Les Funérailles du Roi Léopold II.
Vive le Roi Vive la Reine
Journal de l'Alliance libérale d'Ypres et de l'Arrondissement.
Dimanche, 26 Décembre 1909.
69e
année.
52.
l'RIX DE LA.B \T Nr E M EMT
iour la ville Par an 4 francs.
pr la province Par an -4 fr 50
p' létranger Par an 0 fr. 0O
ANNONCES
Annonces 15 centimes la ligne.
Réclames 25
Annonces judiciaires 1 fr. la ligne.
La foule dans les rues
de la Capitale.
Les funérailles du Roi Léopold II
ont amené Bruxelles une foule com
me on n'en vit jamais, inètne dans les
plus grandes circonstances.
Tous les trains du matin déversent
dans la capitale des milliers de provin
ciaux venus de tous les coins du pays.
Sur le parcours que doit suivre le
cortège funèbre, dès 9 heures, s'est
massée une toule énorme maintenue
grande peine par la troupe et la garde
civique.
La levée du corps.
A 11 heures, les clairons sonnent
aux champs. Un vif remous se produit
dans la foule massée devant le palais
royal. Le corps sort du palais porté par
douze officiers d'artillerie. L'énorme
cercueil, sur lequel est placé une ger
be de violettes olferte par les trois tilles
du Roi, est placé sur le char funèbre,
le même qui a servi, Samedi soir, la
translation du corps.
Le char est surmonté d'un dais et
traîné par huit chevaux caparaçonnés
de noir il est très simple, mais a très
grande allure.
Le cercueil est recouvert d'un man
teau rouge bordé d'hermine et de la
couronne royale.
Les coins du poêle sont tenus par M.
Simonis, président du Sénat, M. Coo-
reman, président de la Chambre, M.
Schollaert, chef du cabinet, M. De
Lantsheere, ministre de la justice, le
général Verstraete, inspecteur général
des gardes-civiques du royaume et du
lieutenant-général commandant la 4e
circonscription militaire.
Aux côtés du cercueil marchent les
serviteurs du Roi défunt et l'on se dé
signe le fidèle valet Bajart qui assista
le souverain jusqu'au dernier moment.
Le Prince Albert, en grand unifor me
de général, inarche seul derrière la
dépouille mortelle de son oncle.
Vient ensuite le groupe brillant des
missions étrangères qui provoque la
plus vive curiosité. Il comprend des
uniformes superbement chamarrés.
On se désigne le duc de Connaught,
le prince Henri de Prusse, l'archiduc
Salvator, l'infant Charles de Bourbon,
le prince Henri des Pays-Bas, les prin
ces de Hohenzollern, etc, etc.
Une première bousculade se pro
duit parmi la foule maintenue par les
grilles du parc c'est miracle qu'il n'y
ait pas d'accident déplorer.
Le corbillard est précédé de tout le
clergé de Sainte-Gudule au milieu du
quel se dresse la haute silhouette du
cardinal Mercier.
Le cortège ne manque pas de gran
deur, mais la foule qui malgré tout,
veut voir n'est guère recueillie et l'on
n'éprouve pas l'impression que don
nent d'émouvantes funérailles.
Au parvis Sainte Gudule.
Gomme sur tout le parcours du cor
tège, la foule était massée en quantité
si considérable que, dès 10 heures, il
n'y avait plus moyen de trouver une
place disponible. Néanmoins les cu
rieux affluent toujours et vers 10 h. 1/2
se produisit une poussée formidable.
Une marée humaine irrésistible dé
boucha dans la rue des Colonies et de
toutes les rues avoisinantes. Le cordon
de gardes civiques qui devait tenir la
foule distance, fut bientôt rompue et
les soldats de la ligne arrivés la res
cousse, subirent le même sort. Alors
on appela la gendarmerie cheval et,
malgré tout le calme et la modération
dont les pandores firent preuve, les
choses menaçaient de se gâter.
De tous côtés des cris s'élèvent, des
femmes et des enfants sont piétinés et
la poussée perdure toujours...
Tout près de la porte de l'église, un
enfant d'environ huit ans est retiré par
les journalistes de dessous un cheval
de gendarme. La gamine qui n'est heu
reusement pas blessée est remise sa
mère, qu'on laisse passer travers un
cordon de troupes pour lui permettre
de s'éloigner.
Comme beaucoup d'autres, part
cette forte émotion, elle ne gardera pas
d'autre souvenir des funérailles royales.
