JOURNAL 11 YPRES ET DE l ARRONDISSEMENT.
No 2956.
29me année
7PR3S, 28 JANYIER.
DE L'ANCIENNE
CATHÉDRALE D'YPRES
DE SA RESTAURATION.
LES DEUX PORTRAITS DE FAMILLE.
On s'abonne Ypres, Grand'-
Place, 34, vis-à-vis de la Garde, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume.
Pttl\ DE LUBOVUEMEIT,
par trimestre,
Pour Ypresfr. 4—OO
Pour les autres localités 5S®
Prix d'un numéro. f 9©
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
Ypres. Le Propagateur paraît
le §AIIED1 et le MERCREDI
de chaque semaine.
PRIX DES IYSERT10YS.
19 centimes par ligne. Les ré
clames, 95 centimes la ligne.
YÉRITÉ ET JUSTICE.
et
i
Dans l'histoire
elle a conquis sa place, et son titre est notoire.
L'architecture du moyen-âge a été pendaDt trop
long-temps en butte aux dédaiDs et presque au
mépris: C'est ce qui fait sans doute qu'aujourd'hui
la réhabilitation de l'art gothique s'opère dans
presque tous les esprits avec une si forte réaction.
On emploie toutes les formules laudatives pour
célébrer ce qui autrefois passait inaperçu: On
devient tout-a-coup admirateur enthousiaste
d'observateur froid et indifférent qu'on était
autrefois. Tel est le cours ordinaire de l'esprit de
l'homme; il est rare qu'il se tienne dans de sages
limites, et qu'il ne tombe tour a tour dans les
excès contraires. Toutefois il faut l'avouer, on avait
été injuste, et l'art méritait une éclatante répara
tion aussi malgré notre prosélytisme parfois aveu
gle, nous sommes pour le moment plus près de la
vérité; et le culte, en quelque sorte idolâtre, que
nous rendons aux vénérables restes des siècles pas
sés, est du moins plus excusable que notre athéisme
d'autrefois car les arts comme la morale deman
dent une religion, sans cela l'homme ne ferait rien
de bon, de fort, de grand ni de durable.
Si de nos jours nous voyons qu'on daigne réédi
fier nos antiques monumentsgloire des temps
passés et que nos gracieux hôtels de ville, nos
églises vénérables et nos sublimes cathédrales sont
rappelés a leur caractère primitif c'est que
(Suite et fin.)
Le costume un peu suranué de M. et Mme Hubert excite la
gaîlé de l'assemblée on ne pense point qu'ils sont là et qu'ils
pleurent.
L'un des rieurs met sou enchère au plus vil prix, et les por
traits vont être adjugés, son grand regret, lorsqu'un peintre
fort connu daus le quartier, s'écrie A dix mille francs les
deux portraits; vingt mille, dit sur-le-champ un autre
peintre; Irenle mille... quarante mille. Ici les enché
risseurs s'arrêtentet les portraits sont délivrés au dernier pour
la somme de 4o,ooo francs.
Hubert, sa femme et Louise croient que c'est une nouvelle
insulte; l'assemblée est dans le plus grand étonnemeut. Le
peintre, possesseur des portraits, prend la parole, et dit:
Pauvres ignorants! vous vous moquez de ce dont vous ne
connaissez pas le prix. Sadhez doue que ces deux portraits sont
d'un peintre fameux, dont les ouvrages sont très-rares, et qui
n'existe plus. «A ces mots, il s'éloigne, emportant les deux
chefs-d'œuvre dont il vient de faire l'acquisition.
Voila donc Hubert deux fois plus riche qu'il ne l'était avant
sa catastrophe; il peut satisfaire ses créanciers et continuer
l'ignorance est de nouveau retombée sous les coups
du génie protecteur.
Partout l'on s'honore de réparer les vieux mo
numents; encore plus solides malgré leur ancien
neté, que toutes ces mesquines constructions qu'on
élève chaque jour. Tournai montre avec fierté son
antique Basilique, cette vieille église des Eleuthère
et des Médart qui l'emporte sur tout les monuments
de la Belgique. Elle appartient, comme l'on sait, a
deux époques et a deux styles différents, le roman
et l'ogival. On sait que cette Basilique romane ex
istait avant l'invasion normade, c'est-b-dire avant
la fin du IX" siècle et que par sa grandeur elle
résista leur fureur; aussi peu de monuments en
Belgique peuvent remonter une époque plus
éloignée. Bruges sa cathédrale d'assez bon gothique;
Gand son Beffroi auquel sont attachés tant de sou
venirs historiques; et Ypres montre déjà au loin
les flèches élancées de son Beffroi qui viennent
d'être réédifiées. Mais au nord de ce monument,
s'élève un édifice religieux, d'un beau gothique et
bien éclairé; plus remarquable cependant par ses
ornements, que par ses dimensions; qu'on ne peut
visiter sans regret en voyant son état de délabre
ment, qui exige sous tous les rapports les soins le
plus pressants, si l'on veut le soustraire d'une des
truction complète. Mais grâce aux soins des mem
bres de la commission, instituée par Sa Majesté
(i) En cherchant dans les décombres qui provenaient d'une
des flèches du Beffroi, un garçon trouva un magnifique exem
plaire du floiin d'or de Philippe-le-beau. A l'avers se trouve
saint Philippe tenant l'écu de Bourgogne, avec la légende
phs. ikceoe pro noms. etau revers une croix cantonnée de deux
couronnes et de deux lys. La légende porte: phs. dfi. ôra.
arch1d avs. dvx. bg. co. f.
