JOURNAL D YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N» 2964.
29mc année.
TPB.3S, 25 Février.
DÉTAILS BIOGRAPHIQUES
I. tM. F, ©Ë©@INT0 IN1©K.
Le discours ci-après fera connaître nos
lecteurs d'intéressantes particularités biogra'
phiques sur M. Deconinck. Au moment de
l'inhumationau cimetière de Zittebeke,
M. Honoré Smaelen, avocat de celte ville,
s'est exprimé en ces termes
On s'abonne Ypres, Grand'-
Place, 34, vis-à-vis de la Garde, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume.
PRIX DE LMBOXXEHEXT,
par trimestre,
Pour Ypresfr. 4
Pour les autres localités 43®
Prix d'un numéro.
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
Ypres. Le Propagateur parait
le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine.
PRIX DES INSERTIONS.
19 centimes par ligue. Les ré
clames, >3 oentimes la ligne.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
sur
illfâsieurs,
Les réflexions graves auxquelles convient nos
fréquentes réunions parmi les cendres des morts,
revêtent aujourd'hui un caractère plus solennel, a
raison des éminentes qualités de l'estimable défunt
dont la terre révendique les restes inanimés, et
qui nous venons exprimer un dernier hommage:
le dernier en public et de vive voix, non pas le
dernier de ceux que rendent le cœur,Me souvenir
et la prière. Par l'effet d'un sentiment que nous
dictent l'attachement, la reconnaissance, l'admira
tion, il est des hommes qui l'extrême vieillesse
semblent mourir prématurément. Rien n'est plus
facile que de montrer que M. Deconinck est de ce
nombre rien ne l'est moins que de le faire
d'une manière digne de la grandeur du sujet. Cou-
vaincu de mon insuffisance, j'effleurerai néanmoins
une vie également brillante par l'éclat des services,
et remarquable jusquesdansle repos de la retraite;
sans séparer des faits les enseignements qui en res-
sortent, me figurant qu'une si noble existence est
moins honorée par des éloges, étendus, que par le
rapprochement des vérités utiles dont elle a résumé
le tableau vivant.
M. Deconinck nous appartient par toute sa car
rière, sa jeunesse exceptée. Son père, avant que
d'être échevin et receveur général de la Chatellenie
d'Ypres, avait occupé le poste de greffier de la
Généralité des huit paroisses, fonctions dont s'é
taient déjà acquittés ses ancêtres. Né a Wytschate
le 20 Février 1763, M. Jean-François Deconinck
se distingua de bonne heure par ses succès dans les
études. Persuadé que c'est de l'emploi des années
de la jeunesse que dépend en général tout l'avenir
de l'homme, il ne les passa point dans les vains
amusements; mais dans l'application et la frugalité
cosorte que le seul excès dont il fallût le préserver,
fut celui du travail. Aussi est-il arrivé la dernière
vieillesse, et de flatteuses distinctions apanage
mérité d'une jeunesse prudente et sage.
En 1786, il prit le grade de Licencié en droit
a célèbre université de Louvain, ou quelqu'un de
ses ayeux avait fondé le collège de Driutius.
Bientôt après, et peine majeur d'après la législa
tion d'alors, il fut nommé Conseiller-pensionnaire
de la Généralité des huit paroisses, avec résidence
Y près. Ses débuts dans la magistrature inspirèrent
une si haute idée de son mérite, que déjà en
1790, le gouvernement l'appela aux fonctions
importantes de Substitut du Procureur-général du
Conseil de Flandre Gand. Dès la suppression de
cet office, arrivée en 1792, lesmagistratsd'Ostende
s'empressèrent de le choisir pour Conseiller-pen
sionnaire et Greffier de la ville, poste auquel l'ad
ministration autrichienne joignit celui de juge de
l'amirauté. L'invasion française lui fit perdre ces
places, et il resta sans emploi public jusqu'en 1807.
Pendant la tourmente révolutionnaire, il rendit
d'éminents services aux familles les plus illustres,
aux Montmorency, aux d'Aoûst de Jumelles, aux
Lichtervelde, aux d'Aremberg. La reconnaissance
de ces familles, et leur confiance illimitée, lui res
tèrent acquises jusqu'à sa mort.
