêt, en cette illustre cité, sans parler de
celles qui ne sont pas visibles par la bonne
raison qu'elles sont encore irréalisées, mais
dont on'appréhende la réalisation. Je sup
pose que vous connaissez Ypres. Cette sup
position implique un certain doute et ce
doute me vient naturellement de ce qu'il
m'est arrivé de rencontrer des gens dont on
n'eut jamais pensé, première vue, qu'ils
ne connussent pas Ypres. Cependant ils
m'avouaient ne point le connaître.
Ce phénomène peut s'expliquer la ri
gueur, si l'on considère l'ingenieuse façon
dont notre railway national s'est appliqué
rendre inaccessible là cité aux halles glo
rieuses. De- Bruxelles Courtrai, ça ne va
pas trop mal. A partir de Courtrai, com
mence une petite balade de famille, par Me
nai, VVervicq, Comines, avec d'autres haltes
variées ce qui finit par constituer, pour
les gens pressés, un voyage infiniment plus
redoutable que ne le feraient croire les cent
et quelques kilomètres qui séparent la ville
d'Ypres de la capitale de la Belgique.
Car, en vérité, si le nord de la Flandre
bénéficie des communications rapides que
lui valent les services internationaux et les
trains de bains de mer, la partie méridio
nale reste encore livrée au régime des pires
banlieues. Actuellement, Ypres est devenu
surtout accessible aux voyageurs qui vien
nent de France en automobile. Et c'est
heureux pour lui, parce que cela lui assure
la riche clientèle du département du Nord.
Je reviens mon hypothèse vous con
naissez Ypres et vous voyez d'ici l'entrée
actuelle de la ville, l'issue de la gare. On a
banalisé cette entrée en supprimant, du
côté gauche, ce qui restait de la vieille en
ceinte et du fossé, et en érigeant sur le ter
rain nivelé un pâté de maisons fabrique
selon la dernière recette renaissance flaman
de. Là, tout est dit le charme est rompu.
Reste le côté droit, qui conserve les vesti
ges du vieux bastion miré dans l'eau du
fossé et couronné de groupes d'arbres d'une
exquise silhouette. Ici, du moins, la beauté
persiste. Derrière ces restes vénérables et
charmants de l'ancienne place forte s'étend
l'Esplanade avec la caserne au fond.
Le regard du visiteur est attiré et séduit
par ce coin du tableau qui se présente
l'entrée d'Ypres. Et rien n'égalerait l'eton-
nementde l'homme doué de quelque senti
ment de l'esthétique, lorsqu'il apprendrait
tout d'abord que l'on songe embellir
cette entrée en rasant ce qui subsiste du
bastion, avec les arbres qui le couron
nent, cela va de soi en comblant le fossé
et en érigeant, sur le terrain aplani et nive
lé, une caserne de gendarmerie
C'est pourtant ce que l'on projette, et si
la chose n'est pas décidée encore, les plans
sont tout faits.
Ypres, qui fut une cité de 200,000 habi
tants au grand siècle de la draperie, ainsi
u on témoigne le colossal édifice dont'elle
tire gloire aujourd'hui encore, peut bien en
compter une quinzaine de mille l'heure
présente. Ce n'est certes pas la place qui lui
manque pour y mettre une caserne de gen
darmerie si elle tient s'en payer une neu
ve, et l'idée-de la mettre ici, juste l'endroit
où il faudrait commencer par détruire une
chose dont la conservation importe avant
tout, implique une mentalité très particu
lière, dans le sens le plus fâcheux du mot.
Il est triste de penser que des villes com
me celle-ci, dont le passé glorieux revit en
des souvenirs émouvants et des monuments
précieux, sont livrées de pareilles aventu
res.
Mais ce n'est pas tout. 11 y a un autre
projet, aussi odieux, aussi déconcertant que
le premier. Au cœur même de la cité, der
rière le Palais de Justice, dans le voisinage
immédiat du groupe prestigieux formé par
les Halles, l'église Saint-Martin et leurs an
nexes, il reste un préau planté de vieux ar
bres leur conservation réclame d'autant
plus de sollicitude qu'ils constituent peu
près le séul coin de verdure dont les rues
d'Ypres soient agrémentées la nature vi-
vace ne joue pas assez dans les vieilles pier
res de cette cité archaïque aussi, le préau
ombragé du Palais de Justice devrait-il être
l'objet d'un respect plutôt exceptionnel.
Or, il est question de raser tout, et, sur la
place nette, d'édifier... un Casino-Théâ
tre
Quand on m'a dit ça, devant ces grands
arbres que le printemps faisait verdoyer en
tre les murs sombres, j'ai cru d'abord
une plaisanterie. Il a fallu insister pour me
faire prendre la chose au sérieux.
