JOURNAL D'ÏPRES IT DI L'ARRONDISSEMENT.
No 3039.
3Qme année.
Dans notre nume'ro da 19 septembre
dernier nous invitâmes le Progrès de dé
clarer avec toute la franchise et sincérité
dont il est capable, s'il appartenait au libé
ralisme écervelé, ou bien au libéralisme perru
que. Tout hébété par la cruelle catastrophe
que la malheureuse scission avait fatale
ment amenée dans le congrès libéral, lequel
pourtant avait promis l'apparition de l'âge
d'or, notre confrère tomba dans un assou
pissement profond entre les deux fameuses
fractions libérales, comme l'âne de Buridan
qui se laissa mourir d'inanition entre deux
picotins d'avoine.
Aujourd'hui le mouvement semble lui
être revenu; il a même fait un pas pour se
rapprocher de l'un des deux partis. Yu son
extrême jeunesse et sa vigueur adolescente,
on aurait crû qu'il se serait tourné vers le
libéralisme jeune, vigoureux, sincère, démo
crate. Mais non; l'organe de M. Verhaegen,
qui, habituellement avait été son guide,
l'aura encore gagné par la peur celte fois-ci.
Le voilà donc qu'il se laisse traîner dans
l'ornière d'un libéralisme arriéré, lui qui
se nomme Progrès; d'un libéralisme rétro
grade, lui dont la dévise porte vires acqui-
rit eundo; d'un libéralisme hypocrite, lui
qui, avec M. Rogier, proclame la sincérité
UN DIVORCE EN 1846.
trois fois nécessaire; enfin d'un libéralisme
perruque, lui dont les idées, comme la mise,
furent toujours si jeunes. Quelle métamor
phose s'est-il donc opérée dans les bureaux
du Progrès! N'est-ce pas le moment de s'é
crier
Omniajam fiunt, fieri quœ posse nagabam.
Mais le coté le plus plaisant de tout son
article c'est d'avancer gravement que le
parti clérical donne la main ceux, que lui,
Progrès,articule aujourd'hui les artisans de
désordre, et qui cependant, malgré leur art
de faire des désordres, comme Verviers,
Ath, Tournai, Namur etc., sont constam
ment demeurés ses meilleursamis jusqu'au
moment de la malheureuse scission dans
le camp libéral.
Or voici notre réponse l'accusation du
Progrès.
Les doctrinaires enregistreotchaque jour
Bruxelles, Liège, Anvers, Gheel, par
tout,les preuves d'amitié, les indices de
connivence de notre parti l'égard du ra
dicalisme; et ils nous disent n'êtes yous
pas honteux de vous unir aux radicaux
contre nous qui sommes si bons, si ver
tueux?
Les radicaux colligent soigneusement
toutes les apparences de sympathies, tou
tes les ombres d'intérêt que notre parti
donne la Doctrine; et il nous crie N'êtes-
vous pas honteux de vous unir aux doctri
naires, aux perruques, contre nous qui
sommes un parti si vertueux, les défenseurs
de la liberté en tous et pour tous?
Et puis le radicalisme et la doctrine se
disent de l'un l'autre Vous voyez bien
que ce sont les radicaux qui fraient avec
les catholiques. Non, ce n'est pas moi,
c'est vous. Non, ce n'est pas nous, c'est
vous. Si! c'est vous et pas moi. Si!
c'est vous et pas nous.
Quant au rôle qu'on nous fait jouer,
nous conservateurs, il y a du vrai et il y a
du faux.
Tendons-nous la main aux radicaux?
Nous nous en gardons bien. Embrassons-
nous la doctrine ultrà-libérale et exclusive?
Pas davantage. Nous tendons la main,
nous nous unissons tous ceux qui veulent
la constitution, toute la constitution, rien
que la constitution, en un mot, aux vrais
libéraux qui sont aussi étrangers au radi
calisme qu'à la doctrine.
Le discours du trône, que nous donnons
ci-après, a obtenu l'approbation presque
unanime de la presse libérale. La Consti
tution ne craint pas de dire que le discours
prononcé cette année-ci par le Roi devant
les chambres réunies n'a pas le caractère
d'insignifiance qui se remarque ordinaire-
On s'abonne Yprea, rue de
I.ille, n" 10, près la Grand'place, et
chez les Percepteurs des Postes du
lloyaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT,
par trimestre,
Pour Ypres fr. 4
Pour les autres localités 4S©
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Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
Apres. Le Propagateur parait
le SAMEDI et le MERCREDI
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clames, S5 centimes la ligne.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
YPR.3S, 14 Novembre.
