JOURNAL D APRES ET DE L ARRONDISSEMENT.
!\o 3088.
Mercredi, 5 Mai 1847.
30me année.
7ÎP.SS, 5 MAI.
Deux ambitieux surtout peuvent servir
d'exemple.
MM. Lebeau et Rogier, après être tombe's
par leur faute, voulurent ressaisir le pou
voir, n'importe quel prix et par quel
moyen. Ils ont recruté pour cette croisade
des auxiliaires parmi les opinions les plus
extravagantes et les plus contradictoires;
ils ont mendié le service de toutes les pas
sions depuis les plus folles jusqu'aux plus
violentes. Environnés de cette force cen
trifuge, ingouvernable; entraînés par ces
mille Protées aux formes bizarres et in
constantes, ils se sont posés en face du
pays tantôt comme des victimes, tantôt
comme des vainqueurs. Humbles aussi
longtemps qu'ils ont eu foi au prestige de
leur nom, l'estime de leurs principes,
ils s'étaient contentés de se plaindre de
l'injustice des conservateurs, de s'offenser
des soupçons dont ils étaient l'objet. Puis,
lassés de ce rôle, ils se sont redressés liè-
rement, ilsont tenu un langage plus hostile,
une allure plus audacieuse, une conduite
plus arrogante l'égard de l'opinion con
servatrice, mesure qu'ils devenaient
plus faibles, plus compromis aux yeux des
gens modérés, mesure qu'ilsse mon traient
moins osés, moins estimables auprès de
leurs auxiliaires. Le pays hésitait encore
nous croire, nous qui lui découvrions
sous leurs masques des visages blêmes
d'effroi, des fronts ridés d'inquiétudes,
sous cette apparence de vie, d'impuissants
cadavres agités par le galvanisme du déses
poir. Le pays inclinait encore se laisser
persuader par ces prétendus grands hom-
mesqui vantaient leurs forceschimériques,
annonçaient l'approche de leurs succès im
possibles, menaçaient de leur victoire et
de leur ressentiment. Aujourd'hui le char
me est rompu, la vérité paraît, et chacun
répète ils ont peur, les vieux! oh! oui, les
vieux ont bien peur.
Lorsque les vieux, il y a tantôt six mois, -
par un coup de tète éclatant, brisaient avec^t
le Trou, rompaient avec la Queue de RobesjJ
■pierre, les niais s'imaginèrent que cettq^ G'i
H
On s'abonne Yprès 9 rue de
Lille, n° 10, près la Grand'place, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume
PBIX DE 1/ABOYYEJIEYT,
par trlmeslre,
Pour Ypresfr. 4 O®
Pour les autres localités 4 5®
Prix d'un numéro. O t®
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
Ypres. Le Propagateur parait
le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine.
PKI Y DES IXSERTIOYS.
11 centimes par ligne. Les ré
clames, S S centimes la ligne.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
Le vénérable vieillard qui préside aux intérêts
religieux de la Flandre occidentale, vient de pu
blier un mandement, ordonnant les prières d'usage
en temps de famine, dans toutes les églises pa
roissiales et succursales de son diocèse. Elles sont
destinées alléger les maux actuels du peuple, et
a appeler surtout les bénédictions divines sur la
récolte prochaine. Vers cet espoir se dirigent en
ce moment tons les regards, bien qu'il soit éloigné,
et qu'il puisse encorece qu'à Dieu ne plaiseêtre
déçu. Même dans cet extrême malheur, une rési
gnation reconnaissante et soumise devrait nous
guider reconnaissanteparce que ce ne sont pas
les bienfaits qui nous ont manqué, mais la foi en
celui qui les prodiguait; soumise, parce que la
révolte et le murmure irritent, tandis que les re
grets et les supplications peuvent seuls désarmer
un bras tout-puissant.
L'an dernier, quand l'évêque recommandait la
prière pour obtenir du beautemps, l'Impartial de
Bruges crut faire preuve d'esprit en insinuant
qu'après le mauvais temps venait naturellement le
beau. Le Progrèsque M. Malou-Vergauwen
adopte pour son champion, s'empressa d'emprunter
l'ingénieuse trouvaille. Elle était effectivement du
goût du libéralisme impie et railleur. Aujourd'hui
que les populations souffrent davantage, que les
jours de marché sont attendus avec anxiété, et que
le bulletin des mercuriales sonne comme une clo
che d'alarme chaque fois plus forte, la monnaie,
d'irréligion a perdu de son cours. Le feuilleton
impudique est moins gonté, depuis que la polka
et l'ivrognerie se sont retirées devant les baillons de
nos mendiants campagnards.
