Un discours de M. Hymans. M l.a Ligue Libérale s'est réunie Di manche en assemblée générale annu elle, pour procéder au renouvellement de son comité. M. Louis Kuysmans a été nommé président. M. Paul Hymans a prononcé cette occasion un grand discoursdans lequel il a examiné les causes de la défaite de Juin, justifié l'attitude prise par l'état- major du parti, déterminé le rôle de celui-ci. Nos lecteurs liront avec inté rêt les principaux passages de ce re marquable discours qui a été longue ment acclamé. Le glissement droite. La peur du nouveau L'histoire des dernières années Que devait-on faire Tactique et politique» La démocratie Les sections. Toutes les sections de la Chambre se sont réunies Vendredi. Elles ont com mencé l'examen du projet militaire aucune section n'a terminé ses travaux toutes se sont ajournées au début de la semaine prochaine. En Ie section, MM. Troclet et Hubin ont combattu le projet au nom de la gauche socialiste. La 2° section a adopté le principe du projet par 18 voix contre 8 socialistes et 2 abstentions (MM. Van Cauwelaert et de Kerckhove). En 3" sectionnes socialistes ont émis l'avis que la prise en considération de la proposition de revision serait de nature faciliter l'entente sur la réfor me militaire. La 4" section était présidée par M. Woeste qui a déclaré qu'en présence de la situation internationale actuelle, il voterait le projet. En 5e section toute la séance a été prise par la lecture des réponses du gouvernement aux questions de M. Devèze. En 6e section, M. Vandervelde a dé claré que les socialistes voteraient con tre le projet. M. Persoons a déclaré qu'il voterait le principe du projet, tout en se réservant pour l'ensemble. M. Grick a déclaré lui qu'il voterait le projet. M. Nolf a demandé si l'organi sation nouvelle de l'armée laisserait subsister la garde civique et comment se ferait son recrutement. M. Borgui- gnon a défendu les revendications fla mandes. Elle s'est ajournée Mardi. Garde Civique. Gaimant A. 25 20 25 25 30115 Ommeslagh E. 20 20 25 20 25110 Vantholl H. 20 25 20 25 20110 Froidure R. 20 25 20 25 20110 l fioiidremenl au canal On sait que le tunnel sous lequel de« vait passer lecanal de Gominesà Vpres, la limite des communes de Voorme- xeele et d'Hollebeke, a disparu et que L'année qui vient de s'écouler a étérem- plie de labeurs, d'espoirs et de désillusions. Jamais le parti libéral ne fit un plus grand effort et ne se crut plus près de la victoire. Comment la défaite s'ëxplique-t-elle Quelles leçons s'en dégagent C'est ce que nous avons pour devoir de rechercher. L'é vénement est assez éloigné déjà pour que, de sang-froid, l'on puisse analyser les causes et les effets. A la Chambre, la majorité cléricale, qui depuis dix ans n'avait cessée de décroître et de s'effriter chaque élection, est remontée brusquement de 6 16 voix. Sans doute la majorité des suffrages n'est dansl'ensemble du pays que de 80,000 sur un total de i,500,000. Et la forte majorité parlemen taire dont dispose aujourd'hui le gouverne ment est loin de correspondre la majorité électorale dont elle est issue. De ce que le régime plural double ou triple le pouvoir d'un grand nombre de citoyens, il suit que la majorié des individus est beaucoup infé rieure encore la majorité des voles on ne peut donc, dans la masse globale de la na tion, guère compter queqoà 30.000 hommes de plus d'un côté qne de l'autre. Entre les forces électorales du parti ca tholique et celles des partis anticléricaux l'écart est en somme assez restreint. Mais il n'en est pas moins certain que, partout, même Bruxelles, Liège et Gand.où le cartel ne fut pas conclu, un identique phénomène de glissement droite s'est opéré dans certaines couches de l'opi nion, au préjudice spécialement du parti libéral. A quel facteur politique faut il attribuer ce mouvement imprévu, en contradiction avec les résulatsde toutes ies élections antérieures depuis dix ans Nous ne signalons les manœuvres aux quelles on s'est livré que pour les flétrir et pour montrer, par leur immoralité, quel degré d'affolement la crainte de perdre le pouvoir jeta le parti clérical. Mais ne nous attardons pas peser lefruitqu'il en recueil lit. Oui s'est vendu hier, trahira demain il n'a de titre qu'au mépris ou la pitié; passons. Ce qui nous intéresse, c'est le mobile auquel ont obéi les électeurs libres et con scients qui, habitués voter pour les libéraux, ont silencieusement, le "1 juin, apporté leurs bulletins aux candidats catholiques. Leur nombre fut peu considérable par rapport la masse, mais il détermina le sort de la bataille. On les prit, dans les premiers jours, pour des traîtres qui, reniant leurs convictions, avaient