M. le professeur de rhétorique En vou
lant user d'une courtoisie galante envers
deux corps estimables, qui vous tirerez
bientôt la dernière révérence, vous êtes
d'une modestie par trop compromettante.
Il fallait plus de précautions oratoires.
Quoi? ni la commission du collège ni le
conseil communal n'ont fait de vives in
stances pour vous y retenir? ils sont donc
presque l'aise du parti que vous venez
de prendre? Nous soutiendrons le con
traire pour votre honneur en dépit de vo
tre lettre.
Ni la commission du collège, ni le con
seil communal n'ont fait de vives instances.
En corps, ou officiellement c'est possible,
mais des membres de l'une ou de l'autre
de ces administrations n'en ont-ils pas fait
individuellement et officieusement?
M. Metzdorf n'a jamais eu l'intention de
quitter le collège au commencementd'août,
mais seulement au 20 août. Nous ne pou
vons connaître les intentions que par les
actes qui les manifestent. M. Metzdorf n'a
pas vu vendre ses meubles par saisie exé
cution il a fait annoncer librement dans
le Progrès qu'il les vendait pour cause de
départ. Le public en a conclu, et nous avec
lui, que le départ suivrait de près la vente.
Est-il présumable qu'un savant professeur,
qui n'a pas craindre que des créanciers
viennent troubler ses études, occupe du
rant un mois avec sa famille une maison
sans mobilier?
L'article inséré au Propagateur était de
nature faire changer de résolution, si le
départ immédiat était arrêté: M. Metzdorf
assure qu'il ne l'était pas; nous n'avons
pas la prétention de scruter cette opéra
tion intérieure de la volonté qu'on appelle
intention; nous citons les faits.
Dans les dernières observations du Pro-
pagateuret plus encore dans ses articles
antérieurs, il y avait bien d'autres ma
tières qui pouvaient tenter M. le Professeur
d'engager avec nous une polémique utile
et significative; que ne s'avise-t-il donc de
nous chercher querelle qu'au moment où
nous ne le rencontrerons plus, et sur l'in-
2
nocente vétille de savoir s'il s'en va le 1" ou
le 20 août? Cette piqûre au dos en fuyant
est l'adieu d'un écolier espiègle ou n'y
voit rien de la gravité du rhéteur. C'est
répondre en résumé tous les articles qui
ontfiguré dans nos colonnes: «Nous avons
tout lu, tout entendu, et jusqu'au départ
nous n'avons su que dire. Qu'en pense
ront les collègues qui reste le paquet?
Voici la lettre qui nous a été adressée
BEAUX-ARTS. Peinture et Dessin.
1 1
La perte de Molly paraît plus que jamais iuévitable. Elle
est sur le bord d'un nouvel abîme que l'oeil ne peut sonder.
Le roc y plonge en ligne droite: uni comme un mur, il ne
présente pas la moindre saillie que la main puisse saisir, pas la
moindre place où le pied puisse trouver un appui. Les précau
tions de Molly redoublent, sa confiance en Dieu la maintient;
elle observe plus attentivement le lieu qui l'environne et un
nouveau rayon d'espérance vient briller ses yeux.. Elle a dé
couvert une lierre desséché depuis un siècle, peut-être, aucune
feuille ne l'avait orné. Sa couleur était celle du roc contre
lequel il avait grimpé; mille rameaux t'y tiennent attaché.
Quelques-uns dans leur développement étaient devenus de
véritables branches qui, s'entrelaçant en tout sens, formaient
une espèce d'espalier toutefois, les jours qu'ils présentent per
mettent peine d'y poser l'extrémité du pied. Un seul faux
pas et la mort est làr Molly ne se le dissimule point; son cou
rage n'en est que plus inébranlable. Aussitôt elle détache le
lien qui avait iixé son enfant sur sa poitrine, le ftoue de ma
niéré que le pauvre petit être repose sur ses épaules, et la voilà
qni se prépare descendre l'effrayante échelle.
Au moment où elle se retourne pour s'y appuyer, elle jette
un regard au fond de la vallée. Elle y aperçoit plus distincte
ment la multitude: elle la voit agenouillée au pied du roeber;
elle entend monter jusqu'à elle la mélodie d'un saint cantique.
C'est uue prière pleine de ferveur quis'éleve pour sa délivrance.