De la verdure II en reste néanmoins
un peu, dans ce quartier central d'Ypres
où les façades antiques semblent implorer
quelque chose qui corrige leur sévérité
mais elle se dissimule le plus discrè
tement du monde il faut, pour la
trouver, pénétrer dans le couvent des Claris-
ses contigu l'église Saint-Martin, et qui
renferme le cloître dont on savait l'existence,
mais qu'on ne voyait jamais, cause de la
rigoureuse clôture où vivaient ces dames.
Maintenant, les Clarisses ont déménagé
elles ont, suivant les moeurs d'aujourd'hui,
échangé leur antique demeure, vétusté et
incommode, contre un domicile pourvu du
confort, moderne exige pour la vie monasti
que comme pour la vie du siècle
Et le vieux couvent est désert. Quelle
masure, d'ailleurs, que cette maison de
Jansénius Car c'est l'évèque sectaire
que l'on doit la vaste bâtisse qui, en mas
quant le bas-côté nord de Saint-Martin, en
clava le cloître ogival du treizième siècle. Et
combien les installations y manquaient
d'hygiène On conçoit que les filles de
Sainte-Claire, toutes pénitentes qu'elles
sont, aient mis un certain empressement
quitter ces lambris sans gaîtè.
Mais le cloître est délicieux. Cet ambula
toire des chanoines d'autrefois est envahi,
par les végétations et une herbe épaisse re
vêt son préau. Toutes les choses d'alentour
respirent l'abandon et la ruine. Le silence
n'est troublé que par le croassement des
corneilles qui passent là-haut, en vols tour
noyants. Des pousses folles s'élancent par
tout, s'accrochent aux colonnettes, se mê
lent aux fines dentelures des ogives et la
tristesse des vieilles pierres s'égaie de la
fraîcheur du printemps.
On va réparer cela pour y recevoir les vi
siteurs. J'espère que l'on respectera autant
que possible ce que la nature vivace, laissée
libre, y apporta de charme pénétrant. Mais
je suis tout de même fort heureux d'être en
tre là avant qu'on eût touché rien.
J'ai souvenance decloîties ainsi délaissés,
aux dalles dejetées et moussues, envahis par
la végétation desordonnée qui s'empare des
ruines. Il en existe un Saint-Emilion la
vigne y court parmi les herbes hautes et
s'accroche aux frondaisons touffues avec les
ros;s. Il y en a aussi en Provence et en Ita
lie ici, les cônes des cyprès noirs tranchent
sur le feuillage pâle des amandiers. Mais,
partout, sous des cieux différents, c'est la
même impres-ion de mélancolie intense
qui vous saisit et vous pénétré. Puisse l'an
cien cloître de Saint-Martin Ypres garder
cet attrait précieux
Quant la réfection des Halles, en voie
d'accomplissement depuis l'an dernier, je ne
pense pas qu'il y ait lieu de s'en alarmer.
Elle n'est que l'exécution d'un travail dont
la nécessité, hélas n'était que trop évi
dente, puisqu'il s'agit, en empêchant les
dégradations ultérieures, de corriger une
exécrable restauration faite il y a une cin
quantaine d'années. Ce n'est pas le vieux
monument qu'on répare, c'est un mauvais
retapage, exécuté avec de mauvais maté
riaux, dé 1834 1875, et que nous eûmes
maintes fois l'occasion de regretter.
La pierre employée pour les sculptures
renouvelées alors et pour la crête qui cou
ronne le comble s'en allait en miettes. (La
querelle politique des pierres existait déjà,
sans doute, et la pierre nationale avait
triomphé). Il a fallu reprendre tout cela.
Cette fois, on emploie la pierre d'Euville
qui. seule, offre les garanties désirables.
Peut-être les encadrements des fenêtres et
des niches ogivales qui décorent cette faça
de de 132 mètres auraient-ils pu être con
servés c'est la seule observation que je
trouve exprimer. Mais tous les menus dé
tails d'ornementation sont refaire.
Pour les toitures d'ardoises qui cou
vrent la merveilleuse charpente allongée de
chaque côté du beffroi central, leur état né
cessitait une prompte réfection, car elles ne
protégeaient plus suffisamment l'édifice con
tre les pluies et les intempéries. Les fres
ques de Pauwels et celles de Delbeke ont
déjà souffert cruellement de cette incurie et
plusieurs panneaux sont dans un état regret
table.
L'aile orientale est déjà peu près ter
minée et on lui a restitué les écussons poly
chromes qui décoraient autrefois la toiture.
L'architecte, M. Coomans, qui dirige ces
travaux, n'a droit évidemment qu'à des
éloges.
M. Nolf, le député d'Ypres et M. Arthur
Butaye, auteur de l'excellent guide illustré
de la vieille cité, ont bien voulu m'accompa-
gner dans cette visite. Je les en remercie.
Jean'D'ARDÈNNE.
- triaobjel*" -
Séance du 16 Juin 1909.
M. Scliollaert fournira des explica
tions pendant la discussion de son
budget.