(Suite.)
PLAIDOYER DE M" TARTUFFE.
Vous avez devant vous, messieurs les juges, une
femme vénérable par son âge, vénérable par ses
malheurs. Vous voyez vos pieds, suppliante et
éplorée, cette femme jadis puissante par sa beauté,
par ses grâces, aujourd'hui trahie, abandonnée
malgré son génie et ses vertus. Quelles vicissitudes
de fortune dans une vie destinée jeter un si grand
éclat dans l'histoire contemporaine, et qui va s'é
teindre sans gloire et sans bruit. O instabilité des
grandeurs humaines! inconstance des aflections
populaires! Comment est-elle tombée celle qui était
la force et l'honneur d'un grand parti, l'amour et
l'orgueil du Trou, le vainqueur et l'effroi du clé
rical Comment? Hélas! son bon cœur l'a perdue!
Rappellerai je ici, messieurs, tout ce qu'elle a
fait pour gagner et pour conserver l'affection de
son indigne conjoint qui la renie et l'outrage? Vous
ne l'ignorez pas. Oui, vous savez ce qu'était le Trou
lorsqu'elle lui donna sa main et son cœur. 11 sortait
peine de l'adolescence, inconnu, sans expérience,
sans considération, sans fortune et même sans espé
rance, il eût végété longtemps, toujours peut-être,
dans un oubli profond; avec la conscience de sa
faiblesse, et il n'eut jamais osé se montrer; et s'il
se fût élevé de lui-même, le dédain public l'eût
refoulé dans son obscurité, mais il ne l'aurait pas
tenté, même dans ses rêves de jeunesse.
Elle descendit jusqu'à lui pour l'élever jusqu'à
elle. Elle fit passer un souffle de sa vie dans ce corps
peine animé; d'un rayon de sa gloire elle dissipa
l'ombre qui le couvrait; elle l'éclaira d'nn reflet de
son génie, et de sa popularité.
En retour de cet insigne honneur qu'elle lui
procurait, en l'associant ses destinées, que lui
demandait-elle? Du dévouement. Elle n'exigeait
pas de lui qu'il se sacrifiât, qu'il compromit sa
santé, qu'il oubliât les joies et les plaisirs de son
âge, par la recherche des hauts emplois de la re
présentation et du ministère. Non, elle se réservait
ces pénibles fonctions du ministère, ces corvées du
parlement. Elle consentait se charger de tout le
fardeau des affaires, afin de lui rendre la vie douce,
de lui procurer d'éternels loisirs.
S'il résultait quelqu'avantage du rôle qu'elle
s'était adjugé; si quelque gloire était le fruit de
ses travaux, son conjoint n'y était-il pas associé, et
la gloire ne rejaillissait-elle pas sur son front?
Cependant égaré par de perfides conseils, séduit
par ses amis si pas par son orgueil, il commença
mépriser celle qui lui avait valu quelque considé
ration, rebuter celle dont l'amour faisait sa puis
sance.
11 voulut partager avec elle les emplois auxquels
elle aspirait seule. En vain elle lui représenta qu'il
devait prendre soin de sa santé, qu'à son âge on ne
devait avoir d'autre ambition que de s'amuser,
qu'il fallait encore au moins vingt ans avant qu'il
fût initié aux affaires: il ne voulut rien entendre.
Il se courrouça, il regimba contre toutes ces obser
vations si amicales et si sages il prétendit être
quelque chose. Prétentions imprudentes! rêve cou
pable
Affligée, effrayée de ce refroidissement immérité,
déraisonnable, elle voulut employ
nouveaux moyens, et remplace
persuasion par ceux de l'auty)
opioiâtre opposition qu'elle
briser cette résistance qu'elle i
Tout fut inutile, l'autorité
que la persuasion. Devait-elle i
subalterne, elle qui n'avait jamais
même quand elle la prêchait; devait-elle admettre
un égal, elle qui avait tout ravalé, tout abaissé au
tour d'elle quand le pouvoir s'exefcSUSnar ses