passé l'ennemi. Les témoignages, les renseignements recherchés et recueillis de toutes parts ont permis depuis de recon stituer la vérité. La plupart de ces électeurs n'appartenaient pas aux milices régulières du parti. Ils n'avaient pas contracté d'enga gements politiques échappaient aux mots d'ordre, se tenaient éloignés de l'atmos phère grisante de réunions électorales, res taient étrangers aux mouvements du dehors. Ils avaient souvent, dans le passé, émis un vote anticlérical, étant frondeurs par tempérament, ennemis d'une politique ex cessive, et jugeant qu'il n'était pas de meil leur moyen de contraindre le gouvernement la modération que de renforcer l'opposition. Le jour ou ils'estagi d'ériger l'opposition en majorité et de lui donner le pouvoir, ils ont reculé. Pourquoi Un mot l'explique, Ils ont eu peur. Peurdequoi Ils ont eu peur d'un brusque changement de régime, peur de l'avènement d'un gou vernement qui s'appuierait sur les socialistes et que peut-être les socialistes auraient ten té de dominer, et, pour tout dire, ils ont eu peur du cartel là même où, comme Bru xelles. libéraux et socialistes luttaient sé parés ils n'ont pas voté pour la politique cléricale, ils n'ont pas voté contre les idées libérales. Ils ont voté contre le cartel Au succès du cartel ils préféraient le statu quo c'est-à-dire un gouvernement faible, immobilisé par une opposition forte. Ils voulaient maintenir le statu quo et, sans l'avoir voulu, ils l'ont détruit. Ils ont créé une situation parlementaire qui ne répond pas leurs désirs et qui n'est pas conforme l'état réel de l'opinion. A quelles régions appartiennent ces élec teurs - Au monde des affaires, et spéciale ment du commerce et de la petite industrie. Dans l'ensemble, ces électeurs étaient des hommes de tempérament conservateur et modéré, redoutant les agitations politi ques et constituant un élément impropre ment appelé flottant stable au con traire et positif, et dont le poids suffit contrebalancer un mouvement d'opinion. Au milieu de partis équivalant ou peu près, il devient l'arbitre du conflit. Sur cet élément tout l'effort de la propa gande catholique a convergé Pour amor tir le grand courant d'idées qui entrainait le pays gauche, on a cherché alarmer les intérêts. On s'y est ingénié par les pro cédés les plus habiles. Et on a réussi. Dès le lendemain du scrutin, des voix se sont élevées qui nous ont dit Nous l'avions prévu. 11 fallait s'y attendre L'événe ment accompli, il est facile de s'attribuer les vertus du devin. La vérité est que du moment où l'on s'assignait pour but d'abattre le régime clérical, l'entente des partis d'opposition s'imposait comme la seule tactique effi cace. Pendant les premières années qui suivi rent l'établissement de la représentation proportionnelle et la reconstitution de la Gauche libérale au parlement, la perspec tive du renversement du gouvernement catholique paraissait si reculée qu'on y son geait peine. La seule tâche qui nous fût dévolue était une fonction de critique et de contrôle. Les élections de 1904 modifièrent cet état d'esprit. La conquête soudaine de sept sièges fit luire nos yeux la possibilité de détruire la majorité. Dèsce moment, on vit se resserrer l'union des groupes libé raux entre eux et se rapprocher la fraction libérale et la fraction socialiste de l'opposi tion parlementaire. Ce mouvement de con centration s'accentua lentement. Des inci dents avaient surgi qui semblaient le com promettre, lorsque le Cabinet Schollaert dé posa son projet de loi scolaire. Ce fut com me un coup de foudre. L'élan de protesta tion fut immédiat, unanime, formidable. Le parti libéral ne pouvait lutter seul. Il fallait du secours. On le trouva chez les so cialistes. Et de commun accord la résistan ce s'organisa. On se demanda alors si le mouvement qui venait d'assurer aux Gauches de si rapides et éclatants succès pouvait être brusque ment arrêté, si le devoir, au contraire, ne commandait pas de le prolonger, et par con séquent de maintenir l'entente qui avait rendu la victoire possible. La bataille élec torale n'était-elle pas prochaine Ne serait- elle pas décisive Les Gauches libérales ré solurent de continuer la campagne, et les grandes manifestations projetées avant la crise ministérielle se succédèrent dans l'or dre convenu. Sur ces entrefaites, les mandataires libé raux firent disparaître de la Déclaration des Gauches les dernières réserves dont s'ac compagnait la revendication de l'égalité po litique. Bientôt la possibilité apparut de donner l'entente du parti libéral et du parti socia liste une base positive. 11 n'y eut ni marchandages secrets, ni né gociations, ni traité. Le programme se dé gagea des circonstances. 