On écrit de Bruxelles 12 août Le prin
ce royal de Prusse est descendu hier
YHôtel de Belle-Vue, venant de l'Allemagne.
Immédiatement après son arrivée, M. le
comte d'Arschot,grand-maréchal du palais
lui a fait visite. Le soir, le prince a assisté
au Théâtre de la Monnaie la dernière
représentation de la troupe allemande.
Lord Palmerston arrivera Bruxel
les mardi prochain. Personne n'ignore
que lord Palmerston, qui fut longtemps
ministre des affaires étrangères dans le
cabinet whig, prit une part active aux
négociations qui amenèrent la reconnais
sance et la consolidation de la nationalité
belge. Lord Palmerston se rend dit-on,
Ischl pour y prendre les eaux.
Le P. Walle, directeur spirituel de
la colonie belge de Guatemala, doit avoir
quitté Rome Te 4 de ce mois. Le P. Walle
arrivera en Belgique vers la fin de ce mois,
et partira bientôt après la tête de plu
sieurs prêtres de la compagnie de Jésus
pour aller fonder un collège dans l'état de
Guatemala.
On écrit d'Ath8 août Un bien triste
événement s'est passé hier, vers cinq heu
res et demie de relevée, au faubourg de la
porte de Mons. M. Noppeney, sous-lieute
nant de cavalerie, en non-activité, en
notre ville, s'est brûlé la cervelle. On ne
sait quoi attribuer cet acte de désespoir.
FRANCE. paris, 10 Août.
Nous avons raconté les détails de l'as
sassinat commis près de Pontoise, sur la
personne de M. Chenevière, agent d'af
faires, et l'arrestation du nommé Caffin,
âgé de soixante-dix-huit ans, et de sa fille
âgée de cinquante anscontre lesquels
s'élevaient des charges fort graves. Mer
credi matin, cinq heures,en entrant dans
la prison de Caffin père, le gardien l'a
trouvé mort: ce malheureux s'était pendu,
l'aide de son mouchoir, l'un des bar
reaux de la fenêtre, et la mort remontait
plusieurs heures. Rien, dans la conduite,
et dans les paroles de Caffin, n'était de
nature faire supposer cette résolution;
il paraissait fort gaiet peu inquiet du ré
sultat de l'instruction qu'on suivait contre
lui. Sa fille est toujours au secret.
Tous les étrangers qui ont élu domi
cile Cauterets pendant la saison thermale
ont été vivement préoccupés la semaine
dernière, par un événement tragique dont
cette localité a été le théâtre.
Une dame anglaise fort riche, lady Th...,
avait successivement perdu trois de ses
enfants dans l'espace de quelques années.
Tous étaient morts poitrinaires, et il ne
lui en restait plus qu'un seul sur lequel
elle avait rencontré toutes ses espérances.
Cet unique objet de son effection et de ses
rêves maternels était un jeune homme de
17ans. Les soins inimaginablesqu'on avait
pris de sa santé l'avaient assez raffermie
pour qu'on pût espérer que cet héritier
d'un nom illustre et d'une grande fortune
serait conservé sa mère. Il vivait entouré
de soins, d'affection et d'amour.
Malheureusement, cet unique rejeton
d'une noble famille avait des goûts qui je
taient le cœur de sa mère dans de conti
nuelles appréhensions, qui lui causaient
de perpétuelles alarmes. D'un caractère
indépendante! aventureux, son plus grand
bonheur était d'arrer travers les mon
tagnes, de faire des courses périlleuses,
de gravir les rocs les plus escarpés. Sou
vent, sa mère avait cherché le détourner
de ces excursions pleines de dangers, mais
ses représentations n'avaient pas été écou
tées. Chaque fois qu'il s'absentait pour al
ler courir les pics, c'était pour lady Th...
une journée de transes qui ne cessaient
qu'à son retour. Dans une occasion récente,
son absence dura tout un jour, et l'on ne
pourrait rendre quelles furent pendant ce
temps les angoisses de la pauvre mère.
Or, la semaine dernière, il partit seul
un malin avant le lever du soleil. La nuit
était arrivée, et ce jeune imprudent pas
encore rentré l'hôtel. Le lendemain se
passa de même... La malheureuse mère fit
venir les guides et leur promit une récom
pense de 3,000 francs si on lui ramenait
son fils en vie, et 1,200 francs si on ne lui
rapportait que son cadavre. Les monta
gnards se mirent immédiatement sa re
cherche, et le troisième jour ils rentrent
Cauterets portant sur un brancard le corps
du jeune lord. On l'avait trouvé baigné
dans son sang et la tête fracassée, au fond
d'un ravin.
On croit que sa mort a été le résultat
d'une chute, et qu'il s'est brisé la tête eu
glissant sur le bord d'un précipice.
Il est bon de prendre un bruit son
origine, fût-il ridicule; en voici un qui,
pour n'émaner que de la petite correspon
dance locale des journaux parisiens, n'en
fera pas moins le tour du monde. Nous
copions
Il existe l'ambassade de Russie un
appartement mystérieux dont se préoccu
pent singulièrement les personnes qui veu
lent percer tous les mystères. Cet appar
tement décoré et meublé avec un luxe
remarquable, n'est occupé par personne,
et cependant, on l'entretient avec un soin
extrême. On le dit destiné recevoir l'em
pereur de Russie, qui aurait l'intention de
visiter Paris incognito dans le courant de
l'hiver prochain.
La ville de Tulle vient d'être mise en
émoi par un acte de violence qui prouve
que nos gouvernants ne savent pas se dé
fendre de fâcheux entraînements. La fille
d'un conseiller municipal était entrée au
monastère des Carmélites spontanément,
dans la plénitude de sa liberté; on s'est plu
dénaturer la pensée de sa démarche, et
son père assez pacifique d'abord, parce
qu'il respectait les pieux désirs de sa fille,
a voulu faire intervenir, au proGt de son
autorité paternelle, le conseil de la com
mune.