On commence a reconnaître plus volontiers que
lorsque le Créateur promet le pain quotidien, tout
en prescrivant de le demander en la forme qu'il
dicte son Église, il n'est pas au-dessous du ma
gistratde l'officier, du rentier, du soldat, du
négociant, de l'écrivain, du savant, du philosophe,
de se courber devant lui dans son temple, et d'at
tendre qu'il lui plaise d'accorder.
Nous supportons après tout la juste peine des
iniquités, des faiblesses, des résistances, de l'in
différence, des négligences de nos pères et de nous.
Les cinquante dernières années en ont été une
chaîne continuelle. Quand l'invasion française vint
renverser nos temples, briser nos autels, confisquer
les biens et les fondations destinés soutenir et
propager le culte et la piété, des Belges com
plaisants et avides se rencontrèrent en masse pour
aider les tyrans dans leur tâche infernale et pour
pêcher leur part dans l'eau trouble des spoliations.
Il n'y eut pas jusqu'à l'infâme idolâtrie de la Rai
son qui ne rencontrât ses adeptes sur le sol des
Pays-Bas catholiques. Lors de la promulgation de
la Loi fondamentale, et de la difficulté qu'elle fit
momentanément naître sur le serment, tous les
fonctionnaires s'empressèrent de se ranger du côté
d'un gouvernement calviniste contre la cour ro
maine. Aucun emploi ne resta inoccupé, aucun
ou n'en fit pas une affaire de consciencemais
d'argent. La haine qui poursuivait un saint évê-
que, trouva des organes pour le flétrir, des jour
naux pour le calomnierune population inerte
pour assister l'exécution en effigie de l'ignomi
nieux arrêt. Avec la domination hollandaise, les
blasphèmes hollandais furent acclimatés dans l'ar
mée; il y a dixsept ans que nous avons eu assez
de force pour conquérir notre indépendance la
face de l'Europe armée, et le blasphème contre
Dieu, importé de Hollande, n'est pas encore ex
tirpé parmi nos troupes; les autorités ne s'en oc
cupent pas, les officiers n'y songeut guère; c'est
peu près le seul vestige de l'ancien régime qui
soit resté impunément debout. Dans les spectacles,
dans les livres dans les salonsdans les bals dans
les arts, dans les journaux, dans les conversations,
le mépris de la religion, des choses de religion,
des ministres de la religion, des préceptes de la
religion, des actes de religion, a constamment
exercé uo empire incontesté on craint encore de
paraître animé de sentiments catholiques, on s'en
excuse, on agit avec timidité; on sourit des pa
roles obscènes, on n'expulse pas de l'estaminet un
jureur, les bailleurs de maisons ne manquent pas
pour soutenir la prostitution; les chefs constitués
en dignité ne s'inquiètent nullement si les devoirs
les pius essentiels du culte sont remplis par leurs
subordonnés; l'Université de Bruxelles, qu'ont at
teinte jusqu'à trois censures ecclésiastiques, est
suivie sans gêne par la jeunesse, et choisie par
un grand nombre de parents. Toute observation
qui tendrait corriger un abus quelconque sur le
terrain religieux, est reçue par de gros éclats de
rires. C'est même le plus sûr moyen d'exciter une
hilarité laquelle on n'est pas très-disposé sous
d'autres points de vue. Il est temps de conjurer
l'orage par la cessation des causes qui le provoquent,
par une réforraation résolue des mœurset une
ardeur décidée de pratique.
Les solennités du mois de Marieont recommencé
avec la pompe accoutumée 'a l'église des Cannes.
Les mêmes honneurs sont journellement rendus
la mère de Dieu dans une des salles de la Congré
gation des jeunes gens.
Aujourd'hui 26""' anniversaire de la mort de
Napoléon les frères d'armes de l'empire, se sont
reridusœn corps, musique en tête 'a l'église S' Mar
tin où un service funèbre a été célébré, dix
heures du matin.
MM. les notaires de l'arrondissement se sont
réunis lundi dernier leur banquet auuuel la
Tèle d'Or.
Ce matin vers les dix heures, un enfant de i 2
i3 ans a volé une chemise dans une boutique,
dans l'intention de se faire incarcérer, pour avoir
la nourriture de prison.
Le boulanger Vandelanoittecondamné jeudi
dernier pour emploi de sulfate de cuivre dans le
pain, n'a pas encore interjeté appel. La condam
nation consiste en deux années d'emprisonnement,
retirement de la patente dans l'intervalle, 200 fl.
d'amende, cent affiches du jugement dans toutes
les communes de l'arrondissement, confiscation des
pains et matières saisies, et les dépens.
On nous informe que M. Messiaen juge d'in
struction Fumes, a fait procéder la saisie du
pain chez huit des neuf boulangers que compte
cette ville, afin de s'assurer de la réalité de l'em
ploi de sulfate de cuivre que leur impute la ru
meur publique.
ON EST TOUJOURS PUNI PAR OU ON A PÉCHÉ.