11 se résumait en tiois points l'instruction obligatoire et la défense de l'enseignement public, le suffra ge universel, les retraites ouvrières. Il était simple, précis, limité, réalisable, propre devenir le lendemain un programme de gouvernement. 11 laissait intacte l'autono mie des partis. II ne mettait en péril ni les institutions fondamentales, ni l'ordre et la prospérité publique. 11 donnait satisfaction eufin ces réclamations que j'ai entendues si souvent, dans les dernières années, de la bouche des libéraux les plus modérés il ne suffit pas de dire ce que l'on ne veut point il faut dire ce que l'on veut il faut surtout donner au pays la conviction que, ce que l'on veut, on aura les moyens de le réaliser C'est dans ces conditions que la lutte électorale s'engagea. Pouvait-on adopter des procédés diffé rents, imaginer une tactique meilleure? Personne n'en suggéra aux heures de la dé cision et de l'action. Ou'aurait-on pu tenter Répudier tout accord avec le parti socialiste, se confiner dant un «splendide isolement On eut fait beau jeu l'ennemi, dont l'argument favori jusque-là avait été de dénoncer la di vision des gauches er d'alléguer l'impuis sance où elles seraient de gouverner en cas de succès. Se drapper dans une intransigeance puri taine C'était soulever contre soi l'immen se majorité du parti libéral, impatient d'ac tion et de victoire. C'était, la veille delà bataille, s'annoncer vaincus, et jeter par tout le découragement- C'était reconnaître la perpétuité du régime clérical. C'était se figer dans une attitude de pur académisme, de pur platonisme politique. Ce qui fut fait devait l'être. Le parti libé ral ne nous eût pas pardonné d'avoir rejeté un moyen puissant de combat, au moment du suprême engagement. L'expérience a échoué. Déplorons la défaite, mais ne rou gissons pas des efforts loyaux que nous avons accomplis pour affranchir le pays d'un régime confessionnel qui classait les Bîlges d'après leurs croyances et livrait le pouvoir comme un apanage une secte et a ses prê tres. L'entreprise assurément exposait des risques Nous les avons affrontés, convain cus que nous servions notre parti et notre pays. Oui. nous croyions servir l'unité mo rale du pays et la paix sociale, en cherchant combler le fossé qui séparait les classes moyennes, gouvernementaliser le parti so cialiste, l'éloigner de la violence et de l'utopie, tirer des éléments populaires dont il est constitué le rendement le plus utile, le meilleur emploi pour le bien commun de la Belgique et le développement des forces nationales. Quoi qu'il en soit, cette politique avorté. Dans certaines régions, elle n'a pae été comprise. Nos adversaires l'on dénaturée et travestie maintes reprises, nous avions, par des paroles fermes et claires, fixé nos positions. On nous représenta comme asservis au socialisme, on nous accusa de livrer le pays l'anarchie, on invoqua contre nous les grè ves anglaises, les excès du syndicalisme fran çais. Et l'on parvint impressionner cer tains éléments de l'opinion publique, dont nous avons plus haut tracé l'esquisse psy chologique. Après avoir exposé les causes de la défai te, il nous reste caractériser la significa tion du scrutin et résumer les enseigne ments qui s'en déduisent. Notre programme politique a-t-il été ré pudié par le corps électoral Non, il n'a même été ni discuté, ni combattu. L'ad versaire a fait campagne contre le cartel. C'est contre le cartel que se sont prononcés les électeurs dont le déplacement vers la droite a décidé de l'élection. Les témoi gnages abondent de droitecommed'extrême gauche. Nous pouvons donc affirmer que les prin cipes, les idées, les tendances du libé ralisme n'ont pas été atteints. Ce n'est pas une politique, c'est une «tactique» qui a été yaincue. 11 ne m'appartient pas, il n'appartient personne aujourd'hui de dire, de décider ce que sera notre tactique future. En ces ma tières, les circonstances sont souvent déter minantes. Mais dès présent il faut proclamer la nécessité pour le parti libéral de marquer en toutesci rconsta nces son au tonom ie ,d accuser sa personnalité, d'éviter les équivoques où l'adversaire cherche le noyer.Nous ne som mes ni cellectivistes, ni républicains nous sommes attachés de raison et de cœur aux institutions fondamentales du pays Nous ne connaissons pas plus l'esprit de classe que l'esprit de secte. Nous concilions avec le souci de-i besoins collectifs, qu'impose la solidarité sociale, celui du libre développe ment de l'individu. Nous haïssons tous les despotismes, celui des clubs comme celui d'une Eglise nous tenons pour biens su prêmes la pleine liberté de la conscience humaine et