De la hauteur où elle se trouve, elle ne peut distinguer les
paroles, mais elles lui sont bien connues. Que de fois ne les
avait-elle pas accompagnées de la meme mélodie, sous 1 hum
ble toit de sa mère ou (Lins l'enceinte de l'église alors que sa
voix, alors que son coeur s'unissait ceux qui, daus cet in
stant imploraient le Tout-Puissant pour elle! Qu'ils étaient
graves, qu'ils étaient solennels ces sons qui se portaient pour
elle vers le trône de Dieu! L'âme de Molly les recueillait
Ypresle 15 août 1845.
A Monsieur le Rédacteur du Propagateur,
iHonsteur
Je ne sais pas dans quel but vous me prêtez
l'intention d'avoir voulu quitter le Collège com
munal avant les vacancesmais je dois vous
déclarer que je n'ai jamais eu cette intention, et
que par conséquent ni la commission du Collège
ni le conseil communal n'ont dû faire de vives
instances pour m'y retenir.
Je vous prie d'insérer cette lettre dans votre
prochain numéro.
Agréez les assurances de ma considération dis
tinguée.
I. METZDonr.
Durant la Fête communale et la Foire, s'ouvre
aux curieux notre cabinet des Beaux-Arts et un
salon où nos artistes produisent les résultats de
leurs efforts.
Le cabinet des Beaux-Arts, qui s'appellerait
mieux le Musée d'histoire naturelle, se développe
insensiblement. Les amateurs d'animaux sont
invités k en juger par eux-mêmes.
Disons quelques mots de l'exposition. Quand il
s'agit d'apprécier des tableaux, le publie a besoin
d'un guide.
Ou le sait, l'autorité communale a commandé
deux tableaux au peintre Bossuet, renommé pour
ses succès dans la perspective. L'uu représenterait
la grand'place de la ville, le sujet de l'autre serait
choisi par l'artiste. Il y a deux ans, le premier
tableau fut exposé, maintenant on peut exami
ner l'un et l'autre. Le pendant de la grand'place
est une vue d'Espagne. Ce sont deux productions
(i) Malo me Galatea p^tit, lasciva paella
Et fugit ad Salices
Galatée me jette une pomme la jeune étourdie, et s'enfuit
derrière les saules.
comme autant d'accents de consolation et d'espérance.
Elle reprend sa route périlleuse, dont l'idée seule eût fait
trembler l'homme le plus téméraire. Molly resta calme; elle
n'a le sentiment d'aucun des obstacles qu'il faut vaincre. Enfin
le terrain résiste son pied,masis le danger n'a point diminué.
Quelle direction suivre? comment éviter les précipices qui se
multiplient autour d'elle? Son oeil cherche en vain l'aspect
de la vallée. L'hymne pieuse qui tout Theure avait soutenu
son courage, ne retint plus son oreille. Elle se surprend
réfléchir, et seulement alors elle frémit de ce qu'elle vient
d'exécuter. L'étonnementla stupeur, se peint sur tous ses
traits, l'aspect de la masse du roc qn'elle vient de franchir,
elle ne peut la mesurer. Jamais jusqu'ici vestige d'homme ne
s'y était empreint. I*a possibilité de l'escalader ne s'était jamais
offerte l'illusion d'un songe.
Molly sentit q'une force miraculeuse l'avait jusqu'ici con
duite, et de nouveau son coeur s'anime l'espérance que quel
que autre issue s'ouvrirait elle: soudain ses côtés une voix
faible et tremblante se fait entendre. Surprise, elle regarde;
une chèvre avec ses deux chevreaux est ses pieds, et pour
elle c'est un guide envoyé par le ciel Dieu, se dit-elle, a in
spiré l'amour maternel ces animaux timides s'ils gravissent
des élévations semblables, ils savent aussi par quelque seutier
ramener leurs petits au fond de la valée; et cette idée, Molly
presse avec ivresse son enfant sur son seiu. Pour la première
fois sou oeil s'est humecté et bieutôt des larmes abondantes
viennent soulager sou coeur.
Elle suit son guide qui s'éloigne. Le chemin est des plus
périlleux encore, il eût fait reculer le plus intrépide chasseur
de chamois; mais l'animal prudent trouve toujours la place où
il peut s'appuyer avec moins de danger, et comme lui Molly
s'y appuie également. Enfin elle atteint un bouquet de verdure
Véritable casis au milieu de ce désert rocailleux. La végétation
remarquables: l'ensemble est magnifique, ce qui
n'empêche pas de voir dans les détails une grande
facilité et beaucoup de précision. Nous aimons cet
air chaud du midi, mais l'air de la place d'Ypres,
s'il est parfois tiède, est ordinairement froid.