Dans la mêlée un gendarme est cul
buté le cavalier sort égal ementindem-
ne de l'aventure.
Le service d'ordre est littéralement
désemparé et l'on prévoit le moment
où la foule va envahir l'église. Nous
avons juste le temps de nous y réfu
gier avant la fermeture des portes.
Les personnalités, qui arrivent tou
jours, ne peuvent plus'pénétrer dans
le temple. A l'intérieur on court cher
cher des renforts.
Un peloton de carabiniers, l'arme au
bras est envoyé pour dégager l'entrée
de l'église. Entretemps de nombreux
invités de marque sont arrivés.
Voici les ministres d'Etat Graux, Le-
jeune, Dupont, Woeste et Beernaert.
Ces deux derniers arrivent dans la mê
me voiture ce qui, dans les groupes de
curieux, donne lieu pas mal de com
mentaires.
Mais voilà le cortège qui arrive et
entre dans l'église sans encombre.
A Sainte Gudule.
L'église est toute tendue de noir et,
dans le scintillement de milliers de
cierges, présente un aspect de gran
diose austérité.
Au milieu, en face du transept, par
où le cortège pénètre, est dressé un
énorme catafalque surmonté d'un cer
cueil enveloppé dans les plis du dra
peau tricolore sur lequel est placé la
couronne royale.
La messe, en plein-chant, est célé
brée par le cardinal Mercier assisté des
évèqnes de Belgique.
Toutes les autorités du pays se trou
vent réunies dans le chœur. Les robes
rouges des magistrats de la Cour de
Cassation et de la Cour d'Appel jettent
une note spéciale parmi les habits cha
marrés des généraux, gouverneurs,
ministres et sénateurs.
Un seul incident pendant le service
religieux le ministre de Chine est de
venu indisposé et a dû être transporté
la sacristie où des soins lui ont été
donnés.
A l'issue de la messe, les absoutes
ont été dites en grand apparat par les
cinq évêques qui se sont promenés
autour du catafalque, suivant les rites
liturgiques.
A la sortie de l'église, les troupes
présentent les armes, les clairons son
nent aux champs, la foule sedécouvre,
tandis que le corps est replacé sur le
char funèbre.
Les princes de sang ont pris place
dans les voitures de la Cour et le cortè
ge, reformé dans le même ordre qu'au
départ, s'est dirigé vers Laeken, précé
dé de toutes les délégations de l'armée
et de la garde civique, avec les dra
peaux voilés de crêpe.
A Laeken.
Le cortège n'arrive l'église de Lae
ken qu'à deux heures, après avoir par
couru, sous une pluie fine et pénétran
te, l'itinéraire fixé.
Sur tout le parcours une foule im
mense s'est massée.
A chaque coin de rue, c'est une
énorme muraille formée par des chai
ses, des échelles, des tables, des estra
des, auxquelles s'accrochent de vérita
bles grappes humaines. Toutes les fe
nêtres, tous les balcons, les toits, les
plates-formes, les corniches regorgent
de spectateurs.
LL. AA. RR. la comtesse de Flandre,
les princesses Elisabeth, Louise, Sté
phanie et Clémentine se sont rendues
directement l'église de Laeken.
Les absoutes ont été dites par M.
Codreman, curé-doyen, entouré des
curés du doyenné. Tous les évêques
étaient présents.
Après cette cérémonie, le cortège
funèbre s'est rendu dans la crypte par
la nef latérale et le grand escalier de
droite.
Les honneurs militaires étaient ren
dus par le bataillon des grenadiers de
Laeken. Dans le parc royal, le canon
tonnait.
Il était 3 h. 15 exactement, lorsque
dix-huit sous-officiers des grenadiers
confiaient sa dernière demeure, la
dépouille du second Roi des Belges...
Elle a été vraiment triomphale l'en
trée de nos jeunes Souverains dans les
murs de la Capitale.
Les acclamations de la foule se sont
mêlées celles du monde officiel et
l'on peut dire que c'est la nation toute
entière qui a salué le nouveau Roi.
Avec tous les bons citoyens nous
nous réjouissons de cette explosion de
loyalisme.
Nous formons nos vœux les plus
ardents pour la grandeur du règne qui
commence.
Puisse-t-il assurer la Belgique de
longues années de paix, de concorde
et de prospérité
Vive le Roi Albert I
Vive la Reine
Le Discours du Roi.
Le programme du
nouveau règne.