En 1807, sur les instances de ses amis, et d'au
tres personnes des plus considérables, il rentra
dans la carrière judiciaire, et fut nommé Juge au
tribunal de première instance d'Ypres. Quels noms
plus recommandables pouvait-on y réunir que
ceux des Deconinck, des Hynderick, des Vander-
meersch Cependant il se démit de ces fonctions
au regret de ses honorables collègues en 1823,
renonça ses droits de retraite, et parut décidé
se renfermer désormais dans la vie de famille, où
l'étude devait toujours occuper une large part de
ses loisirs. Toutefois il ne put refuser ni ses lumières
aux États provinciaux, ni son activité l'adminis
tration des hospices. Après un si grand nombre
d'années passées dans les honneurs, mais aussi
dans les fatigues d'emplois difficiles, on ne pouvait
méconnaître qu'il n'eût droit cette tranquillité
occupée, où l'on ne soit asservi aucune sujétion,
et où tout puisse être fait avec ordre: repos du
sage, récompense terrestre d'habitudes douces et
réglées, que chacun aime se réserver en perspec
tive pour le dernier période, et comme le couron
nement de son existence. Peu réalisent ce bonheur,
soit parce que les qualités qui le font atteindre, ou
qui en font jouir leur manquent, soit parce que la
mort prévient leurs illusions. Exempt d'ambition,
ennemi des plaisirs qui ne laissent que le vide et
l'ennui dans l'âme, homme de cabinet et de tra
vail, érudit et agronome, M. Deconinck réunissait
la plupart des conditions qui rendent agréable et
fructueuse une vie retirée, et lui servent d'orne
ment. Aussi comptait-il sans doute finir ainsi,
paisiblement et dans l'exercice des vertus domes
tiques et chrétiennes, srconforines son caractère,
des jours entourés de considération et de respect.
La Providence en avait disposé autrement. Tant
de mérite ne devait pas s'user dans l'ombre. A
cette halte de la carrière publique devait succède1"
une carrière nouvelle, pleine d'écueils et d'orages,
opposée aux mœurs sédentaires du jurisconsulte,
qu'il était loin de rechercher, mais que vint com
mander le salut de la patrie. La révolution de
i83o avait éclaté. L'ordre, bouleversé par cette
commotion politique, avait besoin d'être rétabli sur
des bases solides le Gouvernement provisoire
avait ordonné la convocation d'un Congrès: de
suite, tous les yeux se tournèrent vers M. De
coninck, et il fut envoyé notre assemblée consti
tuante. C'est ainsi que dans les grandes crises, la
raison publique des peuples, foulant aux pieds les
intrigues et les rivalités, découvre et saisit la
charrue ou dans la retraite, les hommes capables de
les sauver, soit pour les placer la tête des ar
mées, soit pour mettre entre leurs mains les des
tinées d'un pays. Le canon grondait encore quel
ques lieues de Bruxellesles ruines et le sang
fumaient encore dans son enceinteque déjà M.
Deconinck était son poste. Ceux qui ont partagé
la gloire et le danger de siéger avec lui, diront
quelle influence sa haute probité, sa juste consi
dération et la conviction de son profond mérite,
attachaient ses opinions et ses votes.
L'histoire énumérera avec étonnement les actes
de cette législature improvisée, qui fit tant de
grandes choses en si peu de temps, au milieu de
difficultés sans nombre. C'est elle que nous de
vons notre indépendance nationale, c'est elle qui
a assuré la Belgique son auguste dynastie et ses
garanties d'avenir; c'est elle qui l'a dotée d'une
constitution qui déjà a servi de modèle en Grèce
et en Espagne; c'est a elle que nous sommes rede
vables de cette somme de libertés, qui fait retentir
chez les nations étrangères, même chez la nation
la plus policée du monde ce vœu devenu prover
bial en Europe La liberté comme en Belgique!
M. Deconinck contribua fonder toutes nos
libertés, il les vota toutes, et toutes les mesures
propres les consolider, honorant par cette fran
chise et cette confiance le génie sage et le caractère
modéré du peuple belge.
Quand la crainte d'une conflagration générale
arrêta aux frontières du nord les succès militaires
de nos compatriotes; quand une diplomatie hostile,
multipliait les embarras toujours croissants du
pays; quand les menaces des puissances étrangères,
et l'intérieur la trahison répandaient l'épou
vante; quand la guerre civile ensanglantait les
rues de Gand, et s'agitait jusques dans la capitale
tandis que des factieux tentaient de deshonorer
notre régénération politique par les excès des pil
lages M. Deconinck sans se laisser jamais aller
au découragement, continua éclairer le Congrès
de ses conseils, le renforcer de ses votes; aida