JOURNAL D'ÏPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. 2955. Samedi, 24 Janvier 1846. 29me année LES DEUX PORTRAITS DE FAMILLE. M. Alexand re D'Hond t, doyen des a voue's, est décédé hier, après une courte maladie. Il remplit les fonctions d echevin pendant quelques années après la révolution de 1850. La régence vient de décider que des mé dailles seront décernées aux chefs d'esta minet chez lesquels la collecte au profit des pauvres aura produit le plus dans le cours d'une année. Giller, dit Backer, était en route avec plusieurs chargements de foin au plus fort des dernières averses, entre Elsen- damme et Fumes. Ne pouvant avancer de nuit cause de la violence de la tempête, il laissa stationner ses chariots sur la voie publique. Traduit de ce chef devant le tri- bunal de simple police de Rousbrugge, il a fait valoir par l'organe de Me Comyn, du barreau d'Ypres, l'impérieuse nécessité dans laquelle il s'était trouvé, et qui devait faire fléchir le texte de la loi. Cette défense présentée avec adresse, a complètement réussi; Giller a ét^acquitté. Un vol des plus audacieux a été commis, dans la nuit du jeudi au vendredi dernier, au centre du village de Langemark, dans l'atelier du charron Joseph Vanderhaeghe, qui donne sur la place. Les voleurs ont pratiqué avec un perçoirquatre petits trous dans îa porte sous le loquet, et ont enlevé l'aide d'un couteau le bois qui se trou vait entre les trous, cela leur a permis d'y introduire la main et d'ouvrir la porte sans efforts. Dans l'atelierqui sert aussi de bou tique un boucher de la campagne nom mé François Baccarne, se trouvait une quantité de viande de porc salée et fumée le tout a été ènlevé. Le charron raconte que, dans la journée du jeudi, un individu, mine suspecte et qu'il croit être des environs de Clercken, est allé causer un peu avec lui dans son atelier. C'est toujours un fait certain que les malfaiteurs doivent avoir très-bien exa miné les lieux, et s'être assurés qu'il n'y avait pas de verroux la porte. Ils ont même évité les clous, qu'ils auraient pu rencontrer avec leur perçoir. On lit dans la Chronique de Courtrai Depuisque les eaux de la Lys sont rentrées dans leur lit habituel, l'état de nos quais est curieux voir. Après cette crue extraor dinaire qui les a complètement inondés pendant plusieurs jours, il sera impossible que ce qui reste puisse résister une nou velle inondation. Une grande partie des pierres de bordure, de quatre six pieds On s'abonne l prcs, Grand'- Place, 341, vis-à-vis de la Garde, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume. PR1\ DE L'ABONNEMENT, par trimestre, Pour Ypres fr.' AOO Pour les autres localités A5© Prix d'un numéro. Tout ce qui concerne la rédac tion doit être adressé l'Éditeur Ypres. Le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCHED1 de chaque semaine. PRIA DES INSERTIONS. 4 9 centimes par ligne. Les ré clames, 33 centimes la ligne. vérité et justice. 7PB.3S, 24 Janvier. ÉPISODE DE L'ENSEIGNEMENT LIBÉRAL. Depuis longtemps M. Lenormant professeur d'histoire moderne h Paris, donnait ses leçons a la Sorbonne avec un éclat et dès succès qui portaient ombrage h d'ambitieux rivaux. M. Lenormant avait surtout le courage de présenter l'histoire sous son véritable jour, et de rétablir d'après des recherches consciencieuses, en puisant aux sources, les faits que les coryphées d'un libéralisme antireligieux se sont efforcés de dénaturer pour nuire au catho licisme. Cette franchise n'a pas tardé h ameuter contre lui la masse des sophistes voltairiens qui ont besoin d'empêcher que la vérité se fasse jour, pour soutenir et propager les fausses doctrines qu'ils préconisent. Aussi n'est-ce pas au moyen d'argumantations qu'on s'est pris h réfuter M. Lenormant, mais a l'aide de sifflets et de coups. On a vu cette jeunesse qui était allée crier des vivats sous les fenêtres de M. Quinet, et qui pro diguait ses marques de sympathie h M. Michelet, se ruer h l'instigation de meneurs occultes dans l'enceinte où le professeur catholique donnait pai siblement son cours, vociférer comme la populace aux séances de la convention, jeter les bancs pêle- mêle, se déméner comme des possédés, et se mon trer disposée commettre les plus odieuses violen ces. L'attitude ferme et décidée du professeur a souvent contenu et parfois décontenancé la cohue elle était aussi plus ou moins intimidée par la présence d'un auditoire nombreux qui rendait jus tice au talent et au caractère du savant, et lui aurait prêté main forte au besoin. On croirait que les autorités de l'université aient interposé leur pou voir pour assurer l'ordre et faire cesser le scandale? Au contraire, M. Leclerc, doyen de la faculté de belles lettres, agissant au nom de ses collègues, a, par