M. le préfet de la Corrèze, assez mal
disposé pour tout ce qui tient la religion
s'est prêté tout avec un déplorable em
pressement. Il a autorisé une réunion ex-
traordinaireduconseil municipal de Tulle,
que l'on motivait sur la nécessité de voter
une somme de 130 fr. pour la pose de
quelques plâtres la mairie. Mais contrai
rement la loi du 21 mars 1831d'après
laquelle il devait s'occuper exclusivement
de l'objet qui l'avait fait convoquer, le
conseil n'a songé qu'aux Carmélites, il a
pris une délibération par laquelle il de
mandait le renvoi de ces pauvres reli
gieuses, demande qu'il appuyait sur des
considérations où la vérité faisait place
la passion.
M. Meunier, le préfet, a appuyé le vœu
du conseil, insistant sur la nécessité de
supprimer le couvent des Carmélites de
Tulle. Vingt-quatre heures après la récep
tion de son rapport, M. Duchâlel, ministre
de l'intérieur, a expédié l'ordre de chasser
vonsnous qui perdons peu d'intervalle deux de nos
plus jeunes confrères!
Un de nous aurait-il pu croire que celui qui remplaçait
Ghesquiere dans plusieurs fonctions serait allé si tôt le
rejoindre au domaine du repos éternel?
Ah! je ne pourrais vous dire la tristesse et l'affliction
qui se sont emparé de moi depuis que, hier sept heures
du matin seulement, j'ai appris qu'il venait de m'ètre en
levé un ancien condisciple, un confrère, un ami.
C'est au collège que prirent uaissauce mes liaisons avec
Julien Caslricque là je reconnus le germe de ces dispo
sitions heureuses du cœur et de l'esprit que plus tard je
vis arriver leur plus haut développement; là je fus l'un
des témoins de ses premiers et de bien délicieux succès.
Lorsque nous eûmes achevé nos études moyennes, le
sort nous sépara il acquit ses grades l'université de
Louvain; les miens me furent déférés l'université de
Gand. Il suivit les audienoes de la Cour de Douai durant
une année et dès mil huit cent trente six commencèrent
entre lui et moi ces relations intimes, ces effusions sinoères
de l'amitié fidèle qui seules peuvent répandre quelques
charmes sur les débuts arides de la carrière houorable,
mais difficile et pénible, que nous avions embrassée.
Des circonstancesque je ne saurais jamais me rappe
ler sans amertume, indépendantes de sa volonté et de la
mienue, modifièrent en apparence des sentiments qui n'ont
point subi la moiudre variation en réalité. NonJulien
les exigences du monde n'ont point altéré oette sympathie
qui confondait nos âmes; vous avez conservé pour moi
cette affection, cette confiance, dont vous m'aviez fourni
des preuves non équivoques; et moi, je le déclare dans ce
moment solennel et suprême, je garderai pour vous jusqu'à
la fin de ma vie, un souvenir profond d'attachement et
de regret.
Mais ces trésors de sensibilité et de dévouement n'étaient
pas des privilèges exclusifs pour quelques-uus il savait les
partager avec discernement entre tous ses parents, tous ses
amis, tous ceux qui s'approchaient de sa personne. L'as
semblée qui m'écoute confirme ce témoignage par sa pré
sence et son recueillement.
Quel scie, quel intelligence ne montra-t-il point dans
l'accomplissement de ces diverses fonctions qui devaient
sans aucun doute lui préparer un accueil flatteur et définitif
dans l'ordre judiciaire?
Bien ne pouvait rebuter son désintéressement et son ac
tivité. Avocat, ju*e suppléant du tribunal de i" instance,
juge suppléant de la justice de paix du z» arrondissement,
chargé de travaux si différents et si nombreux, il trouvait
encore le temps de se sacrifier, comme membre du Bureau
de Bienfaisance, au soulagement d'une partie de la popula
tion indigente.
L'esprit ne possédait pas moins de richesses que le coeur
chez Julien Castricque. Nous avons tous eu l'occasion
d'apprécier cette vaste mémoire, qui engendre le jugement
le plus prompt et le plus solide. Que de variété il y avait
dans ses connaissances; comme il était familier avec les
moindres détails de l'histoire et de la législation du pays.
Il mettait une admirable lucidité dans l'exposition des faits;
il creusait une question de droit jusque dans ses dernières
profondeurs et faisait triompher ses convictions avec mesure
et politesse, mais aveo persévérance et énergie.
Chose rare oet âge et dans ce siècle, il était l'abri de
toute espèce de préventious. En matière de religion, comme
en matière de politique, la réseive la plus circonspecte et
la plus rigoureuse impartialité furent constamment les guides
de sa conduite.
Non seulement comme avocat, mais aussi comme juge,
et était destiné marcher avec honueur et distinction, sur
les traces de cet oncle vénérablequi est l'une des gloires
du barreau, l'une des gloires de la magistrature.
Quelle abondance de facultés! Quelles brillantes espé
rances! Quel magnifique avenir!../, et l'impitoyable doigt
de la mort tout brisé, tout anéanti.
Vous, ses frères bien-aimés; vous, Carpentier, et moi,
ses plus dévoués amis, nous avons devant les yeux un sujet
de deuil qui ne finira qu'avec nous.
Julien, bon Julien, qu'au sein du Créateur votre âme
repose en paix, et qu'elle y reçoive, dans toute sa plénitude,
la récompense légitime de vos excellentes qualités....
Adieu, Julien... Adieu!