la tolérance qui la protège et as sure son épanouissement l'éducation nous apparaît comme la première condition d'une société morale, indépendante et éclairée. Enfin, au-dessus de toutes les questions de langue, de religion ou de parti, noq^ éri geons comme un phare l'intérêt général de la patrie. Le peuple belge, dans sa grande majori té, professe traditionnellement la religion catholique. Il est d'autre part de nature po sitive et réaliste, attaché ses coutumes, très soucieux de ses affaires, plus préoccupé d'intérêts que d'idées, adonné principale- mentaux travaux pratiques de la produc tion et de l'échange. L'histoire le montre sous ces aspects, toutes les époques. Les partis ne peuvent impunément faire abstraction de ces éléments historiques et psychologiques. Le parti libéral combat depuis l'origine la politique cléricale,c'est-à-dire la politique du cierge, de l'Eglise, une politique qui tendàconférerà l'Eglise la direction effective de la société, lui créer une position prépon dérante dans l'Etat, une politique confes sionnelle qui a pour but principal de livrer au clergé la formation de la jeunesse. Mais le parti libéral n'a pour but ni de détruire une religion, ni d'extirper des âmes l'idéal religieux. Son a:tion se meut dans le domaine de la politique, non de la discussion philosophique. 11 doit s'y main tenir. Toute incursion qu'il ferait au de hors froisserait des consciences, affaiblirait sa puissance de pénétration et détournerait de lui des esprits qu'il doit, au contraire, s'efforcer d'attirer. D'un autre coté, le parti libéral, doit se préoccuper davantage, dans le choix de mandataires, d'assurer l'industrie et au commerce une représentation en rapport avec leur importance, dans la vie du pays et du parti lui-meme. Enfin sans doute il faut, et nous l'avons démontré, donner la personnalité morale du libéralisme un plein relief sans doute, il faut se distinguer du socialisme et de la politique de classe, sans doute il faut sesous- traire toutes inspirations de l'esprit sec taire. Mais il faut autre chose et plus. Il faut que le parti libéral s'affirme com me un parti de démocratie sincère et prati que. Je dis démocratie, non démagogie. Et j'entends par démocratie l'étude objective et la solution pratique des questions touchant directement les plus pauvres, l'instruction, l'éducation professionnelle, le travail, le loge ment, l'hygiène, lecrédit.les ri-quesdechô mage, delà maladie, de la vieillesse. J'en tends par démocratie un régime d'égalité politique et de solidarité sociale, de dévoue ment et de concorde, non une politique de guerre intérieure,d injustes suspicions l'é gard des uns, de vaines promesses l'égard des autres. Je dis démocratie et nondémago- gie je repousse le système de la surenchère et de la flatterie, qui excite les appétits et reste impuissant les satisfaire. Sous l'empire de ces idées et de ces pré occupations, reconstituons nos forces et no ire crédit. Faisons appel la jeunesse. Elle est impatiente et meurtrie, elle a soif de re vanche. Dans sa naturelle ardeur, elle croit facilement la vertu des grands gestes et des paroles sonores. Ne nous en étonnons, ne nous en effrayons pas. Qu'elle ait besoin de se remuer, de parler, de menacer, cela est de son âge et de son tempérament les jeunes gens excessifs sont les gens raison nables de demain. Nous ne lui demandons qu'une chose, c'est de garder de la foi et de l'enthousiasme, de ne pas laisser s'éteindre en son âme le feu sacré et, aussi, de ne pas se laisser dessécher le cœur parlesméfiances et les soupçons. Anciens et jeunes, restons unis, chacun son rang, avec ses devoirs et ses Ves ponsa bi 1 i tés La revision s'impose. Nous avons l'espoir que le gouvernement et la majorité catho lique comprendront la nécessité, dans l'in térêt de la ju.-tice et de la paix sociale, de résoudre avec les Gauches le problème électoral qui empoisonne notre vie publique et qui après une évolution de dix années, a atteint la complète maturité. La question de la défense nationale vient de reparaître, plus pressante que jamais. Je puis me borner ici quelques mots. J'atteste notre résolution de consentir tous les sacrifices exigés par le patriotisme en vue de sauvegarder l'existence et l'hon neur du pays. Ici, point de politique, point de tactique, point de préoccupation de parti. Le devoir parle, il commande. C'est du salut commun qu'il s'agit. Les Belges, fiers de l'être et ré solus le rester, ne donneront pas l'étran ger le spectacle d'une défaillance. Libéraux nous sommes, mais Belges avant tout. «"S «s m *ss «s m «s j il i Atii |t] j11 ii ii il j]

HISTORISCHE KRANTEN

Le Progrès (1841-1914) | 1912 | | pagina 5