3 janvier dernier, lorsque Virginie Verduyn épouse de Louis Penei, cabareiier et boucher Moorslede, allant Passcliendaele voir son père et arrivée non loin de ce village glissa dans un fossé et se Cassa la jambe. Elle fut aussitôt transportée chez son père qui fit appeler le sieur Debaere, chirurgien de l'eu— droit; Debaere se rendit chez le sieur Ver duyn et fit la réduction dans la fracture de la jambe de l'épouse Penet. Le lendemain Debaere ne vint point visiter la malade, bien que celle ci, ne pouvant endurer ses souffrau- ces, fil chercher le chirurgien Debaere pour qu'il portât quelque secours ses douleurs. Le surlendemain Penet fit transporter sa fem me Moorslede où le chirurgieu Pelyt vint visiter la jambe de Virginie Verduyn et la traita seul jusqu'à sa parfaite guérisou. Le jour même que Virginie Verduyn fut transportée de Passchendaele Moorslede, son père alla en informer le chirurgien Debaere, et voulut en même temps lui payer ce dont il était redevable pour les soins donnés l'avant veille la jambe de sa fille. Debaere témoigna du mécontentement de ce que l'on avait transporté la femme Penet Moorslede sans le consulter cet égardil ajoute même avec aigreur, qu'il pouvait en résulter de mauvaises suites pour la fracture, que, cela étantle tout retomberait indubitablement sur celui qui le premier en avait fait la réduction, qu'ainsi l'on portait atteinte sa réputation enfin, qu'il ne voulait point remettre sou compte, que la femme Penet aurait probable ment encore eu basoiu de sou ministère. Cependant Debaere ne fut plus appelé près de la femme Penet, le chirurgien Petyt donna seul tous ses soins la maladeil défit lo utes les ligatures faites par Debaere et appliqua un tout auire appareil la jambe. L'amour propre de Debaere fut nécessai rement* froissé par cette manière d'agir de Penet. Etre ainsi délaissé après avoir fait la preinière opération, pour être remplacé par uu jeune chirurgien qui vient de quitter les baucs de l'école, et qui critiqua et jefii tout ce que Debaere avait fait, conçoit-on quelque chose de plus pénible, de plus cruel sup porter pour un vieux praticien. Aussi Debaere en eut du ressentiment, car la première occasion qu'il se trouva seul avec Penet, il lui enfit des reproches amers, au dire de la servante qui était près de la table lorsque Debaere et Penet soupèrenl ensemble. Plus tard le sieur Verduyn père de la femme Penet, retourna chez le sieur Debaere dans l'intention de le payer, mais il ne le trouva point la maison, et donna connais sance la fille de Debaere de l'objet de la visite. Le virgt-un du mois de juillet vprs les six heures du soir, Debaere se rendit chez Penet, qui dans ce moment était absent, il y avait encore deux autres personnes dans le cabaret. La femme Penet servit un verre de bierre a Debaere, et celui-ci de lui rappeler les pre miers pansements faits sa jambe. La caba- relière demanda quel était le montant de sa dette en y ajoutant dans huit ou dix jours je viendrai chez vous pour vous payer. De baere demanda dix huit florins: la femme Penet repondit que celte somme lui paraissait elevée, mais qu'elle en ferait part son mari, sur ces entrefaites Penet rentre chez lui. De baere lui présente son verre de bierre et l'engage jouer une partie aux boules avec lui et les deux autres personnes que se trou vaient dans le cabaret. L'on joua deux contre deux jusqu'à neuf heures. Debaere et son compagnon perdirent tout l'echo, le tout se passa gaiemeul. Debaere resté seul au cabaret dit Penet, j'ai tait connaître tantôt votre femme ce qui me revient pour les soins que j'ai donnés dans le temps sa jambe, elle m'a repondu qu'elle viendrait dans quelques jours chez moi pour me payer: si vous voulez me remettre maintenant les dix-huit florins qui me sont dûs de ce chef, ce sera une affaire terminée. Penet i'invita d'abord souper eu ajoutant je vous payerai, M. Debaere. L'on se mil table durant et apiès le repas De baere amena continuellement la conversation sur la fracture de la jambe de Virginie Ver duyn et sur le payement de ce qui lui était dû, payement que Penet trouva trop élevé pour ce que Debaere avait fait la jambe