Il est présumer que cette monnaie aura été mise dans une
fissure de la: flèche, par l'architecte, lors de sa constructu n.
Cette pièce m'a été vendue et elle se trouve présentement
dans mon médaillier.
avantageusement son commerce. Ces bonnes gens sont dans la
joie qui leur eût dit qu'ils possédaient chez eux tant de
richesses? Ces deux portraits, dans le temps, ne leur avaient
coûté que douze francs chacun encore avaient-ils eu le cadre
par-dessus le marché. Cependant, dit Hubert en regardant
sa femme, je ne puis m'empêcher de regretter le tien. Ah!
répond M,ne Hubert, si nousavions été plus riches!...
Louise partage la joie de ses parents son mariage peut se
renouer; le père de Charles est revenu voir ses voisina. On l'a
d'abord assez froidement reçu mais huit jours se sont ptiue
écoulés que les vœux de Louise sont comblés.
Le lendemain de la noce, Hubert dit sa femme et sa fille
Il me vient une bonne idée! Voilà plus d'un mois que nous
ne sommes allésvoir M.deLisban, et que nous u'avous entendu
parler de lui; il faut le surprendre: allons nous-mêmes lui
annoncer le mariage de Louise; je connais son cœur, notre
bonheur lui fera plaisir. M,ne Hubert est enchantée de cette
idée; Louise rougit: ulle se souvient de sa lettre resiée sans
réponse. Qu'irions-nous faire chez lui? se dit-elle; notre
présence ne lui reprochera-t-elle pas 1 oubli dans lequel il nous
a laissés? Il doit la vie mes parents, et les laissait mourir de
faim' Comment me piéseuter chez lui? Quelle situation!
Léopold, pour la conservation de tous les anciens
monuments éparpillés sur le sol de son royaume;
nous pouvons maintenant déjà admirer deux fenê
tres qui ont été réédifiées, avec la plus grande
justesse d'après les anciennes, pendant le cours de
l'année mil huit cent quarante cinq.
La grandeur et la beauté de cette ancienne
cathédrale explique et justifie k la fois l'intérêt
dont les représentations provinciale et nationale
l'entourent; intérêt vivement sollicité par les ar
chéologues pour sa conservation. Si S'-Martin est
une des plus anciennes églises des Flandres, elle
est aussi, a ce titre, la plus maltraitée et la plus
menacée et par le temps et par les hommes.
Les travaux de restauration soulèveront plus
d'une question d'art et d'économie qui ne pourra
se résoudre que par l'étude approfondie de l'édifice.
Car ici le talent n'est pas créer, mais copier, a
reproduire avec précision ce qui était il faut faire
preuve de patience et d'étude plutôt que d'imagi
nation. Pour restaurer avec goût un monument
du XII" ou XIII" siècle dit un savant architectono-
graphe, il faut avoir étudié l'architecture ogivale
de cette époque, il faut savoir distinguer les diver
ses transformations de cette école si riche et si
variée, de peur d'attribuer 'a un édifice un style et
des ornements d'un siècle autre que celui qui l'a
élevé. Eu effet l'ogive, l'arc-boutant, le pinacle,
le clocher du XIIIe siècle ne ressemblent guère aux
mêmes ornements du XV". Les confondre serait
faire une anachronisme en architecture, et pour le
bien apprécier, il faut s'être livré des études
spéciales. On peut conclure de l'a que l'art ogival
négligé de nos jours, est tombé dans le domaine de
la science, que cet art si savant et si supérieur a
été longtemps méconnu par des écoles nouvelles et
quel embarras! pourra-t-il soutenir ma préseude? Louise m'a
cru meilleur que je ne suis, dira-t-il en lui-même, et mainte
nant Louise sait que je ne suis qu'un ingrat.
Elle emploie toute sou éloquence pour détourner ses parents
de ce voyage mais, comme elle n'osa parler de la lettre écrite
l'iusu et contre la volonté de son père, ses raisons ne sont pas
goû'ées Hubert et sa femme se font un grand plaisir de sur
prendre M. de Lisban, et Louise est bien forcée de les suivre.
La petite famille arrive bientôt la terre du comte, Hubert
demande le voir on lui dit qu'il le trouvera seul daus son
cabinet; il monte avec sa femme, sa fille et son gendre, et ils
pénètrent sans peine jusqu'à M. de Lisban, qui les accueille avec
l'air du plaisir, mais cependant avec uu peu de contrainte et
d'embarras.
Venez dans le salon, mes amis, leur dit-il venez, nous
y causerons plus notre aise que dans ce cabinet. Pourquoi
cela? dit Hubert; lorsqu'on est avec des personues que l'ou
aime, je pense que l'appartement n'est jamais trop petit.
Le comte n'ose insister il demande au bon Hubert des
nouvelles de s'a santé, de ses affaires, comme s'il les ignorait,
et lui reprocha sa longue absence u Quelle fausseté! dit
Louise eu elle-même.