JOURNAL D YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N« 2965.
29me année
Les électeurs de Roulers se proposent
de choisir Mr De Neckere-Deconinck de
notre ville, comme membre du Sénat, en
remplacement de M1 Bonné-Maes, décédé.
Ledistriclde Roulers ne sauraitêtre mieux
représenté que par ce citoyen actif,éclairé,
indépendant, qui l'habitude des affaires
publiques a fait acquérir une expérience
toujours précieuse dans la formation des
lois. Successivement échevin de la ville
d'Ypres, conseiller provincial pour le can
ton de Messines, membre de la députalion
permanente Bruges, et enfin commissaire
du district d'Ypres,Mr DENECKEREa montré
dans toutes ces fonctions le même dévoue
ment aux idées patriotiques et gouverne
mentales, que ne désavouera point la ville
des Rodenbaeh.
On démolit en ce moment la sacristie
qui était adossée l'église de S'-Martiu du
coté méridional, et qui nuisait l'ensemble
de ce magnifique édifice.
On lit dans les Petits Affiche de Courtrai:
Samedi dernier, les fabricants de Rou-
baix ont congédié un grand nombre d'ou
vriers tisserands belges; d'après les ren
seignements qui nous arrivent le nombre
monte douze cents. Les maîtres char
pentiers menuisiers et maçons ont pris
également une résolution qui tendrait
donner de préférence de l'ouvrage aux ou
vriers français. 11 paraît que cette résolu
tion a occasionné une émeute et que l'au
torité locale a été forcée de faire venir en
toute hâte la force année de Lille.
On lit dans la Gazette de Liège Une
cérémonie intéressante et bien touchante
a eu lieu hier 23 dans la chapelle des filles
de la Croix. MUe Caroline Frésard, fille du
banquier de ce nom, a reçu l'habit reli
gieux des mains de M. le vicaire-général
Jacquemolte. Le R. P. Dechamps a prêché
avec cette éloquence et celte onclion qu'on
lui connaît. Celte cérémonie avait attiré
beaucoup de monde.
Dimanche dernierdescendit Mous-
cron, venant de France, un homme d'une
belle taille, d'une démarché fière et déga
gée, le regard plein de feh, le tint bruni
par l'ardeur du soleil, et porteur de la
plus belle crinière noire qu'il soit possible
de trouver en Afrique, où les crinières
noires sont la mode. Son costume n'ex
citait pas moins l'admiration que l'étonné-
ment: il portait le turban musulman un
manteau rouge écarlate sur lequel pendait
un second manteau d'un beau blanc, tom
bait élégamment de ses larges épaules. 11
portait la veste brodée turque et le panta
lon aux plis larges et abondants. Ce per
sonnage arrivait de Lille par le convoi du
chemin de fer, et prit au bureau belge une
place de waggon pour Bruxelles. Un des
gendarmes, stationnés Mouscron, s'ap
procha de l'Arabe et demanda ses noms,
prénoms et qualités. Boûn-Men-Alep
Devos, natif de Thielt en Algérie, ex-lrom-
pettedu régimentdes spahisffut la réponse
de l'Arabe. Thielt en Algérie? fit le
gendarme étonné; vous voulez dire: Thielt
en Flandre? Est-ce que je connais la
Flandrerépliqua-t-ilje suis né près
d'Alger, je vais en congé Bruxelles. Le
gendarme tint bon pour Thielt en Flandre,
et consultant un calpin, il arrêta notre
Arabecorameétant Pierre Devos de Thielt,
déserté il y a huit ans. Le spahis traita le
gendarme d'imposteur,et tenta vainement
de lui prouver en langue arabe, espagnole,
italienne, allemande, française, anglaise
et flamande qu'il parla tour tour, qu'il
était un véritable Algérien. Mais en roule
pour Courtrai, voilà que le conscrit passe
près de Lauwe devant un Christ en croix,
et machinalement l'Arabe porta respecti
vement la main son turban, en guise de
salut. Je vous croyais turc, dit le gen
darme qui avait vu le geste, et voilà que
vous faites le signe du chrétien. C'est
que le prophète, le grand Mahomet, m'a
fait la grâce de me convertir au culte
romain, répondit flexmatiquement le pri
sonnier. Arrivé Courtrai, il fui écroué
la prison de cette ville et subit le lende
main un interrogatoire devant M. le pro
cureur du roi.
D'après des renseignements dignes de
foi, cet Arabe n'est pas plus Algérien que
Thieltois. S'il eut tenu bon, la gendarmerie
aurait eu toutes les peines du monde
prouver qu'il était Pierre Devos ex-grena
dier du 6"" de ligne, car quoique son pas
seport parlât bien ce nom, personne de
Thielt n'eut pu le reconnaître. Un déser
teur belge de ce nom lui avait donné, il y
a 8 ans, ses papiers pour qu'il pût s'enga
ger en Algérie, il s'en était servi. Il arri
vait donc avec un congé en règle sous le
nom de Devos de Thielt, près d'Alger;
mais la gendarmerie comme on voit sait
sa géographie.
Appelé devant M. le procureur du roi,
il rencontra dans le cabinet de ce magis
trat, M. H. Gillon, dernièrement revenu
d'Afrique, où il a servi avec distinction
pendant plusieurs années. Dès que Boûn-
Men-Alep Devos vit M. H. Gillon Quoi
vous êtes ici, Ben-Mouza Djebel s'ëcria-t-il
Comme vous le voyez,mon brave, répondit
M. Gillon. Oh! alors, dit-il, s'adressant
M. le procureur du roi, ce n'est plus la
peine de vous cacher qui je suis et je vais
vous dire la vérité. Il déclara alors qu'il
n'était pas plus Devos qu'Arabe, mais du
Hainaul; qu'il avait déserté il y a huit ans
du régiment d'artillerie cheval, en gar
nison Tournai, dans lequel il était trom
pette, et s'était engagé en Afrique avec les
papiers Devos qu'il ne croyait pas être un
déserteur. Le spahis parla alors avec M.
Gillon de leurs campagnes en Afrique, car
il avait servi dans le même régiment, et
M. Gillon avait été son sergent-major. Il
passa ensuite dans la cavalerie indigène
française des spahis comme trompette, et
assista la bataille d'Isly contre les Maro
cains. Notre compatriote fut un des quatre
braves qui s'emparèrent du fameux para
sol dû fils de l'empereur de Maroc, au
jourd'hui un des trophées de la gloire
française,déposé au château des Tuileries.
Mais ne vous a-t-on pas récompensé pour
ce fait d'armes? lui demanda M. le pro
cureur du roi. Récompensé? fit le spa
his,bah,oui,en Algérie,ou ne récompense
pas les soldats étrangers, demandez plutôt
Ben-Mouza-Djebel, il devrait avoir la
croix, lui. Mais quand un soldat belge
ferait même Abd-el-Kader prisonnier, on
ne le citerait seulement pas l'ordre du
jour. M. H. Gillon confirma tout ce que
dit le spahis, et assura qu'il était de sa
connaissance que le trompette avait été
un des premiers la bataille d'Isly s'em
parer du parasol de l'empereur.
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VÉRITÉ ET JUSTICE.
7P3.3S, 28 Février.
Mr Ch. De Patin, procureur du roi est
nommé président des Hospices. Cette
nomination sera généralement approuvée.