Au moment où j'assume la mission
que me confie la Constitution, ma pen
sée se reporte naturellement vers les
Fondateurs de notre Indépendance
vers le Congrès, fixant, dans une charte
mémorable, les principes fondamen
taux de notre vie nationale vers ces
hommes d'Etat qui illustrèrent l'époque
de 1830 et qui guidèrent la Belgique
dans les voies de la sagesse politique.
Ma pensée se reporte, enfin, vers le
Chef de la Dynastie, le Roi Léopoid Ior,
l'éludes libres mandataires de laNation.
Je leur adresse, ici, un hommage
ému et reconnaissant.
Gardien respectueux des institutions
que le pays s'était données, Léopold Ir
sut comprendre et réaliser les aspira
tions du peuple belge.
Il consolida la Belgique l'intérieur
et la fit honorer au dehors. Dans la
grande famille des nations, la Belgique
fut estimée comme un pays d'ordre, de
liberté et de progrès, son Roi comme
un sage.
Le Souverain que nous pleurons
aujourd'hui prenait, en montant sur le
Trône, l'engagementde faire la Belgique
plus belle et plus grande noble am
bition qu'il eut la gloire de réaliser.
Il y a trente ans peine, on se mon
trait, sur le continent africain, un terri
toire immense, resté impénétrable, où
l'esclavage entretenait la désolation.
C'était une tache sur la carte du monde.
Maintenant la paix règne dans ce pays,
largement ouvert la civilisation. Qui
a réalisé ce prodige
Le roi Léopold II, par sa prévoyance,
sa hardiesse, sa ténacité si vaillamment
secondée par le dévouement de tant de
nos compatriotes.
Le souvenir en restera gravé dans
l'histoire des peuples.
Animé du souci constant d'enrichir
la Nation, le Roi voulait asseoir, sur
des fondements solides, l'avenir écono
mique du pays.
Ses desseins toujours vastes étaient
servis par une volonté qui ne défaillait
jamais et qui, en mainte circonstance
heureuse ou critique, s'est solennelle
ment affirmée et alors le pays était
fier de son Roi.
Les hommages qui ont salué la mé
moire de Léopold II expriment les sen
timents de sincère reconnaissance que
lui ont voués les Belges.
A ces hommages, les Gouvernements
étrangers, émus du deuil de la nation
belge et admirateurs des hautes quali
tés intellectuelles de Léopold II, ont
désiré s'associer par l'envoi de mis
sions spéciales. Au nom de la Belgi
que, j'adresse des remerciements aux
Princes, aux ambassadeurs et envoyés
extraordinaires dont la présence a été,
pour nous, un gage précieux d'amitié.
De plus en plus, le moment est venu,
pour la Belgique, de prendre conscien
ce de ses destinées et de regarder en
face les nécessités de l'avenir.
Au cours d'une existence de trois
quarts de siècle, elle a dépassé les pré
visions les plus optimistes de ses fon
dateurs. Elle est heureuse elle est
riche. Mais la richesse crée des de
voirs aux peuples comme aux indivi
dus. Seules les forces intellectuelles
et morales d'une nation fécondent sa
prospérité.
Il nous appartient de prolonger une
ère brillante en nons pénétrant des
idées et des principes qui sont dans la
tradition des Belges l'inébranlable
attachement toutes nos libertés con
stitutionnelles, l'amour de notre indé
pendance, la sagesse et la mesure dans
la gestion des affaires publiques.
C'est ainsi que le peuple belge main
tiendra intact le patrimoine sacré fait
du labeur de tant de générations, et
qu'il poursuivra sa marche vers les
conquêtes pacifiques du travail et de la
science, tandis que les artistes et les
écrivains de Flandre et de Wallonie
sèmeront le chemin de leurs chefs-
d'œuvre.
La nation, de son plein consente
ment, désireusede mener bien l'œuvre
de son Roi, vient d'assumer la souve
raineté des territoires du Congo. Avec
la conscience de ses devoirs, avec fer
meté aussi, elle a tracé la politique
l'union mit la force. i*araiM*anl te MMitnattche. Vires acquirit eund«.
On s'abiinue au bureau du jourual. rue de Oixmude, 53, Ypkes. Les annonces, les faiis
divers et les réclames sont reçus pour l'a r indissem mi d'Ypres elles deux Flandres au bureau
du Progrès. Pour la publicité en dehors des deux Flandres, s'adresser exclusivement au
Oomptoir de Pablicité JAOQtJiS CdtBelS ARA 14, Place de Brouckère, Bruxelles,
téléphone 5230. Pour les annonces on traite forfait.
Le Progrès.
Messieurs,
Messieurs,