un refus indigne de concours et d'appui, aban- Le comte de Lisban, qui s'était expatrié au commencement de la révolution, avait, en dépit des décrets menaçant de mort tout exilé qui rentrerait dans sa patrie, cédé au désir si vif et si naturel de revoir ses foyers. A sou retour en France, il avait trouvé ses biens séquestrés sa tête était proscrite, et tous les dangers menaçaient sa vie. Ses anciens amis étaient en prison 3 il 11e savait où trouver un asile. Pendant un moisil parvint se soustraire aux avides re gards des bourreaux; mais entin sa retraite fut connue: il allait être conduit l'échafaud, lorsqu'il se sauva dans la maison d'un petit marchand de la rue de Clery, nommé Hu bert, qu'il ne connaissait point, et la pitié duquel il n'avait d'autres droits que ceux de l'iufortune. C'était beaucoup pour le bon marchand il accueillit le comte avec la plus noble gé nérosité, arrangea lui-même, dans l'endroit le plus obscur de sa maison, une retraite inpénétrable aux recherches ardentes des persécuteurs, partagea ses modestes repas avec lui, et le servit avec les attentions les plus délicates, pendaut huit mois que dura cette cruelle détention. donné le maître aux émeutiers de la classe. Alors M. Lenormant, renonçant une lutte qui pouvait devenir dangereuse pour sa personne, a envoyé sa démission h M. Salvandy, ministre de l'instruction publique. Voila donc un professeur exclu de sa chaireb cause delà conformité de ses doctrines avec le culte que la charte proclame comme celui de la grande majorité des Français. Cet incident donne la mesure de ce qu'ont le droit d'attendre les pa rents qui affectent d'attacher tant de prix pro curer a leurs enfants une éducation parisienne. Nous savions jusqu'à ce jour que le séjour Paris sert maintefois a vernir tant soit peu de grandes médiocrités, nous ignorions encore qu'on y formât d'aussi bons émeutiers. La prime d'encouragement accordée aux écoliers mutins de M. Lenormant en haine du catholicisme, est de nature faire réfléchir la législature, sur l'influence que l'esprit libéral la mode prétend exercer en général dans la for mation de la loi organique de l'instruction pu blique. Nos bourreaux, tournant enfiu leurs fureurs contre eux- mêmes, délivrèrent la nation d'un joug qu'elle n'avait pas le courage de secouer. Un rayon de justice vint briller au milieu de ce bouleversement de tous les principes de la morale, de la religion, de l'humanité et de la saine politique. Le comte de Lisban sortit de sa retraite en témoignant une vive reconnais sance ses bienfaiteurs; il rentra dans une belle terre qu'il avait aux environs de Paris, et dont, par un heureux hasard, il n'avait pas encore élé dépouillé. Il y recevait presque toutes les semaines le bon Hubert, Mrae Hubert, et la pelite Louise, leur fille. Il les admettait sa table, et, ne perdant jamais de vue le service qu'ils lui avaient rendu, il les traitait d'égal égal, excepté pourtant les jours où il lui arrivait de Paris une société nombreuse et brillante; alors, il les traitait avec plus de cérémonie et de respect, leur donnait la place d'honneur, les servait les premiers, et semblait dire aux autres convives: Je vous demaude bien paidou, mais vous ne m'avez pas sauvé la vie. Le commerce du bon Hubert prospérait depuis quelque temps. Louise devenait grande; Hubert songeait sérieusement la marier avec le fils d'un commerçant, son voisin, bou sujet, ayant un peu de forlune, et plus d'esprit qu'il n'en fallait pour devenir riche un jour. Ce mariage était arrangé depuis deux mois dans la tête des parents, et depuis six mois dans le cœur de Louise; mais un terrible événement vint renverser ce petit édifice de bonheur. La probité d'Hubert eut trop de confiance dans celle des autres; il essuya plusieurs bauqueroutes, et se vit bientôt assailli par une foule de créanciers qu'il n'avait plus le moyen de satisfaire. Le mariage de Louise, il est vrai, peut, en grande partie, réparer les pertes de la famille. Mais, hélas! ce mariage est rompu le père de Charles, excelleut calculateur, ne tient pas compte d'un sentiment qui ne rapporte rienet ne veut plus en entendre parler. Il serait difficile de peindre le déses? poir de Louise et de Charles, Hubert cherche en vain des ressources pour détourner le malheur qui les menace. Ses amis sont pauvres ou l'abandon nent; il ne lui reste que le comte de Lisban, et le comte est précisément le seul, qui, dans un revers si grand, le bon Hubert ne veuille point s'adresser. L'idée de lui demander des secours est cependant entrée dans la tête de Mrae Hubert; elle en parla sou mari. Nous lui avons rendu tant de services,

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Le Propagateur (1818-1871) | 1846 | | pagina 1