A la dernière exposition, M. Charles Carton a
excité la plus franche, la plus cordiale hilarité h
celle-ci, il arrache des larmes de tendresse. Le talent
de cet amateur se renforce en même temps qu'il se
diversifie. M. Carton se distingue par l'intelligence
et le bon goût lorsqu'il fait rire, il fait rire h cha
que pas, lorsqu'il fait pleurer, il ne fait pleurer
qu'une fois. Les émotions profondes ne peuvent
se succéder trop vite, et puis quand on expose une
si belle œuvre ou doit ne pas en exposer d'antre.
Une pauvre mère qui veille sur son enfant
malade est un véritable bijou. Quelle finesse de
dessin, quel vigueur de coloris, quel effet de lu
mière? M. Charles Carton se livre k la peinture,
non parce qu'il doit travailler comme tant d'autres,
mais exclusivement par amour de l'art j et puis, du
sein de l'opulence il aime a descendre jusqu'k la
cabane du malheureux pour y choisir les sujets
de ses éludes. Cela est doublement méritoire.
L'artiste riche n'est pas sorti de chez la pauvre
mère sans avoir mérité ses bénédictions) et l'his
toire de la peinture lui consacrera une de ses pages
les plus flatteuses.
M. Delbeke a exposé i° Un portrait cChom
me2® Venfance de Sixte quint3° le dévoue
ment d'Eus tache de S1-Pierre pendant le siège
de Calais (esquisse) et 4° deux études. Il continue
k faire des progrès; il marche sur les traces de feu
Vantours, dont on admire deux études placées au
salon par M. Vandevyverj il se rangera parmi les
artistes les pins distingués du pays.
Un capucin par M. Domicent. révèle de grands
progrès. Ce que nous avions prédit s'est réalisé,
depuis qu'il marche moins vite, M. Domicent
avance k pas sûrs.
M. Delangbe a envoyé le portrait d'une très-
jolie femme. La pose est gracieuse, la carnation
est transparente.
Le tableau de famille par Dcruelle est au-
dessns des forces de cet élève. Son bas relief en
peinture est bon.
Les deux paysages de Cleenwerk sont char
mants. L'hiver snrtout mérite l'attention. Les
figures sont spirituellement touchées.
M. Roffiaen a exposé i° La Roche à-Bayard,
2° Les ruines du clidteau de Mont-Aigle.
gagne de plus eu ping. Bientôt une espèce de ssntier, que sans
doute des ehèvres ont tracé, se présente devant elle. L'instinct
avait donc bien conduit son guide.' la voilà parvenue cet en
droit de la montagne qui, tout escarpé qu'il est, n'est du moins
plus regardé comme inacessible. Déjà elle savait que quelques-
uns des jeunes montagnards nés plus hardis étaient parvenus
jnsque-là; et en effet, au moment même, elle aperçoit plusieurs
têtes qui semblent se lever hors du 'précipice. Marc Stewart
s'avance le premier.
A cette vue, Molly, qui tout l'heure s'était montrée sans
faiblesse contre tous les dangers les plus menaçants, se sent
près de succomber sous le poids des sentiments qui viennent
l'assaillir. Elle ne craint plus ni pour son enfant ni pour elle
et cependant la voix, la respiration lui manquent. Ce qu'elle
éprouve, son regard seul l'exprime. D'an geste suppliant eltese
borne imposer silence oeux qui s'approchent; elle leur mon-
tre le ciel, ce gnide secret et sûr qni avait soutenu, dirigé ses
pas. Les jeunes gens, muet-, s'arrêtent pour contempler l'hé
roïque mère; un respect religieux a pénétré leur âme. Ouant
Stewart, un sentiment de tristesse, de cou fusionsemble s'y
mêler; il a fait preuve de moins de force que cet être si faible!
Arrivée peu près au but, il voit Molly chanceler; il s'élauce
pour la soutenir, et d'on bras vigoureux, et sans redouter les
difficultés qui s'opposent sa marche, il l'emporte jusqu'à la
verdoyante colline qui s'élève au-dessus du torrent, et qui
déjà fait partie du vallon Glen-Orchy. Il la dépose, mais éva
nouie, mais 1 image de la mort empreinte sur la figure.
Elle vit, elle et son enfant! tous deux sont sauvés! Ces
paroles retentirent soudain du haut, de la colline. C'était la
voix de Marc Stewart, cette voix puissanta, qui si souvent du
haut du mât avait fait résonner le cri joyeux Terre: terre
Mm*