de sa femme. L'on s'aigrit de part et d'autre, et le pourparler qui s'étabit ce sujet entre De baere et Peuel se termina par un refus formel de la part de ce dernier de payer les dix-huit florins, eu ajoutant plutôt que de vous don ner dix-huit florins, je préférerai de vous donner dix-huit coups de pied dans le der rière et de vous jetter sur la rue. Debaere lui répondit: vous n'avez pas le droit de me jetter de hors, puisque je ne vous injurie point, et si vous estimez que je demande trop pour ce que j'ai fait la jambe de votre femme, faites le taxer par le juge. Il eut pour tout toute réponse de Penet je n'ai que faire de vous et de votre juge, sortez de chez moi ou je vous jette par la croisée, et proférant cette menace il donna un coup sur la table que le chandelier bondit et renvetsa. Au même instant Dtbaere tire de sa poche un enorme couteau pointu souvrant ressort, ressort et l'ouvre derrière lui. Le bruit que fil le sessort en souvrant donna a croire Penet que Debaere armait un pistolet. Il lui dit: quoique vous soyez armé d'uu pistolet je vous jetterai également sur la tue. De baere montra alors son couteau et se mil en garde, voici mou arme dit il si vous m'ap- piochez je vous écarterai avec ce couteau, vous aurez mauvais jeu. Les frères Bonté, qui passèrent dans ce moment devant le cabaret de Penetentendi rent du biuit dans la maison, s'arieterenl pour mieux entendre ce qui s'y passaitmais ils hésitèrent y entrer. Au même instant la servante de Penet court hors de la maison en criant au meurtre, l'assassin. Les frères Bonté entrent dans la maison, voient Debaere renversé terre tout de son long. Penet genoux sur lui, demanière vouloir l'empêcher de pouvoir faire le moin dre mouvementtenait avec force la main de Dtbaere encore armée du couteau meurtrier; l'epouse de Penut criait au secours faisant tous les efforts possibles pour arracher le couteau des mains de Debaere, elle eut les quatre doigts coupés. L'un des deux frères Bonté s'approche, ordonne Debaere de lâcher son coteau, il refuse. Bonté menace de lui casser la tête s'il ne se laisse desarmer, alois seulement Debaere laisse tomber son coteau la femme Penet s'en saisit et le joita sous le comptoir. Aussitôt Debaere désarmé, Penet le laisse aller; Debaere se leve court précipitamment hors de la oraison en abandonnant son coteau et sa casquette, sans payer les dépenses qu'il avait faites, et en disant: c'est ici un réponse de brigands et d'assassins. Penet veut aussi se relever, mais il tombe en défaillance baigné dans son sang, il avait reçu deux coups de couteau l'un par detrière dans la fesse droite, l'autre dans le coté droit de la poitritrine, il paraît que le couteau a glissé sur la dixième coteet qu'il a percé le paroi de la poitrine, sous blesser les poumons. Dtbaere avait laissé son mulet la porte du cabaret, il détaché sa bête, la monte et retourne paisiblement chez lui. A peu de distance de la maison ou cette horrible scène vient d'avoir lieu, Debaere rencontre le nommé Vaudenhemel, s'artèle et lui raconte en peu de mots son aventure, sans se plaindre du moindre mal, sans parler de porter les secours de sou art celui qu i vient de blesser mortellement, je viens, dit-il d'échapper un assassinai dans la maison de Penet, je n'y ai échappé qu'en faisant usage de mon couteau avec lequel j'ai blessé Dent t. Plus loin Debaere rencontre le notaire Christiaen qu'il raconte son aventure dans les mêmes leimes, il descend de sou mulet pour satisfaire au besoin et se plaiul qu'il a du mal pour uriner. En rentrant chez lui, il était alors onze heures du soir, on annonce a Debaere qui! doit se rendre immédiatement chez le feiruiei Boulen Langhemarck deux lieues de distancé environ de la demeure de Debaere; que la fermière était sur le point de venir eu couches. Debaere remonte sur son mulet, se reud a Langhemarck, reste la ferme jusqn a cinq heures du malin que tout le travail lût fini, mais il n'y du pas uu mol de l'aveulie qui venait de lui arriver quelques heures au paravaul chez le cabareiier Penet.

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Le Propagateur (1818-1871) | 1836 | | pagina 2